Logiciel libres et Health Data Hub au menu du rapport sur la souveraineté du numérique

Avec fleurs et couronnes
Droit 5 min
Logiciel libres et Health Data Hub au menu du rapport sur la souveraineté du numérique

Le député Philippe Latombe publie son rapport d’information visant à « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne ». L’épais document – 198 pages – est le fruit notamment de 83 auditions menées par le député Modem.

« La souveraineté numérique constitue d’abord et avant tout une ambition politique forte, celle d’une autonomie à conquérir de la France et de l’Europe en matière d’équipements et de technologies numériques » avance l’élu qui constate sans mal, au fil de ses échanges, qu’il existe de nombreuses approches.

Quelques traits saillants : derrière l’expression se retrouverait « la liberté pour la puissance publique d’effectuer librement des choix stratégiques et technologiques », levier qui passe également par la liberté de choisir ses dépendances, la capacité à maitriser ses choix et la possibilité de revenir en arrière.

Pour le parlementaire, une politique de la souveraineté numérique comprendrait à la fois un volet offensif et défensif. Offensif, qui « implique (...) de développer un écosystème numérique, de manière à favoriser l’éclosion d’entreprises du numérique ayant vocation à devenir des champions mondiaux. ». Défensif, dès lors que « la puissance publique doit être en mesure de réguler les acteurs qui évoluent dans la sphère numérique, conformément aux valeurs qu’elle défend ».

Notre analyse du rapport Bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne :

Vers un recours effectif au logiciel libre ?

C’est dans ce contexte que le rapport marque un intérêt tout particulier pour le logiciel libre. Philippe Latombe plaide même pour faire du recours à cette licence « un principe effectif au sein des administrations publiques », hors quelques exceptions « dument justifiées ».

Pour s’en convaincre, l’auteur rappelle l'instruction du Premier ministre du 19 septembre 2012 où le choix du logiciel libre « est considéré comme un choix raisonné devant la contrainte budgétaire croissante et la valorisation des compétences et de l’expertise professionnelle des équipes informatiques ».

Il se souvient également de l’article 16 de la loi du 7 octobre 2016 pour la République numérique qui encourage les administrations à « l'utilisation des logiciels libres et des formats ouverts lors du développement, de l'achat ou de l'utilisation, de tout ou partie, de ces systèmes d'information ».

Quant à l’instruction du Premier ministre du 27 avril 2021 sur la politique de la donnée, elle « insiste à nouveau sur le fait que cette ambition, outre le renforcement de l’ouverture des codes sources et des algorithmes publics, passe par l’usage du logiciel libre et ouvert ».

Dans ce sillage, Philippe Latombe estime nécessaire d’aller désormais plus loin. Il propose d’ « imposer au sein de l’administration le recours systématique au logiciel libre, en faisant de l’utilisation de solutions propriétaires une exception ».

Il souhaite, dans la même veine, que le recours à des solutions numériques françaises et européennes au sein des administrations soit lui aussi imposé, du moins « lorsque leur niveau de performance est satisfaisant pour les usages concernés ».

Le mauvais bilan de santé du Health Data Hub 

Le rapport ne fait pas l’économie du cas Health Data Hub. Stéphanie Combes, directrice du groupement d’intérêt public éponyme, « a insisté sur le fait que, compte tenu des exigences de sécurité, de performance et de délai fixés par la commande politique, la solution du logiciel Azure de Microsoft était la seule à répondre à toutes ces exigences », résume le document.

« Les acteurs français ne proposaient pas les fonctionnalités dont nous avions besoin. Si nous avions publié un marché public, Microsoft y aurait répondu et Microsoft l’aurait remporté » a témoigné l’intéressée devant la mission.

De fait, Phillipe Latombe apporte un autre éclairage sur cette plateforme des données de santé : « la construction du HDH s’est objectivement opérée sans tenir compte des solutions existantes, qui auraient pu être des modèles, et contre l’avis des autres co-concepteurs du projet ».

Pire, selon lui, « la réversibilité du système n’a pas été prévue à l’origine et que s’est manifestée une volonté assumée de continuer avec Microsoft, même contre les engagements des ministres, ce qui pose un réel problème de gouvernance ».

Auditionné dans le cadre de cette mission, le professeur de droit Thibault Douville a estimé que même si Microsoft stocke des données en Europe, une non-conformité au droit de l’UE serait envisageable en raison de la réalisation d’opérations de traitement sur les données « pour partie, conduites grâce à un transfert temporaire via des serveurs américains »

« Lors de son audition, la directrice de cette structure, Mme Stéphanie Combes, a d’ailleurs indiqué qu’une étude sur les conséquences de la décision Schrems II avait été commandée par ses services à ce sujet » relate le rapport.

« En tout état de cause, cet élément de risque supplémentaire aurait pu être évité en recourant à des solutions françaises ou européennes, dont il n’apparaît pas, au regard des auditions menées, qu’elles auraient été trop peu performantes pour justifier pareil arbitrage. Les contraintes calendaires et politiques ne sauraient suffire en effet à justifier le recours à un prestataire américain quand il existe une offre française ou européenne suffisamment compétitive ».

Le parlementaire plaide en conséquence pour qu’« un état des lieux de l’arsenal juridique national permettant de s’opposer à la communication d’informations à une puissance étrangère et former les acteurs publics à ce type d’outils » soit réalisé. Il concède en l’état que les interprétations sur la territorialité du droit américain diffèrent.

Vous n'avez pas encore de notification

Page d'accueil
Options d'affichage
Abonné
Actualités
Abonné
Des thèmes sont disponibles :
Thème de baseThème de baseThème sombreThème sombreThème yinyang clairThème yinyang clairThème yinyang sombreThème yinyang sombreThème orange mécanique clairThème orange mécanique clairThème orange mécanique sombreThème orange mécanique sombreThème rose clairThème rose clairThème rose sombreThème rose sombre

Vous n'êtes pas encore INpactien ?

Inscrivez-vous !