Randy Pitchford, le PDG du studio Gearbox à qui l'on doit notamment les jeux de la franchise Borderlands ainsi que leurs nombreux DLC, s'est entretenu avec nos confrères de GamesIndustry lors du D.I.C.E. De nombreux sujets furent traités, de la violence dans les jeux jusqu'au paysage actuel de l'industrie vidéoludique.
L'industrie vidéoludique vivrait sa Renaissance
Alors qu'à entendre la minorité bruyante, l'industrie se repose majoritairement sur les titres « AAA » à gros budget et au succès quasiment assurés, comme la version annuelle de Call of Duty ou de FIFA, le PDG de Gearbox Software ne voit pas les choses de cet oeil-là.
« Je pense que nous avons devant nous un large spectre de jeux et que nous voyons de nouvelles choses tout le temps. En fait, je pense même que nous voyons beaucoup plus de nouvelles choses en ce moment. Je pense que nous sommes au coeur d'une sorte de Renaissance de l'industrie. Celle-ci ne proviendra peut-être pas des blockbusters triple A, avec des budgets de 50 millions de dollars pour le développement, mais quand vous regardez ce qui se passe du côté des indépendants, il y a beaucoup d'idées à dompter c'est très enthousiasmant. J'ai d'ailleurs passé une bonne partie de mes vacances sur Faster Than Light, qui est vraiment très cool », explique le dirigeant.
Pitchford voit ce fourmillement d'idées chez les indépendants comme une bonne chose, et ne craint pas l'avenir. « Je ne pense pas au futur avec la peur au ventre. J'y pense avec enthousiasme et anticipation, et d'une certaine manière j'aime l'idée de faire moins de paris, en misant davantage, parce que j'aimerais voir ce qu'il est possible de faire quand on met plus de ressources qu'on n'en a jamais mis dans quelque chose d'autre auparavant. En tant que créateur, l'idée que notre studio puisse construire quelque chose avec un budget deux ou trois fois supérieur aux précédents c'est se dire "Oh mon Dieu, vous pouvez imaginer tout ce qu'on peut faire avec ça ?" Donc cela m'enthousiasme vraiment », ajoutera-t-il.
Le paysage actuel semble lui donner raison, tout du moins sur le marché des consoles. Avec « une baisse du volume total des ventes de 20 à 25 %, mais les ventes des meilleurs titres qui croissent d'autant » commercialement parlant, il semble plus intéressant de se focaliser sur moins de titres, en misant énormément dessus. « Est-ce bon, est-ce mauvais ? Je n'en sais rien. Mais je préfère avoir moins de choses, mais qu'elles soient énormissimes, parce que de toute façon je n'ai pas le temps de jouer à tout ça quoi qu'il arrive. Vous voyez ce que je veux dire ? Il y en a tellement que je n'arrive plus à suivre, et pourtant je suis un p**** de joueur hardcore, je joue tout le temps ! Et pourtant je n'arrive pas à suivre, du coup j'aime l'idée de miser plus gros sur moins de titres. Pendant ce temps, il y a tellement de fourmillement chez les indépendants, et tellement de petites mises. Il y a énormément de diversité là-bas, et c'est vraiment énorme ».
Et si la NRA agissait comme l'ESRB ?
Concernant la violence dans les jeux vidéo, Pitchford n'a pas vraiment d'avis tranché sur la question. Il émet cependant une hypothèse intéressante sur le rôle que devrait tenir la NRA, la rapprochant de ce que fait l'ESRB pour l'industrie vidéoludique.
« Pensez à la relation qu'il y a entre l'industrie du jeu vidéo, et l'ESRB. L'ESRB c'est notre organisme autorégulé pour la classification des jeux, que l'industrie a créée pour apposer des labels sur ses titres. La plupart des éditeurs payent pour l'ESRB mais pourtant nous avons des relations tendues avec eux. Ils sont vraiment très bons dans leur travail. Ils permettent à l'industrie de rester viable avec leurs lignes de conduite et tout le reste, et peu importe le label apposé, ils le choisissent de façon appropriée. Si vous franchissez une ligne, ils mettent votre jeu dans une autre case, que vous le vouliez, ou non », explique-t-il.
« Maintenant, imaginez que la NRA préconise des lois concernant les armes à feu. Imaginez que la NRA ait avec l'industrie de l'armement la même relation que l'ESRB avec nous. Au lieu de dire "ne faites aucune loi" on verrait plutôt quelque chose comme "merde, la NRA me fait faire un tas de trucs pour rendre mes armes mieux sécurisées, je comprends ce qu'ils veulent faire, mais ça me fait mal au cul !" C'est exactement ce qui se passe entre l'ESRB et l'industrie vidéoludique. Nous apprécions qu'ils soient là mais nous devons faire avec leur merdier et passer tout un processus pour avoir le classement. Si nous ne le faisons pas, les détaillants ne nous mettent pas en rayon, et si notre contenu dépasse certaines bornes, ils nous appellent, et nous devons faire avec. Imaginez que la NRA puisse avoir la même relation avec son industrie. Le reste du pays les soutiendrait, et ils deviendraient les gentils dans l'histoire », argue-t-il.
Concernant l'avenir de son studio, l'homme reste très confiant et dit avoir une visibilité sur les cinq années à venir. Seulement avec Borderlands, ou se risquera-t-il à des paris encore plus audacieux et risqués ?