Quand l’État est condamné pour la publication d’un avis CADA non anonymisé

C'est la CADA, c'est la CADA, c'est la CADAstrophe
Droit 3 min
Quand l’État est condamné pour la publication d’un avis CADA non anonymisé
Crédits : seb_ra/iStock

L’État a été condamné l’année dernière à verser 4 500 euros à un fonctionnaire qui avait vu différentes données personnelles le concernant jetées en pâture sur Internet, au détour d’un avis non anonymisé de la CADA.

L’avis litigieux, rendu en septembre 2008 par la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), mentionnait le nom, le prénom et l’emploi du plaignant. Il indiquait surtout que ce dernier avait été victime de harcèlement moral, quelque temps auparavant, au sein de l’administration fiscale.

L’autorité indépendante, qui fait office de médiateur lorsqu’une administration refuse de dévoiler un document administratif à un citoyen (dossier, statistiques, code source...), s’était alors prononcée sur la « communicabilité » des conclusions de l’enquête, diligentée par l’inspection générale des finances, destinée à identifier les harceleurs de cet inspecteur divisionnaire du Trésor public.

Le fameux avis avait alors été mis en ligne, vraisemblablement sur le site « cada.data.gouv.fr », sans occultation du nom de l’intéressé, notamment. En temps normal, les avis de la CADA sont pourtant anonymisés avant d’être rendus publics.

Le tribunal administratif reconnait la « faute » de l’administration

Estimant que les services du Premier ministre (dont dépendent tant la CADA que la mission Etalab, qui héberge la plateforme d’avis de la CADA) avaient commis une faute, le plaignant a réclamé en mars 2016 le paiement de 15 000 euros, au titre des préjudices résultant de la publication de cet avis sans anonymisation préalable.

Au travers d’un jugement en date du 6 février 2018 (mais récemment pointé par la CADA, au détour de son dernier rapport d’activité), le tribunal administratif de Paris a estimé que l’administration avait effectivement « commis une faute de nature à engager sa responsabilité ».

« Seule une anonymisation complète de l’avis de la CADA rendait possible sa publication sur Internet par l’administration », a retenu le juge en charge du dossier, les yeux rivés sur la « loi CADA » de 1978. À ce jour, les documents administratifs comportant des données personnelles ne peuvent en effet être mis en ligne sans avoir fait l'objet d'un « traitement » préalable, « permettant de rendre impossible l'identification » des personnes concernées – sauf rares exceptions (voir notre article).

Un préjudice moral évalué à 3 000 euros

Le tribunal administratif a néanmoins évalué le préjudice moral de la victime à 3 000 euros, bien loin des 15 000 euros réclamés. Le fonctionnaire, devenu entre-temps enseignant à l’université Paris XIII, avait notamment produit une attestation d’un collègue, affirmant que la publication de cet avis non anonymisé de la CADA l’avait mis « dans une position délicate et inconfortable » vis-à-vis de ses étudiants.

De plus, poursuit le jugement, « le doyen de la faculté de droit de Paris XIII a constaté que le requérant, qui avait quitté son administration d’origine pour se reconstruire loin du milieu professionnel au sein duquel il avait été victime de harcèlement moral, semblait très affecté par la révélation publique de ce harcèlement ».

Pas de faute liée au référencement de l'avis sur Google

Le magistrat en charge du dossier a enfin jugé que contrairement à ce que soutenait le plaignant, le référencement de l’avis litigieux dans les moteurs de recherche, et notamment Google, ne relevait pas d’une faute de l’administration.

Et pour cause, le Premier ministre n’avait « pas compétence pour procéder directement à un déréférencement ou pour obliger un exploitant d’un moteur de recherche à y procéder », retient le tribunal. Avant d’expliquer qu’au regard de la loi Informatique et Libertés, « le droit au déréférencement impose seulement à l’exploitant d’un moteur de recherche mettant en œuvre son traitement en France, saisi d’une demande en ce sens, de supprimer de la liste de résultats des liens vers des pages web publiées par des tiers et contenant des informations personnelles ».

L’administration a en outre été condamnée à verser 1 500 euros à la victime, au titre de ses frais de justice (voir le jugement sur le site Doctrine). L’avis litigieux – qui semble plutôt être un conseil à destination de l’administration fiscale – a visiblement été anonymisé depuis, sans que le jugement du tribunal administratif ne revienne sur les raisons de cette défaillance, ni sur sa durée.

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