Au premier trimestre, les revenus d'Iliad augmentent doucement, tandis que le nombre d'abonnés est encore en baisse. Après avoir chamboulé ses offres en juin, le groupe trace les grandes lignes de ses ambitions... d'ici 2024.
Iliad vient de dévoiler son bilan pour le premier trimestre. Le fournisseur d'accès se vante d'un « chiffre d’affaires Groupe en hausse de 7,7 % » et d'un « retour de la croissance en France avec notamment une très bonne performance du Mobile ». Mais derrière ces annonces se cachent des baisses du nombre d'abonnés sur le fixe et le mobile.
La tendance à la hausse est donc surtout renforcée par l'intégration de Jaguar Network et des revenus en Italie. Afin de renforcer son bilan et disposer d'une rentrée d'argent frais, Iliad annonce être en discussions exclusives pour la vente de ses filiales Iliad TowerCo (infrastructures passives) à Cellnex, pour un total de 2 milliards d'euros.
Le groupe en profite pour dévoiler son plan Odyssée 2024, des grandes lignes et des objectifs, sans détails pour le moment.
Italie, Jaguar et équipements fixes « sauvent » le bilan
Les revenus d'Iliad sont de 1,293 milliard d'euros sur les trois premiers mois de l'année, contre 1,201 milliard au premier trimestre 2018. Ils sont donc en hausse de 92 millions d'euros, dont 81 millions proviennent du développement en Italie. Un bon score pour le groupe, mais pas pour sa branche française.
En effet, dans l'Hexagone la hausse est de 12 millions d'euros, dont 10 millions pour Jaguar Network récemment racheté. À périmètre constant, la hausse des revenus en France est donc plus modeste : 2 millions d'euros (+0,2 %).
Dans le détail, les services sont en baisse de 0,4 % – et même 1,3 % hors Jaguar Network – plombés par le fixe qui chute de 2,7 % en passant de 672 millions d'euros à 654 millions. Par contre, sur le mobile, le chiffre d'affaires facturé aux abonnés augmente de 5,2 % à 487 millions d'euros permettant de limiter la casse.
Les équipements (fixes et mobiles) rapportent 30 % de plus à Iliad, pour un montant de 73 millions d'euros. Ce dernier point est largement boosté par la vente du Player de la Freebox Delta. Iliad explique que « la baisse du chiffre d’affaires équipements sur le Mobile se poursuit, en raison d’une politique plus stricte sur les offres de location mise en place en 2018 ».
66 000 clients de moins en trois mois
Sur le mobile, Iliad perd 50 000 clients en trois mois, contre 16 000 sur le fixe. Plusieurs bonnes nouvelles tout de même. Tout d'abord, l'ARPU (revenu moyen par abonné) de la Freebox grimpe de 70 centimes pour arriver à 32,5 euros, certainement grâce aux nouvelles Freebox Delta et One, plus chères.
Sur le fixe, le FTTH progresse de 150 000 abonnés en l'espace de trois mois et dépasse le million de clients. Sur le mobile ensuite, le nombre de forfaits Free illimités augmente de 75 000 pour arriver à 7,858 millions. Enfin, 3,309 millions de clients étaient recensés en Italie au 31 mars 2019, soit 472 000 de plus en trois mois.
Voici les principaux chiffres à retenir :
- Free Mobile : 13,391 millions abonnés (-50 000 en trois mois)
- Dont 7,858 millions (+75 000 en trois mois) au forfait illimité
- Freebox : 6,411 millions abonnés (-16 000 en trois mois)
- Dont 1,133 millions en fibre (+150 000 en trois mois)
Cellnex va racheter 70 % d'Iliad TowerCo
En marge de ses résultats, Iliad annonce un partenariat « industriel stratégique » avec Cellnex autour d'Iliad TowerCo. La société est ainsi « entrée en négociations exclusives pour la cession de 70 % de la société gérant ses infrastructures passives de télécommunications mobiles et comprenant 5 700 sites ». Une opération déjà réalisée par Altice/SFR.
Le but est évidemment de disposer d'une rentrée d'argent, qui sera majoritairement utilisée pour « renforcer la structure du bilan du Groupe ». Parmi les pistes mises en avant par Iliad : « renforcer la capacité d’investissement du Groupe qui entre dans un nouveau cycle de croissance et d’innovation » et « conforter la solidité financière d’Iliad en réduisant le levier d’endettement d’environ 1x l’EBITDA ». Il faut dire que les enchères pour la 5G arrivent à grands pas.
« L’opération envisagée valorise Iliad TowerCo à une valeur d’entreprise de 2 milliards d’euros », affirme Iliad. De son côté, « Iliad TowerCo sera à même d’offrir des services à l’ensemble des opérateurs ». La transaction devrait être finalisée durant le quatrième trimestre 2019. Une autre opération du même genre est lancée en Italie, avec Iliad Italia TowerCo. Cette fois-ci, le groupe a conclu un accord avec Cellnex pour céder 100 % de sa filiale, qui serait ainsi valorisée 600 millions d'euros.
Au total, Iliad espère ainsi récupérer 2 milliards d'euros (1,4 milliard en France, 600 millions en Italie).
Après la traversée du désert en 2018, l'Odyssée jusqu'en 2024
La société de Xavier Niel profite de la publication de ses résultats pour dévoiler sa feuille de route pour les cinq prochaines années. Une annonce attendue, qui arrive avec trois semaines de retard sur le calendrier initial. Iliad commence par une autocritique : « 2018 a été une année difficile pour le Groupe, marquée par de mauvaises performances commerciales, un manque d’anticipation et des retards d’adaptation ».
Les nouvelles offres lancées en juin dernier (lire notre analyse) « commencent à porter leurs fruits comme en témoignent les résultats du 1er trimestre et permettent au Groupe de présenter aujourd’hui son plan Odyssée 2024 ». Ce dernier repose sur « un renforcement de la présence du Groupe sur le marché de la Fibre, une montée en puissance sur les réseaux 4G et 5G, un développement sur le marché des entreprises en France et une forte croissance des activités en Italie ».
Des paroles, sans les actes
Iliad vise ainsi « 30 millions de prises raccordables en 2024 – avec une présence sur l’intégralité du territoire et notamment tous les RIP où la part de marché est aujourd’hui faible »... il faut donc s'attendre à de multiples annonces sur le sujet, Iliad étant le roi de la découpe. Pour rappel, Orange a également annoncé son arrivée sur l'ensemble des RIP.
Le cas de la Freebox Delta n'est pas détaillé, alors que de nombreuses nouveautés étaient attendues pour le début d'année, sans évolution concrète pour le moment. Pas un mot non plus sur la complexité de l'offre fixe et son éventuelle refonte.
Sur le mobile, « l’ambition est de conquérir la place de 1er opérateur alternatif sur le très haut débit mobile 4G et 5G ». Le groupe veut construire 2 000 nouveaux sites en moyennes par an, tout en continuant à « favoriser la montée en gamme de nos abonnés vers l’offre data 4G puis 5G ». D'ici 2024, Free Mobile veut ainsi 80 % d'abonnés sur son forfait haut de gamme, contre seulement 58 % actuellement.
Toujours sur le mobile, Iliad veut « adresser de manière ambitieuse l’actuel marché dit du "subventionnement" qui aura été ouvert à une nouvelle concurrence ». Pour rappel, et après plusieurs années de batailles judiciaires, Free a récemment gagné en appel contre SFR sur cette question. Par contre, pas un mot sur la manière dont Free Mobile compte justement adresser ce marché.
Sur le B2B, Iliad veut « créer un nouvel opérateur d’envergure nationale », notamment poussé par le rachat de Jaguar Network. Le groupe espère représenter 4 à 5% de part du marché entreprise à l'horizon 2024, pour 400 à 500 millions d’euros de chiffre d’affaires. Il va donc entrer en concurrence directe avec Bouygues Telecom, qui rachète aussi des sociétés pour se renforcer sur ce segment.
Fort de son succès au lancement en Italie, Iliad affirme enfin son intention de devenir un acteur de référence « à la fois dans le fixe et dans le mobile ». Si les forfaits de téléphonie sont connus, ce n'est pas le cas des abonnements sur le fixe pour l'instant ; aucune date n'est même évoquée.
Bref, plein de promesses dont on attend maintenant de voir comment elles vont se concrétiser.