Après les deux premiers appels à candidatures, la sénatrice Colette Mélot revient sur ce dispositif dont bénéficient déjà 634 communes. Elle en rappelle les rouages et souhaite qu'il évolue, notamment pour que les communes françaises puissent davantage en bénéficier.
Le projet WiFi4EU n'est pas nouveau – il date de 2016, mais n'a été officiellement validé que fin 2017 – mais sa mise en place a été plus compliquée que prévu. Alors qu'un premier appel à candidatures avait été lancé en mai 2018, il a tout simplement été annulé un mois plus tard à cause d'un « problème technique ». Les choses sont depuis rentrées dans l'ordre.
Il est revenu en novembre de l'année dernière, avec 2 800 coupons de 15 000 euros pour déployer du Wi-Fi dans des villes européennes. Un second appel à candidatures a été lancé début avril 2019 avec 3 400 coupons supplémentaires et les résultats sont connus depuis peu. Les projets de 224 et 410 communes françaises ont été validés.
Au Sénat, Colette Mélot (vice-présidente de la commission des affaires européennes) est revenue sur le lancement de cette initiative, le détail des premiers résultats (y compris pour la France) et son avenir.
« Premier arrivé, premier servi »... avec un faux départ
Rappelons déjà que WiFi4EU permet de financer l'achat du matériel et, en échange, la collectivité s'engage à l'entretenir et à proposer le service pendant au moins trois ans. Des coupons d'un montant de 15 000 euros sont distribués suite aux différents appels d'offres. Cette somme peut couvrir « jusqu'à 100 % des coûts éligibles », précise la sénatrice. Mais attention, cette « aide n’est pas là pour apporter une connexion à une commune qui n’est pas reliée à un réseau », rappelle la FAQ de WiFi4EU.
Notez que le prestataire qui réalise les travaux doit s’engager formellement auprès du maître d’ouvrage sur des aspects réglementaires : utilisation conforme des bandes de fréquences (nous avons pu voir les conséquences d'un mauvais réglage sur des radars météo à des dizaines de km), respect des recommandations de sécurité de l’ANSSI sur le Wi-Fi, conservation des données de trafic (voir les recommandations de la CNIL), information du public conformément à la loi Abeille, et enfin se conformer évidemment au RGPD.
Le principe d'attribution est « premier arrivé, premier servi », avec « une répartition géographique équilibrée entre les pays ». Chaque commune européenne intéressée doit s'inscrire sur Internet puis valider sa demande lors de l'ouverture des appels à candidatures, avec un risque de charge importante pour les serveurs.
Le premier a été lancé en mai, puis annulé en juin à cause d'une « faille technique ayant permis à des communes de candidater avant l'heure d'ouverture ». Un faux départ donc pour l'initiative européenne WiFi 4EU. Le projet n'a pas été abandonné pour autant.
2 800 coupons en novembre, 224 pour la France
Un second appel à candidatures a ainsi été lancé en novembre 2018 avec 2 800 coupons, contre 1 000 seulement en mai. « Sur les 21 500 communes enregistrées au préalable, environ 13 200 ont répondu à l'appel à candidatures, dont 3 500 dans les 5 premières secondes », explique Colette Mélot. Au total, un peu plus de 20 % des demandes ont donc été satisfaites.
En France, 2 116 communes étaient inscrites, mais seulement 224 ont obtenu un coupon de 15 000 euros. Un faible score que la sénatrice impute en partie aux règles sur la répartition géographique au sein de l'Europe : « 15 coupons au minimum par pays et un maximum de 8 % du total, soit 224 ».
Un nombre jugé trop faible par Jacqueline Gourault (ministre de la Cohésion des territoires) qui a demandé à la Commission européenne de revoir sa copie pour les prochains appels à candidatures. « L'Allemagne était sur la même ligne », précise la sénatrice.
Leurs voix ont été entendues puisque la limite est passée de 8 à 15 %. La seconde vague d'appel à candidatures lancée début mai 2019 mettait en jeu 3 400 coupons de 15 000 euros, soit un maximum de 510 par pays, contre 224 auparavant. Cette fois-ci, la France n'a pas fait un carton plein.
3 400 coupons de plus en avril, 410 pour la France
De 13 200, le nombre de candidatures est descendu à environ 10 000. Avec 3 400 coupons, le taux de satisfaction est de 34 %. « C'est nettement plus qu'au premier appel » note Colette Mélot, mais pas surprenant puisqu'il y avait moins de candidats et plus de coupons. Il fallait cette fois encore être extrêmement rapide : 98 % des coupons ont été attribués en seulement 60 secondes.
En France, « plus de 410 coupons ont été attribués pour 1098 candidatures », soit presque deux fois plus de coupons pour deux fois moins de dossiers. Mme Mélot se demande néanmoins « pourquoi n'avons-nous pas atteint le nombre plafond de 510 coupons par pays, à l'instar de l'Allemagne, de l'Espagne et de l'Italie ». Aucune réponse n'a été apportée pour l'instant.
Crédit : Commission européenne
Colette Mélot veut prolonger et faire évoluer WiFi4EU
Lors de son compte-rendu, la sénatrice met en avant « une action efficace de la Commission européenne. Au-delà du problème technique de départ, en un an, elle a attribué 93 millions d'euros d'aides à destination de 6 200 communes en Europe ». En France, les premières installations sont d'ores et déjà déployées, notamment dans l'Hérault. La Commission européenne semble aussi satisfaite du résultat puisqu'elle a passé le budget pour 2019-2020 de 120 millions à 150 millions d'euros ; de quoi proposer du Wi-Fi gratuit dans 2 000 communes supplémentaires.
Elle ajoute par contre que la France est handicapée par deux caractéristiques : « Un tiers des communes d'Europe sont en France : 36 000 sur 90 000. L'augmentation du plafond du nombre de coupons à 15 % par pays ne suffira pas à couvrir nos besoins. Ensuite, pour proposer du Wifi à très haut débit, il faut que la commune bénéficie d'un réseau fixe à très haut débit de qualité ».
Colette Mélot souhaite donc que ce dispositif soit prolongé au-delà de l'appel à candidatures prévu pour fin 2019 et de celui pour 2020. Elle souhaite également le faire évoluer : cette manne financière « pourrait être destinée en priorité à des communes qui en ont le plus besoin, soit en raison de leurs moyens limités, soit en raison de leur situation géographique. C'était déjà une demande de la France pour l'actuel dispositif », indique-t-elle.
Une autre piste est aussi évoquée : « ne pas prendre en charge 100 % des coûts pour augmenter le nombre de bénéficiaires. Dans ce cas de figure, un cofinancement pourrait être mis en place ». Avec des coupons de 7 500 euros, deux fois plus de communes seraient ainsi éligibles.
Enfin, dans sa note d'information, le Sénat rappelle que « les élus pourront trouver un financement supplémentaire ou de substitution dans certaines dotations mises à disposition par l’État. C’est particulièrement le cas, sous certaines conditions, de la dotation de soutien à l’investissement local, la DSIL, créée en 2016 et prévue à l’article L.2337-42 du code général des collectivités territoriales ».