La direction des Inrocks a semble-t-il profité de l'affaire de la Ligue du LOL pour solder le scandale de leur couverture sur Bertrand Cantat, bien inopportunément parue au moment où explosaient #MeToo et #BalanceTonPorc, en sacrifiant le rédacteur en chef qui... s'y était pourtant opposé.
L'article de CheckNews qui déclencha « l'affaire » avait été mis en ligne le vendredi 8 février 2019 en fin d'après-midi. Robin Andraca, son auteur, avait été interrogé trois jours plus tôt : « Des membres de la Ligue du LOL ont-ils harcelé, sur Twitter, des militantes féministes ? », et résumait la réponse comme suit : « Toutes les victimes interrogées, une dizaine, le reconnaissent : près de dix ans plus tard, les preuves manquent. Elles n’ont bien souvent pas conservé les messages reçus entre 2009 et 2012, qui pour la plupart ont été supprimés. Restent donc les témoignages ».
À mesure que les accusés étaient devenus inaudibles, et qu'ils avaient cessé, de leur propre chef ou à la demande de leurs avocats, d'essayer de se défendre, les articles au sujet de la Ligue du LOL ne se reposaient que sur les témoignages de leurs seules victimes présumées, recueillis trois jours durant, sans réelle contextualisation ni, a fortiori, enquête.
À titre de comparaison, David Doucet estime avoir consacré « au moins trois mois à temps complet » à constituer son fact-check, afin de déconstruire via des preuves et des témoignages les accusations dont il a fait l’objet. L'auteur de ces lignes travaille à sa propre vérification, ayant servi de base à ce dossier de plus de 100 000 signes, depuis six mois.
Reste que le parti-pris de CheckNews consistant à croire sur parole les victimes présumées, en abandonnant la recherche de preuves (et de contexte) a été repris par l'ensemble de la presse et des médias. Et ce, alors même que l'emballement médiatique fut tel que des propos qui, jusque-là, auraient pu être considérés comme ironiques, voire anodins, pouvaient être relus et réinterprétés à l'aune du portrait « à charge » faits des membres de la Ligue du LOL.
Et nonobstant le fait que plusieurs des faits imputés à « la » Ligue du LOL sont antérieurs à la création du groupe, que d'autres émanent de personnes n'en faisant pas partie, et que, des années après, les souvenirs peuvent être trompeurs.
Notre dossier :
- La fabrique d'un « bourreau » idéal 1/4 : « à charge »
- La fabrique d'un « bourreau » idéal 2/4 : « la chute »
- La fabrique d'un « bourreau » idéal 3/4 : « les ragots »
- La fabrique d'un « bourreau » idéal 4/4 : « le fusible »
« Toute prise de parole sur Twitter me condamnerait à une forme de mort sociale »
En tout état de cause, on ne peut pas comprendre cet emballement médiatique, et les conséquences qu'il a eu, sans en reprendre la chronologie, à la fois publique, et privée.
À cet effet, Doucet a fait preuve d'une transparence suffisamment inédite pour être soulignée, me proposant d'accéder à ses messageries au moyen de mots de passe temporaires, pour que je puisse non seulement vérifier les milliers de messages reçus ou envoyés et dont il avait mis de nombreuses captures d'écran dans son fact-check.
Mais également de pouvoir en saisir le contexte, de sorte d'éviter d'être moi-même biaisé, comme pourrait l'être quelqu'un à qui on montre une capture d'écran décontextualisée. Et de parvenir à mes propres recoupements.
Le vendredi 8 février, réagissant à l'article de CheckNews, Florence Porcel écrit sur Twitter : « J'ai aussi été harcelée par la ligue du LOL pendant des années, et il est punissable d'1 an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. (Y a prescription.) J'ai vos noms, mecs. J'oublie pas. », faisant implicitement référence au canular téléphonique.
Le samedi 9, à 14h22, elle s'étonne de découvrir que le canular a été effacé : « Je crois que le rédacteur en chef d'un grand magazine, dont le nom n'est pas sorti, est en train de chier dans son froc. Je te laisse à tes lessives, vieux ». Puis de préciser : « NON, je ne donnerai pas son nom publiquement. Je n'ai ni l'argent, ni l'énergie, ni le temps pour un procès en diffamation. »
À 15h35, Doucet lui envoie un mail pour s'excuser de ce qu'il qualifie lui-même alors, sous la pression et faute de se souvenir du contexte, de « canular téléphonique malveillant », qui lui a « fait prendre conscience à quel point j’ai été lâche et stupide ». En réponse, Florence lui envoie un (long) mail en fin d'après-midi lui expliquant notamment ce en quoi elle avait perçu ce canular comme le « point d'orgue » du harcèlement dont elle faisait alors l'objet, et lui demande de démissionner, « et que vous encouragiez et appuyiez la candidature de consœurs (féministes) ».
À 0h07, Doucet lui répond : « Ce que tu me décris me déchire le cœur. Je n’ai jamais imaginé que ce canular téléphonique ait pu avoir un tel impact sur ta vie. Je me rappelle qu’à l’époque le rédacteur en chef du Vinvinteur l’avait relayé en saluant "la blague". J’imagine que ça a dû être encore plus douloureux et humiliant pour toi ».
À aucun moment Doucet – qui se souvenait que j'avais relayé sa « blague », mais pas le contexte dans laquelle elle s'inscrivait – ne remet en doute la parole des personnes se présentant comme victimes de la Ligue du LOL, non plus que celle de Florence Porcel. Plus que la prendre au sérieux, il la valide : « J’ignorais tout ce que la Ligue du LOL t’avait fait subir précédemment. J'ai lu avec effroi la plupart des témoignages qui sont sortis et tu es l’unique personne dont je suis le bourreau. C’est déjà de trop ».
Quand je lui avais demandé, en février 2019, pourquoi il s’était lui-même décrit comme un « bourreau », au point de qualifier son canular de « dégueulasserie », Doucet m'avait répondu que le fait de voir son nom jeté ainsi en pâture, de découvrir que ce canular avait fait aussi mal à Florence, que de nombreuses victimes dénonçaient le harcèlement dont elles assuraient avoir fait l'objet – et dont il ne mesurait pas jusque-là l'ampleur ni les dégâts – l'avait incité à tenter, de la sorte, de faire amende honorable.
Deux heures avant d'envoyer son tweet d'excuses, il écrit de nouveau à Florence Porcel : « J’aimerais m’excuser publiquement. Je n’aime pas fuir mes responsabilités. Mais aujourd’hui toute prise de parole sur Twitter me condamnerait à une forme de mort sociale. C’est inaudible d’avouer cet acte sans en assumer les autres. C’est pourtant mon cas. »
Ce même samedi après-midi, Jean-Marc Lalanne, directeur de la rédaction des Inrocks, avait tenté de le rassurer, via Messenger : « Ça me paraît très exagéré en tout cas. On va pas initier une réu pour ça. Mais par contre ca serait bien qu on se voit avec Elisabeth » (Laborde, directrice de la publication des Inrocks). À Doucet qui lui écrit « Je suis au fond du trou », Lalanne répond : « Tiens bon. Ne réponds pas tt de suite ».
À 0h53, Doucet craque auprès de son supérieur : « je suis foutu :( son témoignage est partagé, comme si ce canular avait détruit sa vie du jour au lendemain, moi j'ai juste fait le canular, j'ai rien fait d'autre, je l'ai appelé une fois. Les gens veulent du sang maintenant, des têtes qui tombent, je tiendrai pas en attendant lundi ».
À 1H21 : « Et si je reconnaissais publiquement ce canular ? Je tiens pas là, je vais avouer publiquement maintenant ». À 1h23, Doucet envoie à Lalanne son texte, inspiré du mail d'excuse qu'il avait envoyé à Florence Porcel, et le publie sur Twitter à 2h12. Il ne voulait pas avouer le « harcèlement », mais reconnaître avoir fait ce canular, et s'en excuser.
Ce qui fût interprété comme une reconnaissance de culpabilité. En réponse à son tweet d'excuses, nombreux sont ceux à appeler à sa démission. À 11H06 le dimanche, Florence Porcel lui répond sur Twitter : « Merci David. C’est un bon début. Je vais pouvoir commencer à te pardonner ».
À 13h30, elle précise : « Quand je dis "c'est un bon début", ça veut dire que ces excuses étaient nécessaires (et appréciées à leur juste valeur) mais pas suffisantes. Oui, je souhaite toujours ardemment une démission. »
« Elisabeth a été très sympa au téléphone »
Dans le compte-rendu de son entretien préalable à son licenciement, qui s'était tenu le 19 février, rédigé par un délégué du personnel et que j'ai pu consulter, Doucet explique qu'Elisabeth Laborde lui avait dit au téléphone le dimanche en fin de matinée que « ce n'était pas grave et que je n'avais agressé personne (...) je pleurais au téléphone et tu as relativisé la situation et les demandes de démission dont je faisais l'objet ».
Doucet lui avait alors proposé de contacter un ami commun, qui avait lui aussi fait partie du groupe Facebook de la Ligue du LOL, de sorte qu'elle puisse comprendre ce qu'était ce groupe. Contacté quelques mois plus tard, cet ami commun répondit à Doucet ne pas se souvenir que Laborde l'ait contacté à ce sujet.
Sur WhatsApp, Doucet écrit à un ancien des Inrocks qu'« Elisabeth m'a dit que j'avais bien fait de m'excuser, qu'il n'y avait pas mort d'homme (et) que pour elle la polémique me concernant était close ». À Jean-Marc Lalanne, il écrit qu'« Elisabeth a été très sympa au téléphone, j'ai de la chance de vous avoir tous les deux ».
À quoi Elisabeth Laborde, lors de cet entretien, lui répondit : « Quand tu m'as téléphoné, j'ai tout de suite senti que tu étais en panique, et j'ai essayé de te calmer. Je n'avais pas encore connaissance de tous les faits ».
Le lendemain matin, lundi 11 février, changement de ton. Doucet reçoit à 7h39 un SMS d'Elisabeth Laborde le convoquant à 10h. À 8h12, un email l'informe qu'il ne fait plus partie des administrateurs du compte Facebook des Inrockuptibles. À 10h, Laborde lui demande s'il avait songé à démissionner, avant de lui proposer de signer une rupture conventionnelle, au motif que « notre rapport aux femmes est trop fragile, en référence à la couverture que le journal avait faite avec Bertrand Cantat », comme il l'a depuis raconté à Marianne.
Rattraper le coup de la couverture Cantat (entre autres)
Après avoir consacré une pétition de soutien au cinéaste Jean-Claude Brisseau (accusé de harcèlement sexuel) en 2005 puis, en 2013, deux Unes à Bertrand Cantat et Roman Polanski, suivies d'une troisième de nouveau consacrée, en octobre 2017, à l'ex-chanteur de Noir Désir, responsable de la mort de Marie Trintignant, Les Inrocks avaient souffert de plusieurs polémiques leur accolant une réputation masculiniste, voire antiféministe.
À l'époque, la couverture Cantat, qui devait être un « coup éditorial », s'était transformé en énorme « scandale médiatique » : alors que le journal partait à l'imprimerie, qu'il était donc trop tard pour revenir en arrière, le New York Times révélait en effet que le producteur Harvey Weinstein était accusé de nombreux cas de harcèlement sexuel. Il vient d'être reconnu coupable de deux des cinq chefs d'accusations portés contre lui à New York.
La veille de la parution du magazine, cinq femmes l'accusèrent par ailleurs de viols dans le New Yorker. Dans la foulée, l'actrice Alyssa Milano lançait le mouvement #MeToo, et la journaliste Sandra Muller #BalanceTonPorc. Une conjonction qui ne fit qu'amplifier le « bad buzz », tant sur les réseaux sociaux que dans les médias.
En réponse au message d'excuses de Doucet, de nombreux « twittos » l'avaient d'ailleurs acculé à ce sujet (il avait été nommé rédacteur en chef du magazine et du site en septembre 2016), pensant avoir enfin trouvé le responsable de cette couverture, ou la mentionnant comme une « preuve » supplémentaire de son comportement supposé toxique :
Nous avons anonymisé les tweets relevés pour cette capture
À ceci près que Doucet – à l'instar de plusieurs autres salarié(e)s des Inrocks – avait précisément bataillé ferme contre cette Une, comme l'a depuis révélé Olivier Mialet, ancien secrétaire de rédaction aux Inrocks, dont il avait également été délégué syndical de 2004 à son départ en 2018, et donc a priori bien au fait des problèmes rencontrés en interne.
Le fait que Doucet se soit vertement opposé à ladite couverture nous a par ailleurs été confirmé par plusieurs autres ancien(ne)s salarié(e)s. Après avoir tenté, en vain, de la faire modifier, Doucet n'avait à l'époque réussi qu'à masquer, sur le tweet annonçant la parution du magazine, le texte où Cantat se disait « émotionnellement incapable de lire, d'écouter », en y apposant un CD, estimant cette phrase totalement déplacée.
Il espérait aussi contribuer à limiter les dommages sur les réseaux sociaux dont, in fine, il avait la charge et qu'il allait donc devoir gérer en frontal, contrairement à ceux qui avaient décidé d'y consacrer la Une des Inrocks.
La couverture incriminée et la façon dont elle a été diffusée par le compte Twitter des Inrocks à l'époque
Ironie de l'histoire, Elisabeth Laborde, celle-là même qui allait le licencier, faisait partie, en tant que directrice de la publication des Inrocks, de ceux qui avaient validé la couverture sur Cantat.
À la rédaction, qui lui avait dit « on veut pas le faire », parce que « ça va être l'enfer », elle avait répondu « mais non, vous vous faites une montagne de rien », tout en reconnaissant que « si j'étais une lectrice, je serais choquée, et j'en voudrais au mag' qui le met en Une ».
De 10 à 14h, ce lundi 11 février, jour de sa mise à pied, Doucet tente de trouver un avocat, mais Laborde refuse de l'autoriser à poser une demi-journée. À 14h, elle lui propose de nouveau une rupture conventionnelle, que Doucet refuse, comme le confirment ces échanges de SMS que nous avons pu consulter.
À 15h19, il prend en photo la lettre de convocation à un entretien préalable en vue de son licenciement pour faute grave, avec mise à pied conservatoire, qu'elle lui demande de signer. Elle lui laisse quelques minutes pour contacter son avocat par téléphone, et précise qu'il a cinq minutes pour dire au revoir aux gens et prendre ses affaires.
À 15h55, quelques minutes seulement après y avoir apposé sa signature, Jérôme Lefilliâtre, journaliste média de Libé, annonce sur Twitter sa mise à pied « à titre conservatoire », et précise qu'« une procédure de licenciement pour faute grave est engagée ». L'info, reprise dans des dépêches AFP et Reuters, sera rediffusée en boucle par plus de 150 médias, contribuant à la condamnation sociale du journaliste.
Ce, avant même qu'il lui soit permis de se défendre, et alors que Doucet n'était accusé que de ce seul canular. À défaut de l'avoir démontrée, ces dépêches constituèrent par ailleurs une seconde « preuve » de leur culpabilité.
Un communiqué « à charge »
La décision de licencier Doucet aurait été prise entre le dimanche midi, où Laborde n'avait, d'après ses dires, « pas encore connaissance de tous les faits », et le lundi matin, sans qu'aucune enquête n'ait matériellement pu être faite au sujet du canular non plus que de sa participation à la Ligue du LOL, et sans même avoir été entendu à ce sujet.
A contrario, Laurent Joffrin écrivait dans son édito de Libération, le soir de ce 11 février, avoir également procédé à « deux mises à pied conservatoires », tout en précisant qu'« il n’est pas d’usage au journal de sanctionner quiconque sans effectuer auparavant une enquête interne qui permette d’établir la responsabilité des uns et des autres ».
Joffrin précisait à ce titre, évoquant la Ligue du LOL, que « certains l’ont quittée, d’autres se sont contentés d’une participation intermittente ou lointaine, d’autres enfin – en tout cas, on peut le supposer – ont posté des messages sans pour autant se livrer aux actions de harcèlement qui heurtent tout un chacun au sein de Libération et ailleurs. D’où cette mesure, qui ne présage pas des décisions qui seront prises une fois mis au jour les éléments requis ».
Intitulé « Ligue du LOL : après l'effarement », le communiqué des Inrocks, mis en ligne le mardi 12, cosigné Elisabeth Laborde, Jean-Marc Lalanne « et l’ensemble de la rédaction des Inrockuptibles », témoignait de son côté de « la plus vive empathie pour le courage de ces prises de paroles, le cheminement sensible de chacun.e d’elles, de la honte subie à la désignation courageuse du préjudice et de l’oppresseur ».
Il fustigeait à ce titre « l’acharnement, le sadisme, la pulsion féroce de domination dont ont fait preuve les auteurs de ces actes ». L'absence de toute précaution de langage rendait in fine Doucet co-responsable de ces actes, contribuant à le clouer au pilori, quand bien même il n'a jamais été démontré, ni à l'époque ni depuis, qu'il ait participé à une quelconque forme de harcèlement.
Confirmant le fait que « des mesures conservatoires ont été prises au plus vite afin de marquer notre plus totale réprobation de ces actes », il n'annonçait par ailleurs aucune enquête à venir visant les charges qui pourraient lui être reprochées. Mais concluait que « ces épisodes dramatiques doivent être aussi l’occasion d’une réflexion sur la manière dont le pouvoir est réparti et s’exerce dans les rédactions ».
Autre différence de traitement : alors que Libé consacrait sa Une du 12 février à l'affaire, avec un dossier complet, les Inrocks n'en firent rien dans leur magazine papier, se contentant de ce communiqué « à charge » sur son site. Non contents de ne pas enquêter en interne, les Inrocks n'ont pas non plus enquêté en tant que journalistes pour tenter de comprendre et expliquer à leurs lecteurs ce qu'avait pu être (ou pas) la Ligue du LOL.
Interrogée à ce sujet, Élisabeth Laborde expliqua à L'Express avoir préféré « le support digital pour être plus réactifs et mieux relayés. En l'espèce, le traitement sur le digital nous a semblé plus approprié. Il permet de diffuser un texte plus rapidement et avec un maximum de relais ». En clair : il était urgent, non pas de comprendre la nature du problème, mais de s'en débarrasser, et de le faire savoir en communiquant publiquement à ce sujet.
Contactée, Elisabeth Laborde n'a pas donné suite, ni répondu à nos questions, malgré plusieurs relances.
Trois enquêtes... à trous
Les trois longues enquêtes publiées par Mediapart, L'Obs/Rue89 et Le Monde, reposant respectivement sur « vingt », « plus de 20 » et « une trentaine » de témoignages d'anciens ou actuels salarié(e)s, n'ont elles aussi été qu'« à charge » : aucune ne mentionne par exemple le témoignage que je venais pourtant de rendre public à ce sujet, non plus que sa principale accusatrice m'avait confirmé que Doucet ne l'avait par ailleurs jamais « harcelée ».
Toutes se référaient pourtant au canular téléphonique concerné, qualifié de « puits sans fond d’humiliation » par L'Obs/Rue89, et le tweet accusatoire de Florence Porcel. Si Mediapart avait intégré mon interview du « gentil troll », il ne m'a pas été proposé de la contextualiser, ne conservant que les seuls éléments « à charge ».
Contactées à ce sujet, les deux journalistes de Mediapart (pourtant alertées sur le sujet, voir ici ou là) éludent la question, arguant du fait que leur enquête « ne portait pas sur les agissements de la ligue du LOL et sur les accusations visant tel ou tel. C’est de la gestion des Inrocks qu’il s’agissait. Nous n’avons pas consacré un article de trois pages à David Doucet (dont le nom ne figure ni dans le titre, ni dans le chapô). Mais à un magazine à la gestion problématique ».
L'article comporte certes 32 mentions des Inrocks, mais également 30 de David Doucet, plus 15 de la Ligue du LOL, les trois figurant par ailleurs en « mots-clés », signes que Doucet et le contexte de la Ligue du LOL étaient donc bien explicitement ciblés. De plus, leur article, intitulé « Après la Ligue du LOL, la gestion des « Inrocks » mise en cause » et publié dix jours seulement après l'éclatement de l'affaire, explique précisément que « certaines méthodes de la Ligue du LOL semblent pourtant avoir contaminé la rédaction même du journal », tout en désignant expressément « la personnalité du rédacteur en chef David Doucet », rappelant que, « mis à pied » de ce fait, il risquait « un licenciement pour faute grave ».
Rue89, dont l'article, « Inrocks » : des méthodes managériales pas si LOL et pas si cool, comporte quant à lui 44 mentions de David Doucet (24 des Inrocks, et 17 de la Ligue du LOL et/ou de ses « loleurs »), nous a répondu de pas comprendre notre question. Nous leur avons répondu qu'elle visait à comprendre pourquoi ils n'avaient retenu que les éléments « à charge » sans mentionner ceux « à décharge », mail resté sans réponse à ce jour.
Le Monde, dont l'article, L’affaire de la ligue du LOL révèle un fonctionnement toxique aux « Inrocks », comporte 12 mentions de Doucet, 11 des Inrocks et 8 de la Ligue du LOL, a « précisé que M. Doucet était “adepte des canulars” et “avait aussi créé de faux comptes Twitter de célébrités ou de politiques parfois cités à tort dans la presse”, ce qui était le sujet de l'émission que vous aviez faite avec M. Doucet et évoqué dans votre témoignage », sans répondre à notre question.
Plus généralement, les trois rédactions se retranchent également derrière le fait que, malgré plusieurs relances, Doucet n'avait pas, à l'époque, répondu à leurs questions. Ce que son avocat l'avait dissuadé de faire. Et ce qui n'explique nullement, au demeurant, pourquoi elles avaient omis d'informer leurs lecteurs d'éléments « à décharge » comme ceux que j'avais pu rendre publics.
Dans la suite de notre enquête, nous revenons plus en détail sur la trentaine de témoignages recueillis à l'occasion de ces trois articles, écartant ou omettant de nombreux éléments « à décharge ».
Si vous voulez témoigner ou me contacter de façon sécurisée (voire anonyme), le mode d'emploi se trouve par là.