Facebook devra répondre demain d’atteinte à la présomption d’innocence devant la justice française, comme le révèle aujourd’hui La Dépêche. En cause : une utilisatrice du réseau social, accusée d’avoir violé ce principe via une page Facebook. L’intéressée est elle aussi assignée, de même que le site de pétitions en ligne Change.org.
Le 8 avril 2011, Céline T. décède tragiquement au cours d'une intervention chirurgicale réalisée en vue de lui permettre d'avoir un enfant. Comme le rapporte La Dépêche, « le rapport d'autopsie a confirmé que, au cours de la cœlioscopie pratiquée par l'obstétricien à l'hôpital du Pays d'autan [à Castres, ndlr], une artère avait été accidentellement sectionnée ce qui a entraîné son décès ». Depuis, le praticien concerné a été mis en examen pour homicide involontaire.
Sauf qu’au mois de novembre, ce dernier a obtenu l'autorisation de s'installer à nouveau à Castres, sans toutefois continuer à pratiquer la chirurgie obstétrique. Eliette B., amie du compagnon de la victime, juge alors cette décision « intolérable ». Elle décide d’ouvrir une page Facebook, intitulée « Tous avec Laurent pour Céline ». Visant à soutenir les proches de la victime, cette page va rapidement conduire certains utilisateurs du célèbre réseau social à laisser de nombreux commentaires, à commencer par Eliette B. elle-même. Selon cette dernière, la page comptabilisait plus de 13 000 membres.
Le 28 novembre, Eliette B. décide de continuer sa campagne. Elle lance en parrallèle à sa page Facebook une pétition en ligne depuis le site « change.org », réclamant alors la fermeture du cabinet du praticien.
Le juge des référés statuera demain
Problème : le médecin, qui est toujours présumé innocent - étant donné que la justice n’a pas encore statué sur son sort, a décidé de se retourner contre Eliette B.. Accusée d'avoir porté atteinte à la présomtion d'innocence, cette dernière est ainsi assignée devant le juge des référés de la 17ème chambre du tribunal de grande instance de Paris. Elle comparaîtra demain aux côtés de Facebook et de Change.org, qui ont hébergé ses propos.
Les poursuites engagées par le praticien visaient tout d’abord à obtenir le retrait des pages en question, qui a déjà été effectué. Dans un second temps, il réclamait que ces pages soient remplacées par un communiqué indiquant que la pétition, les messages de soutien et commentaires étaient constitutifs d'une violation du droit au respect de la présomption d'innocence auquel il pouvait prétendre. Il a d’ailleurs demandé au juge d’assortir cette sommation d’une astreinte financière conséquente.
Rappelons qu’en vertu de l’article 9-1 du Code civil, « Chacun a droit au respect de la présomption d'innocence. Lorsqu'une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme étant coupable de faits faisant l'objet d'une enquête ou d'une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé (...) prescrire toutes mesures, telles que l'insertion d'une rectification ou la diffusion d'un communiqué, aux fins de faire cesser l'atteinte à la présomption d'innocence ». Toutefois, Facebook et Change.org pourraient bénéficier de la protection accordée par leur statut d'hébergeur, à savoir qu'ils ne sont responsables des contenus qu’ils stockent que dans la mesure où après avoir eu connaissance dans les formes que ceux-ci étaient illicites, ils n’ont pas agi promptement pour les retirer ou en rendre l'accès impossible.