Droits voisins de la presse : Google écope d’une sanction de 500 millions d’euros

Droits voisins de la presse : Google écope d’une sanction de 500 millions d’euros

Un demi-milliard, émoi, émoi, émoi

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Marc Rees

Publié dans

Droit

13/07/2021 23 minutes
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Droits voisins de la presse : Google écope d’une sanction de 500 millions d’euros

L’Autorité de la concurrence a infligé ce jour une sanction de 500 millions d’euros au géant du Net. Elle reproche à Google de ne pas avoir respecté plusieurs injonctions sur le terrain des droits voisins. Next INpact revient sur les 132 pages de la décision.

Big bang dans le ciel des droits voisins. Google se voit infliger une sanction d’un demi-milliard d’euros, conclusion d’une longue décision rendue mardi matin par l’Autorité de la concurrence. Pour mieux comprendre la décision, petit retour en arrière. La France fut l’un des premiers pays à transposer le principe d’une rémunération des droits voisins des éditeurs et agences de presse prévue par l’article 15 de la directive sur le droit d’auteur de 2019.

Et pour cause, une proposition de loi fut amorcée au Sénat au fil des débats européens puis adaptée et publiée une fois la directive finalisée. L’idée de ce texte ? Prévoir une obligation de négociation entre les plateformes et les entreprises de presse pour la reprise d’extraits d’articles. Ces négociations peuvent ainsi avoir un versant financier afin de compenser les investissements industriels des éditeurs et agences qui viennent profiter aussi aux moteurs et autres services en ligne.

Trois exceptions ont été prévues : elles concernent les hyperliens, les mots isolés et les « très courts extraits ». Enfin, les journalistes sont censés percevoir une part « appropriée et équitable » des sommes éventuellement perçues par les éditeurs et agences.

Le bras de fer entre Google et la presse est né après la tentative menée par l’entreprise américaine de pousser ce régime dans ses derniers retranchements. À l’automne 2019, le moteur décidait en effet de supprimer de sa page Actualité les courts extraits associés aux titres des articles. À charge pour les éditeurs et agences de réactiver cet affichage, via une option dans le code HTML de leur service. En activant cette option, toutefois ils ne pouvaient alors prétendre au moindre paiement.

Google avait en effet déniché une martingale dans les méandres de la directive qui n’oblige pas nécessairement au paiement, mais avant tout à la négociation des droits voisins. Le géant contraignait ainsi les professionnels du secteur à choisir entre une présence de leurs titres rabotée et une indemnisation impossible. 

Voilà pourquoi, sur l’échiquier, les éditeurs et agences ont rebondi en jouant avec la pièce « droit de la concurrence », flairant l’abus de sa position dominante et autres effets anticoncurrentiels.

En avril 2020, l’Autorité de la concurrence rendait une première décision gorgée d’injonctions :

  1. Obligation de négocier de bonne foi
  2. Obligation de communiquer aux éditeurs et agences de presse les informations nécessaires à une évaluation transparente de la rémunération due
  3. Obligation de maintenir les extraits textuels et les extraits enrichis des éditeurs et agences de presse pendant la période de négociation.
  4. Obligation de négocier pendant trois mois à partir des demandes émises par les éditeurs
  5. Obligation de neutralité dans les modalités d’indexation, de classement et de présentation des contenus protégés des éditeurs et agences de presse sur les services de Google au cours des négociations relatives aux droits voisins
  6. Obligation de neutralité des négociations relatives aux droits voisins sur toute autre relation économique qu’entretiendrait Google avec des éditeurs et agences de presse
  7. Obligation pour Google d’adresser des rapports à l’Autorité pour lui expliquer la manière dont elle se conforme à ces obligations.

Google bénéficiait de plusieurs mois pour mettre en œuvre ces mesures, délais repoussés dans le contexte de crise sanitaire. Le moteur a profité de ce laps de temps pour également attaquer la première décision de l'Autorité devant la cour d’appel de Paris qui, le 8 octobre 2020, a finalement rejeté l’intégralité de ses moyens. 

Cette procédure était doublée au fond par la poursuite de l’instruction auprès de l’Autorité de la concurrence. Dès la fin de l’été 2020, plusieurs représentants des éditeurs la saisissait, non sans reprocher à Google l’inexécution de plusieurs des injonctions imposées en avril.

L’Alliance de la Presse d'Information Générale (APIG, 289 titres adhérents) a dénoncé notamment l’absence de bonne foi, qui serait « matérialisée, (…) par le refus de Google de discuter de la rémunération des droits voisins, au motif que le trafic redirigé par Google vers les sites des éditeurs de presse générerait pour ces derniers une valeur supérieure à celle que perçoit Google de l’affichage des contenus protégés sur ces services ». Le Syndicat des Éditeurs de la Presse Magazine (SEPM) et l’AFP ont émis des critiques similaires.

Le rapport rédigé par les services d’instruction de l’Autorité a lui aussi conclu que Google n’avait pas respecté quatre des injonctions prononcées en avril 2020. Les échanges avec les parties ont perduré jusqu’en avril

C’est en point d’orgue qu’intervient la décision rendue mardi 13 juillet, décision qui débute par un état des lieux de la presse qui serait pour le moins morose : des ventes physiques qui se ratatinent, des recettes publicitaires captées par les services du numérique, des réorganisations d’entreprises et autres plans de soutien lancés par le ministère de la Culture…

Elle relève aussi que Google a reçu, au 19 mars 2021, 12 demandes d’entrée en négociation formelle provenant notamment de l’AFP, l’APIG, SEPM. En sus, Google a conclu des accords bilatéraux avec Libération, L’Express, Le Monde, Le Figaro, l’Obs et d’autres acteurs dont le nom est « confidentiel ». Mais ces accords ont été signés tardivement, comme on le découvre avec luxe de détails dans la chronologie des faits, et particulièrement les difficultés rencontrées par les éditeurs et déjà l’AFP. Un vrai sac d'embrouilles. 

Les droits voisins, l'AFP et Google

S’agissant des agences, Google a d'abord fait état de difficultés dans l’identification des contenus qui seraient plus importantes que pour les « contenus des éditeurs qui peut être réalisée à travers les noms de domaine ». Et pour cause : ses dépêches sont reprises par la plupart des mastodontes de la presse.

Le géant a ainsi été lourdement en désaccord avec les demandes de l’AFP visant à « recevoir une rémunération additionnelle de la part de Google au titre des affichages de contenus AFP pour lesquels les éditeurs de presse ont eux-mêmes déjà rémunéré l’AFP ». Et le «» de GAFA de refuser de payer deux fois les mêmes titres.

En face, l’agence a estimé que Google disposait au contraire de « tous les moyens pour identifier l’origine des contenus protégés qu’elle reprend et diffuse », notamment à l'aide des métadonnées.

Voilà pourquoi, à date d’échéance du calendrier imposé par l’Autorité, aucun accord n’était intervenu entre Google et l’AFP, celle-ci rejetant les propositions faites par la première aussi bien « sur la titularité des droits voisins », ou concernant « la volonté de Google de négocier un partenariat commercial portant sur des services additionnels sans lien avec les droits voisins », etc.

L'accord tardif avec l'APIG, l'absence d'accord avec le SEPM 

Après des mois de négociations similaires, le 21 janvier 2021, l’APIG et Google annonçaient avoir trouvé un accord fixant « les principes selon lesquels Google négociera des accords individuels de licence avec les membres de l’Alliance dont les publications sont reconnues d’Information Politique et Générale, tout en reflétant les principes fixés par la loi. Ces accords individuels de licence couvriront les droits voisins, et ouvriront l’accès à News Showcase, un nouveau programme de licence de publications de presse lancé récemment par Google, qui permettra aux lecteurs d’accéder à un contenu enrichi. ».

Aucun accord n’a par contre été trouvé avec le SEPM. Au contraire, ce dernier dénonce l’initiative ShowCase chère à Google qui opèrerait à ses yeux une discrimination entre les éditeurs heureux élus et les autres, alors que dans le même temps ce service se limiterait à une « enveloppe globale ». « Showcase serait elle-même conditionnée à la souscription du service Subscribe with Google (S’abonner avec Google), ce qui aboutirait à renforcer la dépendance des éditeurs à l’égard de Google ».

D’autres tentatives ont été répertoriées, mais aucun accord n’a été trouvé. Sont citées notamment celles esquissées par la Fédération Française des Agences de Presse, TF1 ou le Groupe Amaury/l’Equipe.

Pour être plus complets, relevons que des accords bilatéraux ont bien été noués, mais là encore postérieurement à la période de négociation imposée par l’Autorité de la concurrence. Libération, le Groupe Le Monde, L’Express, le Figaro, L’Obs... sont cités. Tous reposent sur l’offre Showcase de Google, avec un système de rémunération globale.

« Certains des éditeurs (Le Monde, Libération, L’Express et Le Figaro notamment) ont conclu, en plus du contrat Publisher Curated News, un ensemble de contrats portant sur le service Subscribe with Google (ci-après SwG), outil de souscription aux abonnements via Google »

Après avoir dressé un long panorama des négociations menées depuis des mois, l’Autorité conclut que Google a donc tenté de faire signer durant de longs mois aux éditeurs un partenariat global, où les droits voisins ne sont qu’un module, mais sans que sa valeur ne soit individualisée.

Ce n’est qu’en août 2020, quelques jours avant le terme, que l’entreprise a accepté d'évoluer, non sans préciser que le montant qui serait mis sur la table serait par définition inférieur à celui proposé dans le cadre de l’offre ShowCase.

Coup de rabot sur les titres non-IPG

Sur la même période, Google a tenté d’imposer sa grille de lecture sur le spectre des droits voisins par plusieurs leviers.

Elle estime par exemple que seuls les services de presse en ligne d'information politique et générale (dits IPG) sont éligibles, non les autres.

Le géant a voulu exploiter sa grille de lecture d'une disposition de la loi selon laquelle la fixation du montant de la rémunération doit prendre en compte plusieurs éléments « tels que les investissements humains, matériels et financiers réalisés par les éditeurs et les agences de presse, la contribution des publications de presse à l'information politique et générale et l'importance de l'utilisation des publications de presse par les services de communication au public en ligne ».

Dit autrement, dans son esprit, si le critère IPG pèse dans la balance, c’est que nécessairement seuls les titres ayant cette certification sont éligibles. « Il faut noter toutefois que la position de Google a légèrement évolué à la fin de la période de négociation, puisque dans un email du 14 août 2020, soit quelques jours avant la fin de la période de négociation, Google évoque pour la première fois la possibilité de discuter d’un partenariat couvrant les membres non certifiés IPG, mais dotés de "paywalls" », tempère la décision.

Coup de rabot sur les dépêches d'agence

Autre exemple, les agences de presse. Pour Google, les dépêches d’agence ne peuvent bénéficier des droits voisins que si elles sont intégrées dans une publication d’éditeurs de presse.

C’est en somme l’éditeur qui serait éligible à percevoir ces montants, non l’agence, sauf lorsque celle-ci porte une double casquette en éditant un site dédié.

Coup de rabot sur l'évaluation des droits voisins

Dernier cas, l'évaluation des droits voisins.

Si le Code de la propriété intellectuelle exige que la rémunération soit fondée sur les « recettes directes et indirectes », Google a répondu qu’il ne vend pas d’accès, le calcul ne pouvant donc être qu’indirect. Et, c'est peu de le dire, son estimation n’a pas été vraiment au goût des éditeurs qui ont eu une vision nettement plus extensive.

Google s’est en effet attaché essentiellement aux activités publicitaires de Search, mais non sur l'environnement de Google Actualités et Discover. Aucune prise en compte des revenus issus par exemple de l’exploitation de données d’utilisateurs ou encore de l’amélioration de l’ergonomie et de l’attractivité de ses services.

Par comparaison, l’AIPG plaidait pour la prise en compte de « tout type de revenus indirects tels que ceux liés à l’exploitation des données à des fins de ciblage publicitaire ou assimilé, mais aussi la valeur intrinsèque des publications de presse qui permettent à Google de disposer de contenus de qualité, variés sur une même thématique, frais (récents), pertinents au regard des centres d’intérêts immédiats des utilisateurs notamment sur des sujets d’expertise, et très fréquemment renouvelés ».

Google a là encore finalement bien voulu fournir d'autres données aux éditeurs et agences mais qu'à quelques jours du délai imparti par l'Autorité. « L’essentiel des données communiquées par Google à l’APIG l’ont été le 4 août 2020, soit plus de deux mois après le début des négociations, et quatorze jours seulement avant l’expiration de la période de 3 mois prévue par l’Injonction ».

Google a également attendu le bout de cette période pour communiquer celles réclamées par le SEPM. Même chose pour l’AFP.

Les efforts de Google à l'épreuve des injonctions de l'AdlC

L'ensemble de ces éléments objectifs a été confronté à chacune des injonctions émises en avril 2020, en particulier les injonctions 1, 2, 5 et 6. 

Une négociation de bonne foi ? Pas exactement, répond en substance l’Autorité, pour qui « Google n’a respecté ni la lettre, ni l’esprit de l’Injonction ».

Ainsi, « Google a imposé unilatéralement des discussions relatives à un partenariat global, dénommé Showcase et portant principalement sur l'offre de nouveaux services par les éditeurs », et « ce n’est que quelques jours avant la fin de la période de négociations avec les saisissantes que Google a accepté d’aborder la question de la rémunération des droits voisins au titre des utilisations actuelles des contenus protégés ».

L’Autorité rappelle les termes du contrat ShowCase, qui oblige les éditeurs à « quotidiennement créer, organiser et compléter un certain nombre de modules destinés à alimenter le service ("daily briefing", "story cluster" et autres sections) par des contenus de presse ayant vocation à être affichés en intégralité sur Google Actualités, Discover et Search ».

Un service qui demande au surplus à l’éditeur de permettre aux internautes d’accéder à des articles en principe payants. Ce qui n’est pas tout à fait identique à la loi taillée pour les extraits d’articles.

Comme déjà souligné, cette offre Showcase n’isole pas les revenus attribuables à la redevance sur les droits voisins. Mieux, des clauses créent une incertitude pour les rémunérations espérées par les éditeurs. « De fait, les éditeurs ont été placés dans une situation où aucune garantie véritable de rémunération, ni aucune information claire ne leur a été apportée par Google sur le niveau de rémunération consenti au titre des droits voisins pour l’utilisation actuelle par Google de leurs contenus protégés ».

Un périmètre trop restreint 

Google se voit aussi reprocher d’avoir réduit le périmètre des droits voisins qu’elle a réservés aux seuls titres IPG, « contrairement aux dispositions de la Loi, et ce alors même que, selon ses propres évaluations, les revenus que Google tire des contenus "non IPG" sont supérieurs à ceux qu'elle retire des contenus "IPG" ».

« Une discrimination injustifiée entre les éditeurs de presse non-IPG et les éditeurs de presse IPG » puisque « un même contenu (deux articles sur le même évènement sportif, par exemple), ne sera pas nécessairement rémunéré, selon qu’il est publié par un titre bénéficiant d’une certification IPG ou non ».

Pour l'Autorité, ce critère de l’IPG n’est pas une condition d’enclenchement des droits voisins, mais un poids dans la balance de leur évaluation, nuance. 

Même remarque s’agissant de l’exclusion des agences de presse s’agissant des titres repris par les éditeurs, quand l’AFP a indiqué « produire quotidiennement, à elle seule, environ 5 000 dépêches et 3 000 photographies, à destination des éditeurs de presse ». 

Pour l’Adlc, « la position de Google revient à dire que ces dernières sont titulaires d’un droit voisin uniquement lorsqu’elles ont la qualité d’éditeur de presse », ce qui est contraire aux travaux parlementaires et au texte, dixit là encore la décision.

Elle réfute de même l’existence d’un double paiement, dénoncé par Google. « L’existence de plusieurs ayants droit sur un contenu de presse n’implique pas que ces derniers soient rémunérés pour la même chose, mais qu’une rémunération propre leur soit accordée au titre de leur contribution respective, même si toutes ces contributions sont rassemblées au sein d’une même œuvre journalistique ».

De même, limiter la notion de revenus aux seuls « Ads » sur Google Search exclut tous les autres revenus indirects. Ces revenus manquent à l’appel, d’autant que le géant aiguise les effets de réseaux grâce aux articles de presse.

En clair, « plus le nombre d’utilisateurs fournissant des données augmente, plus la qualité des services publicitaires de Google s’améliore, et plus Google est en mesure d’augmenter ses revenus publicitaires ».

L’Autorité juge « incontestable que Google perçoit d’autres formes de revenus indirects tirés de l’affichage de contenus protégés sur ses services. L’affichage de contenus de presse diversifiés et attractifs sur ses différents services permet en effet à Google d’inciter l’utilisateur à les visiter régulièrement et à demeurer dans son environnement pour des durées plus longues que celles qui seraient constatées en l’absence de ces contenus ».

Ce n’est pas tout. « Si aux termes de l’accord-cadre conclu avec l’APIG le 12 février 2021, soit plus de 5 mois après la fin de la période prévue par les Injonctions, les éditeurs peuvent négocier une rémunération spécifique au titre de l’utilisation actuelle de leurs contenus protégés sur les services de Google, (…) ces derniers doivent, en contrepartie, renoncer à participer au programme Showcase, ce qui a pour conséquence de dégrader leur rémunération et leur exposition sur Google, par rapport aux concurrents y participant. Les éditeurs sont donc fortement incités à privilégier l’offre de rémunération globale émise par Google sur les utilisations actuelles et nouvelles par Google de l’affichage des contenus protégés ».

Manques de précision

En dernière ligne droite encore, Google a bien voulu « limiter les discussions aux utilisations actuelles des contenus protégés », mais sans « élément de calcul, ni d’estimation propre à la situation spécifique de l’AFP, de l’APIG ou du SPEM ».

Google a pris pour l'occasion quelques bases de comparaison pour aiguiser son offre, à savoir les montants de licences versées pour les contenus météo, les contenus sportifs, les dictionnaires anglais d’Oxford et français Le Robert, ou des informations météorologiques.

Des exemples qui « illustre[nt] le manque de crédibilité de Google dans la formulation d’une telle offre ».

« La valorisation d’une publication de presse ne peut donc pas être comparée à la valeur d’un contenu de dictionnaire », juge utile de rappeler l’Adlc : « la comparaison de la valeur d’une publication de presse écrite avec celle d’un service d’informations météorologiques ne paraît pas davantage pertinente ».

Une réaction tardive de Google, des comparaisons hasardeuses, un manque de précision… autant de signes qui montrent que le moteur a manqué à son obligation de bonne foi, alors que Sundar Pichai, numéro 1 de Google, n'a eu de cesse de saluer des résultats en forte augmentation durant la période de crise sanitaire où « les gens se sont tournés vers Google Search et de nombreux services en ligne pour rester informés, connectés et divertis ».

Manque d'informations

Même conclusion s’agissant de la deuxième injonction, celle relative à l’obligation de communiquer « tous les éléments d’information relatifs aux utilisations des publications de presse par leurs usagers ainsi que tous les autres éléments d’information nécessaires à une évaluation transparente de la rémunération ».

L’Autorité constate que les seules données communiquées par Google à l’AFP, à l’APIG et au SEPM, « pendant la plus grande partie de la période de négociations, se limitent au seul service Google Search, à l’exception des autres services de Google ».

Ce n’est que quelques jours avant le terme de l’injonction que Google a ouvert plus généreusement les vannes, alors que l’Autorité aurait préféré un comportement beaucoup plus collaboratif. « Cette communication tardive a donc maintenu l’AFP, l’APIG et le SEPM dans une situation d’asymétrie d’informations pendant l’essentiel de la période de négociation prévue par la Décision et a affecté par la suite le caractère équilibré de la négociation entre les parties ».

L’Autorité rappelle l’existence d’autres revenus, par exemple ceux tirés des activités publicitaires de Google sur les sites de presse, vers qui le moteur éponyme renvoie du trafic, outre l’effet d’attractivité, etc. « La circonstance que Google ne monétise pas les services Google Actualités ou Discover en France ne signifie pas que ces derniers ne génèrent pas de revenus indirects », insiste-t-elle.

google presse

Google n’a pas davantage respecté les injonctions 5 et 6 relatives au principe de neutralité. « En privant les éditeurs et agences de presse souhaitant accéder au programme Showcase de la possibilité de ne discuter que de la rémunération relative aux utilisations actuelles de contenus protégés, Google a privé ces derniers de la possibilité de s’assurer que l’utilisation actuelle de leurs contenus protégés était rémunérée conformément aux critères prévus par la Loi. Ce comportement a donc porté atteinte aux objectifs visés par la Loi ». S’ajoute là aussi l’exclusion de la presse non-IPG.

L’Autorité estime que Google n’a pas pris « les mesures nécessaires pour que les négociations [...] n’affectent pas les autres relations économiques qui existeraient entre Google et les éditeurs de presse », d’autant que les différentes clauses contractuelles portées par l’entreprise allaient lui permettre de renforcer « les relations économiques avec les éditeurs et s’assure[r] une rémunération de long terme assise sur les revenus des éditeurs ». Un comportement qui relève d’une « situation économique déviante ».

Par ailleurs, « Google ne peut dès lors soutenir avoir pris les mesures nécessaires pour éviter que les négociations n’affectent la présentation des contenus protégés dans ses services, alors qu’elle a systématiquement lié et assimilé les discussions portant sur la rémunération des droits voisins au titre des utilisations actuelles des contenus protégés avec la rémunération du service Showcase ».

Non-respect de quatre injonctions

Au final, l’Autorité a conclu à la violation des injonctions 1, 2, 5 et 6 par Google, balayant d’un revers de manche les négociations intervenues après la période définie par la décision d’avril.

Sachant que le plafond théorique des sanctions est de 16 milliards d’euros (10 % du chiffre d’affaires au 31 décembre 2020), et que « les manquements constatés constituent une pratique d’une exceptionnelle gravité », elle a fixé le montant de la sanction à 500 millions d’euros.

Ce n’est pas tout. Elle ajoute à sa décision une astreinte de 300 000 euros par jour de retard à l’expiration d’un délai de deux mois. Elle est accompagnée d’une série d’injonctions visant pour l’une à « proposer une offre de rémunération répondant aux prescriptions de la Loi et de la Décision » et pour l’autre, à fournir un flot d’informations aux éditeurs et agences :

  • « les revenus publicitaires que Google génère sur les pages de son moteur de recherche en ligne sur lesquels les contenus protégés apparaissent »
  • « les revenus que Google perçoit en tant qu’intermédiaire de publicité en ligne, au titre des annonces ciblées générées sur les sites des éditeurs vers lesquels l’utilisateur du moteur de recherche est redirigé et pour lesquelles Google perçoit une commission »
  • « les revenus indirects perçus par Google résultant de l’attractivité apportée à ses services par l’affichage de contenus protégés, attractivité qui peut jouer tant dans le déclenchement d’une recherche que dans le temps passé par l’utilisateur sur le moteur de recherche et l’ensemble des services de Google et les données personnelles qui en dérivent »

Si l'on ne sait si l'entreprise l'attaquera, Google s’est dit très déçue « par cette décision » assurant avoir « agi de bonne foi pendant toute la période des négociations ».

L’amende « ne reflète pas les efforts mis en place, ni la réalité de l’utilisation des contenus d'actualité sur notre plateforme. À date, Google est la seule entreprise à avoir annoncé des accords couvrant les droits voisins, et nous sommes sur le point de signer un accord avec l’AFP portant sur une licence globale, ainsi que la rémunération au titre du droit voisin pour leurs publications de presse. »

L’entreprise indique que son objectif est désormais de « tourner la page avec un accord définitif. Nous allons adapter nos offres en prenant en considération les retours de l’Autorité de la Concurrence. Par ailleurs, nous sommes d’ores et déjà en discussion avec des éditeurs et agences au-delà de la presse IPG, en prenant en considération les éditeurs inscrits sur les listes de la CPPAP [Commission paritaire des publications et des agences de presse, ndlr]. Nous réitérons notre proposition de faire intervenir une tierce partie indépendante afin de partager les données ayant trait à la valeur de l’actualité et nous permettre de baser nos discussions sur des éléments factuels. »

Ce même jour, l’AFP et Google ont annoncé être finalement proches d’un accord

Écrit par Marc Rees

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Sommaire de l'article

Introduction

Les droits voisins, l'AFP et Google

L'accord tardif avec l'APIG, l'absence d'accord avec le SEPM 

Coup de rabot sur les titres non-IPG

Coup de rabot sur les dépêches d'agence

Coup de rabot sur l'évaluation des droits voisins

Les efforts de Google à l'épreuve des injonctions de l'AdlC

Un périmètre trop restreint 

Manques de précision

Manque d'informations

Non-respect de quatre injonctions

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Commentaires (9)


Au vu des éléments, on voit que Google n’a pas été le plus volontaire sur le sujet mais (je peux me tromper) on ne pas retirer la mauvaise fois de l’autre parti qui nie la valeur que leur apporte Google.



C’est assez dingue comme résultat quand même. En tout cas ça prouve que quand il y a une volonté, il est possible d’appliquer des règles à des entreprises aussi puissantes.



Et je ne peux que m’étonner de la différence de traitement entre les acteurs de la presse et les citoyen.



Le RGPD qui est pourtant plus vieux ne mène à aucune véritable sanction pour des infractions avérées que l’on a pu constater depuis des années et qui continuent à perdurer.



L’exemple le plus flagrant étant la façon dont Google présente sa demande de consentement qui était dans le plus pure dark pattern.



Et même les dernières version ne respecte toujours pas le principe de l’égale facilité entre l’acceptation et le refus.



EtenN a dit:


Au vu des éléments, on voit que Google n’a pas été le plus volontaire sur le sujet mais (je peux me tromper) on ne pas retirer la mauvaise fois de l’autre parti qui nie la valeur que leur apporte Google.




S’ils ne le niaient pas, comment ils feraient pour prendre de l’argent indû à GG?




C’est assez dingue comme résultat quand même. En tout cas ça prouve que quand il y a une volonté, il est possible d’appliquer des règles à des entreprises aussi puissantes.




Ca montre surtout que quand les lobbies sont puissants, ils agissent plus facilement… :craint:



EtenN a dit:


Au vu des éléments, on voit que Google n’a pas été le plus volontaire sur le sujet mais (je peux me tromper) on ne pas retirer la mauvaise fois de l’autre parti qui nie la valeur que leur apporte Google.



C’est assez dingue comme résultat quand même. En tout cas ça prouve que quand il y a une volonté, il est possible d’appliquer des règles à des entreprises aussi puissantes.



Et je ne peux que m’étonner de la différence de traitement entre les acteurs de la presse et les citoyen.



Le RGPD qui est pourtant plus vieux ne mène à aucune véritable sanction pour des infractions avérées que l’on a pu constater depuis des années et qui continuent à perdurer.



L’exemple le plus flagrant étant la façon dont Google présente sa demande de consentement qui était dans le plus pure dark pattern.



Et même les dernières version ne respecte toujours pas le principe de l’égale facilité entre l’acceptation et le refus.




En effet, c’est regrettable, et pas seulement de la part de Google, tous les acteurs de la tech US sont concernés, il n’y a qu’à voir Micorosoft et leur fameux accord de confidentialité, surtout pour l’utilisation du Microsoft game dont la moitié des utilisateurs doivent être mineurs c’est juste ahurissants, personne n’accepterait ces accords si on avait ne serait-ce que le choix.


Merci pour l’article, on y voit presque plus clair, enfin c’est vite dit, disons qu’on s’aperçois vite du sac de nœuds !


Donc si j’ai bien compris, tous les journaux européistes, qui sont des usines à infox, qui reprennent tous les mêmes infos sans jamais les vérifier ni faire intervenir de détracteurs face à la doxa du régime, qui se prennent pour juges et parties avec des “fake” checkers qui ne suivent toujours que la ligne directrice du Ministère de la Vérité, et qui ne parlent d’Asselineau et de l’UPR que quand ils trouvent une boule puante fabriquée de toute pièce à coller au parti du Frexit, vont recevoir prochainement un paquet de pognon ?
En quoi financer les outils de propagande et les collabos de l’UE/traîtres à la Nation, est sensé nous rassurer ?



hansi a dit:


Donc si j’ai bien compris, tous les journaux européistes, qui sont des usines à infox,




Pour vous, des gens qui écrivent des choses qui ne vont pas dans votre sens sont des usines à Infox. Par contre, votre cher Asselineau qui fait de l’histoire approximative, de l’argument d’autorité est quelqu’un de crédible? Vous pouvez migrer tout de suite en Russie, ils seront heureux de votre arrivée.



Patch a dit:


S’ils ne le niaient pas, comment ils feraient pour prendre de l’argent indû à GG?




Pourquoi indu? Google de par son hégémonie est un concurrent déloyal sur la publicité. Il utilise l’attrait pour l’information pour être encore meilleur sur sa publicité et donc taper encore plus dans la poche des journaux dont la valeur publicitaire se dégrade avec la montée de Google.




Ca montre surtout que quand les lobbies sont puissants, ils agissent plus facilement… :craint:




Euh, pour l’instant les lobbies qui tiennent encore l’essentiel sont les Gafam, sinon ils seraient déjà tous en train de payer correctement leurs impôts.



(quote:1887461:Patrick_C.)
Pourquoi indu? Google de par son hégémonie est un concurrent déloyal sur la publicité.




Depuis quand la presse travaille dans la publicité, exactement?
Et tu vas nous expliquer que la presse ne gagne rien à être référencée par News? Donc pquoi ils le font, si ca ne sert à rien?




Euh, pour l’instant les lobbies qui tiennent encore l’essentiel sont les Gafam, sinon ils seraient déjà tous en train de payer correctement leurs impôts.




Je ne savais pas que c’étaient les GAFAM qui arnaquaient les autres sur les droits voisins indus, mais bon…



hansi a dit:


Donc si j’ai bien compris




On peut s’arrêter là, tu piges rien. Jamais.