NVIDIA confirme sa volonté d'acheter ARM pour 40 milliards de dollars

18 mois de galère
Economie 7 min
NVIDIA confirme sa volonté d'acheter ARM pour 40 milliards de dollars

Après la période des rumeurs, celle de la procédure officielle. Une procédure qui pourrait s'annoncer longue et difficile. Car le rachat d'une société comme ARM, qui compte de nombreux et puissants clients de par le monde, est tout sauf gagné d'avance. Mais l'occasion est trop belle pour NVIDIA.

NVIDIA est dans l'une de ces périodes de grâce où tout sourit à une société. Elle vient de passer les dix dernières années à parfaire sa vision d'un GPU pouvant servir à (presque) tout calculer via sa plateforme CUDA, avec succès. Elle possède 80 % du marché des cartes graphiques (dGPU) grâce au bon accueil fait à ses GeForce RTX.

NVIDIA multiplie les succès

Ces dernières ont été l'occasion de marier ses deux secteurs principaux au sein d'une même génération de puces : le jeu vidéo et les nouvelles accélérations qui étaient jusque-là dédiées aux professionnels. Les calculs liés à l'IA ou le ray tracing en temps réel sont désormais à la portée du plus grand nombre.

La génération Ampere qui vient d'être dévoilée enfonce le clou, avec de nombreux outils associés qui devraient plaire aux joueurs : Broadcast pour les streamers, Reflex pour les joueurs ayant besoin d'une basse latence dans les jeux compétitifs, Omniverse Machinima pour ceux qui se sentent une âme de réalisateurs, etc.

Résultat : son action était récemment au plus haut à près de 530 dollars début août.

ARM et NVIDIA : une erreur qui devient moteur

Surtout, l'entreprise a réussi à se développer sur de nombreux marchés très lucratifs. Certes, dans celui des consoles de jeux elle n'a gagné « que » la Switch de Nintendo avec ses puces Tegra, également utilisées dans ses propres consoles de salon Shield TV. Mais ces projets sont la preuve que l'entreprise sait faire d'un raté une force.

Pensée au départ pour gagner le monde de la mobilité, la gamme Tegra a été l'occasion pour l'entreprise de se familiariser avec les puces ARM et de combler l'un de ses plus grands manque au regard de sa stratégie : l'absence de processeur maison. AMD et Intel, ses deux grands rivaux, sont en effet les seuls de leur taille à disposer d'une licence x86 et donc de pouvoir fabriquer des CPU l'exploitant. D'une certaine manière, NVIDIA en est dépendant.

L'entreprise a donc tout misé sur ARM ces dernières années. Un pari gagnant puisque c'est ce qui lui a permis de se développer dans la robotique, le médical ou encore l'automobile en proposant des SoC complets, avec CPU, GPU et accélérateurs maison. La société a même adapté sa couche CUDA pour les serveurs en étant équipés.

Ainsi, des serveurs dotés de SoC ARM peuvent exploiter des GPU NVIDIA de dernière génération. Des plateformes de référence existent d'ailleurs autour des derniers A100 (Ampere) destinés aux datacenters.

Un enjeu stratégique

Mais voilà : ARM reste une société tierce, propriété d'un ancien actionnaire important de NVIDIA, SoftBank. Elle ne fabrique aucune puce mais conçoit les architectures destinées à d'autres, vendues sous forme de licences. Elle a déjà gagné le marché du mobile et rencontre de plus en plus de succès ailleurs : dans les serveurs avec des sociétés comme Ampere (rien à voir avec l'architecture de NVIDIA) ou l'intégration à venir aux Mac d'Apple.

Le fait d'être possédée par un fonds géant facilite sa neutralité d'action vis-à-vis de ses clients, qui est sans doute ce que ces derniers cherchent le plus à préserver. Mais depuis que SoftBank a fait savoir qu'il était vendeur, les appétits se sont aiguisés. Et si la stratégie d'ARM pouvait déjà évoluer avec le temps, dépendre d'autres acteurs ayant plus de poids que NVIDIA, si l'entreprise venait à changer de propriétaire, cela pourrait empirer.

Pour continuer à se développer dans ses secteurs d'avenir, le géant de la puce graphique a donc tout intérêt à racheter ARM pour à la fois l'aider à se développer face à des géants comme Intel, mais aussi s'assurer que cette évolution se fasse bien en accord avec sa propre feuille de route, pour les dix prochaines années.

  • ARM NVIDIA
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ARM l'inrachetable

C'est ce qui explique la proposition faite aujourd'hui d'un rachat à 40 milliards de dollars , contre 32 milliards payés par SoftBank en 2016. 12 milliards en cash (dont deux payables dès la signature), 21,5 milliards sous la forme de 44,3 millions d'actions NVIDIA. Les employés de ARM toucheraient 1,5 milliards de dollars en equity.

SoftBank, qui a donné son accord, reviendrait donc au capital de l'américain, avec moins de 10 % des parts. Et pourrait également gagner 5 milliards si certains objectifs sont remplis par ARM. La transaction ne concerne pas l'activité IoT d'Arm. Reste l'habituelle phrase, qui a toute son importance ici : cette opération est soumise à l'accord des régulateurs, dans de nombreux pays : la Chine, les USA, mais aussi l'Europe auront à donner leur feu vert. Tout comme le Royaume Uni, siège historique de l'entreprise. L'opération pourrait nécessiter jusqu'à 18 mois.

C'est sans doute ce qui explique que l'offre soit généreuse, comportant de nombreuses garanties : le développement de la R&D à Cambridge pour satisfaire un Royaume-Uni en plein Brexit, l'assurance de garder une activité de licences ouvertes, neutre vis-à-vis des clients pour éviter d'alerter les autorités de la concurrence.

Mais aussi d'y ajouter des technologies NVIDIA pour compléter les GPU Mali par exemple et montrer aux actionnaires que l'entreprise va faire ce qu'elle a déjà fait pour d'autres, telle que Mellanox (devenue Networking) : développer la société face à ses concurrents. Si un accord définitif est donné, il pourrait donc être accompagné d'une (très) longue liste d'obligations à respecter à l'avenir et de contrôles stricts.

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Car ce sont bien ces derniers qui pourraient trouver à y redire. Un AMD ou un Intel ont en effet de quoi s'inquiéter à voir NVIDIA absorber la société qui leur donnait du fil à retordre, nourrissant leurs concurrents ces dernières années. La voir sérieusement se renforcer en R&D, en puissance commerciale, avec le père des GeForce et autres Quadro comme figure de proue de ses prochaines avancées technologiques pourrait ne pas les rassurer.

On imagine aussi que des Apple, Samsung et autres Qualcomm regarderont de près le dossier, tant leur stratégie dépend d'ARM et du succès de ses futures solutions. Voir une entreprise comme NVIDIA être seul maître à bord pourrait tant leur apparaître comme une bonne qu’une mauvaise nouvelle. Ils viendront sans doute nourrir le dossier des autorités en charge de la concurrence, Jen Hsun Huang et ses équipes devront rassurer.

Ce dernier a d'ailleurs publié une lettre ouverte pour commencer à préparer le terrain.

L'ultime bataille de NVIDIA ?

Le PDG a construit NVIDIA et son succès sur de nombreux paris gagnants. Est-ce que ce sera à nouveau le cas ici ? Ce sera la question de ces prochains mois. NVIDIA devra d'ailleurs prendre garde à ne pas se préoccuper de ce seul rachat, à continuer de développer ses gammes de produits et à se préparer au fait que la transaction puisse ne pas être finalisée si les garanties apportées n'étaient finalement pas jugées suffisantes.

Mais si le succès est au bout du chemin, ce sera sans doute la plus grande transformation de l'entreprise depuis sa création, le début d'une nouvelle ère pour elle et l'un des aboutissements de l'œuvre de son PDG.

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