Au travers d’un rapport présenté aujourd’hui, la députée Aurore Bergé plaide pour une redevance « universelle », payée donc par chaque foyer fiscal (même dépourvu de téléviseur). L’élue LREM souhaite maintenir le montant de la fameuse contribution, ce qui permettrait de supprimer la publicité sur Radio France, ainsi que sur France 5.
Alors que la ministre de la Culture a récemment affirmé que le chantier de la « contribution à l’audiovisuel public » serait rouvert dans un an, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, les conclusions de la mission d’information « sur la régulation de la communication audiovisuelle » vont sans surprise apporter de l’eau au moulin de la Rue de Valois.
Sa rapporteure, Aurore Bergé, en appelle notamment à une redevance « profondément réformée ». « Incohérent dans son fait générateur, vécu comme injuste dans ses modalités, cet impôt suscite le plus souvent l’incompréhension de ceux qui y sont assujettis, souligne la députée. Qui plus est, la possible attrition future de son assiette ne peut que justifier, si l’on souhaite préserver les financements dont bénéficient les entreprises de l’audiovisuel public, qu’une réflexion sur ses modalités de calcul soit rapidement menée à son terme. »
Un dispositif juridique qui souffre d’une « incohérence patente »
Le problème est loin d’être nouveau. À ce jour, la redevance, qui est destinée à financer les chaînes et radios publiques, est due par toute personne qui détient une télévision ou un « dispositif assimilé ». Outre le fait que « la liste de ces dispositifs assimilés fait l’objet de débats récurrents », Aurore Bergé déplore l’« incohérence patente » du régime en vigueur :
« Il n’existe aucune raison valable de soumettre à l’impôt le détenteur d’une télévision qui regarde les programmes de France Télévisions en direct et de permettre à celui qui accède aux contenus produits par Arte après leur diffusion par le biais de son ordinateur, qui écoute, sur son téléphone portable, le podcast d’une émission de France Inter ou regarde, sur sa tablette, la dernière vidéo publiée par l’Institut national de l’audiovisuel sur les réseaux sociaux, d’échapper au paiement de la contribution à l’audiovisuel public », écrit la parlementaire.
Comme de nombreux acteurs de l'audiovisuel, Aurore Bergé voit dans la multiplication des appareils permettant de profiter des contenus diffusés par les entreprises de l’audiovisuel public (ordinateurs, smartphones, tablettes...) un potentiel danger pour la pérennité de la redevance. L’élue explique ainsi que l’on constate depuis quelques années une « diminution lente mais continue du taux de pénétration des téléviseurs ». De 98 % en 2012, ce taux est en effet descendu à 93 % l’année dernière.
L’élue reconnaît néanmoins que le nombre de foyers assujettis à la redevance « ne semble pas, pour l’heure, pâtir de cette évolution ». Mieux : il « continue de progresser », peut-on lire dans le rapport, en raison « de la croissance démographique et d’évolutions sociologiques notables tendant à l’augmentation du nombre de personnes vivant seules ».
Toutefois, poursuit Aurore Bergé, « d’aucuns estiment qu’en l’absence de réforme, la baisse du rendement de la contribution à l’audiovisuel public est inéluctable à court ou moyen terme ». La députée plaide ainsi pour une « réforme profonde et rapide », faute de quoi il faudrait selon elle « augmenter de façon déraisonnable la fiscalité pesant sur les foyers qui possèderont encore un téléviseur dans les décennies à venir ».
Une redevance pour chaque foyer, sauf cas de dégrèvement
L’élue reprend sans grande surprise la proposition, déjà mise en avant ces derniers mois au sein de la majorité, d’instaurer une redevance « universelle ». « Considérant que tous les foyers ont aujourd’hui un accès potentiel, d’une façon ou d’une autre, aux programmes proposés par les sociétés de l’audiovisuel public, le paiement d’une contribution forfaitaire par foyer, d’un montant identique à celui d’aujourd’hui [139 euros pour 2017, ndlr], est envisageable », soutient Aurore Bergé.
En clair, la contribution serait systématiquement due, téléviseur ou pas, ordinateur ou pas, radio ou pas.
Alors que certains espéraient que cette réforme permettrait de diminuer le montant de la redevance (justement pour faciliter son acceptation), Aurore Bergé plaide de son côté pour l’introduction de « dispositifs de dégrèvements ». L’idée : que « les personnes qui sont aujourd’hui dispensées du paiement de la taxe à raison de leur situation sociale – revenus, âge, etc. – le soient également demain ».
Entre 100 et 150 millions d’euros de recettes supplémentaires
L’élue estime que l’universalisation de la redevance permettrait de générer « entre 100 et 150 millions d’euros » de recettes supplémentaires pour les finances publiques (visiblement par an).
Avec cette enveloppe, la députée voudrait « financer la suppression de la publicité sur les antennes de Radio France » et « la réduire significativement sur les chaînes du groupe France Télévisions, par exemple sur France 5, la consacrant ainsi comme la chaîne de la connaissance et du savoir ».
Les pistes de réforme esquissées par Aurore Bergé devront encore convaincre, comme en illustre cette réaction du sénateur Roger Karoutchi (LR).
Total désaccord avec les députés En Marche qui veulent élargir l’assiette de la redevance audiovisuelle pour taxer les ménages de 100 à 200 millons d’euros supplémentaires.L’audiovisuel public peut faire 200 millions d’euros d’économies en 3 ans(sur 4 milliards!).Stop aux impôts!
— Roger KAROUTCHI (@RKaroutchi) 4 octobre 2018