Un rapport, rendu public ce 15 juin par l’ONG bruxelloise EU DisinfoLab, révèle une partie de la stratégie de désinformation russe en France. Un site internet, que d’apparence rien ne lie à la Russie, utilise comme caisse de résonance plusieurs « médias alternatifs » pour diffuser un narratif pro-Kremlin. Enquête entre Paris et Moscou.
« Vous travaillez sur la désinformation russe ? Eh bien bon courage ! ». Lorsqu’un membre des services de renseignement français nous a tenu ce discours, nous n’y avons vu qu’une manière polie de décliner une interview. On ne pensait pas qu’il fallait prendre cette affirmation au pied de la lettre. Mais travailler sur ce dossier n'a pas été de tout repos.
D’abord en raison de l’opacité générale qui entoure le sujet et de ce que cela implique. Beaucoup ont cru voir, par le passé, la main de Moscou derrière des individus qui n’étaient que des « idiots utiles », dont les convictions convergeaient avec les narratifs diffusés par le Kremlin sur les grands dossiers internationaux.
Ainsi, entre ceux qui voient des Russes partout et ceux qui n’en voient nulle part, il est parfois difficile de s’y retrouver. Lorsque l’ONG bruxelloise EU DisinfoLab nous a contactés pour nous confier le résultat de ses recherches, nous savions donc que nous empruntions un terrain miné.
Ces résultats tiennent dans un rapport de 60 pages. « Et encore, il aurait pu être bien plus gros que cela. Si nous n’avions que le soupçon d’un doute sur une information, nous ne l'intégrions pas », nous confie Alexandre Alaphilippe, patron de l’ONG spécialisée sur l’étude de la désinformation.
« Alors qu’on étudiait la désinformation autour de la pandémie de Covid-19, nous sommes tombés sur un site internet qui publiait de fausses informations, « Observateur Continental ». C’était un peu le fil qui dépassait de la pelote de laine ». En tirant dessus, c’est alors tout un réseau de désinformation que l’ONG découvre. Tentaculaire, opaque, qui entretient des liens avec l’État russe et utilise les médias « alternatifs » français pour décupler son audience.
L’EU DisinfoLab n’en est pas à son coup d’essai. Avant cela, elle a mis au jour plusieurs réseaux de désinformation à travers le monde, dont un qui visait directement à partager le narratif du gouvernement indien, notamment sur les événements au Cachemire, auprès des institutions européennes.
Revers de la médaille, à chaque rapport, les insultes et les menaces fusent sur les réseaux sociaux. Peu de chances que ce soit différent ici. « Nous avons été accusés de travailler pour l’OTAN, les Polonais, l’Union européenne, le Mossad, le Pakistan ou encore l’association de défense des consommateurs espagnols… », souffle, dépité, Alexandre Alaphilippe.
Pas une, mais des désinformations russes
La plupart des chercheurs travaillant sur la désinformation venue de Russie considèrent que le Kremlin cherche à affaiblir les pays occidentaux en y semant une sorte de zizanie à l’intérieur des États et au sein de leurs alliances, en appuyant sur les divisions préexistantes et en instaurant la confusion, tout en mettant en valeur la Russie et ses positions sur les grands dossiers internationaux. Le but : orienter l’opinion publique dans un sens plus favorable aux intérêts du Kremlin.
Dans un rapport publié en 2018 sur « Les manipulations de l'information », le Centre d'Analyse de Prévision et de stratégie (CAPS) revenait en 214 pages avec l'Institut de Recherche Stratégique de l'École Militaire (IRSEM) sur les acteurs, causes et moyens mis en œuvre, en partie par des États, notamment la Russie.
« Ce n’est pas faire preuve de « russophobie » que de constater que toutes les ingérences récentes dans des référendums (Pays-Bas, Brexit, Catalogne) et des élections (États-Unis, France, Allemagne) sont liées, de près ou de loin, à la Russie. Nos interlocuteurs dans les instances européennes attribuent 80 % des efforts d’influence en Europe à la Russie, le reste provenant d’autres États (principalement la Chine et l’Iran) et d’acteurs non étatiques (groupes djihadistes, en particulier Daech) » pouvait-on y lire. Une stratégie mise en œuvre dès la précédente campagne présidentielle.
« Une analyse indépendante des 800 sites les plus visités durant la campagne et de près de 8 millions de liens partagés entre novembre 2016 et avril 2017 « n’a identifié d’influence étrangère qu’en provenance de Russie. Aucune autre source étrangère d’influence n’a été détectée ». De nombreux théoriciens ou officiels russes ont d’ailleurs mis en avant l’utilisation de l’information à des fins d’intimidation et de déstabilisation politiques, avec une recherche d’objectifs stratégiques ».
Quitte à diffuser des narratifs qui se contredisent entre eux : sur la tentative d’assassinat de Sergueï Skripal à Salisbury (Royaume-Uni), attribuée au GRU, RT et Sputnik ont proposé au moins quinze théories mutuellement incompatibles. « Rien n’est vrai, tout est possible », résume le journaliste Peter Pomerantsev.
« Cette désinformation est une menace pour la France et pour l’Europe car elle vise à semer, voire cultiver la discorde et la peur au sein de nos sociétés et aussi entre pays occidentaux alliés » explique Cécile Vaissié, professeure des universités en études russes et soviétiques à l’Université Rennes-II et autrice des Réseaux du Kremlin en France (Les Petits Matins, 2016).
« C’est une arme de déconstruction démocratique massive », nous explique Bruno Studer, député LREM et rapporteur de la loi contre la manipulation de l'information. Une vraie menace, bien difficile à contrer car « quand vous essayez de légiférer, on vous accuse immédiatement de chercher à réduire la liberté d’expression, on évolue là sur une ligne de crête », explique-t-il, bien conscient que « les puissances étrangères exploitent les particularités des systèmes démocratiques à leur avantage ».
Mais dans le cadre de la guerre de l’information menée par la Russie, il faut distinguer la stratégie d’influence – publique, visible, notamment à travers des médias comme RT et Sputnik – de celle qui ne l’est pas.
Dans cette dernière, on compte une multitude d’acteurs, plus ou moins liés aux autorités russes, et des réseaux plus ou moins grands et plus ou moins « autonomes ». Une distinction importante, car de la désinformation « autonome » a déjà été attribuée à tort à Vladimir Poutine par des médias occidentaux.
Poupées russes
Vous n’avez probablement jamais entendu parler d’Observateur Continental et c’est normal. Avec 11 771 abonnés sur Facebook, l’audience native de ce site se présentant comme une « plateforme dédiée aux chroniqueurs et analystes du monde » est plutôt anecdotique. Mais les consommateurs de médias dits « alternatifs », ont probablement été exposés à leurs contenus, sans forcément le savoir.
Dans le cadre de l’épidémie de Covid-19, le site a notamment publié une interview de l’ancien professeur de droit international Francis Boyle qui explique que c'est « une arme biologique parfaite » qui serait « sortie tout droit des laboratoires américains ». Une théorie complotiste que l’on retrouve aussi dans une vidéo disséquée par Le Monde.
La plateforme héberge des contenus à tonalité complotiste et d’autres s’alignant sur le narratif poussé par le Kremlin sur plusieurs dossiers internationaux, quand ils ne sont pas strictement à la gloire de Vladimir Poutine, comme dans cet article comparant l’alimentation et l’hygiène de vie de plusieurs chefs d’État.
Parmi ses contributeurs, on retrouve Olivier Renault et Mikhaïl Gamandiy-Egorov qui ont tous deux travaillé pour La Voix de la Russie, devenu entre-temps Sputnik France. Ils apparaissent également comme auteurs sur un certain nombre de médias « alternatifs ». Toutefois, afficher les mêmes idées que le Kremlin ne démontre pas nécessairement de liens avec celui-ci.
Publiquement, rien ne semble lier Observateur Continental à la Russie. Dans la rubrique « qui sommes-nous » du site web, celui-ci explique que « ce portail a pour objectif principal de fournir à ses lecteurs francophones les informations pertinentes sur les activités de l'OCS (Organisation de coopération de Shanghai), du groupe des BRICS (union politique et économique de 5 pays: Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) et du grand partenariat eurasien entre l'Union économique eurasiatique (UEEA) et d'autres pays, dont l'Inde, l'Iran, le Pakistan et les pays membres de la CEI et même de l'UE ».
Mais grâce à différentes techniques d’OSINT (open source intelligence), reposant sur des données disponibles en sources ouvertes sur internet et des outils en ligne, l’ONG bruxelloise a découvert des liens plus évidents entre Observateur Continental et la Russie ; trois éléments viennent en attester.
Le premier provient d’une simple analyse Whois du site. Elle a fait ressortir plusieurs informations, notamment le contact technique présentant une adresse mail terminant par « @inforos.ru » ainsi qu’une adresse basée à Moscou (nous y reviendrons). Sur son site internet, Inforos se présente comme une agence de presse russe.
Le deuxième élément, lui, a été obtenu en cherchant directement dans le code source du site web. Un élément distinctif en a été extrait et recherché sur un moteur de recherche dédié. Il en résulte que ce bout de code apparaît dans 243 sites web, presque tous enregistrés en Russie et en langue russe à l’exception de deux : Observateur Continental et le « think Tank et média indépendant » OneWorld.
Dernier élément, l’analyse de l’index du site fait apparaître un dossier au nom peu commun « gazetastar ». Nom de dossier que l’on retrouve à l’identique sur le site web de OneWorld. Enfin, il arrive que le site web se trahisse lui-même en affichant directement des messages d’erreur… en russe.
Derrière Observateur Continental, une agence d’information en affaires avec le Kremlin
InfoRos se présente comme une agence d’information et gère de nombreux sites web : ceux de médias locaux russes, mais aussi des plus militants, comme South Ossetia - cronicle of genocide.
Selon le Freeman Stogli Institute for International Relations at Stanford (FSI Stanford) InfoRos aurait participé à une opération d’influence du Kremlin, identifiée comme telle par Facebook, visant à « soutenir et défendre les récits pro-russes et pro-soviétiques de la guerre » à l'approche du 70e anniversaire de la victoire des Alliés en 1945.
InfoRos est également liée à l’État Russe par plusieurs contrats : « un contrat attribué par le ministère russe des Affaires étrangères pour développer et gérer un site Web sur un thème d'intérêt pour l'État russe ; un contrat attribué par le think tank InterAffairs [lié au ministère russe des Affaires étrangères, ndlr] pour organiser une conférence internationale sur la cybersécurité en Allemagne; un contrat attribué par le gouvernement local de Moscou pour la maintenance de sites Web et mener des sondages d'opinion », détaille EU DisinfoLab.
L’entreprise avait déjà attiré l’attention du Washington Post dans un article datant de 2018. Sur la base de sources appartenant aux services de renseignement occidentaux, le journal lie InfoRos au GRU, et plus exactement à l'unité 54777, ou 72nd Special Service Center, dédié à la guerre psychologique et aux opérations d'influence en Europe et en Ukraine.
Une attribution que vient tempérer un membre des services de renseignement français. « C’est le genre de sujet avec lequel il faut rester très prudent dans les attributions. Les gens imaginent que les services de renseignement russe sont un bloc monolithique avec Poutine au sommet. Ce n’est pas le cas. Dans tout ce réseau, il ne serait pas surprenant qu’il y ait beaucoup “d’idiots utiles” qui ne se rendent même pas compte de ce qu’ils publient ou répercutent sur leur page Facebook », nous prévient-il.
Une analyse que vient corroborer Emerson T. Brooking, chercheur résident au DFRLab de l’Atlantic Council, une structure qui étudie la désinformation :
« Après 2016, la stratégie de désinformation russe s’oriente maintenant vers des réseaux plus petits, où il est très difficile de faire émerger la preuve d’une coordination centrale. Ils font plus d’efforts pour se camoufler et les attributions directes deviennent presque impossibles. Observateur Continental est clairement la démonstration de cette tendance».
Pour le chercheur, il est néanmoins certain que « sans le travail de EU DisinfoLab, les liens avec Inforos seraient restés sous le radar ». Selon Kevin Limonier, maître de conférences en études slaves à l’Institut Français de Géopolitique (Université Paris 8), « On a une galaxie d'acteurs qui sont des entrepreneurs d'influence, qui vont monter [dans leur coin] des opérations informationnelles (...) mais de mémoire de chercheur on n'avait pas encore vu quelque chose comme ça en France. S'agit-il d'une initiative isolée ou de quelque chose de décidé plus en amont, [c’est difficile à dire] ».
Il invite lui aussi à la prudence sur l’attribution.
Bons baisers de Moscou
Afin d’en savoir plus, nous nous sommes rendus à Moscou, à l’adresse mentionnée dans le rapport de l’ONG, rue Krzhizhanovskogo dans le sud de la capitale russe. Sur internet, les registres d'enregistrement des sociétés indiquent que l'agence de presse InfoRos est enregistrée à la même adresse que la fondation Rousskii Mir (Le monde Russe) ; créée en 2007 par Vladimir Poutine. Son rôle officiel est de promouvoir la culture russe et l’enseignement de la langue russe dans le monde ; c’est aussi un relais d’influence du Kremlin.
« Tout l'immeuble appartient à Rousskii Mir », nous a confié un agent d'entretien du quartier, « la fondation loue ses bureaux à des entreprises ». L'immeuble en pierres rouges est composé d'un bâtiment principal et de deux ailes. L'une d'elles est occupée par une représentation régionale du ministère de la Justice, l'autre par plusieurs petites entreprises, un cabinet de juristes, un centre bouddhiste et un dentiste.
Si les trois ailes sont physiquement reliées, nous avons pu constater que la partie occupée par la fondation « Rouskii mir » est isolée, accessible seulement par l'entrée principale gardée par un agent de sécurité.
Le gardien nous a confirmé la présence de représentants d'InfoRos au sein du bâtiment. « InfoRos ? Oui, ils sont bien ici, ils sont assis là-bas », nous a-t-il lancé, désignant des bureaux situés à sa droite, au rez-de-chaussée de l'immeuble. Impossible pour autant d’accéder à la rédaction. La présence de représentants d'InfoRos dans ces bureaux nous a cependant été confirmée par une autre personne rencontrée à la sortie de l'établissement.
Contrairement aux autres accès qui indiquent par des plaques la présence des sociétés enregistrées à cette adresse, l'entrée principale n'indique que les bureaux de la fondation Rousskii Mir et la présence d'une cantine située dans le sous-sol du bâtiment. Mais qui est à la tête d’InfoRos ? C’est là que les pistes se brouillent.
Car il semblerait qu’il n’y ait pas une, mais deux sociétés Inforos aux noms presque identiques et que seul un guillemet déplacé distingue. On trouve à leur sommet un chef d’entreprise de Saint-Pétersbourg qui vend du « matériel de protection » au ministère de la Santé russe et une société « OCS business club », club d'affaires lié à l'OCS.
À lui seul (en son nom et au nom de deux femmes qui semblent y travailler), le business club semble détenir les deux tiers des parts d’Inforos. À la tête de celui-ci, on pense retrouver l'ancien militaire cité dans l’article du Washington Post, soupçonné par le journal de travailler pour le GRU. On retrouve au passage l'ancien militaire dans les petits papiers d'une autre société d'édition, elle aussi enregistrée dans l'immeuble aux briques rouges.
C’est un ancien officier de l'armée russe, devenu chercheur dans la prestigieuse université Mgimo, qui dirige cette autre société. Contacté, Inforos a accepté de répondre à nos questions par mail ce matin à 8h48. Nous mettrons à jour l'article dès que nous aurons leurs réponses.
Petite infox deviendra grande
Mais pourquoi se donner tant de mal pour un « média » dont l'impact semble si faible ? En réalité, si Observateur Continental ne bénéficie que d’une audience très limitée sur sa page Facebook, il mise sur d’autres pages bien connues pour faire caisse de résonance en reprenant ses publications.
Parmi ces acteurs amplificateurs, le rapport de l’ONG pointe des « médias alternatifs » comme AgoraVox (62 000 abonnés sur Facebook), Les Moutons Enragés (47 000 abonnés), Réseau international (156 000 abonnés et partenaire de OneWorld), Mondialisation.ca (24 000 abonnés) ainsi qu’Adoxa Info, qui a récemment fermé (11 000 abonnés à l’époque).
Sur le site participatif AgoraVox, une page opérant sous l’alias « Patrice Bravo » s’en est même fait une spécialité en republiant en masse les articles d’Observateur Continental depuis octobre 2019. Une démarche qui fait grincer des dents d’autres utilisateurs de la plateforme.
Contactée, « l’équipe d’Agoravox » nous explique que le média « est une plateforme d'hébergement qui offre gratuitement à ses rédacteurs inscrits la possibilité de publier des articles et/ou des vidéos. Il n'y a donc pas de comité de modération et un directeur de la publication ». Ils précisent n’avoir « aucune d'information » ou « contact particulier avec ce rédacteur » mais assurent que « si un article ou un commentaire contenant des éléments erronés ou des calomnies devait passer en ligne, nous le supprimons dans les plus brefs délais dès qu'il nous est signalé par mail ou via les formulaires prévus ».
Sur le site Les Moutons Enragés, on retrouve plus d’une cinquantaine d’articles d’Observateur Continental, dont plusieurs signés non pas par « Patrice Bravo », mais une certaine « Christine Bravo ». À la question d’un utilisateur qui s’étonne de cette apparente connexion entre les deux sites, une administratrice du nom de « Volti » répond que les répercussions sont faites « à la demande » du blog. Contactée par mail, elle n’a souhaité faire aucun commentaire.
Sur le site conspirationniste Mondialisation.ca, plus d’une quarantaine d’articles d’Observateur Continental ont été republiés. Contacté, il n’a pas donné suite à nos questions. Même son de cloche du côté de Réseau International (plus de 180 occurrences d’Observateur Continental) qui a déclaré refuser toutes les demandes d’interview. Chou blanc, donc.
Réseau international et le Center for Research on Globalization (qui gère les sites GlobalResearch.ca et Mondialisation.ca) font tous deux partie des sites partenaires de OneWorld. Contacté, le « think tank et média indépendant » nous a renvoyé à la longue réponse – une sorte de profession de foi relativement hors-sujet – que nous a transmise l’un de leurs journalistes, Andrew Korybko, et à un édito incendiaire publié sur leur site suite à une prise de contact de la BBC qui travaillait également sur le rapport publié par EU DisinfoLab.
Joint par téléphone, Grégory Roose, fondateur d’Adoxa Info – qu’il a aujourd’hui fermé « par manque de temps » – explique avoir été contacté par Olivier Renault, qui lui a proposé de republier des articles d’Observateur Continental. Il assure n’avoir sélectionné que les plus « factuels » et écarté ceux qui semblaient moins sourcés.
À l’évocation de la possibilité qu’il s’agisse de désinformation russe, il dit n’avoir « pas de problème » avec cela, dans la mesure où nous vivons une « guerre de l’information » et où les journalistes des « grands médias » ont eux-mêmes d’autres « allégeances ». Ces contenus sont aussi traduits, republiés sur des sites étrangers et dans le reste de l’Europe.
L'article d’Observateur Continental copié-collé par Agoravox est ainsi repris par la plateforme tchèque První Zprávy, le contenu est ensuite partagé sur des pages et groupes slovaques et tchèques. L'article original d'Observateur Continental est quant à lui relayé par plusieurs groupes Facebook italiens, dont des pro-Beppe Grillo.
Paris ne répond plus
Face à cette stratégie mise en place, quelle est la réponse de l’État français dans un contexte où Emmanuel Macron souhaite aller vers un apaisement des relations entre Paris et Moscou et appelle à « repenser le lien avec la Russie » ?
Sous couvert d’anonymat, une source au sein des services de renseignement tempête : « En interne, personne n’est d’accord et il y a de gros débats. Pourtant, ce n’est pas dans nos habitudes de remettre en question ce qui vient d’en haut ». Pour lui, la guerre de l’information ne tourne clairement pas à notre avantage.
« Il suffit de regarder la Serbie pendant la crise du Covid-19. Ils sont persuadés que la Chine et la Russie ont été de meilleurs partenaires que l’Union européenne alors que c’est cette dernière qui les a le plus aidés. On foire complètement, on a un vrai train de retard sur ces questions alors qu’eux sont très efficaces ».
Et sur l’idée du rapprochement avec Moscou ? « Évidemment qu’on comprend l’idée du président de la République, mais on leur donne beaucoup trop et ils en profitent clairement. »
Une affirmation qui fait bondir un proche conseiller de Macron à l’Élysée qui demande, lui aussi, à garder l’anonymat. « C’est faux. Croyez-moi qu’avec ces gens-là, ce n’est pas binaire. Nous ne sommes pas des lapins de six semaines. Le fait de vouloir normaliser nos relations ne nous fait absolument pas baisser la garde ».
« De toute façon, ceux qui râlent sont généralement de l’arrière-garde. Ces gens-là ne veulent entendre parler des Russes sous aucun prétexte, mais nous sommes fermes avec tout le monde », poursuit-il. Le conseiller l’assure, ce qui pourrait être pris pour de la permissivité n’est en fait qu’un calcul sur le plus long terme. « Ne pas attribuer ne veut pas dire ne pas savoir. »
« C’est vrai toutefois que nous avons un train de retard sur le sujet de la lutte contre la désinformation », finit-il toutefois par admettre en promettant quand même que « les choses bougent ».
Mais bougent-elles suffisamment vite ?