Shadow x HubiC : premières décisions, un nouveau CTO

Et des vGPU
Economie 11 min
Shadow x HubiC : premières décisions, un nouveau CTO

Depuis la reprise de Blade, Octave Klaba est intervenu plusieurs fois publiquement pour évoquer sa stratégie à propos du service de PC dans le cloud Shadow qui intègre son projet de relance d'HubiC. En coulisse, les changements sont nombreux et de nouvelles offres se préparent.

Le 30 avril dernier, le tribunal de Commerce de Paris faisait son choix : HubiC, la société portée par Octave Klaba et son frère, soutenus dans leur investissement par OVHcloud, était désignée comme repreneur de Blade. Elle en récupère une partie des actifs, la société actuelle devant être liquidée, ainsi que sa filiale américaine. 

Comme nous l'évoquions alors, le tribunal a fait ce choix en raison du prix supérieur proposé, mais aussi de l'impact social moindre et la « constance dans son implication et son engagement depuis le début de l'appel d'offre ». Le projet avait également reçu l'avis favorable de l'administrateur judiciaire et du dirigeant, mais pas les représentants des salariés qui lui avaient préféré l'offre portée par quelques employés et Scaleway, financée par Xavier Niel.

C'est Eric Sèle qui dirige HubiC, dont Shadow est désormais l'un des services. Mais en pratique, Octave Klaba s'active pour dérouler le plan qu'il a prévu pour l'offre de PC dans le cloud. Après la reprise, les défis restaient nombreux : mobiliser les salariés encore présents, prendre les premières décisions pour limiter les pertes, finaliser l'accord avec 2CRSi, préparer de nouvelles offres... le tout en maintenant le service pour le plus grand nombre.

L'objectif affiché était alors de « mettre les choses en œuvre et planifier ce que sera Shadow d’ici 10, 20 ans ». Un peu moins de trois semaines plus tard, les grandes lignes se dessinent.

Octave Klaba aux manettes et à la comm'

Le premier changement visible depuis l'extérieur est la communication de Shadow. Elle était principalement communautaire, passant par le serveur Discord, une émission Twitch régulière où l'on retrouvait certains employés. Depuis la reprise, c'est l'actionnaire Octave Klaba qui fait les annonces depuis son compte Twitter personnel.

Une façon de faire qui n'étonne pas vraiment, puisqu'il a toujours procédé ainsi. Mais elle change les habitudes d'une communauté qui n'avait sans doute pas besoin d'être bousculée si rapidement. D'autant que les questions posées dans le canal Discord créé suite à la reprise sont toujours sans réponses concrètes.

En interne, Klaba et Sèle se partagent les rôles, mais certains ont peu apprécié les débuts un peu abrupts de cette communication publique qui n'était pas toujours précédée d'annonces auprès des équipes. De quoi leur faire revivre la période où Emmanuel Freund annonçait régulièrement des dates et des projets (intenables) alors que tout n'était pas finalisé, ce qui ne reste pas dans les mémoires comme la meilleure période de Blade.

Peu à peu, chacun semble néanmoins trouver sa place et Klaba prend ses aises dans son nouveau bureau, guitare à la main. Un Shadow News devrait sans doute être organisé sous peu pour « reprendre contact ». On note tout de même que le nouvel organigramme ne comporte pas de personne en charge de la communication, notamment auprès de la presse. La personne qui nous répondait (ou pas) jusqu'à lors nous a annoncé son départ peu avant la fin de la procédure de reprise et n'a pas été remplacée. Un problème qu'il faudra sans doute régler.

Nous avons donc posé nos questions directement à Octave Klaba, qui ne nous a pas répondu pour le moment.

Du mouvement dans les équipes, qui doivent évoluer

Le projet de reprise par HubiC ne comportait aucun licenciement ferme, si ce n'est celui de Jean-Baptiste Kempf qui avait porté le projet concurrent et officiait comme directeur technique. Mais plusieurs employés sont partis sans attendre la fin de la procédure. Il nous a été confirmé que d'autres ont depuis décidé de partir.

Certains ont espéré initier une rupture conventionnelle, qui semblent refusées. Nous n'avons pour le moment pas pu obtenir de décompte du nombre d'employés restant. La question des 15 % du capital (maximum) pouvant leur être proposés, et sa répartition, n'a apparemment pas non plus été évoquée.

Dès les premiers jours, Klaba a présenté les choses de manière assez directe, rappelant aux équipes qu'ils travaillent désormais pour HubiC dont Shadow est l'une des composantes. Elles peuvent donc être mobilisées pour ses différents services, la conception de son site, etc.

Les personnes en charge de l'infrastructure, qui est externalisée chez OVHcloud, se sont vu proposer de rejoindre un pôle R&D chez l'hébergeur, ce qui n'a pas vraiment été du goût de tout le monde. David Chanial, qui était en charge de ces sujets au sein de Blade, devient pour sa part directeur du partenariat avec OVHcloud. Il devrait être secondé d'un responsable Infrastructure et datacenter (en recrutement).

Un nouvel organigramme et un actionnaire-CTO

Klaba semble bien être conscient qu'il va manquer de forces vives et a déjà annoncé que 20 à 30 embauches étaient prévues, sans avoir pour le moment publié de liste de postes. Une chose est sûre, cela ne peut pas être pour celui de CTO, puisque Kempf doit avoir priorité 24 mois. Aucun profil n'ayant convenu en interne, c'est finalement Octave Klaba qui a été nommé à ce poste par Eric Sèle (lui-même choisi par Octave Klaba). 

Stéphane Héliot, co-fondateur de Blade qui a dirigé l'entreprise ces derniers mois est désormais directeur général délégué et secrétaire général. Au final, le comité de direction compte une dizaine de membres, dont les directeurs en charge de la gestion financière, des RH ou du support. On retrouve également Bruno Pennes qui s'occupe des nouveaux business et Yannis Weinbach qui avait participé au dossier de reprise par les employés et Scaleway avec Jean-Baptiste Kempf. Il est désormais en charge de l'offre grand public.

Le rattachement exact des équipes aux différentes directions était encore à définir aux dernières nouvelles. Des réunions s'organisant pour définir les périmètres et s'assurer d'un fonctionnement efficace. 

Accord signé avec 2CRSi, fin des nouvelles offres aux USA

L'une des premières décisions qui a été prise et rapidement annoncée est la fin des nouvelles offres (Ultra et Infinite) à l'étranger. La raison est simple : HubiC et 2CRSi se sont mis d'accord pour que le premier reprenne les serveurs qui étaient en bonne partie payés, ceux de l'offre Boost. Le second récupère tous les contrats antérieurs.

Les clients concernés se sont vu proposer de repasser sur une offre Boost ou de suspendre leur abonnement. Cela ne concerne bien entendu pas les (rares) clients européens ayant eu accès à Ultra/Infinite puisque cela passait par les serveurs d'OVHcloud, dans le cadre du partenariat acté entre les deux sociétés fin 2019. 

Dans un communiqué, 2CRSi précise les modalités de l'accord et dit céder à HubiC « ses droits sur les matériels fournis à Blade SAS ou Blade Global Corp au titre de l’ensemble des contrats antérieurs au 31 décembre 2019 en contrepartie d’un versement en numéraire d’un montant de 10,5 M€ hors taxes », une somme qui serait « en ligne avec les attentes du Groupe ». Un contrat désormais « signé et payé » indique Klaba.

De son côté, HubiC s’engage à « faciliter la restitution des matériels restants, issus des contrats de 2020, et dont la plus grande partie se situe aux États-Unis. À  titre d’information, la valeur historique de commande des matériels faisant l’objet d’une restitution est de 19,5 M$ (soit environ 16,2 M€) ». Des serveurs qui ont une valeur d'autant plus importante qu'ils contiennent des GPU, très demandés actuellement sur le marché.

D'autant que 2CRSi est partenaire de sociétés spécialisées dans les cryptomonnaies. Il s'agit donc d'une bonne nouvelle pour l'entreprise, qui a depuis été sélectionnée pour recevoir une subvention de 800 000 euros dans le cadre du plan de relance pour l’industrie. Elle vient également d'annoncer la création d'un campus technologique et un datacenter « vert », mais à Rouses Point, dans l’État de New York.

Des nouvelles offres avec (v)GPU

Ce n'est une surprise pour personne, d'autant que cela avait été annoncé dans le cadre des offres de reprise : les tarifs de Shadow vont augmenter. De combien ? Cela ne semble pas décidé pour le moment. Aux dernières nouvelles il était question de 25 à 30 euros par mois pour la nouvelle offre, plutôt dans la tranche haute.

Mais la première question à laquelle l'équipe d'HubiC devra répondre est de savoir si une hausse est prévue à court terme pour les dizaines de milliers de clients de Shadow Boost, actuellement facturés entre 13 et 15 euros par mois (selon l'engagement). Un choix qui aurait l'avantage de faire rentrer plus d'argent dans les caisses de la société.

Pour la suite, les configurations définitives ne sont pas encore arrêtées, même s'il semble acté que les cartes graphiques seront toujours des modèles RTX professionnels de NVIDIA (Ampere). Côté CPU, il ne nous a pas été confirmé s'il s'agirait d'une solution AMD ou Intel. La première semble la plus logique pour des raisons de coût et de densité, mais de nombreux autres facteurs peuvent entrer en considération et modifier le choix final. 

Une décision semble déjà prise : la carte graphique dédiée pour tous les clients, c'est fini. Désormais, elle pourra être virtualisée afin de réduire les coûts, pour s'adresser à différentes catégories de joueurs. L'offre haut de gamme viserait néanmoins le 4K à 60 ips, avec subsampling 4:4:4 sans que l'on sache dans quelles conditions : jeux, qualité graphique, avec ou sans des technologies telles que le ray tracing et/ou DLSS d'activées, etc.

Mais diviser par exemple des RTX A5000 ou RTX A6000 qui sont des équivalents de GeForce RTX 3080/3090 en 2, 4 ou 6, n'est pas vraiment la même chose. Et même si cette nouvelle génération facilite un tel découpage avec la fonctionnalité Multi Instances GPU (MIG), ce n'est pas anodin en termes de performances.

L'arrivée de la virtualisation du GPU, qui va à l'encontre de la promesse originelle de Shadow et de son ADN, ne devrait pas plaire aux fans de la première heure. Mais l'important sera de savoir si, pour un prix supérieur, on aura droit à une version RTX d'un équivalent de la GeForce GTX 1080 proposée jusqu'à lors, ou à des performances supérieures/inférieures. La réaction des clients sera très différente selon les choix opérés et la manière de les mettre en place. Il faudra aussi veiller à ne pas faire de promesses qui ne seront pas tenues côté performances.

Shadow x HubiC : une évolution en plusieurs étapes

Concernant la stratégie plus générale, Klaba a indiqué que la première priorité était de continuer à proposer du cloud computing (Desktop-as-a-Service), mais avec une offre inférieure et une supérieure puis d'enrichir cela de services : réseau privé, NAS, plusieurs points géographiques, KVM, etc. 

L'équipe travaillera ensuite à proposer le streaming d'applications particulières plutôt qu'un OS complet, à la manière de ce qui est fait dans le cloud gaming, mais avec une approche bureautique et professionnelle. Enfin, la solution devra pouvoir être proposée sous la forme de licence à des tiers, pour une intégration à leur écosystème.

Si les annonces pourraient se faire rapidement, il faudra sans doute encore attendre des mois pour qu'une nouvelle offre soit accessible. Car une fois les configurations et le modèle économique arrêtés, il faudra commander le matériel, le mettre en place dans les datacenters, vérifier que tout est fonctionnel, préparer le lancement marketing et commercial. Autant d'étapes qui prennent du temps. Rien avant la fin de l'année ? Impossible à dire.

Quid du minage ?

Une autre question reste en suspend : celle du minage de crypto-monnaies. Au fil de notre enquête sur Blade, il nous a été régulièrement confirmé, par de nombreux interlocuteurs, qu'un projet de minage sur les serveurs inutilisés de Shadow avait été lancé. De quoi rapporter à l'entreprise plusieurs millions d'euros selon nos estimations, surtout dans la période de l'explosion des cours depuis la fin de l'année dernière. 

Est-ce que cela est toujours d'actualité ? Il semblerait. Est-ce qu'il s'agit d'une partie intégrante du business model tel qu'il est développé par Octave Klaba ? Également interrogé sur le sujet, il n'a pour le moment pas répondu à nos questions. Nous mettrons bien entendu à jour cet article s'il venait à nous apporter des réponses.


Mise à jour du 10 juin 2021 :

Suite à notre article HubiC a commandé un audit sur la question du minage, dont le résultat a été publié par Octave Klaba sur son compte Twitter, faisant étant de 1,6 millions d'euros reversé aux procédure de redressement.

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