Fedora 33 : la bêta disponible, plusieurs grosses évolutions dont le passage à Btrfs par défaut

Fedora 33 : la bêta disponible, plusieurs grosses évolutions dont le passage à Btrfs par défaut

Et à la bonne date

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Vincent Hermann

Publié dans

Logiciel

30/09/2020 10 minutes
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Fedora 33 : la bêta disponible, plusieurs grosses évolutions dont le passage à Btrfs par défaut

Pour une fois, la bêta de Fedora est arrivée à l’heure. Disponible depuis hier, elle contient déjà l’ensemble des améliorations prévues pour cette version 33. Si la mouture précédente était relativement calme, la nouvelle a un programme nettement plus chargé.

Fedora 33 apporte un important lot d’améliorations dans plusieurs domaines, sous le capot pour la plupart. L’arrivée d’une nouvelle version de la distribution est toujours un temps fort dans le monde Linux, car elle est à la fois un laboratoire pour Red Hat – qui peut y tester des nouveautés longtemps avant de les intégrer dans son Enterprise Linux (RHEL) – et un système connu pour intégrer des technologies récentes.

Elle a par exemple été la première à basculer sur Wayland comme serveur d’affichage par défaut, bien qu’en gardant X.org comme solution de « fallback », c’est-à-dire de remplacement en cas d’incompatibilité. Ce support n’a fait depuis que se renforcer, quand d’autres distributions n’y sont toujours pas passées, Ubuntu en tête.

Les deux dernières versions de Fedora (31 et 32) ont surtout été marquées par de multiples passes d’optimisations, provenant tant du noyau que de l’environnement GNOME, que les développeurs optimisent continuellement depuis deux ans environ. Si on écarte les améliorations propres à Fedora, ces optimisations se sont en fait retrouvées dans d’autres systèmes, et nous avions noté la hausse sensible de la réactivité dans Ubuntu notamment.

Fedora 33 introduit cette fois des changements plus importants, même si une part de l’effort vise toujours les performances et la réactivité générale, dont une nouvelle fois à travers GNOME. S’agissant d’une bêta, les avertissements classiques de sécurité restent valables. La version finale est prévue pour le 20 ou 27 octobre.

Cette préversion est, pour une fois, à l’heure en tout cas.

Ext4 remplacé par Btrfs par défaut dans les installations

C’est clairement le plus gros changement de Fedora 33, de la même ampleur que le passage à Wayland. Les évolutions franches sur les systèmes de fichier sont en effet rares. La distribution n’est toutefois pas la première à se lancer : OpenSUSE se sert de Btrfs par défaut depuis plusieurs années.

Précisons d’emblée que cette bascule ne se voit réellement que lors d’une nouvelle installation du système. Les actuels utilisateurs de Fedora 32 ne vont pas voir une conversion magique de leurs partitions. Les développeurs, à juste titre, n’y touchent pas. Dans l’installeur Anaconda, le changement se reflète dans la partie consacrée au partitionnement du disque. Une fois Fedora prête, on retrouve Btrfs dans le Gestionnaire de disque.

Si vous préférez continuer à utiliser Ext4, c’est également possible dans Anaconda.

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Bon, et alors ? Les avantages de Btrfs ne sont pas à chercher du côté des performances. Le système de fichiers est surtout important pour les fonctions de sécurité des données qu’il intègre.

Btrfs apporte ainsi nativement les instantanés (snapshots) à chaud, qui permettent pour rappel de revenir à un état antérieur d’un sous-volume ou du système. Techniquement, il faut parler de « versions », chacune ne gardant en réserve que les changements apportés depuis le dernier enregistrement, avec d’importants gains de place à la clé.

On y trouve également le copy-on-write, un modèle transactionnel permettant d’exploiter les snapshots, les références arrière, le redimensionnement à chaud des volumes, la gestion des volumes logiques, la prise en charge native des RAID ou encore le support des sommes de contrôle.

Actuellement, les performances de Btrfs sont globalement similaires à celles d’Ext4. Contrairement à l’arrivée de Wayland cependant, il ne faut pas s’attendre à une compatibilité limitée : on ne teste pas un système de fichier par défaut comme un serveur d’affichage, car si un problème survient, c’est tout le système qui est remis en cause.

Plusieurs patchs spécifiques à Btrfs sont présents dans le noyau fourni, tout comme le pilote dédié. En outre, le système de fichier a été intégré à la Continuous Kernel Integration de Red Hat pour les tests.

Fedora 33

Côté utilisateur : GNOME 3.38, interface et réactivité

Fedora 33 est fourni dans sa version par défaut avec GNOME 3.38, qui présente notamment un nouveau panneau d’accueil, que l’on peut d’ailleurs voir au premier démarrage du système. Elle pointe les principaux mécanismes à connaître pour manier correctement le système. Un ajout bienvenu.

Dans le menu principal, les catégories « Fréquemment utilisées » et « Toutes » fusionnent. Désormais, seule une grille de 24 icônes par page est affichée, le nom dépendant bien sûr de la définition de l’écran. Tous les lanceurs peuvent désormais être déplacés. Les sous-menus affichent aussi une nouvelle grille, de neuf éléments par page.

Plusieurs améliorations évidentes sont présentes, et pour certaines réclamées depuis longtemps. Par exemple, le menu Alimentation permet – enfin ! – d’accéder directement au redémarrage de la machine, sans cliquer d’abord sur Éteindre. De même, les évènements du jour sont affichés sous la grille du calendrier quand on clique sur l’heure en haut au centre. Encore un ? Dans les options d’énergie pour les ordinateurs portables, on peut maintenant demander à ce que le pourcentage de batterie restante soit affiché en permanence.

Parmi les autres améliorations, notons également l’affichage d’un code QR dans les paramètres Wi-Fi pour les smartphones pouvant se connecter par ce biais, une boite de dialogue dédiée aux captures d’écran, de multiples apports pour le navigateur Epiphany (dont le blocage par défaut de la lecture automatique des vidéos), de nouveaux contrôles parentaux ou encore le support amélioré des lecteurs d’empreintes digitales.

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Ajoutons que même si GNOME est l’environnement poussé par l’équipe de développement, KDE reçoit lui aussi des améliorations, sous forme de « rattrapage » sur les fonctions système.

Dans Fedora 33, les sessions KDE sont ainsi compatibles avec EarlyOOM. Ce mécanisme, apparu dans la version 32, vise les petites configurations en libérant de manière plus agressive la mémoire quand un processus consomme trop de ressources. Une demande de fermeture est ainsi envoyée quand moins de 10 % de la mémoire et du fichier swap sont disponibles, puis un signal SIGKILL si ce chiffre passe sous les 5 %.

Certaines améliorations concernent directement les performances. Outre une nouvelle passe d’optimisations dans GNOME 3.38, un cgroup spécifique a été mis en place pour que des ressources minimums soient réservées aux sessions graphiques actives. DXVK devient également l’implémentation par défaut pour wine3d. Utilisant Vulkan, il doit augmenter les performances graphiques des applications prévues pour Windows, tout particulièrement les jeux. Citons enfin zram pour gérer le swap, qui doit lui aussi apporter une plus grande réactivité.

GNOME 3.38 cache une autre amélioration pour les CPU Intel : l’intégration par défaut de thermald. Si le nom ne vous dit rien, il devrait permettre une meilleure gestion de l’énergie, donc à une consommation globalement moindre, des ventilateurs moins affolés et un meilleur contrôle des pics de performances.

Globalement, Fedora 33 impressionne par son niveau de performances. Le système démarre rapidement, les applications se lancent vite et les animations restent parfaitement fluides. Les actions s’enchainent sans que le système n'ait jamais vraiment l’air de travailler. C’est également vrai dans une machine virtuelle créée avec un seul cœur (sur la base d’un Core i5 6500 à 3,2 GHz) et 2 Go de mémoire.

Enfin, dans la catégorie « inutile donc indispensable », Fedora 33 signe le grand retour des fonds d’écrans dynamiques. Pour les habitués de macOS, le fonctionnement est le même : l’affichage change selon l’heure de la journée. Deux sont fournis, signalés par une petite icône d’horloge.

Fedora 33

Développement et composants

Le développement est l’une des parties où l’on peut le mieux voir la philosophie Fedora. Les versions des paquets concernés sont le plus souvent les dernières : glibc 2.32, binutils 2.34, LLVM 11, Make 4.3, Boost 1.73, Golang 1.15, OpenJDK 11, Node.js 14, Erlang 23, GHC 8.8, Haskell Stackage 16 (LTS), Perl 5.32, Ruby on Rails 6.0 ou Python 3.9.

Pour ce dernier, notez d’ailleurs que les moutures 2.6 et 3.4 sont supprimées et que python-pytoml est déprécié. Il sera supprimé dans une prochaine version du système (la 34 logiquement). Même pour la bibliothèque libdb. Concernant la compilation, glibc-headers.i686 et glibc-headers.x86_64 ont fusionné pour former glibc-headers-x86.noarch. glibc-headers, pour les autres architectures, fait maintenant partie de glibc-devel.

Au cœur de Fedora 33 règne pour l’instant un noyau Linux 5.8.12. La version finale étant prévue pour le 20 octobre, cette version peut encore évoluer. Côté applications, les Fedora sont livrées en général avec le strict minimum. On trouve par exemple les dernières versions Firefox et LibreOffice, dont la branche 7 est encore fraiche.

Quelques logiciels classiques sont présents comme Rythmbox 3.4.4 pour la musique et Machine 3.38 pour la gestion des machines virtuelles, mais il s’agit d’applications livrées avec GNOME. Aucun client email n’est installé par exemple. On remédiera facilement à la situation en lançant Logiciels (Geary, Evolution, Thunderbird…).

Gestion du matériel et administration

La plupart des améliorations concernant le matériel visent en fait l’architecture AArch64. Par exemple, les mécanismes ARM Pointer Authentication et de Branch Target Identification sont maintenant actifs par défaut pour augmenter la sécurité générale des applications. Toujours pour AArch64, .NET Core est maintenant disponible, alors qu’il était jusqu’ici réservé aux moutures x86-64.

Côté administration système, le menu est plus copieux. On commence avec RPM, qui passe en version 4.16. Les bases de données qui l’accompagnent changent d’ailleurs de format, en migrant de Berkeley DB à SQLite. Certains changements étaient attendus et logiques, comme la désactivation (mais pas encore la suppression) de TLS 1.0 et 1.1, comme dans la plupart des navigateurs à ce jour.

De même, les clés Diffie‑Hellman 1 024 bits et les hachages SHA‑1 sont refusés. Une commande permet de restaurer l’ancienne configuration si besoin :

update-crypto-policies --set LEGACY

Chrony (NTP) et Anaconda passent enfin au protocole sécurisé NTS pour synchroniser l’heure et la date pendant l’installation et dans le système. La résolution des noms de domaine dans les applications évolue également en passant par systemd-resolved. Puisque l’on parle de réseau, notez que les nouveaux profils NetworkManager sont maintenant enregistrés au format officiel keyfile. Le format ifcdg-rh, spécifique à Red Hat, est remisé. Les profils existants sont inchangés pour des questions de compatibilité.

Plusieurs composants font en outre leur entrée, notamment Storage Instantiation Daemon. Ce processus veut concentrer toute la gestion du stockage sur la base d’udev, avec à la clé, normalement, une simplification des règles associées. L’API Parsec est également une nouveauté. Indépendante, elle se veut un point d’accès d’unique pour l’accès aux matériels de sécurité (TPM2, HSM et ARM TrustZone) et aux services de sécurité.

D’autres disparaissent, comme device-mapper-multipath, supprimé des installations par défaut pour améliorer le temps de démarrage. Ce retrait n’est valable que pour la version Workstation de Fedora.

Écrit par Vincent Hermann

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Ext4 remplacé par Btrfs par défaut dans les installations

Côté utilisateur : GNOME 3.38, interface et réactivité

Développement et composants

Gestion du matériel et administration

Commentaires (5)


Pour information la Beta a eu 2-1 semaine de retard (les dates initiales étaient le 15 et 22 septembre et non le 29).



Bonne dépêche, merci. :)


Je suis content que btrfs regagne du terrain, ça m’avait inquiété le retrait de centos 8. Surtout que je l’utilise sur un Synology en entreprise 😃


Concernant BTRFS, les soucis concernant le Raid5 ont été corrigés ?



Je n’ai pas bien compris ce problème de “write hole”. Mais vu tout ce que j’ai lu dessus ça m’a valu de privilégier snapraid (ZFS étant trop restrictif sur l’évolution d’un pool) :transpi:



Sinon va falloir que je réinstalle mon PC avec Fedora. J’ai redonné une chance à Ubuntu mais je le regrette de plus en plus :transpi:



Furanku a dit:


ZFS étant trop restrictif sur l’évolution d’un pool




ça vient…



https://github.com/openzfs/zfs/pull/8853


D’ici que ce soit dispo en stable il semble encore y avoir du boulot :transpi:
C’est LE point concernant ZFS qui m’a freiné à passer définitivement dessus, après quelques tests. C’est donc une bonne chose que le sujet progresse !