Copie privée sur le reconditionné : le référé de l’UFC-Que Choisir rejeté au Conseil d’État

Prochaine saison, au fond
Droit 5 min
Copie privée sur le reconditionné : le référé de l’UFC-Que Choisir rejeté au Conseil d’État
Crédits : Xavier Berne

Le Conseil d’État a rejeté la requête de l’UFC-Que Choisir contre le barème de redevance pour copie privée frappant les smartphones et tablettes reconditionnés. Les conditions du référé n’ont pas été estimées remplies. La procédure se poursuit au fond. Next INpact diffuse la décision.

Le 1er juin dernier, la Commission copie privée adoptait deux barèmes de copie privée taillés pour les téléphones et tablettes reconditionnés. Même si les montants sont respectivement inférieurs de 40 et 35 % par rapport à ceux frappant les mêmes produits neufs (soit 8,40 euros et 9,10 euros, en crête), le barème tranchait avec la situation antérieure. Ces produits remis sur le marché étaient jusqu’à présent hors du champ de cette redevance culturelle, déterminée et perçue par les sociétés de gestion collective (SACEM, ADAMI, SPEDIDAM, SACD, SPPF, SCPP, etc.).

La décision administrative était donc publiée au Journal officiel le 6 juin. Elle a rapidement été attaquée par l’UFC Que Choisir, l’association « refusant ce coup de canif au développement de l’économie circulaire et au pouvoir d’achat des consommateurs les plus défavorisés ».

Son analyse menée sur plus de 3 000 smartphones reconditionnés a mis « en évidence que le prix médian de vente de ces terminaux est de l’ordre de 190 euros ». Elle dénonçait donc, via communiqué, un « effet inflationniste (…) d’autant plus violent pour les consommateurs modestes », non sans rappeler que les barèmes sur les modèles neufs vont déjà bien au-delà de ceux pratiqués dans d’autres États membres (10 euros pour 32 Go en France, « contre 6,25 euros en Allemagne, 5,20 euros en Italie ou encore 1,10 euro en Espagne ». 

La procédure au Conseil d’État a été plurielle. Un référé, où la juridiction est appelée à endosser la casquette du juge de l’urgence, doublée par une action au fond. La décision d’urgence vient de tomber : elle se solde par un rejet pur et simple.

Pas d’ « atteinte suffisamment grave et immédiate aux intérêts des consommateurs »

Cette procédure a été fondée sur l’article L 521-1 du Code de justice administrative au terme duquel, un requérant peut réclamer du juge des référés la suspension d’une décision administrative « lorsque l'urgence le justifie » et qu'il est fait état « d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ». 

Selon les règles en vigueur, le juge des référés peut rejeter cette requête sans instruction ni audience, « lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie », sachant qu’une urgence justifie la suspension de l’acte administratif (ici la décision de la commission) quand l’exécution de cet acte « porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre », rappelle le juge des référés au Conseil d’État dans son ordonnance.

Pour plaider l’atteinte « suffisamment grave et immédiate », l’UFC-Que Choisir a d’abord invoqué l’importance des sommes en jeu suite à l’entrée en application de la délibération outre l’impossibilité pour les débiteurs de cette redevance de récupérer les sommes en cas d’annulation au fond.

L’argument n’a pas pesé au Conseil d’État, dont la décision ne pourra que satisfaire les industries culturelles : « à supposer que le montant de la rémunération à verser soit immédiatement et intégralement répercuté sur le consommateur, le tarif applicable varierait, selon la capacité nominale d’enregistrement de l’appareil acheté, entre 0,30 et 8,40 euros pour l’achat d’un appareil mobile reconditionné et entre 5,20 euros et 9,10 euros pour rachat d'une tablette reconditionnée, soit un montant inférieur, respectivement, de 40 % et 35 % par rapport à l'achat d'appareils neufs ».

Toujours pour le juge des référés, « les tarifs contestés ne permettent pas de caractériser une atteinte suffisamment grave et immédiate aux intérêts des consommateurs que défend l'association requérante ». En clair, prises individuellement, les sommes en jeu ne seraient pas constitutives d’une atteinte suffisamment grave pour peser en faveur de l’UFC-Que Choisir…

Démonstration insuffisante sur l’impact écologique ou la fracture numérique

L’association avait également mis à l’index les « répercussions négatives sur le marché des appareils reconditionnés et les atteintes susceptibles d'en résulter pour l'intérêt public au regard de la place importante de ces objets dans la réduction de l'impact écologique de la filière numérique ainsi que de la fracture numérique », mais le juge de l’urgence lui a reproché cette fois ne pas avoir apporté « d'élément justifiant d'une atteinte suffisamment immédiate ».

« Enfin, l'invocation d'une méconnaissance du droit de l'Union européenne, à la supposer établie, n'est pas constitutive d'une situation d'urgence justifiant, par elle-même, la suspension de la décision contestée ». La requête de l’UFC-Que Choisir est donc rejetée, mais la procédure se poursuit au fond.

Des tarifs en vigueur depuis le 1er juillet, ESS compris

Depuis le 1er juillet , smartphones et tablettes restent donc soumis à la redevance pour copie privée.

Si le Sénat avait de son côté demandé à ce que ces biens soient hors du champ de la redevance, dans le cadre de la proposition de loi destinée à réduire l’empreinte environnementale du numérique, le gouvernement avait fait adopter son amendement à l’Assemblée nationale  pour sacraliser au contraire cette ponction

En séance, le député Christophe Castaner avait néanmoins déposé un sous-amendement à l’amendement de l’exécutif pour épargner malgré tout l’économie sociale et solidaire (l’ESS).

Comme cette loi n’a pas été finalisée, - elle est revenue depuis dans le camp sénatorial, l’exemption de l’ESS reste lettre morte. Et pour cause, la délibération de la Commission copie privée ne fait pas cas de ces acteurs, en particulier les activités reconditionnement d’Emmaüs.

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