Les pratiques de Google sur la publicité en ligne vont être examinées de près par la Commission européenne. L’institution va vérifier si la société n’a pas favorisé ses propres services « au détriment de prestataires de services de technologie publicitaire, d'annonceurs et d'éditeurs en ligne concurrents ».
Il y a quelques semaines, l’Autorité de la concurrence sanctionnait Google à hauteur de 220 millions pour abus de position dominante sur la publicité en ligne ; la société n’avait d’ailleurs « pas contesté les faits ». C’est désormais au tour de la Commission européenne d’entrer dans la danse et d’ouvrir officiellement une enquête sur un possible comportement anticoncurrentiel « dans le secteur des technologies de publicité en ligne ».
But de l’opération : déterminer si le géant du Net a favorisé « ses propres services de technologies d'affichage publicitaire en ligne au sein de la chaîne de fourniture "ad tech", au détriment de prestataires de services de technologie publicitaire, d'annonceurs et d'éditeurs en ligne concurrents ».
C’est un marché juteux, rappelle la Commission européenne : « En 2019, les dépenses consacrées à l'affichage publicitaire dans l'UE se sont élevées, selon les estimations, à 20 milliards d'euros environ ». Google y joue un rôle central d'intermédiation entre les annonceurs et les éditeurs concernant « l'affichage d'annonces publicitaires sur des sites web ou des applications mobiles ».
Une concurrence « plus difficile » à cause de Google ?
Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive chargée de la politique de concurrence, rappelle – à juste titre – que l’entreprise de Mountain View est présente « à presque tous les niveaux de la chaîne de fourniture » de la publicité en ligne. « Nous craignons que Google n'ait rendu l'exercice d'une concurrence sur l'"ad tech stack" plus difficile pour les services de publicité en ligne concurrents », ajoute-t-elle.
La vice-présidente en profite pour en rajouter une couche. Bien que l’enquête soit « axée sur l'affichage publicitaire », la Commission examinera « également les pratiques de Google en matière de suivi des utilisateurs afin de nous assurer qu'elles sont compatibles avec une concurrence équitable ».
L’enquête approfondie portera sur plusieurs éléments :
- « l'obligation de recourir aux services Display & Video 360 («DV360») et/ou Google Ads de Google pour acheter des affichages publicitaires en ligne sur YouTube […]
- l'obligation d'utiliser Google Ad Manager pour offrir des affichages publicitaires en ligne sur YouTube […]
- l'avantage apparent conféré à Ad Exchange (AdX) de Google par DV360 et/ou Google Ads, ainsi que l'avantage potentiel conféré à DV360 et/ou à Google Ads par AdX […]
- les restrictions imposées par Google en ce qui concerne la capacité de tiers […] d'accéder aux données relatives à l'identité ou au comportement des utilisateurs, données qui sont disponibles pour les propres services d'intermédiation publicitaire de Google, y compris Doubleclick ID […]
- le projet de Google d'interdire le placement de "cookies" tiers sur Chrome et de les remplacer par la panoplie d'outils "Privacy Sandbox" […]
- le projet de Google de ne plus mettre l'identifiant publicitaire à la disposition de tiers sur les appareils mobiles intelligents de type Android lorsqu'un utilisateur renonce à la publicité personnalisée ».
Google brosse dans le sens du poil
La réponse de Google ne s’est pas fait attendre : « Nous continuerons à nous engager de manière constructive avec la Commission européenne pour répondre à ses questions et démontrer les avantages de nos produits pour les entreprises et les consommateurs européens », affirme un porte-parole.
« Des milliers d’entreprises européennes utilisent chaque jour nos produits publicitaires pour atteindre de nouveaux clients et financer leurs sites web. Elles les choisissent parce qu’ils sont compétitifs et efficaces », ajoute-t-il à nos confrères.
La Commission rappelle que « l'ouverture d'une enquête formelle ne préjuge pas de son issue ». Elle ajoute qu’aucun délai légal n'est prévu pour la clôture d'une enquête sur de possibles pratiques anticoncurrentielles, et ne donne aucun calendrier concernant la fin de cette procédure.
Google et la Commission, une longue histoire « d’amour »
Depuis 2017, Google a été sanctionnée à plusieurs reprises par la Commission européenne, pour plus de 8 milliards d’euros au total.