Le Soleil est notre étoile : il a permis l’apparition de la vie et représente 99,8 % de la masse du Système solaire. De nombreuses missions spatiales l’ont étudié de « près », faisant avancer nos connaissances, mais il reste des zones d’ombre sur son fonctionnement. À plus d’un titre, il influence votre vie quotidienne.
Dans l’immensité de l’Univers, notre Système solaire occupe une place bien particulière : il est – à notre connaissance – le seul système planétaire à abriter la vie de manière durable sur l’une de ses planètes, la Terre.
Si l’actualité spatiale récente se focalise sur la Lune et Mars, tout ne tourne pas autour de ces deux objets célestes. Au contraire, dans notre microcosme, c’est notre étoile – le Soleil – qui est au centre des attractions. Au travers d’une série d’articles, nous allons nous y pencher ainsi que sur les huit planètes – nous tricherons un peu avec la « déchue » Pluton, n’en déplaise à l'Union astronomique internationale – et les centaines d’autres objets célestes tournant autour de notre étoile.
Lire notre dossier sur le Système solaire :
- Le Soleil : élément central et « catalyseur » de la vie
- Mercure : une mystérieuse planète « sans équivalent »
- Vénus : une planète étrange, quasi-jumelle de la Terre, qui « a mal tourné »
- Terre : minuscule point dans l’Univers, seule planète à abriter la vie… jusqu’à preuve du contraire
- Mars : cousine de la Terre, objet de toutes les convoitises et de fantasmes
- Un détour par la ceinture d'astéroïdes et les lacunes de Kirkwood
- Jupiter : planète géante dépourvue de surface solide, protectrice du Système solaire
- Saturne et ses anneaux : « joyau » du Système solaire, surprenante à plus d’un titre
Une étoile si particulière… parmi des milliards de milliards
Commençons par replacer le Soleil dans l’Univers : il ne s’agit « que » d’une étoile sur les milliards de milliards qu'il compte. Il s’agit d’une naine jaune de taille moyenne ; il en existe des beaucoup plus grosses. L’étoile UY Scuti, 1 700 fois plus grande, est pour le moment première sur le podium. Dans notre Système solaire, elle s’étendrait au-delà de Saturne.
Autour du Soleil, tournent les huit planètes « quasiment sur un même plan, comme si elles étaient posées sur un disque », explique le CNES : Mercure, Vénus, Terre, Mars, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune. Un moyen mnémotechnique pour s’en souvenir : « Me Voici Tout Mouilllé J’ai Suivi Un Nuage » : chaque première lettre donne le début de la planète.
Les plus vieux ont peut-être appris « Mais Vieux Tonton Marcel, Je Suis Un Nouveau Pensionnaire », avec le « P » de Pluton, ou « Marie Viens Te Marier, Je Suis Un Nouveau Prétendant ».

« Au départ, il y avait un nuage immense »
Dans cette vidéo, le CNES revient sur la création de notre Système solaire : « Au départ, il y avait un nuage immense, fait de gaz et de poussières [connu sous le nom de nébuleuse solaire, ndlr] et puis Boum ! Il y a 4,6 milliards d’années, une étoile voisine explose. L’onde de choc est énorme. Le nuage se met en rotation et s’aplatit. Au centre, une sphère se forme ».
Vous devinez la suite : c’est l’embryon de notre étoile. C’est l’occasion de préciser que les étoiles n’ont pas été créées pendant le Big Bang, il y a près de 14 milliards d’années. « La température y atteint 14 millions de degrés, ce qui provoque des réactions nucléaires. La protoétoile s’allume, elle devient le Soleil. Les poussières du disque, elles, se modifient. Près du Soleil la température est infernale ! Là, des éléments rocheux se forment et, sous l’effet de la gravité, s’agglomèrent ».
Plus loin en revanche, la chanson est différente : des glaces d’eau et de méthane se condensent. Tous ces éléments se choquent et s’entremêlent afin de donner naissance, entre autres, aux planètes.
99,8 % de la masse totale du Système solaire
Si le Soleil est une étoile de taille moyenne, il est un colosse dans notre Système solaire. Pour vous donner un ordre de grandeur, son diamètre est de 1,4 million de km, 110 fois celui de la Terre. Il pourrait contenir l’ensemble de nos planètes… près de 600 fois. Il est très légèrement écrasé : « le rayon [aux pôles] est inférieur de 6 kilomètres à celui de l’équateur ».
Sa masse représente 99,8 % de l’ensemble des objets du système solaire. Il produit un champ de gravité maintenant toutes les planètes en rotation autour de lui. Si ces dernières tournent autour du Soleil, il n’est pas le centre de la galaxie (la Voie lactée dans notre cas). Notre étoile « tourne sur elle-même en 25 jours terrestres [à l’équateur, aux pôles la durée est de 36 jours, ndlr] et autour de la Voie lactée en 200 millions d’années ».
Le Soleil se déplace à 220 km/s dans la Galaxie et utilise l’hydrogène comme « carburant ». La fusion thermonucléaire des molécules d‘hydrogène donne vie à de l’hélium avec une libération d’énergie sous forme de lumière, chaleur, vent solaire, etc. Il est composé à 91 % d’hydrogène et à 8,9 % d’hélium… mais cela dépend de la manière de compter.
Ces chiffres sont valables en volume. En masse, le rapport est plutôt de l’ordre de 75 et 25 %, expliquait l’astrophysicien français et spécialiste du Soleil Roger-Maurice Bonnet sur EuroNews. Pour plus de détails sur la fusion hydrogène/helium et le fonctionnement des étoiles, David Louapre (Science étonnante) a publié il y a presque deux ans une vidéo intitulée « Plongée Au Coeur Des Étoiles ».

Les six couches du Soleil
Notre étoile est divisée en six couches distinctes (en partant du centre) : noyau, zone radiative, zone convective, photosphère, chromosphère et couronne (ces deux dernières forment son atmosphère).
En son centre, le noyau occupe environ 20 % du volume total, avec une température de 15 000 000 °C (oui, 15 millions de °C). C’est là que se déroule la fusion nucléaire des atomes d’hydrogène, créant de l'hélium et libérant de l’énergie sous forme de photons. Elle « met 100 000 ans pour atteindre la surface du Soleil sous forme de lumière », explique le CNES.
La deuxième couche est la zone radiative, qui représente 70 % du rayon solaire. Les températures sont comprises entre 1,5 et 15 millions de °C. L’énergie « jaillissant » du noyau y passe avant de rejoindre la zone convective, la troisième couche. L’énergie est alors « transportée par des courants montants et descendants de gaz chauds grâce à d’énormes bulles, appelées cellules de convection. La température est comprise ici entre 5 500 et 1 500 000 °C ».
Comme on peut le voir, la température diminue lorsque l’on s’éloigne du noyau. Et cela continue avec la surface visible du Soleil, appelée photosphère, correspondant à la quatrième couche. La température est alors de 6 000 °C environ.
Il reste deux couches formant l’atmosphère : « la chromosphère où sont expulsés depuis la surface du Soleil des jets de matière pouvant atteindre une hauteur de 10 000 km, et la couronne constituée de gaz ionisés (plasma) où se déroulent divers phénomènes solaires ». La température y est sans commune mesure avec celle en surface : elle peut dépasser le million de degrés. Cette différence reste « l’un des plus grands mystères de la physique contemporaine », rappelle le CNRS.


Les missions vers notre le Soleil s’enchaînent
De nombreuses missions ont déjà étudié de « près » notre étoile. Le CNES référence celles à laquelle il a participé : Ulysses (1990, étude de la turbulence dans le vent solaire, en particulier hors du plan de l’écliptique), SOHO (1995, suivi des éjections coronales de masse), Cluster (2000, interaction du vent solaire avec la magnétosphère terrestre), Double Star (2003 et 2004, suite du projet Cluster), Stereo (2006, étude d’éruptions solaires et de leurs effets sur l’environnement terrestre), et Picard (2010) qui « a réalisé plus d'un million d’images du Soleil et bien d'autres mesures ».
Deux missions récentes sont également aux « portes de l’enfer » : Solar Orbiter (lancée en 2020) de l’ESA et Parker Solar (qui a décollé en 2018) de la NASA. Deux missions pour un même objectif (mieux connaître notre étoile), mais comme dans le cas d’ExoMars et de Mars 2022 (anciennement Mars 2020), elles sont complémentaires : « c'est une chance en or d'avoir ces deux sondes en même temps et travaillant ensemble. Leurs objectifs sont très similaires, mais les méthodes pour y arriver sont très différentes », expliquait Nicky Fox, directrice scientifique au Johns Hopkins APL.
Si le Soleil est l’objet de tant d’attention, c’est que ses caprices peuvent grandement influencer notre vie quotidienne : « mieux le connaître permet d’anticiper ses effets potentiels sur l'environnement spatial de la Terre », c’est la météorologie de l'espace. Les risques peuvent être importants : « des black-out électriques, des perturbations radio et des satellites endommagés », détaille Kader Amsif, responsable des programmes Soleil, héliosphère et magnétosphères au CNES.
Un exemple marquant parmi d’autres, en 1989 : une éruption solaire a plongé la ville de Montréal dans le noir et, selon Francis Rocard (responsable du programme d'exploration du Système solaire au CNES), « la responsabilité de [cette] éruption solaire a été évoquée dans la perte de la sonde soviétique Phobos 2, qui devait observer Mars et ses satellites ».

Taches sombres et cycle de vie de notre Soleil
En 2014, le CNES revenait sur « ce que le Soleil nous cach[ait] encore » avec une attention particulière aux taches, qui reste d’actualité aujourd’hui :
« Bien des aspects du Soleil restent énigmatiques. Et en particulier son comportement cyclique. Au début d’un cycle, alors que le Soleil est calme, des taches sombres, dont la taille peut dépasser celle de la Terre, apparaissent aux latitudes élevées, puis vers l’équateur. Leur cortège se fait de plus en plus nombreux jusqu’à un maximum, onze ans plus tard, avant qu’elles ne tirent leur révérence »
Ces taches sont en fait des zones où le champ magnétique est si fort qu’il bloque les mouvements du plasma, donc la remontée de la chaleur. Les zones sont plus froides et apparaissent alors comme plus sombres.
Le CNRS ajoute qu'elles « deviennent également le lieu de formidables éruptions solaires, des flashs lumineux intenses, parfois accompagnés d’une expulsion d’une quantité gigantesque de matière, jusqu’à 10 000 millions de tonnes, à plusieurs centaines de kilomètres par seconde. On les appelle des éjections de masse coronale ».
À chaque fin de cycle de 11 ans, les polarités du champ magnétique s’inversent (le pôle sud devient le pôle nord, et vice-versa), « le Soleil retrouve sa configuration initiale tous les 22 ans », explique Roger-Maurice Bonnet. « On ne comprend pas vraiment tous les secrets des cycles solaires, qui ne se réduisent pas au seul cycle principal de onze ans, ainsi que les variations de son maximum d’activité », expliquait Philippe Louarn de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie.
Début février, Étienne Pariat, de l’Observatoire de Paris, expliquait à Ouest France que « c’est en phase maximum qu’il y a le plus de conséquences sur les activités humaines. En ce moment, il y a très peu d’éruptions, car on est en période de minimum solaire ; dans 5 ou 6 ans, il y en aura plus ». Au-delà des conséquences sur la Terre, il ajoute qu’« il vaudra mieux envoyer les humains sur Mars en période de minimum ». Ce n’est pas Phobos 2 qui dira le contraire…
En 2020, nous sommes donc au début d’un nouveau cycle, qui devrait se terminer en 2031, avec un maximum prévu pour 2025/2026. Il faudra donc jongler avec ce paramètre pour envoyer des humains sur la planète rouge. Pour rappel, la fenêtre de tir s’ouvre tous les deux ans (lorsqu’elle est au plus proche) : 2020, 2022, 2024, 2026, etc.
La fin du Soleil déjà programmée
Le Soleil n’est pas éternel et il est environ à la moitié de sa vie. Pas d’inquiétude pour nous, on parle de milliards d’années. À cette échelle, la présence de l’Homme ne représente qu’une broutille. Dans 5 à 6 milliards d’années, notre étoile deviendra une géante rouge. Elle enflera de manière très importante, englobant plusieurs planètes au passage (notamment la Terre), puis sa taille diminuera fortement pour devenir une naine blanche.
L’European Southern Observatory (ESO) anticipe ce qui se passera quand une étoile comme notre Soleil aura consommé l’ensemble de l’hydrogène à sa disposition : « Lorsque ce carburant vient à manquer, elles se transforment en géantes rouges : leurs volumes augmentant considérablement, elles engloutissent les planètes les plus proches. Dans le cas du Système solaire, Mercure, Vénus et la Terre se verront absorber par le Soleil devenu géante rouge d’ici 5 milliards d’années ».
« Puis, les étoiles de type Soleil perdent leurs enveloppes externes. Subsiste alors leur seul noyau consumé, une naine blanche. Ces vestiges stellaires peuvent être environnés de planètes. Nombre de ces systèmes stellaires sont supposés exister dans notre galaxie. Toutefois, les scientifiques n’avaient pas encore découvert les preuves de la survie d’une planète géante en périphérie d’une naine blanche. La détection, en 2019, d’une exoplanète de type Neptune en orbite autour de WDJ0914+1914 pourrait bien constituer la première d’une longue série de découvertes de ce type de système ».
Un dernier point important : ne regardez jamais le soleil à l’œil nu ou avec un télescope, vous subiriez alors de graves lésions : « la brûlure de la rétine entraînée par le rayonnement solaire est indolore, et l'on ne se rend compte des dommages subis par la rétine qu'une fois celle-ci détruite. Cécité totale instantanée et irréversible ! », explique l’AstroCentre d’Orléans.
Dans notre prochain article, nous nous intéresserons à Mercure, la première des quatre planètes telluriques où la température oscille entre - 183 °C dans les cratères polaires, qui ne reçoivent pas la lumière du Soleil, et... plus de 400 °C.