Le CNES, « opérateur unique du plan de relance spatial », vient de dévoiler sa feuille de route pour l’attribution des 500 millions d’euros annoncés par le président de la République. Elle comprend quatre volets survolant tous les domaines (lanceurs, applications, équipements…) et types de sociétés (des start-ups aux grands groupes).
En septembre dernier, le gouvernement annonçait son plan de relance de 100 milliards d‘euros pour « redresser durablement l’économie française et créer de nouveaux emplois », suite à la crise sanitaire. L’objectif est de « transformer l’économie en investissant prioritairement dans les domaines les plus porteurs et faire en sorte que la France puisse retrouver son niveau économique d’avant crise dans deux ans ».
Emmanuel Macron avait déjà expliqué que « 500 millions d'euros [sur les deux années qui viennent, ndlr] du plan France Relance seront consacrés à l'accélération du développement de propulsions à hydrogène et projets spatiaux ». Le Centre national des études spatiales (CNES) donne enfin des détails supplémentaires. Les premiers appels à projets sont déjà en ligne.
Sur les 500 millions, « 365 millions d'euros de nouveaux crédits »
Ce financement s’inscrit dans le volet compétitivité, un des trois principaux avec l’écologie et la cohésion : « un dispositif de plus de 500 millions d’euros, dont 365 millions d‘euros de nouveaux crédits, a été prévu par les pouvoirs publics pour venir en soutien au secteur spatial ». Il s’adresse « à toutes les entreprises du secteur ».
Le CNES en profite pour rappeler quelques chiffres : « le secteur spatial français totalise 4,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires consolidé, dont plus de la moitié sur le marché commercial, et représente 16 000 emplois directs de haut niveau sur l’ensemble de la chaîne manufacturière. Il réalise plus de 50 % des ventes de l’industrie spatiale européenne ».
Il précise ensuite être « l’opérateur unique du plan de relance spatial », mais ajoute que sa mise en œuvre est suivie par un comité de pilotage comprenant notamment des instances du ministère de l’Économie, de celui des Armées et de l’Enseignement supérieur.
Des projets collaboratifs, de 5 millions d’euros minimums
On trouve tout d’abord des appels à projets collaboratifs, qui se destinent donc principalement à des consortiums. « D’une assiette minimum de 5 millions d’euros avec cofinancement industriel », ils devront être « ambitieux et structurants pour la filière et irriguer l’ensemble de l’écosystème ».
Une première vague a d’ores et déjà été lancée sur les domaines suivants :
- Communications optiques : « fournir les futurs équipements et technologies destinés aux liens optiques bidirectionnels très haut débit pour les missions de télécommunications par satellite en orbite géostationnaire (GEO) […]
- Satellites de télécommunication flexibles : tirer profit des innovations technologiques dans le domaine de la microélectronique et de l’électronique de puissance pour proposer des charges utiles de télécommunications de nouvelle génération à la fois flexibles et très capacitives […]
- Virtualisation du segment sol : soutenir la R&D sur les produits et technologies permettant d’améliorer la compétitivité de l’industrie française dans le domaine des segments sols, élément clé dans l’exploitation des systèmes spatiaux […]. Il s’agit également de répondre à des enjeux de souveraineté et de confiance liés à la conception, à la qualification et à l’exploitation des systèmes spatiaux et des données issues de ces systèmes […]
- Terminaux pour les télécommunications par satellite : soutenir les meilleurs projets pour la conception et la production de terminaux grand public et professionnel pour satellites géostationnaires et constellations haut débit (HTS : High Throughput Satellite), très haut débit (VHTS : Very High Throughput Satellite) et Internet des Objets (IoT : Internet of Things) […].
- Économie de la donnée : développement de plateforme innovante et l’intégration d’un ou plusieurs cas d’usage représentatifs permettant de valider les fonctionnalités de plateforme et le rapprochement des utilisateurs et des fournisseurs en intégrant les spécificités des données spatiales. L’objectif est de garantir la création de valeur en France ».
Un plan dédié aux nanosatellites
Un autre volet veut « renforcer et structurer l’écosystème français des nanosatellites », c’est-à-dire ceux avec une taille pouvant atteindre 16U. Ils ont pour rappel le vent en poupe ces dernières années. Grâce à la miniaturisation, il est possible de faire beaucoup de choses avec de petites boites, qui coutent donc bien moins cher à envoyer en orbite. Les lanceurs s’adaptent d’ailleurs à ce nouveau marché en devenant plus flexibles sur l’agencement interne des charges utiles.
Ce plan dédié aux nanosatellites se divise en deux parties. La première baptisée « accélération» vise à accompagner la validation en vol d’équipements et de charges utiles. La seconde, « structuration de l’écosystème nanosatellites », comprend un appel à manifestation d’intérêt (AMI) afin de « mettre en place un Forum d’utilisateurs (opérateurs de services, utilisateurs potentiels commerciaux, institutionnels et scientifiques…) pouvant tirer parti de solutions de satellites nanosatellites ».
Ce « Forum Nanosatellites » est animé par le CNES et réunira donc « les opérateurs de services à valeur ajoutée et les utilisateurs potentiels commerciaux, institutionnels (DGA, CDE, …) et scientifiques (INSU, CNRS, CSU…) pouvant tirer parti de solutions de satellites nano ». Il est destiné à recueillir les besoins de l’ensemble des acteurs du marché, sur les « objectifs applicatifs, de contraintes marché, de capacité de démonstration en vol, d’enjeux de souveraineté et d’enjeux sociétaux ».
Appels d’offres sur des technologies « duales » et pitch days
Le CNES annonce aussi l’arrivée d’appels d’offres ou de contrats de gré à gré « thématisés », qui concernent « en priorité les PME et ETI du secteur spatial ». Le but est « d’acquérir des technologies d’avenir duales, c’est-à-dire avec des applications civiles et militaires, présentant des risques techniques importants ». Cette fois-ci le projet doit avoir un porteur unique et le financement peut atteindre 100 %.
Pour les PME et les start-ups, il y aura des « pitch days ». Cette action du plan de relance doit son nom à la manière dont elle est organisée : les lauréats seront sélectionnés lors d’auditions – ou « pitch days » – mises en place dans des régions partenaires du CNES. Les projets devront proposer « des services innovants valorisant des données, produits ou infrastructures spatiales existantes », et il devront « apporter des solutions concrètes à un défi sociétal ou une thématique ».