Le chantier du rapprochement entre le CSA et l’ARCEP, lancé en août dernier par le Premier ministre, ne semble guère avancer depuis quelques semaines. Pourtant, un rapport censé rester entre les mains du gouvernement a fuité et nous apporte quelques précisions sur ce que les ministres concernés préconisent sur ce dossier.
Capture via BFMTV.
Nos confrères de BFMTV viennent de mettre la main sur le rapport élaboré par le ministère de la Culture, celui du Redressement productif, ainsi que par celui de l’Économie numérique, au sujet du rapprochement entre le CSA et l’ARCEP. Ce document de travail, commandé par le chef du gouvernement l’été dernier, était attendu par Jean-Marc Ayrault pour la fin novembre, même s’il n’avait pas vocation à être publié.
Comme le laissaient présager plusieurs sources proches du dossier depuis plusieurs mois, les ministres préconisent dans leur rapport d’écarter une fusion entre le régulateur des télécoms et celui de l’audiovisuel. À la place, ils en appellent à la mise en place d’une « instance commune » qui pourrait être dirigée par un collège « regroupant à parité des membres du CSA et de l’ARCEP ». Cette nouvelle instance n'aurait manifestement pas de services propres, car elle « s'appuiera » sur les services existants des deux régulateurs, écrivent les ministres.
En termes de champ de compétences, les locataires de Bercy et de la Rue de Valois recommandent de conférer à cette nouvelle instance « un pouvoir de décision sur des sujets communs précisément identifiés ». Celle-ci pourrait en outre « être en charge d'assurer la régulation de sujets communs, et trancher certains types de litiges », précise le rapport. Ce champ devrait néanmoins être relativement limité aux yeux des ministres, qui prônent un périmètre d'action de nature à ne pas « affecter fondamentalement les structures existantes, ni de bouleverser les modalités de la régulation actuelle ». Autrement dit, pas question de marcher sur certaines plates-bandes, à l’image de « la gestion des fréquences, et notamment des fréquences partagées entre audiovisuel et télécoms ».
L'hypothèse de la fusion clairement écartée
Arnaud Montebourg, Aurélie Filippetti et Fleur Pellerin terminent en affirmant que cette solution de rapprochement a minima « devrait être privilégiée » dans la mesure où celle-ci « présente de nombreux avantages » et « paraît la plus équilibrée ». Et pour écarter l’hypothèse d’une fusion entre les deux autorités, ils expliquent qu’une telle option « conférerait un poids politique considérable à l'autorité de régulation [unique], au détriment de l’État central ». Selon leur rapport, « aucune des modifications identifiées aujourd’hui comme souhaitables ne nécessite une réforme institutionnelle de cette envergure. Toutes peuvent être mises en oeuvre dans le cadre existant. Les questions soulevées par Internet et la connectivité de nouveaux équipements [télévision connectée...] ne supposent pas ipso facto une fusion ».
Et pour enfoncer un peu plus le clou, les ministres font valoir que la convergence entre audiovisuel et télécoms, qui était censée guider une éventuelle fusion, « n'est pas un phénomène nouveau », car celui-ci est évoqué depuis « les années 90 »... Ils poursuivent : « L'asymétrie de régulation entre les grands acteurs nationaux comme les chaînes de TV, et les nouveaux acteurs de l'Internet ne pose pas de difficultés insurmontables. La convergence ne remet pas en cause le fondement des deux régulations sectorielles ».
Ce rapport de travail devait permettre d’aiguiller les arbitrages du Premier ministre, qui étaient « toujours en cours » en janvier dernier selon Matignon, alors qu’une décision était initialement attendue pour fin 2012 (voir notre article : Nouveau report des arbitrages du gouvernement dans le dossier CSA/ARCEP). Explication de ce retard selon BFMTV : « Tout le monde n'est pas sur la même longueur d'onde. Le conseiller culturel de l'Elysée, David Kessler, qui avait voulu lancer la réflexion sur le sujet, resterait toujours favorable à un rapprochement des deux gendarmes. "Mais les parlementaires consultés n'en veulent pas", indique-t-on à Bercy ».