À la découverte du nuage de Oort, aux confins du Système solaire

Plus loin, on arrive à Proxima
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À la découverte du nuage de Oort, aux confins du Système solaire
Crédits : Naeblys/iStock

Notre analyse du Système solaire nous conduit aujourd'hui au nuage de Oort, une méga structure qui s’étendrait sur plus d’une année-lumière et contiendrait des milliards de comètes. Nous nous attarderons également sur la zone intermédiaire qui le sépare de la ceinture de Kuiper.

La ceinture de Kuiper est assez proche de l’orbite de Neptune, dernière planète de notre Système solaire. Elle s’étend pour rappel sur plusieurs dizaines d’unités astronomiques (au). Vous trouvez que c’est beaucoup ? Ce n'est rien à côté du nuage de Oort, situé à 20 000 au et qui pourrait s’étendre jusqu’à plus de 100 000 au de notre étoile. Une région qui serait un « résidu » de la formation de notre Système solaire.

Son étude est donc très intéressante : « La compréhension de la dynamique des comètes du nuage de Oort est donc déterminante pour fixer des contraintes aux modèles de formation du système solaire », peut-on lire dans ce rapport d’activités du laboratoire d’Astronomie de Lille.

Ce nuage doit son nom à l'astronome néerlandais Jan Oort (décédé en 1992), qui a formulé son existence dans les années 1950. Il s’était basé sur les travaux de l’estonien Ernst Julius Öpik (décédé en 1985), dont le postulat d’un nuage cométaire très lointain avait déjà vingt ans. C’est pour cette raison qu’on parle parfois du nuage d'Öpik-Oort.

Il faut savoir qu’on n’a pour le moment jamais observé directement les éléments de ce nuage, seulement des émissaires envoyés suite à des perturbations dans « la force ».

Lire notre dossier sur le Système solaire :

Toi dans la ceinture, toi dans le nuage : Neptune s’est occupé du tri

Comme la ceinture de Kuiper, le nuage de Oort est un gigantesque réservoir de comètes. Il est composé de petits corps glacés de quelques mètres à plus de 2 000 kilomètres de diamètre. Si elles ont des populations assez proches, l’histoire de la création de ces deux gigantesques structures de notre Système solaire est différente.

Les comètes de la ceinture ont principalement été créées au-delà de Neptune, puis elles sont restées sur des orbites relativement stables. Au contraire, celles du nuage se sont formées plus proche de notre Soleil et leurs trajectoires n’étaient pas stables : « Perturbées par l'attraction gravitationnelle des planètes géantes, elles ont été soit éjectées à l'extérieur du Système solaire, dans l'espace interstellaire, soit rejetées sur des orbites plus éloignées. Elles ont alors formé le Nuage de Oort », explique l’observatoire de Paris.

Pour autant, rien n’est figé dans le marbre : « des perturbations occasionnelles (par des étoiles proches du Soleil) peuvent à nouveau changer les orbites de ces comètes et les réinjecter vers le Soleil. Ce sont alors des comètes dynamiquement nouvelles ». La marée galactique peut aussi en extraire du nuage, pour les envoyer se balader dans notre Système solaire.

Les astronomes supposent que les comètes dont les orbites présentent des périodes inférieures à 200 ans et des inclinaisons proches du plan de l’écliptique proviendraient de la ceinture de Kuiper, tandis que les autres seraient issues du nuage de Oort. Ce n’est pas une vérité absolue, loin de là.

Ceinture Kuiper nuage oort
L’image n’est PAS à l’échelle. Crédits : CNES

Personne n’a vu des objets directement dans le nuage de Oort

Il n’existe pas de règles précises concernant les trajectoires de nouvelles comètes issues du nuage de Oort. Leurs périodes orbitales peuvent s’étaler sur une large place, avec une inclinaison « au hasard » par rapport au plan de l'écliptique (celui dans lequel tournent les planètes). C’est d’ailleurs pour cela qu’on pense qu’il s’agit d’un nuage sphérique partout dans le Système solaire, contrairement à la ceinture de Kuiper.

« La raison qui fait penser à l’existence d’un nuage, d’un réservoir de comètes, c’est l’observation des comètes qui viennent nous voir. C’est à partir de leur distribution qu’on en a déduit l’existence d’un réservoir situé de manière lointaine […] la seule chose qui est observée, c’est la distribution des comètes qui nous visitent », expliquait récemment Jacques Laskar, directeur de recherche au CNRS, dans la Méthode scientifique de France Culture, une émission intéressante à écouter.

« Les objets du nuage de Oort, dans le nuage de Oort, personne ne les a vus », ajoutait-il. Par contre, en dehors du nuage on peut observer des comètes qui en proviennent, c’est par exemple le cas de P/Halley et Hale-Bopp. Parfois on peut même récupérer des fragments des comètes sur Terre, encore faut-il les trouver.

Un vivier de milliards de comètes en attente

« Ces corps sont les témoins de la formation du système solaire et par conséquent recèlent un savoir très important », explique Yannick Boissel du GEPI (une unité mixte entre l’Observatoire de Paris et le CNRS). Problème, étant donné leurs tailles et la distance à laquelle ils se trouvent, il est impossible de les observer directement, même avec les meilleurs télescopes.

Comme pour les exoplanètes, les scientifiques peuvent utiliser la technique de l’occultation pour tenter de les caractériser. « Il faut connaître notre Galaxie (très grand, très loin) pour étudier les confins de notre système solaire (très petit, très proche) », ajoute le scientifique. Et ce ne sont pas les possibilités qui manquent puisque le nuage pourrait contenir environ mille milliards de comètes.

Ce nombre impressionnant doit être remis en perspective par rapport à l’immense superficie du nuage. Ces milliards d’objets se retrouvent ainsi très isolés, et naviguent dans un vide quasi total. La masse de l’ensemble des comètes ne dépasserait pas quelques masses terrestres, explique Jacques Laskar. C’est toujours largement plus que la ceinture de Kuiper qui ne représente « pas plus de 10 % » de la masse de notre planète selon la NASA,  mais cela reste faible à l’échelle du Système solaire.

Nuage Oort
Crédits : Observatoire de Paris IMCCE

Proxima du Centaure pointe son étoile à l’horizon

Pour donner un ordre de grandeur de ce nuage, il faut voir plus grand et parler en année-lumière (al). La bordure extérieure du nuage se trouve pour rappel à 100 000 unités astronomiques, soit un peu plus de 1,5 année-lumière tout de même.

L’air de rien l’étoile la plus proche de nous, Proxima du Centaure n’est « que » trois fois plus éloignée à 4,2 années-lumière. Pour vous donner un ordre de grandeur, Voyager 2 – la sonde humaine actuellement la plus loin de nous – est seulement à… 152 unités astronomiques de la Terre, soit « à peine » 21 heures-lumière. Elle est donc encore très loin du nuage.

Une « vaste mer chaotique » dans la zone intermédiaire

Après ce tour d’horizon de notre Système solaire, nous connaissons bien les huit planètes, certaines planètes naines, des astéroïdes et comètes. C’est également le cas de la ceinture de Kuiper et du nuage de Oort, même s’il reste beaucoup de questions autour de ce dernier. Mais qu’en est-il de la région intermédiaire entre ces deux grandes structures, qui mesure tout de même plusieurs dizaines de milliers d’unités astronomiques ?

Il s’agit d’une « zone d’ombre dans notre compréhension de la structure du Système solaire », reconnait l’Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides (IMCCE). Cette région n’est pas totalement vide, mais les objets sont « très difficiles à observer en raison de leur distance [contrairement à ceux de la ceinture de Kuiper, ndlr], et aucune perturbation orbitale importante ne permet a priori de les rapprocher de la Terre », comme c’est le cas des comètes du nuage de Oort.

Observatoire de Paris IMCCE

« D’un point de vue dynamique [cette zone] est caractérisée par un régime orbital hybride, où les perturbations planétaires et galactiques sont du même ordre de grandeur […] En raison de la faiblesse des perturbations orbitales, les astronomes considéraient jusqu’alors que les orbites des objets de cette région étaient inertes, ou « fossilisées » dans un état primordial datant de la dispersion de l’amas stellaire dans lequel le Soleil s’est formé », explique l’IMCCE. 

La réalité serait bien différente selon une étude récente de l’Observatoire de Paris et du National Astronomical Observatory japonais : « la région intermédiaire entre la ceinture de Kuiper et le nuage de Oort abrite en réalité une vaste mer chaotique. Aucune barrière dynamique n’empêche les objets d’évoluer entre une excentricité nulle et une excentricité voisine de 1 ».

Pour rappel, lorsque l’excentricité est inférieure à 1, l’orbite est fermée : elle forme une ellipse, ou un cercle quand elle est nulle. Dans le cas contraire, elle est parabolique ou hyperbolique. Certes les variations orbitales sont faibles, « mais pas au point d’être négligeables sur une durée de l’ordre de l’âge du Système solaire [4,5 milliards d’années, ndlr] », expliquent les chercheurs.

Maintenant que nous sommes arrivés aux confins de notre Système solaire, ce dossier touche à sa fin. Pour rappel nous avons fait plus du tiers du chemin qui nous sépare de Proxima du Centaure, le système solaire le plus proche de nous… mais c’est une autre histoire.

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