CJUE : un site n’est pas toujours obligé de fournir un numéro de téléphone à ses futurs clients

Un coup téléphoné
Droit 4 min
CJUE : un site n’est pas toujours obligé de fournir un numéro de téléphone à ses futurs clients
Crédits : kasinv/iStock

Dans un arrêt rendu ce matin, la Cour de justice de l’Union européenne tranche : Amazon n’a pas à être contrainte de fournir un numéro de téléphone pour être contactée avec ses futurs clients. Le site de e-commerce peut opter pour d’autres moyens de communication, pourvu qu’ils soient directes et efficaces.

Cette affaire tranchée aujourd’hui implique le Code civil allemand. Celui-ci oblige les professionnels de la vente à distance à fournir aux consommateurs une série d’informations précontractuelles, dont un numéro de télécopieur et un numéro de téléphone.

Amazon a été poursuivie en Allemagne pour quelques contrariétés avec ces dispositions : aucun numéro de télécopieur, et un parcours du combattant pour obtenir le précieux numéro de téléphone. Une association de consommateurs a estimé en conséquence que le site ne respectait pas ces dispositions, poursuivant ce litige jusque devant la Cour fédérale de justice.

La directive 2011/83 relative aux droits des consommateurs impose une obligation d’information concernant les contrats passés à distance. Ainsi, les consommateurs doivent recevoir, avant conclusion par exemple d’une vente, « l’adresse géographique où le professionnel est établi ainsi que le numéro de téléphone du professionnel, son numéro de télécopieur et son adresse électronique, lorsqu’ils sont disponibles, pour permettre au consommateur de le contacter rapidement et de communiquer avec lui efficacement ».

« Lorsqu’ils sont disponibles » ? Ce petit bout de phrase a intrigué les juridictions allemandes qui se sont demandées finalement si les e-commerçants devaient impérativement fournir le numéro de téléphone avant consentement au contrat.

Une telle obligation imposerait la présence d’une cellule apte à répondre aux demandes des potentiels clients, avec toutes les conséquences qu’on peut imaginer en termes d’infrastructures.

Dans son arrêt du jour, la Cour de justice a  été confrontée à un cas épineux puisque l’information précontractuelle change de sens selon les versions linguistiques de la directive : la communication des numéros de téléphone et de télécopieur prévue à l’article 6 est soit une vraie option soit tend à devenir une obligation.

Une disposition interprétée selon les objectifs du droit européen

« Il convient, dès lors, déduit faute de mieux la juridiction, d’interpréter la même disposition en fonction de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ».

Une certitude, la directive précitée « oblige nécessairement le professionnel à mettre à la disposition de tout consommateur un moyen de communication qui permette à ce dernier de le contacter rapidement et de communiquer avec lui efficacement ».

Cependant, imposer une obligation inconditionnelle « de mettre à disposition du consommateur, en toutes circonstances, un numéro de téléphone, voire de mettre en place une ligne téléphonique, ou de télécopieur, ou de créer une nouvelle adresse électronique pour permettre aux consommateurs de contacter le professionnel paraît disproportionnée ».

Disproportionné puisque certaines structures peuvent vouloir réduire leur coût de fonctionnement, au titre de la liberté d’entreprendre, qui est d’égale importance avec la nécessaire protection des consommateurs.

En outre, l’obligation de fournir ces informations est cette fois non équivoque après la conclusion du contrat, comme le prévoit l’article 5 :

« Si l’intention du législateur de l’Union avait été de conférer à l’obligation de renseigner son numéro de téléphone, mise à charge du professionnel par l’article 6, paragraphe 1, sous c), de cette directive, la même portée que celle qui pèse, de manière non équivoque, sur ce même professionnel en vertu de l’article 5, paragraphe 1, sous b), de ladite directive, il semble plausible qu’il aurait adopté la même formulation ».

Une communication directe et efficace, mais non forcément un téléphone

L’essentiel, finalement, est que la plateforme de vente à distance satisfasse « aux critères d’une communication directe et efficace », tel que posé par la directive. Ainsi, le professionnel peut par exemple encourager l’usage d’un « système de messagerie instantanée ou de rappel téléphonique ».

Au final, conclut la CJUE, la directive interdit bien à une législation nationale d’imposer, en toutes circonstances, la fourniture d’un numéro de téléphone. Elle ne l’oblige pas non plus à mettre en place une ligne téléphonique ou de télécopieur, ou créer une nouvelle adresse électronique « pour permettre aux consommateurs de le contacter ».

Elle n’impose « de communiquer ce numéro ou celui du télécopieur ou son adresse électronique que dans les cas où ce professionnel dispose déjà de ces moyens de communication avec les consommateurs ». Seul cas obligatoire envisagé. 

Avant tout, la cour rappelle que le texte de 2011 impose toujours la fourniture d’ « un moyen de communication de nature à satisfaire aux critères d’une communication directe et efficace ». Et le commerçant peut dès lors opter pour d’autres moyens de communication que ceux qu’elle énumère non limitativement.

En France, cet arrêt devrait imposer la réécriture d’un décret de 2014 relatif justement « aux obligations d'information précontractuelle et contractuelle des consommateurs et au droit de rétractation ». Depuis cette date, le Code de la consommation oblige les professionnels à toujours communiquer aux futurs consommateurs leur numéro de téléphone.

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