Alors que plusieurs millions d’élèves s’apprêtent à reprendre le chemin de l’école, Next INpact revient aujourd’hui sur les principaux changements à attendre de cette rentrée, notamment du côté des programmes. Au lycée, l’enseignement du numérique est ainsi appelé à être « profondément renouvelé », dixit le ministre de l’Éducation.
Adieu, les séries S, ES et L. Les élèves qui entrent cette année en classe de première générale sont les premiers à tester le bac « nouvelle formule », dont les épreuves terminales se dérouleront en 2021. Suite à la réforme conduite par Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation, les lycéens sont en effet appelés à se façonner un parcours « à la carte », en complément d’un socle d’enseignements communs.
« La rentrée scolaire 2019 est marquée par la création de nouveaux enseignements en classes de 2de et de 1re, visant à pleinement préparer les élèves à une société, des études supérieures et un monde du travail toujours plus numériques » a ainsi fait valoir la Rue de Grenelle, hier, à l’occasion de sa traditionnelle conférence de presse de rentrée.
En seconde, un cours obligatoire de « sciences numériques et technologie »
« Dans le nouveau lycée, les élèves suivent un large ensemble d’enseignements communs destinés à transmettre à tous une culture générale du XXIe siècle fondée sur les sciences, les humanités et la maîtrise de deux langues vivantes », explique le ministère.
Dorénavant, tous les élèves de seconde suivront, outre un ou deux enseignements optionnels, une dizaine de cours communs : français, histoire-géographie, SVT, maths, sciences économiques et sociales... Mais aussi un enseignement de « sciences numériques et technologie », d’une heure et demie par semaine.
Ce cours s’articule autour de thématiques telles que « les réseaux sociaux », « la photographie numérique », « Internet », « Le Web », « les données structurées et leur traitement », ou bien encore « informatique embarquée et objets connectés ».
Objectif : permettre aux élèves d’appréhender de grands concepts, mais aussi, « à partir d’un objet technologique, de comprendre le poids croissant du numérique et les enjeux qui en découlent » (cyberharcèlement, droit d'auteur, respect de la vie privée, etc.). L’Éducation nationale espère ainsi aider les lycéens à adopter « un usage réfléchi et raisonné des technologies numériques dans la vie quotidienne ».
Outre ses aspects théoriques et historiques, ce cours devra permettre aux élèves d’approfondir leurs connaissances et compétences en matière de programmation – qui figure déjà dans les programmes de primaire et de collège. Différents exercices pourront être menés en fonction des thématiques (voir ci-dessous ce qui est prévu en matière de photographie). Le programme précise d'ailleurs que les élèves utiliseront le langage Python, au moins en version 3.
En première, du numérique pour tous comme en option
Pour les élèves de première, un « enseignement scientifique » de deux heures par semaine est prévu au titre des cours communs (et donc obligatoires pour tous). Ce vaste enseignement remplace le cours d’ « humanités scientifiques et numériques » qui avait initialement été annoncé par le ministère de l’Éducation nationale.
Au travers de thématiques interdisciplinaires, les élèves seront amenés à utiliser des logiciels de calcul ou de simulation, des « environnements de programmation » et autres tableurs.
Un projet expérimental est par exemple prévu, dans le cadre du thème consacré au son et à la musique, « porteurs d’information ». Grâce à un capteur, éventuellement associé à un microcontrôleur, les jeunes apprendront notamment à « visualiser le spectre d’un son » et à « utiliser un logiciel pour produire des sons purs et composés ».
« L'objectif est de confronter les élèves à la pratique d’une démarche scientifique expérimentale, de l’utilisation de matériels (capteurs et logiciels) à l’analyse critique des résultats », peut-on lire dans le programme. Les élèves seront également amenés, toujours au sein de ce thème, à calculer un taux de compression et à « comparer des caractéristiques et des qualités de fichiers audio compressés ».
Pour ceux qui veulent aller plus loin, un enseignement de spécialité « Numérique et sciences informatiques » est proposé, à raison de quatre heures par semaine. Pour mémoire, chaque élève de première doit choisir trois enseignements de spécialité (sciences de l’ingénieur, maths, littérature, etc.).
Les sujets apparaissent bien plus poussés : traitement de données en tables, architecture matérielle et systèmes d’exploitation, algorithmique, programmation... Au moins un quart du temps de classe sera consacré à des projets conduits par des groupes de deux à quatre élèves. Ces derniers devront alors avoir « accès à un équipement relié à Internet », souligne le programme.
Le ministère de l’Éducation nationale a révélé hier qu’un peu plus de 8 % des élèves de première avaient choisi l’enseignement « Numérique et sciences informatiques », « début prometteur pour un enseignement nouveau ».
Cet enseignement de spécialité pourra être poursuivi en terminale pour les élèves qui le souhaitent, à raison cette fois de six heures par semaines (voir le programme).
D’après Jean-Michel Blanquer, la mise en place de tous ces nouveaux enseignements permettra à la France de se placer « en tête des pays développés en termes de généralisation et de profondeur des apprentissages numériques et informatiques dans l'enseignement du second degré ».
Une « banque numérique de sujets » pour le contrôle continu
Réforme du bac oblige, les élèves de première qui effectueront leur rentrée dans quelques jours n’auront plus qu’à passer cinq épreuves terminales (le français, en première, puis, en terminale, la philosophie, leurs deux enseignements de spécialité et le fameux « grand oral »). Celles-ci compteront pour 60 % de la note finale. Les 40 % restant seront validés en contrôle continu, tant en première qu’en terminale.
Afin de garantir le caractère national de l’examen, les sujets de contrôle continu seront tirés d’une « banque nationale numérique de sujets ». Les copies ont vocation à être anonymisées, et ne pourront être corrigées par les professeurs des élèves.
Bientôt un Capes « Numérique et sciences informatiques »
« Au cours de l'année scolaire 2019-2020, l'éducation au et par le numérique poursuivra son développement, dans un cadre protégeant et valorisant toujours mieux les données au service des apprentissages », se félicite le ministère dans son dossier de presse.
La Rue de Grenelle explique que les réformes en cours ont donné lieu à « un plan de formation de grande ampleur ». « La certification des compétences numériques devient obligatoire dans les masters métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation (MEEF) » détaille l’exécutif, ajoutant que « près de 2 000 professeurs » ont été formés cette année dans le cadre d’un nouveau diplôme inter-universitaire, intitulé « enseigner l’informatique au lycée ».
Surtout, un « nouveau Capes numérique et sciences informatiques donnera lieu à de premiers recrutements en 2020 », annonce le ministère (pour en savoir plus, voir notre article). La création d’une agrégation d’informatique est également prévue « dans les prochaines années ».
Création d’un « Comité d’éthique pour les données d’éducation »
On apprend au passage qu’un « Comité d’éthique pour les données d’éducation », composé de « personnalités et d’experts de haut niveau », doit être institué « dans les prochaines semaines » auprès du ministre, « afin d’éclairer et d’enrichir de manière indépendante l’action dans ce domaine ».
Cette institution sera présidée par la spationaute Claudie Haigneré, qui fut également ministre sous Jacques Chirac.
La Rue de Grenelle doit également nommer « en septembre » un « administrateur ministériel des données » (voir notre article), après avoir déjà annoncé l’année dernière que celui-ci serait nommé « après la rentrée scolaire 2018 ».
Des « éco-délégués », mais aucun bilan sur l’interdiction des portables
Autre changement : toutes les classes de collège et de lycée éliront à la fin du mois de septembre un « éco-délégué ». Cet élève sera chargé de sensibiliser ses camarades à la lutte contre le réchauffement climatique. Il pourra à cette fin identifier des projets destinés par exemple à « diminuer l’impact énergétique de l’établissement », à favoriser les « gestes éco-responsables de l’ensemble de la communauté éducative », à « lutter contre le gaspillage », etc.
« Ici ce sera un potager, des plantations d'arbres, là le tri des déchets, partout une réflexion sur la consommation d'énergie », a expliqué Jean-Michel Blanquer.
Curieusement, le ministère n’a fait aucun bilan de l’interdiction des portables à l’école et au collège, entrée en vigueur lors de la rentrée 2018.