Surveillance de masse et CEDH : interview de Théodore Christakis

Surveillance de masse et CEDH : interview de Théodore Christakis

Victoire à la Pyrrhus

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Marc Rees

Publié dans

Droit

19/09/2018 12 minutes
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Surveillance de masse et CEDH : interview de Théodore Christakis

La Cour européenne des droits de l’Homme a rendu la semaine dernière un arrêt important. Ce dernier condamne le Royaume-Uni pour son programme de surveillance de masse. De rapides conclusions ont été tirées dans les premiers commentaires, que Théodore Christakis, professeur de droit et membre du CNNum, relativise au fil de cette interview.

À la suite des révélations d’Edward Snowden relatives au programme de surveillance et de partage de renseignements entre les États-Unis et le Royaume-Uni, trois requérants avaient saisi la CEDH contre le Royaume-Uni . Il s’agit de l’ONG Big Brother Watch, de représentants des journalistes et d’une dizaine d’organisations de protection des droits de l’Homme, soit en tout, 16 organisations.

« Les requérants dans ces trois affaires estiment que, en raison du caractère sensible de leurs activités, leurs communications ont pu être interceptées par les services de renseignements soit britanniques soit américains », résument les services de la cour. Tous ont mis en cause le régime d’interception massive, ainsi que le partage des renseignements entre les services à partir des données glanées par les fournisseurs de services en ligne. 

Lors de leurs saisines, entre septembre 2013 et mai 2015, toutes les ONG ont considéré qu’une série d’articles de la Convention européenne des droits de l’homme était violée, en particulier l’article 8 sur le respect droit au respect de la vie privée et de la correspondance, l’article 10 sur la liberté d’expression, sans oublier l’article 6 qui garantit le droit à un procès équitable et le 14 sur la non-discrimination. Selon eux, une personne se trouvant hors du Royaume-Uni aurait plus de chance de voir ses données interceptées qu’un résident.

Dans les plus de deux cents pages de son arrêt rendu jeudi 13 septembre 2018, la CEDH estime que le régime de la surveillance massive ne constitue pas en soi une violation de la Convention européenne, cependant, il y a bien violation du texte fondateur lorsque ce régime manque d’encadrement. C’est en substance ce que nuance Théodore Christakis, professeur de droit international, directeur adjoint du Grenoble Alpes Data Institute et membre du Conseil national du numérique, dans cet échange. 

Immédiatement après l’arrêt, certaines ONG comme Amnesty International ont parlé d’une « grande victoire » et même Snowden a twitté qu’« aujourd’hui nous avons gagné ». Les ONG avaient-elles raison de parler d’une « grande victoire » ?

Une victoire oui, sans doute, mais certainement pas une grande victoire... Plutôt une victoire mi-figue, mi-raisin qui, je le crains, pourrait même s’avérer être une victoire à la Pyrrhus.

Les ONG investissent beaucoup de ressources pour se battre contre des géants – en l’occurrence ici contre de grandes agences de renseignement. C’est une mission importante dans une société démocratique qui permet d’apporter de l’équilibre et de lutter contre d’éventuels abus.

Dans cette lutte entre David et Goliath, chaque succès compte et cet arrêt en constitue clairement un dans la mesure où les techniques d’interception massive des communications pratiquées par l’agence de renseignement britannique (le Government Communications Headquarters ou GCHQ) ont été considérées comme violant deux droits importants de la Convention européenne des droits de l’homme : l’article 8 (protection de la vie privée) et l’article 10 (liberté d’expression – compte tenu de l’absence de garanties pour la protection du secret des sources des journalistes). Par ailleurs, la cour a souligné que l’accès aux données de connexion (ou métadonnées) pourrait être tout aussi intrusif que l’accès aux données de contenu. 

C’est donc une victoire pour les requérants qui est d’autant plus précieuse qu’à la lecture des opinions dissidentes on comprend que deux des sept juges de la cour étaient en faveur d’une décision « blanchissant » presque entièrement le Royaume-Uni.  

Toutefois, si on regarde de plus près l’arrêt, on constate que ce qui est condamné par la cour, ce sont surtout certaines techniques utilisées par le GCHQ, notamment le fait que, sur certains points, le Royaume-Uni n’a pas assorti son système de surveillance de garanties suffisantes.

Croire, comme semblent l’indiquer certains tweets et commentaires de la société civile, que la cour a condamné la surveillance de masse en tant que telle et le « système » dénoncé par Snowden n’est pas exact. Grande nuance donc.

La cour accepte donc la politique de surveillance de masse en tant que telle ?

Oui. Déjà dans un arrêt rendu le 19 juin 2018 dans une affaire validant à l’unanimité la loi sur la surveillance internationale de la Suède, la cour avait, de façon aussi expresse que claire, reconnu que la surveillance de masse est une politique légitime que les États peuvent développer.

Mais dans cet arrêt, la cour va encore plus loin en disant (§386) qu’il s’agit même d’un « moyen précieux » pour les États pour protéger la société contre le terrorisme et le crime organisé.

On pourrait donc dire que désormais la cour de Strasbourg endosse une nouvelle situation en Europe, à savoir la multiplication des lois sur le renseignement ayant une dimension « surveillance de masse ». En contrepartie, la cour européenne essaye d’accompagner cette surveillance de garanties et de contrôles. Il ne s’agit donc plus d’une question concernant la légalité des politiques de surveillance de masse, mais plutôt d’une question liée au « comment l’opérer ».

Est-ce que cela ne va pas à rebours des positions de la CJUE dans l’affaire Schrems ou du G29 dans son analyse du Privacy shield ?

Effectivement, on est en train de constater, dans ce domaine, un certain contraste entre le « droit de la CEDH » et le « droit de l’Union européenne ».

Pour la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), le caractère indiscriminé et très général de la collecte et du traitement de données personnelles, fût-il pour protéger des populations contre des crimes graves, comporte des risques importants pour les droits et libertés et exige «que les dérogations à la protection des données à caractère personnel et les limitations de celle-ci s’opèrent dans les limites du strict nécessaire ».  Dans sa fameuse décision « Schrems » de 2015, qui avait invalidé le Safe Harbor, la CJUE avait clairement affirmé qu’une « réglementation permettant aux autorités publiques d’accéder de manière généralisée au contenu de communications électroniques doit être considérée comme portant atteinte au contenu essentiel du droit fondamental au respect de la vie privée ».

De manière similaire, le « Groupe de l’article 29 », qui regroupe les autorités européennes de contrôle des données personnelles (et qui est devenu, depuis l’entrée en vigueur du RGPD, le Comité européen de la protection des données), a publié en décembre dernier son premier rapport relatif au Privacy Shield, où il « réitère sa position de longue date selon laquelle une surveillance massive et indiscriminée des individus ne peut jamais être considérée comme proportionnée et strictement nécessaire dans une société démocratique, comme l'exige la protection offerte par les droits fondamentaux ».

En 2016, on avait alors cru que la CEDH allait suivre un chemin similaire. Dans un arrêt condamnant la Hongrie pour sa législation sur les opérations secrètes de surveillance antiterroriste, la CEDH avait en effet donné l’impression d’endosser le test de la « stricte nécessité » de la CJUE dès lors que l’on se trouve confronté à une surveillance de masse. L’arrêt Big Brother Watch montre qu’il n’en est rien et soulève des interrogations sur une certaine « fragmentation » du droit européen de la protection des données et de la vie privée. 

Est-ce que les garanties exigées par la cour sont suffisantes pour limiter les risques d’abus ?

Il faut noter ici un certain changement de paradigme dans la jurisprudence de la cour. Nous avions, jusqu’à présent, une jurisprudence étoffée concernant les nombreuses conditions et critères devant accompagner la surveillance.

Or, l’endossement de la politique de la surveillance de masse semble conduire la cour à bouleverser ces conditions. À titre d’exemple, alors que certains arrêts avaient indiqué que les États devraient notifier, dès que possible, à une personne visée qu’elle a fait l’objet d’une mesure de surveillance, la cour dit maintenant dans cette affaire Big Brother Watch (§317) que l’idée même de notification est logiquement incompatible avec un système de surveillance de masse (qui, par définition, n’est pas ciblé) et qu’il faut donc l’écarter.

Inversement, sur d’autres points la cour semble vouloir rendre certaines conditions plus strictes pour la surveillance de masse pour contrebalancer la flexibilité donnée aux autorités par ailleurs. 

A-t-on donc désormais deux régimes juridiques distincts de surveillance en Europe ? Un « classique », pour la surveillance ciblée, et un autre aménagé pour la surveillance de masse ?

C’est effectivement ce qui semble être le cas. Mais cette opération d’aménagement menée par la cour prête sur certains points à controverse. Je pense surtout au point suivant : la jurisprudence de la cour était que l’autorisation de procéder à une surveillance doit être donnée (sauf cas exceptionnels) soit par un juge (option préférable) soit par une autorité administrative indépendante du pouvoir exécutif. Il s’agit d’une exigence procédurale destinée à éviter les abus et qui s’est d’ailleurs avérée utile dans la structuration des lois de renseignement en Europe (la CNCTR, en France, lui doit sans doute son existence et ses pouvoirs, même si la CNCTR n’est pas investie de la mission « d’autoriser » à proprement parler...).

La cour contrôle d’ailleurs non seulement le respect de cette condition procédurale, mais aussi si elle est effective : dans l’affaire Zakharov (2015), par exemple, elle a condamné la Russie, car, alors qu’un contrôle juridictionnel ex ante était prévu par la loi, la cour a estimé que ce contrôle ne fonctionnait pas de façon efficace et ne permettait donc pas d’écarter les risques d’abus.

Dans l’arrêt Big Brother, la cour néglige pourtant cette condition procédurale. Elle déclare (§381) que, alors qu’au Royaume-Uni, l’autorisation de procéder à une surveillance de masse n’était donnée ni par un juge ni par une autorité administrative indépendante, il n’y a pas de problème, car plusieurs indices montrent qu’il n’y a pas d’abus de l’exécutif.

Le fond l’emporte sur la forme. Mais on perd en prévisibilité juridique : c’est une chose de poser une condition procédurale claire que les États doivent respecter – quitte à vérifier effectivement si elle fonctionne comme dans l’affaire Zakharov ; c’en est une autre de supprimer cette exigence procédurale en disant que « ce qui nous intéresse c’est s’il y a eu ou non abus de l’exécutif ». Comment la cour va-t-elle évaluer cela et selon quels critères ? N’y-a-t-il pas le risque de voir se développer un contrôle à deux vitesses : d’un côté certains pays de l’Est (Hongrie, Russie, Roumanie, Croatie, Bulgarie, Moldavie, Turquie) qui ont tous été condamnés par la cour pour leurs lois de surveillance et de l’autre les pays occidentaux (Suède, Royaume-Uni et autre France) qui pourraient bénéficier d’une évaluation plus « souple » car leurs systèmes démocratiques constitueraient en tant que tel un gage contre les abus ?

C'est la première fois que la cour se prononce sur le partage de renseignements avec des États étrangers – ici aux pratiques entre le GCHQ et la NSA...

Oui, et au grand dam des requérants, la cour estime que ces pratiques n’ont pas violé la convention et qu’elles étaient « nécessaires dans une société démocratique ». Cette partie de l’arrêt ne semble pas entièrement à la hauteur de l’importance de cette question fondamentale.

La cour s’intéresse presque exclusivement à la question de savoir si le partage de renseignements était « prévu par la loi » britannique – et ne consacre que deux brefs paragraphes (§445-446) à la question pourtant capitale de la proportionnalité pour nous dire, grosso modo, que « c’est important pour les pays d’échanger des renseignements pour nous protéger contre le terrorisme, donc c’est bon ». Il me semble que cette partie de l’arrêt aurait pu être plus étoffée en discutant davantage la question des risques, celle de l’autorisation préalable par une autorité indépendante et celle de l’effectivité des contrôles, des recours et des garanties.

Écrit par Marc Rees

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Immédiatement après l’arrêt, certaines ONG comme Amnesty International ont parlé d’une « grande victoire » et même Snowden a twitté qu’« aujourd’hui nous avons gagné ». Les ONG avaient-elles raison de parler d’une « grande victoire » ?

La cour accepte donc la politique de surveillance de masse en tant que telle ?

Est-ce que cela ne va pas à rebours des positions de la CJUE dans l’affaire Schrems ou du G29 dans son analyse du Privacy shield ?

Est-ce que les garanties exigées par la cour sont suffisantes pour limiter les risques d’abus ?

A-t-on donc désormais deux régimes juridiques distincts de surveillance en Europe ? Un « classique », pour la surveillance ciblée, et un autre aménagé pour la surveillance de masse ?

C'est la première fois que la cour se prononce sur le partage de renseignements avec des États étrangers – ici aux pratiques entre le GCHQ et la NSA...

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Commentaires (15)


Je trouve au contraire que c’est un jugement plutôt négatif. Les politiques de surveillance de masse sont validées, il faut juste revoir les “garanties”. Mais pour la masse surveillée, ces garanties ne seront jamais accessibles, il ne restera donc que la surveillance tout azimut, sans aucun moyen de s’y opposer.



Ce n’est pas parce qu’on va “encadrer” la surveillance et qu’on rend plus strictes certaines dispositions que cela empêchera les gouvernements et leurs agences de continuer à tout pomper, sans aucune distinction, sous un motif spécieux.



Sinon, je suis toujours étonné qu’on mette les journalistes à part :





et l’article 10 (liberté d’expression – compte tenu de l’absence de

garanties pour la protection du secret des sources des journalistes)





Si la liberté d’expression est assurée, ainsi que le secret des correspondances, le journaliste, tout comme le plombier ou le bagagiste, peut faire son métier sereinement. Le jour où les journalistes seront mieux protégés que les citoyens de base, personne ne viendra donc défendre les seconds ?








Jarodd a écrit :



Le jour où les journalistes seront mieux protégés que les citoyens de base, personne ne viendra donc défendre les seconds ?



Pourquoi tu parles au futur, alors que c’est comme ça depuis longtemps ? En plus, tu le rappelles juste avant…



Les « citoyens de base » sont par ailleurs, et depuis le début des sociétés humaines, les ennemis (parfois mortels : demande à Louis XVI) des castes dirigeantes, qui font les lois dont le seul réel objectif est de s’en protéger et les maintenir sous leur contrôle. Protéger les droits de la plèbe ? Et puis quoi, encore ?! Qu’elle ferme sa yeule et se contente d’utiliser le pseudo-pouvoir dont elle croit disposer pour maintenir la caste dominante en place, c’est tout. Pour le reste, qu’elle continue à s’abrutir devant TF1 et C8 qui font un boulot magnifique en ce sens, bien plus efficace et propre que n’importe quelle répression de type canuts de Lyon ou Commune de Paris, puisque la plèbe bien abrutie en redemande ! Louis XVI en aurait été vert : si TPMP et « Poubelle la vie » avaient été diffusés à la fin du XVIIIe siècle, la Révolution n’aurait jamais eu lieu et il serait mort de sa belle mort, sans doute vers les années 1830. Ah, c’est sûr et certain !



Et pour la surveillance, quand tu vois qu’il y a des gens qui s‘offrent corps et âme aux GAFAM, de Google à Microsoft, ne jurant que par Windows 10 et sa télémétrie, Edge et Cortana… Microsoft qui, lui aussi, collabore étroitement avec les services secrets de pays connus pour faire la chasse à l’opposant politique (coucou, la Tunisie !), pour rappel. C’est bon : ils ont gagné aussi, ces tenants du flicage généralisé, car ils ont réussi à faire passer ce qui était encore inacceptable il y a 10 ans pour quelque chose de normal, voire souhaitable aux yeux de ceux qui en sont la cible.



Mais ne nous en faisons pas : en 2022, on réélira Manu qui a réussi l’exploit de se débarrasser de tout opposant à même de le battre aux prochaines élections (et même les suivantes, car je le vois bien tenter de faire sauter la limite à deux mandats consécutifs introduite en 2008 par Sarkozy), donc tout va bien (pour lui, pas pour nous) : faisons confiance à nos surveillants que personne ne surveille.



(Oui, je suis hyper amer, pas besoin de me le faire remarquer)



On est comme dans les années 90 à un tournant.



A cette époque le méchant de service permettant de justifier de bafouer nos principes et libertés était la criminalité organisée, on a vu une série d’experts (souvent plus en dentifrice qu’autre chose) nous seriner que le chaos était à nos portes du fait du caractère international de cette délinquance.



Il a fallu 10 ans et via la peur on a tous adopté petit à petit des textes partant du postulat qu’il fallait restreindre les libertés pour lutter contre de fléau, en France ça sera via les Lois Perben I et II.



Nos libertés ont été piétinées, tandis que les criminalités organisées a pu prospérer comme si de rien et s’alliant par la suite avec le terrorisme.

 

A compter de 2001 et toujours en jouant les Cassandres, peu importe que la mesure envisagée soit efficace ou non, on a instigué l’idée que pour se défendre contre le terrorisme on devait partir du postulat que tout le monde est suspect et doit pouvoir être surveillé.



Et de fait, la CEDH valide ce principe comme étant en accord avec le Convention. Ce qui est plus étonnant c’est la résistance de la CJUE dont la défense des libertés fondamentales n’est pourtant pas le cœur de métier.



Fondamentalement les organisations délinquantes ou terroristes restent hors de notre champ d’action mais c’est sur notre sol que l’on entrave les libertés de tous et indistinctement.



Le problème étant que c’est hélas largement accepté par les citoyens.








crocodudule a écrit :



Le problème étant que c’est hélas largement accepté par les citoyens.





Malheureusement on ne peut pas reprocher à quelqu’un d’avoir peur. On ne peut pas reprocher aux citoyens d’avoir peur. Même si cette peur est fabriquée et entretenue par une certaine classe politique de connivence avec certains médias de masse, bref, par “le système” (Diantre que c’est moche cette expression), le résultat est le même : elle est bien là, cette peur.



Seule l’éducation et l’information correcte et analysée peut endiguer un tel processus, et ça nécessite un temps long, d’une ou deux décennies. Or ce n’est pas le chemin que l’on prend. Collectivement, on demande de plus en plus d’informations à la minute sans analyse, sans recul, sans intérêt. C’est ce que les réseaux sociaux nous ont apporté.



En clair : il faut arrêter de rejeter la faute sur le Citoyen. Il n’est qu’un otage dudit “système” organisé (et bien huilé).









Nozalys a écrit :



Malheureusement on ne peut pas reprocher à quelqu’un d’avoir peur. On ne peut pas reprocher aux citoyens d’avoir peur.



Soit, mais on peut reprocher à ceux qui ont fait en sorte que les gens se soient mis à avoir peur (de quoi, au juste ?) d’avoir organisé ça. Car c’est organisé.









Jarodd a écrit :



Sinon, je suis toujours étonné qu’on mette les journalistes à part :





 L’exercice du journalisme en France est libre et n’est pas réservé aux journalistes professionnels. #JeSuisJournaliste



Tout à fait. C’est bien eux qu’il faut “punir”.


En reponse à trit’. 

Du pain et des jeux…ca resume le sens de (ton si ca ne deranges pas)  premier paragraphe.

J’avais bien aimé une phrase d’un cour de philo dans mes années etudiantes quand on etudiait la paix : “Si un peuple de démon existe, le seul moyen qu’il puisse continuer a exister et non a s’autodétruire est la creation d’un démocratie pour ecraser toute minorité, ainsi que de les antagoniser (ca doit pas se dire ca). C’est cela qui permet la creation d’un controle de masse afin de “proteger” cette majorité.



 Ca a finalement toujours ete le cas. C’est juste que les outils actuel disponible au main des gouvernant n’ont jamais ete aussi puissant: “vous voulez communiquer ? okay c’est “gratuit” a condition qu’on est accès a toutes vos infos.



En reponse a Nozalys.

C’est exactement ca qui crée la peur et la montée des nationalisme aujourd’hui : la presence d’info sans contexte !  (enfin pas que mais une bonne part)

C’est tres paradoxale de vouloir proteger les journalistes sachant que ce sont par eux que passent ces bribes sans queue ni tete.

C’est plutot le droit d’investiguer qu’on doit proteger.








Jarodd a écrit :



Sinon, je suis toujours étonné qu’on mette les journalistes à part :







En fait, tu as la réponse à ta question dans la partie que tu avais cité ici. Ce n’est pas tant les journalistes que l’on veut protéger que leurs sources. C’est pour éviter que l’on connaisse leurs sources qu’il est interdit a priori de surveiller leurs correspondances. Cela peut être autorisé dans certains cas, mais par un juge.




je regarde plus les journaux TV depuis .. 5 ans depuis que j’ai plus de TV :o  même en prenant par sur les news papers , le ressenti des gens n’est pas qu’un ressenti là ou je suis tous les délits sont en hausse depuis des années, finalement les journaux ne font que relater les faits divers, bon ok y en a certains qui engrangent ça comme la venue du 4eme REICH etc



mais les faits sont là et présent , les cacher ? ça se diffusera par un autre moyen.  Rien que cette semaine à coté de mon immeuble ,il y a eu plusieurs incendie , voitures , locaux etc et rien dans la presse locale


Et rajouterai “ Même si ce n’est pas dans les faits divers / incident ” , c’est bien présent dans la “vie de tous les jours” pour les gens .. il faudrait tous vivre isolé en montagne pour être tranquille








fred42 a écrit :



En fait, tu as la réponse à ta question dans la partie que tu avais cité ici. Ce n’est pas tant les journalistes que l’on veut protéger que leurs sources. C’est pour éviter que l’on connaisse leurs sources qu’il est interdit a priori de surveiller leurs correspondances. Cela peut être autorisé dans certains cas, mais par un juge.





Sauf qu’en pratique, si la surveillance / enregistrement est systématique et pour tout le monde, comment distinguer un journaliste d’un autre  ?



 Ce que ça interdit, c’est le ciblage précis, au moment d’une enquête par les autorités d’un journaliste.

Mais une fois les données recueuillies , on ne peux pas ne pas les voir…



(Exemple : Pour rechercher une fuite / lanceur d’alerte au sein d’une administration ou grande entreprise , l’exploitation des données d’horodatage des appels + mails peux permettre d’identifier des traces - traces qui ne seront qu’ensuite “reliées” à , mettons, un journaliste.

Le fait d’identifier le journaliste dans un second temps n’efface pas par magie les traces).



De toute façon, la vrai question selon moi n’est _pas_ la “capture” des données : Cette capture existe, et va en grandissant de toute façon.

 

Par contre le vrai truc qui me fait peur, à moi, c’est qu’une certaine catégorie de personnes puisse y avoir accès sans contrôle et surtout sans responsabilisation a postériori. Je parle ici des fonctionnaires de l’état (police, mais aussi agents divers & variés de toute administration) à qui on fait confiance “à priori” pour tout connaître de la vie de quidam sans vraiment avoir à se justifier.



Des gens sur lesquels les politiques passent leur temps à taper parce qu’ils coûtent trop cher, sont trop nombreux et trop inefficace.



Personne ne vois le problème ?

 









OB a écrit :



Sauf qu’en pratique, si la surveillance / enregistrement est systématique et pour tout le monde, comment distinguer un journaliste d’un autre  ?





C’est pour cela qu’il faut interdire la surveillance généralisée. Je me rapproche plus de la CJUE que de la CEDH sur ce sujet.



Rien ne justifie de surveiller tout le monde dans un état démocratique. On se croirait à l’époque de la STASI !





Ce que ça interdit, c’est le ciblage précis, au moment d’une enquête par les autorités d’un journaliste.

Mais une fois les données recueuillies , on ne peux pas ne pas les voir…



(Exemple : Pour rechercher une fuite / lanceur d’alerte au sein d’une administration ou grande entreprise , l’exploitation des données d’horodatage des appels + mails peux permettre d’identifier des traces - traces qui ne seront qu’ensuite “reliées” à , mettons, un journaliste.

Le fait d’identifier le journaliste dans un second temps n’efface pas par magie les traces).





Si tu pars du côté de la fuite, c’est pour trouver l’auteur de cette fuite, cela est acceptable s’il a commis un délit. Et dans ce cas, tu n’apprends rien puisque tu connais déjà le journaliste qui a publié cette fuite.



Mais il est bien plus facile de partir du journaliste et de trouver l’auteur de la fuite en surveillant ses correspondances. C’est cela qui est interdit, justement pour protéger sa source. Sous Sarkozy, il y a eu l’affaire des fadettes pour trouver l’auteur de fuites dans l’affaire Bettencourt en partant des échanges d’un journaliste du Monde. Et cela a donné lieu à la condamnation de Bernard Squarcini, l’ancien « patron » de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI).





De toute façon, la vrai question selon moi n’est _pas_ la “capture” des données : Cette capture existe, et va en grandissant de toute façon.



 

Il ne faut pas accepter cela comme une fatalité mais le combattre.



Par contre le vrai truc qui me fait peur, à moi, c’est qu’une certaine catégorie de personnes puisse y avoir accès sans contrôle et surtout sans responsabilisation a postériori. Je parle ici des fonctionnaires de l’état (police, mais aussi agents divers & variés de toute administration) à qui on fait confiance “à priori” pour tout connaître de la vie de quidam sans vraiment avoir à se justifier.



C’est pour cela que la CJUE demande à ce que ce soit encadré comme il est rappelé ici.









fred42 a écrit :



C’est pour cela qu’il faut interdire la surveillance généralisée. Je me rapproche plus de la CJUE que de la CEDH sur ce sujet.



Rien ne justifie de surveiller tout le monde dans un état démocratique. On se croirait à l’époque de la STASI !



[…]

 

Il ne faut pas accepter cela comme une fatalité mais le combattre.





C’est encore une histoire de confiance dans l’état & ses services.



A partir du moment où c’est techniquement faisable, moi je considère cette surveillance ce sera mis en place. Soit légalement (d’un seul coup ou par petits pas), soit illégalement, puis légitimé ensuite (ou bien légitimé par des béni-oui-oui, comme la FISA au USA à l’époque). Et si malgré tout ça reste illégal, ben faudra “simplement” pas se faire prendre. Ca compliquera un peu la présentation des preuves, mais c’est tout.



L’idée est _toujours_ d’avancer petit à petit. Regarde les radars automatique:

on est parti de dispositif purement radars puis photo, à des dispositif qui enregistrent tout en permanence , et qui fait le tri ensuite pour verbaliser.

Pour verbaliser aujourd’hui la vitesse, demain d’autres chose…

Et pour ça il faudra bien conserver TOUTE les vidéos….



Demain, tu aura toutes les officines de l’état qui aura accès à non pas a ces vidéo, mais à un système d’analyse informatique desdites vidéo, capable de te dire, par exemple, si 2 véhicules se suivaient, le nombre d’occupants supposé, la route suivie, …

C’est pas de la science fiction, tu peux déjà faire des trucs avec OpenCV & des algo de corrélation.



Je ne suis pas du tout du tout sur que combattre ça législativement soit possible, surtout à une époque ou beaucoup de gens s’en foutent car leur trajet est déjà enregistré par le smartphone et disponible dans le compte google.



 





fred42 a écrit :



C’est pour cela que la CJUE demande à ce que ce soit encadré comme il est rappelé ici.





Ca reste très restreint…. et invérifiable par le public (d’autant que même si ces règles sont ignorés, tu penses vraiment qu’il y aura des conséquences ? )

 









Je ne dit pas que j’ai des solutions - en tous cas à l’heure actuelle, la plupart des gens acceptent largement plus cette surveillance façon STASI qu’avant - notamment car les conséquences en sont beaucoup moins….. définitives qu’à l’époque.

 

Notamment car les gouvernements actuels sont nettement moins portés sur la répression idéologique, et beaucoup plus sur la monétarisation directe de nos comportements.



 

Je pense que mes objections et sentiment négatif vis à vis de cette surveillance potentielle de tous les instant est aussi lié au fait qu’étant jeune j’ai lu 1984 et que j’ai grandi sans internet. Mais c’est pas sur que mes enfants ou petits enfants y prêtent la moindre attention.

Sauf bien sur si un gouvernement répressif parvient au pouvoir et utilise ces données “à priori” .



Un truc que je vois très bien en revanche arriver, c’est un usage que j’y vois c’est sur le comportement en général lié à l’économie:

L’ensemble des données récupérés sur les gens pourraient être exploité dans un cadre “répressif” lié au comportement individuel : Une personne qui fait régulièrement du sport pourra se voir mieux prise en charge qu’une autre qui n’en fait pas, ou encore sur les comportements lié à l’économie d’énergie (température du logement, nb de kilomètre parcourus, utilisation ou pas du vélo,…), et “taxé” en conséquence.

Attali en parle dans son essai ‘Une brève histoire de l’avenir’, mais j’ai lu également des choses identiques chez les écologistes avec un système de bonus/malus comportemental.



Comme toujours, merci à Nextinpact et à Marc de nous éclairer sur ces sujets importants mais difficile à suivre pour un profane comme moi