La Hadopi vient de lever le voile sur une batterie de résultats statistiques qu’elle a fait réaliser l’année dernière. Selon les conclusions présentées par la Rue du Texel, la consommation illicite de produits culturels en ligne (films, musique, jeux vidéo...) aurait sensiblement diminué en un an - de l'ordre de cinq points. Il s’avère néanmoins que les dépenses effectuées sur Internet par les personnes affirmant qu’elles s’adonnent à des pratiques contraires à la loi sont les mêmes que celles prétendant le contraire.
La Hadopi a publié aujourd'hui les résultats d’une enquête qu’elle avait commandée notamment auprès de l’IFOP, et qui s’intitule « Hadopi, biens culturels et usages d’Internet : pratiques et perceptions des internautes français ». Entre le 28 septembre et le 11 octobre 2012, le célèbre institut de sondage a ainsi interrogé plus de 1 500 personnes, avant de proposer les résultats de cette étude déclarative, qui se base donc sur les « perceptions » des sondés - et non pas forcément sur la réalité. Notons par ailleurs qu’il s’agit de la seconde vague de ce baromètre, dont la dernière publication remonte à il y a quasiment deux ans jour pour jour. Cette étude est disponible en PDF :
Sécurisation de l’accès à Internet
La Rue du Texel, qui sanctionne via le dispositif de riposte graduée le défaut de sécurisation de l’accès à Internet, semble se féliciter que les internautes français soient « bien sensibilisés à la nécessité de protéger » leur connexion. Sur l’ensemble des individus interrogés, 83 % se sont en effet dits conscients de cette obligation imposée par le législateur. Fait intéressant : les sondés déclarant avoir des usages illicites sur Internet sont plus nombreux à le reconnaître que ceux dont les pratiques sont déclarées comme étant licites.
Un panier de consommation identique pour les internautes aux usages licites et illicites
La crise serait-elle passée par là ? Selon les résultats de l’étude, le montant moyen des dépenses de biens culturels sur Internet « diminue nettement par rapport à la vague de décembre 2011, passant de 30 € à 21 € (en déclaratif) ». Quoi qu’il en soit, le panier mensuel de produits ou de services culturels dématérialisés est le même pour tous (21 euros), tant pour ceux déclarant un usage licite qu’illicite.
Lorsque l’on regarde le détail des montants dépensés pour des produits culturels en ligne, nous sommes une fois de plus frappés par le faible écart entre les internautes aux usages déclarés comme licites et illicites. On distingue par exemple une égalité parfaite dans la catégorie de ceux qui dépensent 100 euros et plus par mois, et l’on s’en approche pour les « aucune dépense » et les « 50 à 99 euros » mensuels.
Une baisse de 5 points des usages illicites en un an
« Depuis décembre 2011, on constate une baisse sensible de la proportion d’internautes déclarant consommer des biens culturels en ligne de façon illicite, leur proportion passant de 20 % en décembre 2011 à 15 % en octobre 2012» relève l’étude. Les jeunes (15-24 ans) tiennent par ailleurs la tête du classement en matière de consommation illicite déclarée (34 % contre 22 % en moyenne), contrairement aux 40 ans et plus, qui attestent à 89 % que leurs usages sont exclusivement légaux.
N’est-ce qu’une question d’argent ?
À la question « Pour quelle(s) raison(s) ne consommez-vous pas aujourd’hui de la musique, des vidéos, des jeux vidéo, des livres, des séries TV, des photos ou des logiciels de façon licite ? », les sondés ont tout d’abord indiqué à 75 % qu’il s’agissait d’un problème de prix, les produits en question étant jugés trop chers. Viennent ensuite les problèmes liés à l’offre, selon 57 % des personnes interrogées pas assez de choix serait disponible. 46 % affirment en outre qu’ils préfèrent accéder illégalement à certains contenus par habitude. Autrement dit, ces usages de consommation gratuite, mais illicite seraient entrés dans les mœurs de ces individus.
Typologie des internautes
Enfin, l’étude présentée par la Hadopi a regroupé les sondés dans cinq catégories :
- Les non-consommateurs de produits culturels sur Internet. Représentant 33 % de l’échantillon total, cette population serait selon l’étude « plus âgée, plus féminine et plus rurale que la moyenne ». Ces individus ne se sentiraient pas concernés par les problématiques relatives aux consommations licites ou illicites.
- Les pragmatiques. Ils s’inscrivent dans la moyenne tout en se démarquant par une consommation exclusivement licite des logiciels et par davantage de consommation exclusivement illicite de musique et de séries TV. Ils représentent 22 % de l’échantillon total. Cette population se situe « dans la moyenne d’âge des internautes », et comprend notamment des CSP+, tels que les cadres.
- Les passionnés attentifs, qui sont des utilisateurs plus fréquents d’Internet et plus équipés en matériel high-tech que la moyenne. Ils représentent eux aussi 22 % de l’échantillon total. Constituant une population « un peu plus jeune et plus masculine que la moyenne », ce sont ceux qui dépensent le plus pour des produits culturels sur Internet.
- Les « numérivores ». S’ils sont de grands utilisateurs de l’internet et des nouvelles technologies, ce sont en revanche ceux qui dépensent le moins. Cette population est d’autre part « nettement plus jeune (notamment une part importante des 15-24 ans), plus urbaine et plus masculine que la moyenne ». Ils représentent 16 % des sondés. Notons néanmoins qu’ils sont « plus enclins que la moyenne à consommer de manière licite afin d’obtenir un produit conforme à leur attente et de meilleure qualité, offrant des garantie de sécurité (absence de virus) à condition que le contenu leur plaise vraiment ».
- Les culturels légaux. Malgré une utilisation d’Internet « dans la moyenne », il s’avère qu’ils sont peu équipés en matériel High Tech, sauf en ce qui concerne les livres électroniques. Représentant 7 % de l’échantillon total, c’est une population « plus âgée que la moyenne » qui consomme « nettement plus que la moyenne les produits de façon licite ».
Enfin, on notera l’absence de questions relatives à la perception de la Hadopi en elle même, et plus particulièrement du dispositif de risposte graduée, qui étaient pourtant présentes lors de la précédente étude. Près de la moitié des internautes déclarant des usages illicites indiquaient ainsi que l’Hadopi ne changerait pas leur comportement (voir notre actualité).