Benoît Hamon, ministre en charge de la Consommation, avait lancé jusqu'au 1er décembre une concertation sur l’introduction de l’action de groupe en France. On a désormais la synthèse de cette consultation, enrichie par un avis du Conseil National de la Consommation.
La Class action permet à des consommateurs d’agir contre un professionnel dans un litige de masse. Outre-Atlantique, c’est un mode de résolution des litiges très fréquent dans le secteur des nouvelles technologies. En France, le dispositif a été maintes fois promis (un rappel), sans effet jusqu’alors, mais l’actuel gouvernement semble décidé à l’introduire dans notre droit au printemps 2013.
Quelle action de groupe (class action) en France ?
Pour répondre à cette question, le Conseil National de la Consommation (CNC), saisi en octobre 2012 par Benoît Hamon, a constitué un groupe de travail, composé d’associations de consommateurs et d’organisations professionnelles. Dans son avis, il considère que seuls les dommages matériels doivent être pris en compte.
Il exclut donc les dommages corporels et les dommages moraux car leur évaluation est personnelle à chaque consommateur et ne peuvent donc être traités dans un litige de masse. Le CNC estime aussi que la class action à la française doit être réservée aux seules associations agréées de défense des consommateurs. En outre, la démarche doit impérativement passer par une tentative de médiation, et le tout doit être orchestré par un tribunal de grande instance spécialisé, statuant en formation collégiale.
Parallèlement à cet avis, le gouvernement a organisé une consultation sur le sujet en novembre 2012. Plus de 7150 personnes ont répondu au questionnaire mis en ligne sur le site internet de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF). « Ces contributions confirment une forte attente pour l’introduction de l’action de groupe en droit français » résume le ministère en charge de la Consommation.
Dans cette consultation (la synthèse de la DGCCRF) une majorité des avis exprimés pense que le consommateur doit se manifester pour participer à cette action (opt-in). De même, plus de la moitié veulent confier aux associations de consommateurs un rôle pivot dans ces procédures.
« Les avis exprimés souhaitent une procédure simple, qui préserve le droit des consommateurs, esquisse la DGCCRF. L’action de groupe doit avoir un effet dissuasif sur les opérateurs les plus puissants et armés juridiquement [mais] les autres modes de résolution des litiges (médiation notamment), doivent continuer de se développer en complémentarité. »
Un projet de loi est attendu au printemps 2013. Rappelons que l’actuelle majorité avait tenté de déposer un premier texte sous la présidence de Nicolas Sarkozy, mais il était resté finalement dans les tiroirs parlementaires. Cette proposition de 2009 avait été défendue par Jean-Marc Ayrault et Arnaud Montebourg, députés. Elle réservait ces actions aux associations âgées de plus de cinq ans et prouvant une « existence réelle et sérieuse ». Un fonds d’aide assurait la publicité et tous les consommateurs devaient être indemnisés même ceux qui ne s’étaient pas déclarés en début de procédure.
Associations agréées ou structures pertinentes
Le rôle central confié à des associations agréées ne plaît cependant pas nécessairement à toutes les structures. L'April, qui défend le logiciel libre, a répondu à la consultation de la DGCCRF en concentrant son attention sur les dangers de la vente liée. Et sur la question structurelle, elle milite plutôt pour que l’action de groupe soit ouverte aux « structures pertinentes », pas seulement à quelques associations agréées. « Dans la mesure où un nombre de domaines aussi large que possible doit être couvert par le recours collectif, il semble difficile d'identifier au préalable et de façon exhaustive l'ensemble des organismes qui pourraient être pertinents. Ainsi, la possibilité d'ester devrait être accordée à la fois aux organisations agréées à l'avance comme les associations de consommateurs, mais aussi à des organismes sur une base ad hoc, par une autorisation par les juges. Pour éviter dérives et abus, les organismes devraient pouvoir arguer d'une durée minimale d'existence pour prouver leur légitimité. »