Un salarié ne peut être licencié pour des commentaires de ses « amis » Facebook

Un salarié ne peut être licencié pour des commentaires de ses « amis » Facebook

Sarthe de bonne conduite

Avatar de l'auteur
Xavier Berne

Publié dans

Droit

05/12/2018 3 minutes
18

Un salarié ne peut être licencié pour des commentaires de ses « amis » Facebook

La cour d’appel d’Angers vient de juger « sans cause réelle et sérieuse » le licenciement d’une salariée à qui il était reproché, notamment, d’avoir laissé sur son compte Facebook des commentaires injurieux envers son employeur.

« Si un salarié jouit d’une liberté d’expression notamment quant à l’organisation et le fonctionnement de l’entreprise dans laquelle il travaille, c’est à la condition qu’il n’en abuse pas en utilisant des termes injurieux, diffamatoires ou même excessifs », ont tout particulièrement tenu à rappeler, dans cette affaire, les magistrats en charge du dossier.

Cette invitation à la retenue prévaut également sur Internet, puisqu’il « importe peu que les propos soient tenus au temps et au lieu du travail ou non ».

Le litige était né en 2016. Une maison de retraite de la Sarthe avait licencié une secrétaire pour faute grave. Motif invoqué : « dénigrement de l’entreprise auprès des résidents et sur Internet ».

Un mur et des commentaires « en libre accès »

L’employeur s’appuyait sur des messages accessibles librement sur Facebook, au travers desquels la salariée affirmait par exemple avoir « passé une journée de merde ». Du fait d’un précédent litige étant allé jusqu’aux prud’hommes, la secrétaire s’en prenait en outre « à tous les indics » travaillant avec elle.

La lettre de licenciement se poursuivait de la sorte : « Les commentaires de vos amis sont quant à eux outranciers ('petits cons', 'opération aussi complexe que de nettoyer l’anus d’une hyène'). »

« Il est inenvisageable de permettre que vous dénigriez l’entreprise et vos collègues de travail, et que vous laissiez vos amis publier des commentaires aussi violents, sur une page Internet en libre accès », déplorait alors l’employeur.

Résultat, le maintien de la secrétaire dans l’entreprise fut jugé « inenvisageable » (ce qui justifiait le licenciement pour faute grave, sans préavis ni indemnités afférentes).

Pas de responsabilité sur les messages publiés par des tiers

« Il ne résulte pas de ces messages un dénigrement de l’employeur », vient toutefois de trancher la cour d’appel d’Angers. « Les autres messages transcrits par l’huissier de justice et l’employeur dans la lettre de licenciement n’ont pas été rédigés par la salariée mais par des tiers », relève ensuite la juridiction, au travers d’un arrêt rendu le 29 novembre dernier (et consultable sur Doctrine). En creux, on comprend que la secrétaire mise en cause n’avait donc pas à procéder à une quelconque modération.

Et ce même si les messages litigieux étaient diffusés « sur un ‘mur’ public, ouvert à tout un chacun », comme en attestait le constat d’huissier brandi par l’employeur.

La maison de retraite ne rapportant pas non plus « le moindre élément justificatif » de propos dénigrants tenus par la salariée auprès des résidents, les juges ont estimé que les faits qui lui étaient reprochés ne pouvaient recevoir « ni la qualification de faute grave ni celle de cause réelle et sérieuse de licenciement ».

L’employeur a de ce fait été condamné à verser près de 20 000 euros à son ancienne secrétaire (dont 10 500 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse). Il devra également rembourser certaines indemnités chômage à Pôle emploi – à moins que l’affaire ne se poursuive jusqu’en Cassation.

Écrit par Xavier Berne

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Un mur et des commentaires « en libre accès »

Pas de responsabilité sur les messages publiés par des tiers

Le brief de ce matin n'est pas encore là

Partez acheter vos croissants
Et faites chauffer votre bouilloire,
Le brief arrive dans un instant,
Tout frais du matin, gardez espoir.

Fermer

Commentaires (18)


C’est bon ça !




« Il est inenvisageable de permettre que vous dénigriez l’entreprise et vos collègues de travail, et que vous laissiez vos amis publier des commentaires aussi violents, sur une page Internet en libre accès »



“Passer une journée de merde” n’est pas un dénigrement de l’entreprise et des collègues, c’est de l’extrapolation malvenue… Il faut voir le mal partout pour le penser.



Quand aux amis, l’employé a un devoir de loyauté comme dans chaque contrat, mais ça ne dit pas de faire la police et donc en quoi cela incluerait les tiers ? Ces derniers ont signé le contrat aussi ?



L’employeur a tendu le bâton pour se faire battre. Dommage que la sanction soit peu salée, car en attendant une personne est au chômage…








TheKillerOfComputer a écrit :



en attendant une personne est au chômage…







Oui peut être, mais j’en connait beaucoup qui aimeraient bien se retrouver au chômage comme ça avec 20 000 € d’indemnités…



On peut toujours faire une loi pour rendre la plateforme responsable dans ce cas…

C’est à la mode !








stratic a écrit :



Oui peut être, mais j’en connait beaucoup qui aimeraient bien se retrouver au chômage comme ça avec 20 000 € d’indemnités…





20K€ plusieurs années après, ça n’aide pas dans les semaines et mois qui suivent le licenciement ;)



20K€ quand t’es dans la merde, ça aide juste à t’en sortir, et encore.



C’est ridicule comme remarque.

Si elle a du mal à retrouver du travail, cela ne couvrira pas son préjudice. Sur ces 20 000 €, seuls 10500 € couvrent ce préjudice, ce qui ne fait que 9 mois de SMIC pour une personne de 49 ans qui a été reconnue comme ayant du mal à retrouver un emploi. Je trouve au contraire que c’est peu.



Le reste est des sommes qui lui étaient dues puisque le licenciement pour faute grave était non avéré dont le remboursement de frais de justice pour 2500 €.








the_Grim_Reaper a écrit :



20K€ plusieurs années après, ça n’aide pas dans les semaines et mois qui suivent le licenciement ;)



20K€ quand t’es dans la merde, ça aide juste à t’en sortir, et encore.



 



Et encore, dans les 20.000€ une bonne partie c’est des indemnités légales qu’elle n’a pas touché car l’entreprise a considérée que les causes étaient graves. En fait, elle ne touche de 10.500 de dommages et intérêts….



cramé par fred42 <img data-src=" />



Ce qu’il faut pas lire, sérieux… Tu crois peut-être qu’être licencié et se retrouver au chômage est un plaisir ? Ah mais oui, il suffit de traverser la rue pour retrouver du boulot !



Ca fait 2 ans (peut-être presque 3) que cette affaire a commencé. A ton avis, elle a reçu ces 20 000 euros à cette époque ?



Et as-tu pensé à la difficulté de retrouver un emploi, après ce licenciement ? Si lors de la candidature, l’employeur appelle l’ancien pour avoir des infos, tu crois que ce dernier a parlé d’elle en bons termes ?








Jarodd a écrit :



Ce qu’il faut pas lire, sérieux… Tu crois peut-être qu’être licencié et se retrouver au chômage est un plaisir ? Ah mais oui, il suffit de traverser la rue pour retrouver du boulot ! Ca fait 2 ans (peut-être presque 3) que cette affaire a commencé. A ton avis, elle a reçu ces 20 000 euros à cette époque ? Et as-tu pensé à la difficulté de retrouver un emploi, après ce licenciement ? Si lors de la candidature, l’employeur appelle l’ancien pour avoir des infos, tu crois que ce dernier a parlé d’elle en bons termes ?







  • 10000000000000000000000000000000000000000000000 <img data-src=" />



    Le temps que le litige sois jugé tu sera en galère d’argent, et quand le jugement sera prononcé tu aura du mal à retrouver un travail car grillé dans le secteur. D’ailleurs dans certains secteurs le motif de licencient est plus ou moins accessible “publiquement” donc dès le début galère d’argent et pour retrouver un travail.



    Ensuite oui tu aura 20.000€ mais vu le nombre de dettes accumulés c’est pas cher payé. A savoir maintenant si un motif de licenciement&nbsp; en cours qui génère une difficulté du travail peut conduire à des dommages et intérêts supplémentaire pendant le temps de la dite galère. M’enfin je suppose que c’est pas le cas actuellement.









Jarodd a écrit :



Ca fait 2 ans (peut-être presque 3) que cette affaire a commencé. A ton avis, elle a reçu ces 20 000 euros à cette époque ?





Ça fait presque 3 ans oui. Le litige ayant commencé au 31/01/2016.



Et vu comme cette affaire a commencé, je te parie que l’employeur a bien trainé avant de fournir tous les papiers requis pour l’allocation chômage.



&nbsp;









stratic a écrit :



Oui peut être, mais j’en connait beaucoup qui aimeraient bien se retrouver au chômage comme ça avec 20 000 € d’indemnités…





20k€ ça fait environ 1 an de salaire (selon le niveau des salaires du métier de la salariée que je ne connais pas). C’est bien en effet mais si ton chômage dure, pas sûr que ce soit si bien. Sans compter l’énergie que prend une action en justice.



Voilà. Donc licenciement sans préavis, sans indemnité, et probablement sans allocation chômage.



Effectivement, “j’en connait beaucoup qui aimeraient bien se retrouver au chômage comme ça” <img data-src=" />


Pas étonnant …


Vu sous cet angle, les 10000 euros au bout de presque 3 ans de procedures ne representent pas une grosse indeminsation…



comme un INpactien l’a dit plus haut, ca va assainir la situation financiere de la dame, mais ca ne dedommage pas tant que ca de la grosse galere qui a du suivre le licenciement








stratic a écrit :



Oui peut être, mais j’en connait beaucoup qui aimeraient bien se retrouver au chômage comme ça avec 20 000 € d’indemnités…





Sur ces 20 000 € il y a les frais d’avocat ! Autant dire qu’il ne reste pas grand chose.



non. L’employeur a été condamné également aux dépens (art. 700) : c’est la maison de retraite qui paie l’avocat de Mme X







Doctrine (sourcé dans l’article) a écrit :



Il est par ailleurs équitable d’allouer à Mme X une indemnité de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile au paiement de laquelle la société La Rose des Vents sera condamnée.




Pas sûre que l’avocat se contente de ça !


Ces 2500 € sont dans les 20000 € et on ne connaît pas le coût réel de l’avocat. L’article 700 ne couvre qu’une partie des frais d’avocats.