Interdiction du portable à l’école : ce que prévoit l’accord trouvé entre députés et sénateurs

Interdiction du portable à l’école : ce que prévoit l’accord trouvé entre députés et sénateurs

Father & sonne

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Xavier Berne

Publié dans

Droit

20/07/2018 7 minutes
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Interdiction du portable à l’école : ce que prévoit l’accord trouvé entre députés et sénateurs

Députés et sénateurs sont parvenus à un accord, mercredi 18 juillet, en commission mixte paritaire. La proposition de loi relative à l’interdiction du portable à l’école et au collège sera (sauf énorme surprise) définitivement adoptée par les assemblées avant la fin du mois.

« Il n'y a pas vraiment eu de renoncement ni d'un côté ni de l'autre », nous confie Cathy Racon-Bouzon, rapporteure (LREM) pour l’Assemblée nationale. Stéphane Piednoir (LR), son homologue du Sénat, confirme : « Sur un texte comme ça, on n'était pas sur un rapport de force. Il y avait un consensus assez large. »

Les sept députés et sept sénateurs réunis avant-hier en commission mixte paritaire n’ont d’ailleurs mis qu’une demi-heure pour sceller un compromis. Ceci devrait permettre à la majorité de souffler, puisque le texte pourra entrer en vigueur dès la rentrée prochaine, comme s’y était engagé le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer.

Mais que contient cet accord ?

L’interdiction devient le principe, les dérogations renvoyées au règlement intérieur

Depuis 2010, l’article L511-5 du Code de l’éducation interdit aux élèves d’utiliser un portable durant n’importe quelle « activité d'enseignement ». Les établissements scolaires ont en outre la possibilité de prohiber les téléphones dans certains lieux (cour de récréation, cantine...), mais il faut pour cela qu’ils l’inscrivent au sein de leur règlement intérieur.

La proposition de loi que s’apprêtent à adopter les parlementaires va en quelque sorte renverser ce paradigme. L’interdiction prévaudra par principe « dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges ». Elle sera également de mise « pendant toute activité liée à l’enseignement qui se déroule à l’extérieur de leur enceinte », afin de couvrir par exemple les sorties scolaires et les cours d’EPS.

Chaque école ou collège pourra néanmoins autoriser l’utilisation du portable dans certains « lieux » et en fonction de « circonstances » particulières, au travers de son règlement intérieur. C’est uniquement dans ce cadre que les établissements scolaires auront la possibilité d’introduire une exception pour « les usages pédagogiques ».

Pas d’exception pédagogique de principe

Pour mémoire, les députés avaient souhaité que cette exception pédagogique prévale « par défaut », partout sur le territoire, sans qu’il n’y ait besoin de recourir au règlement intérieur. Le Sénat s’y est toutefois opposé, jugeant que cela relevait d’une « précision inutile » et qu’il valait mieux laisser les établissements décider au cas par cas.

« Je ne voulais pas que ce soit automatique », soutient aujourd’hui encore Stéphane Piednoir. L’élu LR craignait en effet qu’une telle règle soit trop sujette à interprétation : « Si jamais un élève était pris la main dans le sac en cours, qu'est-ce qui pourrait prouver que ce n’était pas pour un usage pédagogique ? »

Si Cathy Racon-Bouzon a insisté pour que l’exception pédagogique figure dans le Code de l’éducation, l’élue LREM a finalement rejoint le Sénat quant à son renvoi au règlement intérieur. « Ce ne sera pas l'enseignant, individuellement, qui choisira d'utiliser les téléphones, mais ça fera l'objet d'une discussion en début d'année pour savoir si oui ou non le corps enseignant décide conjointement d'ouvrir cet usage-là. Les établissements devront ainsi construire un véritable projet pédagogique au moment de l’élaboration du règlement intérieur », s’enthousiasme la députée.

Autre nouveauté introduite par le texte : l’interdiction ne concernera plus uniquement les téléphones portables, mais tous les « équipements terminaux de communications électroniques ». Ce qui permettra d’englober les smartphones, tablettes, montres connectées, etc.

Possibilité de confiscation des téléphones, tablettes, etc.

En cas de non-respect de l’interdiction, le législateur a par ailleurs tenu à préciser que les élèves s’exposeraient à la confiscation de leur téléphone ou de leur tablette. N’importe quel « personnel de direction, d’enseignement, d’éducation ou de surveillance » sera ainsi habilité à infliger une telle sanction.

Il appartiendra toutefois à chaque établissement scolaire de définir, là encore au travers de son règlement intérieur, les modalités de confiscation et de restitution des téléphones. Il s’agit ici aussi d’une demande des sénateurs, qui regrettaient que l’Assemblée soit entrée « dans un luxe de détails inutile et nuisible ». Les députés avaient en l’occurrence souhaité que les appareils confisqués soient rendus aux élèves au plus tard en fin de journée (et si possible en présence des parents).

« C'est tout à fait logique de renvoyer au règlement intérieur, il y a besoin de souplesse et de s'adapter à chaque situation », admet désormais Cathy Racon-Bouzon.

Extension aux lycées, mais avec un régime d’autorisation de principe

La proposition de loi se penche également sur le cas des lycées, même si ceux-ci feront en quelque sorte bande à part. Alors qu'ils n’étaient initialement pas concernés par le texte, le Sénat a souhaité leur laisser la possibilité d’interdire les portables et autres appareils connectés « dans tout ou partie de l’enceinte de l’établissement ainsi que pendant les activités se déroulant à l’extérieur de celle-ci » (encore une fois via leur règlement intérieur).

Aucune interdiction de principe n’est cependant posée.

Une sensibilisation accrue à la « citoyenneté numérique »

Afin d’agrémenter ce texte d’un volet « pédagogique », les députés ont insisté en CMP pour rétablir plusieurs dispositions visant à inscrire solennellement dans la loi que les écoles, collèges, lycées et établissements d'enseignement supérieur « concourent à l'éducation à la responsabilité civique » des élèves, « y compris dans l’utilisation d’Internet ».

La formation obligatoire à « l'utilisation des outils et des ressources numériques », prévue elle aussi depuis de longues années par le Code de l’éducation, devra à l’avenir « contribue[r] au développement de l’esprit critique et à l’apprentissage de la citoyenneté numérique ».

Vers une application dès la rentrée

Ce texte de compromis doit dorénavant être soumis au Sénat le 26 juillet, puis à l’Assemblée le 30 juillet. Sauf saisine du Conseil constitutionnel, Emmanuel Macron aura alors quinze jours pour le promulguer.

« Sans doute qu'il y aura un petit temps de latence, étant donné qu’il reviendra aux conseils d'administration et aux conseils d'école de se réunir pour inscrire ça dans les règlements intérieurs », prévient Stéphane Piednoir. Le rapporteur du Sénat espère toutefois que les établissements auront procédé aux ajustements nécessaires d’ici « fin septembre, début octobre ».

Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a par ailleurs rappelé cette semaine au Sénat que ses services publieraient prochainement un « vade-mecum » visant à accompagner les établissements dans la mise en œuvre concrète de cette interdiction. Ce document devrait être élaboré par la Direction générale de l’enseignement scolaire (DGSCO) « avec l’appui d’un groupe de travail réunissant notamment des professeurs et des chefs d’établissement », dans l’objectif de définir des bonnes pratiques.

Le locataire de la Rue de Grenelle a également insisté sur la grande latitude qui serait laissée aux écoles et collèges :

« Contrairement à ce que j’ai pu entendre, il n’est pas question d’imposer ces modalités, par exemple l’installation de casiers dans tous les établissements. Nombre de conseils départementaux se disent intéressés par cette option, qui pourrait présenter d’autres avantages, comme un rangement plus aisé des manuels, mais ce ne sera qu’une possibilité. Chaque établissement, en fonction de la configuration de ses locaux et de son organisation propre, pourra définir les modalités d’application de cette interdiction, en tenant le plus grand compte de ses spécificités » avait esquissé Jean-Michel Blanquer, le mois dernier à l’Assemblée nationale.

Écrit par Xavier Berne

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Sommaire de l'article

Introduction

L’interdiction devient le principe, les dérogations renvoyées au règlement intérieur

Pas d’exception pédagogique de principe

Possibilité de confiscation des téléphones, tablettes, etc.

Extension aux lycées, mais avec un régime d’autorisation de principe

Une sensibilisation accrue à la « citoyenneté numérique »

Vers une application dès la rentrée

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Commentaires (25)


Ah mais ils ont vraiment écrit « confiscation » dans le texte… <img data-src=" />



Du coup c’est cool, le transfert de propriété à l’État règle le problème de la restitution, c’est bien. Le financement des EPLE va s’en trouver fort aise…



D’un point de vue numérique des réseaux (connexion au monde), finalement être en taule ou à l’école, c’est plus ou moins la même chose. <img data-src=" />



Au moins ils ont viré l’exception pédagogique « par défaut » qui rendait le texte complètement schizophrène. <img data-src=" /> <img data-src=" />


« dans un luxe de détails inutiles et nuisibles ».



tiens, tiens….! <img data-src=" />


J’en ai la larme à l’œil devant tant de professionnalisme de la part de nos élus <img data-src=" />


Et l’aube du BYOD deviendra obscurité dans les EPLE : vu sur Éducation & Territoires.








Benj. a écrit :



Et l’aube du BYOD deviendra obscurité dans les EPLE : vu sur Éducation & Territoires.







Le byod c’est de la merde à proscrire de toutes façons





« Les établissements devront ainsi construire un véritable projet pédagogique au moment de l’élaboration du règlement intérieur&nbsp;», s’enthousiasme la députée.





&nbsp;“Projet pédagogique” ? On parle toujours de l’interdiction du portable mobile, là ? <img data-src=" />


Tout dépend du projet… Peut-être qu’il s’agit de revenir « aux sources » et, comme l’ont fait nos ancêtres sumériens, user de tablettes d’argiles et d’un calame… Auquel cas c’est conforme, non ?



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Les gens concernés, enseignants et élèves ont pu participer au débat, où ce sont les ancêtres déconnectés de la réalité du terrain qui ont décidé pour eux = infantilisation? <img data-src=" />


J’aime bien l’approche souple disant que si on a un projet pédagogique pouvant mettre ponctuellement à profit smartphones ou tablettes, c’est quelque chose à prévoir suffisamment à l’avance pour le faire intégrer dans le règlement intérieur.


Et on fera comment pour changer le règlement intérieur avant la rentrée ?

Non parce que ça nécessite de faire voter le CA et de réimprimer tous les carnets de correspondances …

Facepalm


C’est très simple ! Tu prépares en avance comme si il y avait la loi, mais tu mets ça un peu à part, tu fais tout voté tranquilou et si il y a pas la loi tu déchires la page des carnets et dis aux élèves de l’utiliser comme buvard !

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graphseb a écrit :



Tout dépend du projet… Peut-être qu’il s’agit de revenir « aux sources » et, comme l’ont fait nos ancêtres sumériens, user de tablettes d’argiles et d’un calame… Auquel cas c’est conforme, non ?



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on a dit pas de tablette ! que ce soient des d’argile (je connaissais pas cette marque, tiens) ou des Apple <img data-src=" />









dezorda a écrit :



Et on fera comment pour changer le règlement intérieur avant la rentrée ?

Non parce que ça nécessite de faire voter le CA et de réimprimer tous les carnets de correspondances …

Facepalm





“Les enfants, je vais vous distribuer une feuille à l’envers, vous ne la retournez pas pour le moment”



“ maintenant vous l’encollez et vous ouvrez votre carnet de correspondance page 5”



Voilà, simple action du prof principal en 5 min. 👍



J’en connaissais bien un qui a eu 10 pages de correspondance agrafées en supplément 😂



C’est qund même me plus facile d’avoir un téléphone en prison qu’à l’école.<img data-src=" />


Une loi sans détails inutiles et nuisible n’est pas une loi <img data-src=" />








darkbeast a écrit :



Le byod c’est de la merde à proscrire de toutes façons





Pourquoi donc ?









OlivierJ a écrit :



Pourquoi donc ?







Ce sont des risque d’infection par malware/virus/pua, non contrôlable par les équipes informatiques.



Je souhaite bonne chance à l’équipe pédagogique pour détecter des devices de type android wear …



https://www.google.com/search?q=android+wear&client=firefox-b&so…



C’est quand même ultra discret.








ben5757 a écrit :



Je souhaite bonne chance à l’équipe pédagogique pour détecter des devices de type android wear …



https://www.google.com/search?q=android+wear&client=firefox-b&source=lnm…



C’est quand même ultra discret.





J’ai une gear S3 classic et quand je l’utilise c’est quand meme vite cramé c’est pas du tout le meme comportement qu’une montre normale !

&nbsp;Et bon de manière générale quand tu vois quelqu’un passer plus de 5 sec pour lire l’heure de sa montre, tu te doute qu’il…. ne fait pas que lire l’heure !









Alderic a écrit :



J’ai une gear S3 classic et quand je l’utilise c’est quand meme vite cramé c’est pas du tout le meme comportement qu’une montre normale !

&nbsp;Et bon de manière générale quand tu vois quelqu’un passer plus de 5 sec pour lire l’heure de sa montre, tu te doute qu’il…. ne fait pas que lire l’heure !





Petite question en apparté&nbsp; : tu en es content ?&nbsp;





Sinon oui en classe mais après pour regarder ou écrire ponctuellement des messages à la récré( franchement l’interdiction&nbsp; pendant la récré est ridicule) franchement ça passe. Pour qu’un surveillant le voit déjà il faut qu’il s’approche franchement de l’élève et ce dernier pourra toujours dire “bein non c’est une montre” . Difficile à prouver.&nbsp;



Et plus les objets connectés vont se miniaturiser plus leur détection sera compliqué.&nbsp;



Je me répète cette loi c’est de la M……. éconaissance de la réalité.&nbsp;



Surtout que le principe du “smartphone” c’est de pouvoir faire plusieurs choses avec….



PS : Je ne savais pas qu’il existait un code de l’éducation !

PPS : Donc normalement tout parent avant de mettre son enfant à l’école (au sens large) devrait lire ce fameux code ?








Alderic a écrit :



Et bon de manière générale quand tu vois quelqu’un passer plus de 5 sec pour lire l’heure de sa montre, tu te doute qu’il…. ne fait pas que lire l’heure !





ou alors tu peux déduire que l’exam de maths va être (au mieux) compliqué pour lui/elle <img data-src=" />









RuMaRoCO a écrit :





PS : Je ne savais pas qu’il existait un code de l’éducation !

PPS : Donc normalement tout parent avant de mettre son enfant à l’école (au sens large) devrait lire ce fameux code ?





legifrance.gouv.fr est ton ami.









ben5757 a écrit :



Petite question en apparté&nbsp; : tu en es content ?&nbsp;







Yep ca marche plutot pas mal en lien avec mon Galaxy S7 :)









darkbeast a écrit :



Ce sont des risque d’infection par malware/virus/pua, non contrôlable par les équipes informatiques.





Pour les ordis sous Windows possible, après j’ai connu une grosse boîte où on pouvait apporter son ordinateur, certes on était surtout des “informaticiens”, mais on n’a jamais eu de souci. Mon chef tenait beaucoup à son MacBook Pro et un autre apportait son Linux.