Bien que le défaut d’assurance soit désormais sanctionnable par le biais des radars automatiques, le ministère de l'Intérieur vient d’annoncer que les contrevenants recevraient pour l’instant un courrier les invitant à régulariser leur situation. Cette phase à visée préventive devrait durer « quelques mois ».
Alors que de plus en plus de conducteurs sont verbalisés sans interpellation, le gouvernement a autorisé le 19 septembre dernier le Centre automatisé de constatation des infractions routières de Rennes (qui gère notamment les contraventions relevant des radars automatiques) à s’interconnecter au FVA, pour « fichier des véhicules terrestres à moteur assurés ».
Cette gigantesque base de données, alimentée et régulièrement mise à jour par les assureurs, recense depuis l’année dernière l’ensemble des véhicules assurés « au tiers » – ce qui est pour rappel obligatoire en France.
Si policiers et gendarmes pouvaient ainsi interroger le FVA lors de leurs contrôles, afin de vérifier qu’un véhicule est bien assuré, les pouvoirs publics souhaitaient de longue date automatiser ce processus.
Un courrier afin de faire rentrer dans le rang les conducteurs non-assurés
C’est désormais chose faite. Tout du moins sur le plan juridique, puisqu’en pratique, les pouvoirs publics étaient restés jusqu’ici bien discrets sur cette réforme, actée au Journal officiel sans communiqué ni opération de communication particulière.
Le ministère de l'Intérieur et la Sécurité routière sont finalement sortis de leur silence, hier, confirmant le lancement opérationnel du dispositif :
« Si un véhicule est flashé pour une infraction d'excès de vitesse ou de franchissement de feu, et qu'un avis de contravention est envoyé à son propriétaire après les vérifications d'usage, le FVA sera systématiquement consulté. Cette consultation interviendra après un délai d'au moins 3 jours après la date et l'heure de l'infraction, afin de s'assurer de l'exacte mise à jour du fichier ; la loi impose en effet aux assureurs un délai de 3 jours pour alimenter le FVA de tout nouveau contrat, ou des modifications apportées à un contrat existant. »
Si le défaut d’assurance est en principe passible d’une amende forfaitaire délictuelle de 750 euros (pour les conducteurs majeurs épinglés pour la première fois), les contrevenants ne seront cependant pas sanctionnés dans l’immédiat.
Une phase transitoire de « quelques mois »
« Dans un premier temps, dans un but de prévention, tout propriétaire d'un véhicule flashé, pour lequel il aura été constaté que n'existe pas d'assurance, recevra un courrier adressé conjointement par le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) et la Délégation à la sécurité routière (DSR) », a annoncé hier la Sécurité routière.
Le but de cette missive ? Inviter le contrevenant à régulariser sa situation au plus vite, en lui rappelant notamment les risques financiers et judiciaires auxquels il s’expose (voir ci-dessous). Une initiative qui n’est pas sans rappeler la riposte graduée confiée à la Hadopi, aux fins d’enrayer le piratage d’œuvres protégées.
Cette phase n’est cependant que transitoire. « En demandant aux personnes de s'assurer, on va d'abord essayer de favoriser la réassurance ou l'assurance spontanée après avertissement. Et puis, dans quelques mois seulement, si on n'est pas assuré et flashé, on recevra une amende forfaitaire délictuelle de 750 euros » a prévenu Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la sécurité routière, auprès de France Info.
Dans son communiqué, la Sécurité routière se montrait plus vague encore, puisqu’elle affirmait que les sanctions deviendraient automatiques « lorsqu'il sera jugé opportun de mettre fin à cette opération de prévention ».
Si l’on se plonge dans les documents annexés par le gouvernement au projet de loi de finances pour 2020, on peut lire qu’il est « envisagé de commencer ce contrôle automatisé du défaut d’assurance au dernier trimestre 2019 », « après une phase d’expérimentation et de prévention ».
L’exécutif s’attend d’ailleurs à ce que cette réforme donne « une efficacité majeure au FVA, en permettant le contrôle d’un très grand nombre de véhicules en circulation, soit tous ceux ayant fait l’objet d’une infraction constatée à l’aide d’un radar ».
Bientôt un fichier censé faire ressortir les véhicules non-assurés
Il n’en demeure pas moins que cet envoi de courriers « préventifs » reste surprenant. Et pour cause. Lors de la mise en place du FVA, il a été prévu que l’association d’assureurs AGIRA, qui gère notamment l’indemnisation de certaines victimes d’accidents de la route, mette en place un second fichier, consacré cette fois aux « véhicules susceptibles de ne pas satisfaire à l'obligation d'assurance ».
Pour cela, l’AGIRA est habilitée à effectuer un « croisement » quotidien entre le FVA et certaines informations issues du Système d’immatriculation des véhicules, le fameux fichier des cartes grises. Faute de correspondance entre un numéro de plaque d’immatriculation et une police d’assurance, le système a ainsi vocation à faire ressortir les « anomalies ».
Difficile dès lors de comprendre pourquoi seules les personnes flashées par radar automatique recevront un tel courrier... Contactée par nos soins, la Sécurité routière fait valoir que ce second fichier n’est pas encore opérationnel.
Selon l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR), 700 000 personnes rouleraient à ce jour sans assurance. Un phénomène particulièrement inquiétant au regard des 175 décès survenus, rien que pour l’année dernière, suite à des accidents impliquant un véhicule non assuré.