Les enchères pour les fréquences 5G sur la bande des 3,5 GHZ sont terminées. Le montant total déboursé par les opérateurs est d'environ 1,4 milliard d’euros auxquels il faut ajouter 1,4 milliard pour les 4x 50 MHz payés à prix fixe. Comme attendu, Orange sort vainqueur. D'autres étapes suivront.
Ouvertes ce mardi 29 septembre, les enchères sur la 5G sont désormais bouclées après 17 tours. De 70 millions d’euros au départ, le prix d’un bloc de 10 MHz est monté à 126 millions, soit un total d'un peu moins d'1,4 milliard d’euros pour les onze blocs disponibles. Une manne financière qui ira pour rappel dans les caisses de l’État.
Après deux journées, les opérateurs n’étaient pas parvenus à se départager, demandant 13 blocs : 5 pour Orange, 3 pour Bouygues Telecom et SFR, 2 pour Free. C’est donc durant cette troisième (et dernière) journée qu’un arrangement a finalement été trouvé. Bouygues et Orange ont lâché l'un des blocs de 10 MHz qu'ils convoitaient. Pour rappel, 4x 50 MHz avaient déjà été répartis à prix fixe en avril. Soit 2,786 milliards d'euros pour 310 MHz.
Voici la répartition définitive :
- Orange : 4 blocs de 10 MHz et 50 MHz à prix fixe
- SFR : 3 blocs de 10 MHz et 50 MHz à prix fixe
- Bouygues Telecom : 2 blocs de 10 MHz et 50 MHz à prix fixe
- Free Mobile : 2 blocs de 10 MHz et 50 MHz à prix fixe
Une seconde enchère dite « de positionnement » (à un tour au second prix) sera organisée en octobre : les candidats « pourront ainsi exprimer leurs préférences de position dans la bande ainsi que de position relative avec les autres lauréats ». Il n’y aura pas de montant de réserve cette fois-ci.

5G : les opérateurs vont cohabiter avec THD Radio et WiMax
L’attente aura été longue, très longue même puisque les premières consultations ont déjà presque quatre ans. Fin 2018, le régulateur des télécoms en organisait une vaste et importante consultation, exposant les différents choix techniques possibles, avec des incidences sur la quantité de fréquences disponibles.
Pour rappel, la bande des 3,5 GHz n’est pas « nouvelle », elle est déjà utilisée depuis une vingtaine d’années au moins par d’autres technologies. Nous pouvons citer le WiMax dans les années 2000, mais aussi le très haut débit fixe (THD radio) pour lequel l’Arcep a attribué des fréquences aux collectivités locales.
Comme les autorisations déjà délivrées ne prennent fin qu’en 2026, la 5G s’est adaptée.
« Au début, la 5G va ressembler à de la 4G+ »
Afin de faire cohabiter tout ce petit monde, c'est le choix de la synchronisation qui a été fait, plutôt que de sacrifier des bandes de fréquence. Une solution pour maximiser la quantité de fréquences disponibles.
Mais avec des conséquences sur les performances : « La 5G promet des latences de l'ordre de 2 ms permettant des usages temps réel, de la voiture connectée, etc. D’après les premières informations, cette synchronisation pourrait augmenter cette latence, potentiellement jusqu'à 5 ms », nous expliquait-on fin 2018.
Pendant un temps – avant que la bande des 3,5 GHz se libère du THD Radio et du WiMax –, la 5G n’ira donc pas « au bout de ses promesses en termes de latence ». Néanmoins, « on sait qu'au début la 5G ça va quand même beaucoup ressembler à de la 4G+. Les vrais usages critiques à latence faible ne vont pas apparaitre tout de suite », ajoutait le président de l’Arcep. Sans parler des 26 GHz qui n'arriveront que dans un second temps.
C’est finalement en juillet 2019 que le gendarme des télécoms lançait son ultime consultation publique, sur son « projet de modalités et conditions d’attribution d’autorisations d’utilisation de fréquences ». On y apprenait que 310 MHz seraient disponibles et que seuls les quatre opérateurs nationaux pourraient y participer.
Quelles sont les obligations des opérateurs ?
Il était prévu de proposer aux opérateurs d’acquérir au moins 40 MHz à prix fixe, contre des engagements supplémentaires : 5G au service de la compétitivité des autres secteurs de l’économie française, couverture à l’intérieur des bâtiments, offres d’accès fixe, plus grande transparence, innovation et concurrence.
Il a finalement été décidé de passer à 50 MHz. Les quatre opérateurs se sont portés acquéreur de ces fréquences. Les autres engagements sur les enchères concernent notamment le déploiement : les opérateurs devront proposer 3 000 sites en 2022, 8 000 sites en 2024 et 10 500 sites en 2025.
Le régulateur veut aussi s’assurer que le déploiement se fasse sur une bonne partie du territoire : « 25 % des sites en bande 3,4 - 3,8 GHz des deux derniers jalons devront être déployés dans une zone rassemblant les communes des zones peu denses et celles des territoires d’industrie, hors des principales agglomérations »
Les opérateurs ont également des obligations en termes de couverture des axes routiers : « en 2025, la couverture
des axes de type autoroutier (soit 16 642 km), puis en 2027, la couverture des routes principales (soit 54 913 km) », avec des débits d’au moins 100 Mb/s.
Le slicing – qui permet de découper le réseau en tranches pour proposer des services différenciés – devra être mis en place au plus tard en 2023. Il ne s’agit pour rappel pas d’une entorse à la neutralité du Net, mais de permettre de favoriser par exemple la latence (pour des voitures autonomes ou des opérations chirurgicales à distance) ou le débit (pour du streaming) selon les besoins.
Le Berec (regroupement des régulateurs nationaux européens) n’y voit rien à redire : il « considère que le Règlement européen sur l’Internet ouvert laisse une grande place à la mise en œuvre des technologies 5G, comme le "Network slicing", "5QI", et le "Mobile Edge Computing" par exemple. À ce jour, le Berec n’a pas connaissance d’exemples concrets de déploiements de la 5G entravés par le Règlement ».
L'EDRI (European Digital Rights) n’est pas du même avis : « Nous craignons beaucoup que la standardisation en cours de la 5G sape le niveau actuel de protection de la neutralité du net en Europe ». Pour rappel, la Cour de justice de l’Union européenne vient de consacrer cette dernière. C'était une « belle journée » pour Sébastien Soriano.
Enfin, dernière obligation et pas des moindres : « pour accélérer la transition vers le protocole de routage IPv6, l’Arcep prévoit une obligation pour rendre les réseaux mobiles compatibles avec celui-ci ».
Des licences valables 15 (+5) ans
Le régulateur explique enfin que « les fréquences sont attribuées pour 15 ans. Cette durée sera prolongée de 5 ans en cas d’accord du titulaire sur les conditions de cette prolongation ».
Le régulateur prévoit deux rendez-vous intermédiaires en 2023 et 2028 afin de « faire un point sur la mise en œuvre des obligations et sur les besoins, notamment concernant la couverture et la qualité de service des réseaux mobiles ». Si besoin, une adaptation des obligations pourra être réalisée, après accord avec le titulaire.
Pour le lancement commercial des offres 5G, l’Arcep laisse l’initiative aux opérateurs. Suite à la crise sanitaire, le gendarme des télécoms a pour rappel déjà annoncé qu’il supprimait du cahier des charges l’obligation de couverture dans au moins deux villes par opérateur avant la fin 2020.
Pour rappel, Bouygues Telecom a déjà lancé des forfaits « compatibles 5G », sans réseau pour le moment.