C’est fait, la maladie Covid-19 est désormais une « pandémie » pour l’Organisation Mondiale de la Santé. Si le niveau de nouvelles contaminations se calme en Chine, il est en forte augmentation dans le reste du monde. Il n‘y a pour autant pas plus de raison de paniquer qu’avant, explications.
Depuis le début de la propagation de la maladie Covid-19, l’Organisation mondiale de la Santé évoque une épidémie. Alors que sa propagation prenait de l’ampleur dans le monde, l’OMS s’était jusqu’à présent refusée à la désigner comme une pandémie, malgré la pression de certains médias et acteurs du monde politique.
« Il ne faut pas se précipiter et déclarer une pandémie sans une analyse soigneuse et lucide des faits », expliquait l’organisation. Elle a néanmoins précisé à plusieurs reprises qu'elle utiliserait ce terme « s'il décri[vait] bien la situation ». L’organisation expliquait alors que le faire « sans précaution n'apporte aucun avantage tangible, mais présente, en revanche, un risque important, celui d'amplifier inutilement et sans raison la peur et la stigmatisation et de paralyser les systèmes. Ce pourrait aussi être interprété comme le signe que nous n'arrivons plus à contenir le virus, ce qui n'est pas vrai ».
Hier lors d’un discours, le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus (directeur général de l’OMS) a finalement sauté le pas : « Nous sommes à la fois profondément préoccupés par les niveaux alarmants de propagation et par la gravité, ainsi que par les niveaux alarmants d'inaction. Nous avons donc estimé que Covid-19 peut être qualifié de pandémie ».
C'est tout sauf une surprise puisque deux jours auparavant (lundi 9 mars), il indiquait que « la menace d’une pandémie [était] bien réelle ». Dans tous les cas, c’est une première dans l’histoire de l’Organisation Mondiale de la Santé qui « n'av[ait] jamais vu de pandémie déclenchée par un coronavirus ».
Mais que désigne exactement le terme « pandémie » et pourquoi l’OMS a-t-elle décidé de sauter le pas le 11 mars ?
Nous sommes face à la « propagation mondiale d’une nouvelle maladie »
L’OMS en donne une définition précise, simple à comprendre : « On parle de pandémie en cas de propagation mondiale d’une nouvelle maladie ». Même son de cloche ou presque chez Larousse : une pandémie est une « épidémie étendue à toute la population d'un continent, voire au monde entier ». Dans ce second cas, on perd donc la notion de nouvelle maladie.
Ainsi, il ne s’agit pas d’un quelconque changement du virus – SARS-CoV-2, à ne pas confondre avec la maladie Covid-19 – ni de sa dangerosité, d‘une mutation ou encore d’une décision prise suite au nombre de décès. C’est la constatation d'une propagation mondiale qui permet de définir si nous sommes face à une pandémie ou non, « rien » de plus.
Covid-19 remplit désormais tous les critères. Pour rappel, cette maladie infectieuse est causée par le dernier coronavirus découvert, qui « était inconnu avant l’apparition de la flambée à Wuhan (Chine) en décembre 2019 », explique l’OMS qui précise qu'« il s’agirait de la première pandémie de l’histoire qu’il serait possible de maîtriser ». L'avenir nous le dira.
L’évolution de Covid-19 en Chine et ailleurs dans le monde
Pour comprendre la décision de l’OMS, nous avons regroupé dans un tableau les cas confirmés et les décès liés à Covid-19 en nous basant sur les chiffres officiels de l’Organisation Mondiale de la Santé. Ils sont classés dans trois catégories : le total sur l’ensemble de la planète, le cas particulier de la Chine – foyer de base de l’infection – et enfin le reste du monde.
Bien évidemment, si on additionne la Chine et le reste du monde, on retombe sur le total. Attention, il s’agit uniquement de cas identifiés, la réalité est donc forcément (beaucoup ?) plus importante que les données de l’OMS. Certains malades ne sont pas testés pour diverses raisons, d’autres peuvent n’avoir quasiment pas de symptômes, etc.
Comme on peut le voir, le nombre de cas en Chine est quasiment stable en mars – 79 968 le 1er jour du mois et 80 955 le 11 mars – tandis que dans le reste du monde l’augmentation est importante : de 7 169 personnes identifiées début mars, on est passé à 37 371 hier (soit un chiffre multiplié par plus de 5).
Si on regarde le nombre de cas confirmés par jour, on retrouve un écart très marqué entre la Chine qui est en baisse constante sur le mois, et le reste du monde qui au contraire grimpe de plus en plus rapidement. Un palier a même été franchi le 10 mars avec plus de 4 000 cas dans le monde sur une seule journée (contre moins de 2 000 les premiers jours de mars, puis 2 000 à 3 000 ensuite). C’est cette hausse qui a très certainement poussé l’OMS a parler de pandémie.
Dans le même temps, le nombre de pays touchés est lui aussi en hausse, mais avec plus de régularité. De 58 pays touchés le 1er mars, il est désormais question de 113 pays, soit quasiment le double en une dizaine de jours seulement. Entre 3 et 8 nouveaux pays sont ainsi ajoutés par jour, avec une moyenne aux alentours de 5.
« Pandémie n'est pas un mot à utiliser à la légère »
Le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus rappelle que « pandémie n'est pas un mot à utiliser à la légère ou avec négligence. C'est un mot qui, s'il est utilisé à mauvais escient, peut provoquer une peur déraisonnable ou au contraire une résignation injustifiée de la fin du combat, entraînant des souffrances et des morts inutiles ».
Il tient à se montrer ferme sur la suite des opérations : « qualifier la situation de pandémie ne change rien à l’évaluation par l’OMS de la menace de ce virus. Cela ne change pas ce que fait l'OMS ni ce que les pays devraient faire ». Pandémie n'est pas non plus un signe de fatalité, « simplement » que la maladie s’étend rapidement dans le monde.
Le directeur général de l’OMS appelle l’ensemble des pays à prendre les mesures nécessaires pour limiter la propagation du virus : « Nous ne pouvons pas le dire assez fort, ni assez clairement, ni assez souvent : tous les pays peuvent encore changer le cours de cette pandémie […] Plusieurs pays ont démontré que ce virus peut être supprimé et contrôlé ».
Trois sont cités en exemple : « Nous sommes reconnaissants des mesures prises en Iran, en Italie et en République de Corée pour ralentir le virus et contrôler leurs épidémies ».
Une USPPI depuis fin janvier
Pour rappel, l’épidémie de Covid-19 avait déjà été classée comme une urgence de santé publique de portée internationale (USPPI) par l’Organisation Mondiale de la Santé le 30 janvier 2020. C’était la sixième fois que cette sonnette d’alarme était déclenchée depuis l’entrée en vigueur du Règlement sanitaire international (RSI) en 2005.
Les cinq précédentes étaient pour la Grippe A (H1N1) en 2009, la poliomyélite et le virus Ebola en 2014, Zika en 2016 et enfin de nouveau Ebola en 2019. La déclaration d’une USPPI « assure un encadrement permanent de la riposte en Chine et l’accélération des préparatifs dans tous les pays […] le directeur général émet des recommandations temporaires conformément au RSI (2005), dont l’obligation, pour les pays, de fournir à l’OMS des raisons de santé publique suffisantes et une justification pour toute mesure allant au-delà de ce que l’OMS recommande ».
Pour l'organisation « cette disposition est cruciale pour garantir une réaction internationale mesurée, équilibrée et fondée sur des bases factuelles, afin d’éviter toute interférence inutile avec les déplacements et les échanges commerciaux ».
« Covid-19 est généralement bénigne », rappelle l’OMS.
Pour finir, un point sur la maladie en elle-même et ses risques : « La Covid-19 est généralement bénigne, en particulier chez l’enfant et le jeune adulte, mais elle peut aussi être grave : 1 malade sur 5 doit être hospitalisé ».
L’OMS ajoute que recevoir un colis d’une zone où Covid-19 a été signalée serait (presque) sans danger : « La probabilité qu’une personne infectée contamine des marchandises est faible, tout comme le risque de contracter le virus responsable de la Covid-19 par contact avec un colis qui a été déplacé, a voyagé et a été exposé à différentes conditions et températures ».
Pour de plus amples informations sur la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19), ses modes de transmissions, la période d’incubation, les risques, les mesures de protection et le coronavirus de manière générale, une foire aux questions a été mise en ligne par l’Organisation mondiale de la Santé (en français).
Vous retrouverez aussi des ressources sur le site du Gouvernement et de santé publique France. Un numéro vert d'information a également été mis à disposition : le 0800 130 000 (appel gratuit).