Télécoms : forte hausse des litiges, portée par « l'enrichissement des offres »

Quelle surprise…
Mobilité 11 min
Télécoms : forte hausse des litiges, portée par « l'enrichissement des offres »
Crédits : PeopleImages/iStock

En 2020, le nombre de dossiers envoyés à la médiatrice des télécoms a augmenté car des clients ont tendance à confondre vitesse et précipitation. Les soucis de facturation sont en tête des litiges, notamment sur le mobile. La médiatrice fait généralement consensus dans ses avis, même si Coriolis et Free se démarquent de la concurrence. 

Depuis mai 2019, Valérie Alvarez est la médiatrice des télécoms, et elle devrait rester en place jusqu’en 2022 car son mandat dure trois ans. Elle est « indépendante » et « compétente pour recevoir les réclamations et instruire les litiges des consommateurs, clients d’un professionnel du secteur des communications électroniques, signataire de la charte de la médiation ». On y retrouve des dizaines d’opérateurs, dont les quatre nationaux et les principaux MVNO.

Elle doit en théorie rendre son avis dans un délai de 90 jours maximum. En 2020, la médiatrice était dans les clous : « La durée de traitement de dossiers de 61 jours reste bien inférieure à la durée prévue par la loi (90 jours) et, ce dans le contexte de la pandémie ». Le délai moyen était pour rappel de 52 jours en 2019, 66 en 2018, 80 en 2017, mais dépassait largement le cadre légal en 2016 avec rien de moins que 135 jours.

La médiatrice doit publier chaque année un rapport d’activité complet détaillant ses actions et formulant des recommandations pour essayer de résoudre les problématiques rencontrées par les abonnés, libres ensuite aux opérateurs de les reprendre à leur compte, ou non.

Il en est de même pour les décisions rendues : les parties sont « libres d'accepter ou de refuser sa proposition de solution ». L’une et l’autre peuvent, si besoin, lancer un recours devant une juridiction. En 2020, comme les années précédentes, les décisions sont néanmoins largement acceptées par les clients et les opérateurs.

11 919 demandes reçues, mais seulement 4 427 recevables

« Après deux années de baisse du nombre de dossiers adressés à la Médiatrice (-12 % en 2018, -8 % en 2019), 2020 repart à la hausse (+13 %) » avec pas moins de 11 919 demandes envoyées à la Médiatrice des télécoms. Cette dernière à une explication : une forte augmentation de 24 % « du nombre de dossiers irrecevables ». 

La principale cause étant « le non-respect par les consommateurs de la procédure à suivre pour saisir la Médiatrice (étapes et délais) », en lien avec l’impatience des clients « à disposer de leurs moyens de communication devenus indispensables, voire vitaux, dans le cadre du confinement et du télétravail qui s’est généralisé en 2020 du fait de la Covid-19 ».

Médiatrice des télécoms

Pour rappel, avant de joindre la médiatrice, il faut d’abord contacter le service client. Si la réponse ne vous convient pas ou en l’absence de retour au bout de deux mois, vous pouvez alors saisir la médiatrice, pas avant. Dans le détail, 69 % des dossiers sont irrecevables, car les voies de recours n’ont pas été épuisées, 21 % car le traitement est en cours par le service client de l’opérateur.

4 289 avis, acceptés à 96 % par les opérateurs…

Sur les 11 919 demandes, 7 492 ne font ainsi pas l’objet d’un traitement (soit près de 63 %), car jugées irrecevables, ce qui n’en laisse donc que 4 427 à examiner. C’est quasiment autant qu’en 2019 où il y avait 4 447 dossiers recevables. En 2020, la Médiatrice a rendu 4 289 propositions de solution, un chiffre là encore quasiment stable par rapport à 2019 (4 259).

Dans l’ensemble, les avis sont très largement acceptés par la quasi-totalité des clients et opérateurs concernés, avec un taux de satisfaction encore meilleur que sur les trois années précédentes :

  • 97 % des avis sont acceptés par les consommateurs, contre 96 % en 2019, 95 % en 2017 et 2018.
  • 96 % des avis sont acceptés par les professionnels, contre 95 % en 2019, 93 % en 2017 et 2018.

Médiatrice des télécomsMédiatrice des télécoms

… Coriolis et Free se démarquent encore de la concurrence

Chez les professionnels, deux opérateurs sortent du lot : le taux d’acceptation de Coriolis n’est que de 85,71 %, tandis que celui de Free est à 89,60 %. Cela pourrait sembler élevé, mais c’est largement moins que le troisième du classement : Bouygues Telecom à 98,47 %. Les autres opérateurs sont à 99 % minimum, voire à 100 % pour bon nombre d’entre eux.

Cette situation ne devrait pas surprendre grand monde puisque Coriolis et Free étaient déjà deux opérateurs largement en dessous de leurs concurrents sur le bilan 2019, avec 74,1 et 84,5 % respectivement. Coriolis progresse donc de plus de 10 points en un an, tandis que Free gagne 5 points. À voir si la tendance sera la même en 2021.

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Le mobile et la facturation en tête des litiges

Dans le détail, le plus gros pôle des litiges concerne le mobile qui regroupe 41 % des avis rendus. La tendance est néanmoins à la baisse depuis plusieurs années puisqu’on était à 47 % en 2019 et même 52 % en 2018. Vient ensuite l’ADSL qui représente 31 % des avis, puis la fibre en forte hausse (+ 9 points) à 25 % notamment poussés par la progression du nombre de clients sautant le pas.

Toutes technologies confondues, le principal motif de litige est désormais la facturation avec 1 205 avis rendus par la médiatrice, soit 28 % (+10 points) du total. La seconde place revient aux problèmes techniques avec 24 % (-4 points) puis la troisième aux contrats avec 22 % (-12 points). La résiliation reste stable à 19 %.

Une nouvelle catégorie baptisée « services » a été créée cette année « pour tenir compte des litiges portant sur les services offerts par les professionnels : les garanties, les services de location et de livraison de matériel et le Service après-vente (SAV) ». Elle comprend 291 avis rendus, soit 7 % de l’ensemble.

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Hors forfait et « enrichissements des offres »

Si on se penche sur le cas du mobile, on remarque que 42 % des litiges (744, en hausse de 15 points) concernent la facturation. Là encore ce n’est pas une surprise avec les hausses plus ou moins imposées par l’ensemble des opérateurs : « Cette forte augmentation trouve son explication sur des facturations considérées comme indues par le consommateur, des hors forfaits sur des communications à partir de la France et enfin sur les enrichissements des offres opérateurs ayant pour incidence une augmentation tarifaire ».

Une situation emblématique est d’ailleurs expliquée dans les exemples de médiations (qui sont toujours intéressants à lire) : « Monsieur M. reproche à son opérateur d’avoir augmenté (de 4 €) le tarif de son abonnement mobile, sans l’en avoir informé au préalable. À la suite de sa contestation, son opérateur a proposé de lui allouer une remise de 4 € par mois pendant un an ». Il n’a pas jugé que cela était satisfaisant, il a donc contacté la médiatrice des télécoms pour qu’elle se penche sur ce dossier.

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Rappel : l'opérateur est libre de modifier ses offres commerciales

Cette dernière commence par rappeler à juste titre que « l'opérateur est libre de modifier ses offres commerciales » (ce que certains ont tendance à oublier un peu rapidement). Attention néanmoins, l’opérateur doit respecter certaines règles, que la médiatrice rappelle également :

« respecter les dispositions de l’article L.224-33 du Code de la Consommation qui lui impose de communiquer le projet de modification au consommateur "au moins un mois avant son entrée en vigueur, assortie de l'information selon laquelle ce dernier peut, tant qu'il n'a pas expressément accepté les nouvelles conditions, résilier le contrat sans pénalité de résiliation et sans droit à dédommagement, jusque dans un délai de quatre mois après l'entrée en vigueur de la modification" ».

Dans le cas présent, le problème pour l’opérateur c’est qu’il « ne justifie pas avoir envoyé à Monsieur M. un courriel l’informant de l'augmentation tarifaire de son abonnement et de la faculté de résilier sans frais ce dernier ». Forte de cette constatation, elle « invite l’opérateur à rembourser à Monsieur M. les sommes facturées au titre de l'augmentation tarifaire jusqu'à la date de l'avis et à rétablir l'offre qu’il détenait initialement ».

Prenant les devants, la médiatrice ajoute que, « dans l'hypothèse où il serait techniquement impossible de rétablir l’ancienne offre, la Médiatrice invite l’opérateur à accorder à Monsieur M. une remise de 4€ (correspondant à la différence tarifaire entre son offre actuelle et l'offre initiale) jusqu'à la modification ou la résiliation de son abonnement, ou en cas d’impossibilité, à lui allouer une indemnisation ».

Dix recommandations… seront-elles suivies ?

Comme toujours, le bilan de la médiatrice des télécoms se termine par une série de dix recommandations. Si certaines demandes concernent des points assez précis, d’autres sont plus généralistes et mériteraient effectivement d’être mises rapidement en place – éventuellement sous le contrôle de l’Arcep ? On pense notamment à la police d’écriture minimum dans les emails d’information et à la position du paragraphe stipulant la résiliation sans frais et à la procédure de souscription des bouquets TV. 

Nous les avons reproduites en intégralité ci-dessous, en version simplifiée pour certaines : 

  • s’engager dans une réflexion concernant les évolutions qui doivent être apportées aux dispositifs de « relais téléphoniques » actuellement en place, ceci afin de mieux tenir compte des besoins spécifiques des personnes souffrant d’aphasie (lire ce compte rendu de l’Arcep).
  • mettre en place un dispositif permettant aux personnes malvoyantes et malentendantes d'accéder au contenu (télévisé) de leurs offres (sous-titrage lisible avec code couleur).
  • en cas de souscription avec demande de conservation du numéro, et afin que le droit de rétractation puisse être pleinement exercé, de ne pas mettre en œuvre le portage avant l’expiration du délai de rétractation de 14 jours, sauf demande expresse de l’abonné. 
  • notifier au tuteur ou au curateur, si le conseil de famille ou le juge en a décidé ainsi, toutes les modifications effectuées par le majeur protégé sur son contrat, depuis son espace client.
  • revoir la procédure de souscription des bouquets TV et VOD depuis le décodeur TV en prévoyant diverses mesures d’information : un avertissement préalable obligatoire, une description précise de l’offre, un email de confirmation, un code obligatoire  en cas de souscription avec une période de gratuité…
  • revoir la procédure d'enregistrement des données bancaires en cas de règlement d'impayés depuis l'espace client afin de s'assurer du consentement express du client à l'utilisation de ses données bancaires pour des règlements ultérieurs.
  • mettre en place des outils ou, a minima, des indicateurs, permettant aux consommateurs qui souhaitent se rendre à l’étranger de mieux appréhender les réseaux mobiles partenaires utilisables depuis le pays concerné (dans le cas où seulement une petite partie du pays est couverte par exemple).
  • mentionner dans le SMS envoyé confirmant les informations fournies par le serveur vocal d'information lors de la communication du numéro RIO, la date de début de durée minimale de l'engagement ou du réengagement de sorte que le client soit informé de la durée de son engagement.
  • dans le cadre de la modification d’une offre, la police de caractères utilisée dans le courrier d'information adressé aux clients ne devrait pas être inférieure au corps 8. La Médiatrice recommande également que la possibilité offerte aux clients de résilier sans frais ne se situe plus en fin ou bas de courrier, mais dans le corps du texte.
  • mettre en place des procédures adaptées afin d’informer leurs clients de la date à laquelle leur domicile sera de nouveau éligible à la fibre optique à la suite d'une perte de connectivité, ou de la date à laquelle leur ligne sera rétablie.

Trois nouvelles fiches pratiques disponibles

La médiatrice des télécoms en profite enfin pour enrichir son service de « fiches pratiques » avec trois nouvelles : comprendre le Service universel des communications électroniques, comprendre les rôles de l’opérateur de réseau et l’opérateur commercial pour l’installation de la fibre, et raccorder la fibre en façade d’habitation en respectant la réglementation. Elles s’ajoutent aux 22 qui étaient déjà présentes, soit un total de 25.

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