Plateformes : un projet d’arrêté dessine les futures déclarations automatisées au fisc

Plateformes : un projet d’arrêté dessine les futures déclarations automatisées au fisc

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Xavier Berne

Publié dans

Droit

26/09/2018 6 minutes
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Plateformes : un projet d’arrêté dessine les futures déclarations automatisées au fisc

Le gouvernement prépare activement la mise en œuvre de la déclaration automatisée des revenus issus des plateformes. Alors que la réforme est toujours en discussion au Parlement, l’exécutif a notifié hier un arrêté d’application à la Commission européenne.

La majorité veut visiblement aller vite. La semaine dernière, les députés ont adopté, en première lecture, le projet de loi de lutte contre la fraude.

Le texte, qui fera bientôt l’objet d’une commission mixte paritaire (afin de trouver un compromis entre Assemblée et Sénat), revoit en profondeur le dispositif de « déclaration automatisée des revenus » issus des plateformes, qui était censé entrer en vigueur au 1er janvier 2019.

Ces dispositions touchant à la « société de l’information », la législation européenne impose à l’exécutif de les notifier à Bruxelles, afin de déceler d’éventuelles contrariétés avec les règles de l’Union. C’est ce qu’a fait hier la France, en y assortissant un projet d’arrêté complétant le dispositif.

D'importantes précisions ressortent du projet d’arrêté

Sans surprise, le gouvernement a transmis à la Commission européenne la copie votée il y a quelques jours à peine par les députés. Les élus du Palais Bourbon ont souhaité que les plateformes de mise en relation (Airbnb, Ebay...) soient tenues :

  1. D’adresser chaque année à leurs utilisateurs un récapitulatif précisant notamment le « nombre et le montant total brut » des transactions réalisées par leur intermédiaire au cours de l’année civile précédente.
  2. D’adresser à l’administration fiscale ce même récapitulatif annuel.
  3. De « fournir, à l’occasion de chaque transaction, une information loyale, claire et transparente sur les obligations fiscales et sociales » qui incombent à leurs utilisateurs.

Avec cette réforme, le gouvernement entend mieux « accompagner les usagers dans l'accomplissement de leurs obligations fiscales grâce à un nouveau service ». Il sera ainsi rappelé aux contribuables concernés, « lors de l'affichage de leur déclaration de revenus en ligne, via un message d'information spécifique, qu'ils ont perçu des revenus issus de l'économie collaborative et qu'il leur appartient de les déclarer le cas échéant ».

À partir de 1 000 euros de transactions, vérification d’identité

C’est toutefois dans le projet d’arrêté notifié hier à la Commission que l’on en apprend davantage sur les desseins de l’exécutif. Le gouvernement y définit par exemple les « éléments d’identification de l’utilisateur » qui devront notamment être intégrés au récapitulatif annuel transmis au fisc.

Il s’agira, pour les particuliers, des noms et prénoms, adresse de résidence, numéro de téléphone, adresse email et date de naissance. Toutefois, si le « montant total brut » des transactions réalisées au cours d’une année par un utilisateur est supérieur ou égal à 1 000 euros, la plateforme devra soit :

  • Vérifier les noms, prénoms et date de naissance de l'utilisateur, « notamment sur présentation (...) d'une copie d'une pièce d'identité ».
  • Fournir à l’administration fiscale « le numéro d'inscription au fichier de simplification des procédures d'imposition (SPI) de l'utilisateur, après en avoir vérifié la structure, le format et l'algorithme ».

Pour les personnes morales ou physiques agissant à titre professionnel, la plateforme devra transmettre « la raison sociale » de l'utilisateur, le « lieu d’établissement connu de l’opérateur », son numéro de TVA intracommunautaire, ainsi que son adresse email.

Des coordonnées bancaires parfois « réputées connues » des plateformes

L’autre précision importante apportée par le projet d’arrêté concerne les coordonnées bancaires des utilisateurs de plateformes, qui devront elles aussi être intégrées, dans certains cas de figure, au récapitulatif transmis au fisc. Le projet de loi prévoit en effet une communication impérative lorsque ces informations sont « connues » de la plateforme.

Visiblement pour éviter que certains opérateurs ne profitent un peu trop de cette potentielle issue de secours, le gouvernement souhaite que ces coordonnées bancaires (de type BIC et IBAN) soient « réputées connues de l’entreprise dès lors que cette dernière procède directement au versement des sommes auprès de l’utilisateur, ou lorsqu’elle a recours, à cette fin, à un prestataire de services ». Autrement dit, il devra y avoir communication automatique dans ces deux cas de figure.

Pas de transmission automatique au fisc pour certains particuliers

Le projet d’arrêté vient enfin confirmer certains éléments avancés par l’exécutif, la semaine dernière à l’Assemblée nationale. La majorité a en effet introduit une « dispense » de déclaration automatisée au fisc pour les biens vendus d’occasion entre particuliers, ainsi qu’en cas de service « sans objectif lucratif et avec partage de frais avec les bénéficiaires » (de type covoiturage).

Cette dérogation n’est cependant censée s’appliquer que dans deux cas de figure :

  • Lorsque « le total des montants perçus par un même utilisateur n’excède pas un montant annuel » fixé par arrêté des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale.
  • Lorsque « le nombre de transactions réalisées dans l’année est inférieur à un seuil », là encore fixé par arrêté ministériel.

Le texte notifié hier à Bruxelles fixe comme prévu le premier de ces seuils à 3 000 euros, le second à vingt transactions.

Ainsi, selon l’exécutif, « une personne qui, sur une plateforme donnée, réalise un grand nombre de transactions mais pour un montant total inférieur à 3 000 euros ne verra pas ses données de transactions communiquées par la plateforme à l’administration. De même, une personne qui réalise pour plus de 3 000 euros de transactions mais en un petit nombre de transactions (moins de 20) [via plusieurs plateformes, ndlr], ne verra pas non plus ses données transmises. »

Lors des débats à l’Assemblée, le ministre de l’Action et des comptes publics a toutefois bien insisté sur le fait que ce régime dérogatoire visait à alléger les formalités pour les plateformes de type Leboncoin et Blablacar, mais ne changeaient rien en termes de fiscalisation des revenus perçus par leur intermédiaire.

Les revenus devant être déclarés continueront à l’être (que leur montant ait été communiqué automatiquement au fisc ou non), et inversement. Gérald Darmanin a ainsi souligné qu’il ne s’agissait aucunement de « fiscaliser ce qui relèverait de la brocante ou d’échanges ne donnant lieu à aucune plus-value ».

La Commission européenne et les États membres disposent désormais d’un délai de trois mois pour faire valoir leurs éventuelles remarques sur les dispositions envisagées par la France. Celles-ci sont malgré tout susceptibles d’évoluer (au moins en partie), députés et sénateurs travaillant à un compromis entre assemblées.

Écrit par Xavier Berne

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Introduction

D'importantes précisions ressortent du projet d’arrêté

À partir de 1 000 euros de transactions, vérification d’identité

Des coordonnées bancaires parfois « réputées connues » des plateformes

Pas de transmission automatique au fisc pour certains particuliers

Commentaires (6)


Merci pour cet article


Donc pour le bon coin, il suffit de multiplier les comptes pour ne pas être remonté automatiquement. C’est sûr que ça va dérouter les “faux” particuliers…


On ira sur des plateformes étrangères :)








teddyalbina a écrit :



On ira sur des plateformes étrangères :)





C’est en effet beaucoup plus simple et pratique. <img data-src=" />



Ou de ne pas utiliser leboncoin comme tiers de paiement, comme c’était le cas jusqu’à il y a peu.

On sent quand même que le dispositif est taillé pour les gens qui voient passer des gros montants, il sera assez simple pour les autres d’éviter la transmission automatique (ceci n’est pas un jugement sur la légalité de la non déclaration).


j’ai bien peur que cela ne soit pas possible/permis par les plateformes, genre passer par ebay.uk ou rakuten.com.br, grâce à la fameuse amende dissuasif qu’ils vont potentiellement avoir dans ce cas. même vinted basé en ukraine ne vas pas y couper



par contre je connais plein de retraité qui font de l’achat vente, par an ca leur rapporte dans les 4 500€ sur 600-800 vente, c’est une vrai occupation, et c’est fait pour payer leur impôts foncier/locaux/assurances.



ha ca il vont pas créer une structure d’optimisation fiscale en Irlande avec ce genre de revenu<img data-src=" />. J’eusse tenter de les convaincre de déclarer, mais bon c’est tellement limpide la déclaration sur internet -&gt; Calandre grec.



&nbsp;Au moins si c’est près-rempli je pense que la plupart n’y sont pas opposé, moi le premier. 20 ans après l’économie numérique le fisc se réveille <img data-src=" />. J’imagine que pour les gros groupes étranger, il faudra un siècle pour qu’il paye l’impots en France