D’après l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (ALPA), il y aurait eu une diminution de deux millions de « pirates » français entre 2016 et 2017. Une baisse « notable » qui s’expliquerait notamment par la procédure judiciaire à l'encontre de Zone-Téléchargement.
Le bras armé des grands studios et chaînes de télévision a dévoilé, mardi 5 juin, quelques grandes lignes de l’étude annuelle qu’il confie depuis 2010 à Médiamétrie. À partir d’un « logiciel de tracking » installé sur les ordinateurs et autres appareils connectés d’un panel de 30 000 individus, l’institut tente d’évaluer la consommation illégale de vidéos en France.
Le principal enseignement : le nombre de « pirates » (entendez par là personnes « ayant eu au moins un contact avec un site dédié à la contrefaçon audiovisuelle au cours d’un mois ») est à son plus bas niveau depuis le lancement de l’étude. Médiamétrie estime en effet à 12 millions le nombre d’internautes ayant consulté, même de manière occasionnelle, des sites illicites de peer-to-peer, de streaming ou de téléchargement direct en 2017.
À titre de comparaison, ils étaient 14 millions l’année précédente.
32 % d'internautes pirates en 2010, contre 26 % en 2017
La baisse paraît d’autant plus marquée une fois mise en perspective avec le nombre d’internautes, qui est passé de 39 millions en 2010 à 47 millions en 2017. De 32 % de « pirates » lors des premières études, l’on serait ainsi passé à 26 %. « La baisse est d’autant plus notable que le live streaming est cette année pris en compte dans le périmètre étudié », souligne Médiamétrie.
Pour l’ALPA, il n’y a pas de doute : « Ce résultat est dû aux succès des actions judiciaires qui ont permis de fermer de nombreux sites. » L’on ne compte effectivement plus les plateformes ayant disparu ou subi des mesures de blocage ces dernières années suite à des plaintes des ayants droit : The Pirate Bay, Allostreaming, Planet-Series, LibertyLand, mais aussi – et surtout – Zone-Téléchargement (quand bien même un clone lui a rapidement succédé).
La Hadopi, qui n’est citée à aucun moment, appréciera... De même que les acteurs engagés dans le développement de l’offre légale.
Le streaming désormais devant le P2P et le téléchargement direct
Le second enseignement : le streaming arrive désormais en tête des « canaux » de piratage privilégiés des internautes français – tout du moins sur la base du nombre de pirates par protocole.
Suite à la fermeture de Zone-Téléchargement.com, à la fin de l’année 2016, un « transfert » de 1,3 million d’internautes a ainsi été observé par Médiamétrie entre téléchargement direct et peer-to-peer. Le DDL, qui était sur la première marche du podium depuis 2011, a enregistré une lourde baisse, visiblement au profit du peer-to-peer (qui a ainsi ralenti son lent déclin).
En termes de « volume » de fichiers piratés, l’égalité est pourtant parfaite : selon l'étude, 372 millions de vidéos ont été illégalement visionnées en streaming, et autant via du téléchargement direct.
La plupart des pirates ont recours aux mêmes sites
Dernier enseignement important : « la piraterie reste très concentrée », en dépit du nombre de sites dédiés à la contrefaçon. « Plus de la moitié des internautes pirates accède à des contenus illégaux à partir de 5 sites uniquement », souligne ainsi l’étude. Alors que 2 000 sites sont pris en compte par Médiamétrie, 80 % de la « consommation » illicite de vidéos se ferait à partir de 20 plateformes.
On comprend mieux dans ce contexte pourquoi les ayants droit ciblent leurs actions contre de grands acteurs du piratage, à l’instar de Zone Téléchargement. Une lutte qui devrait d’ailleurs être exacerbée à en croire les récentes promesses de la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, qui entend confier de nouveaux pouvoirs en la matière à la Hadopi (voir notre article).
Comme chaque année, l’étude commandée par l’ALPA revient de manière plus accessoire sur les films et séries les plus piratées. Sans surprise, « plus de la moitié » de ces contenus sont américains (54 % pour les films).
Médiamétrie note néanmoins que « près de la moitié des séries piratées sont disponibles sur les chaînes gratuites (44 %) ». Autrement dit, les internautes iraient télécharger ou visionner en streaming des épisodes dont ils peuvent pourtant profiter sans avoir à ouvrir leur portefeuille... Ce qui conduit les auteurs de l’étude à souligner que « l’accès rapide au contenu semble privilégié par les utilisateurs ».
À quelques jours de la Coupe du monde de football, l’ALPA s’inquiète enfin que le piratage des retransmissions sportives en livestreaming soit « en plein essor ». « Le sport et particulièrement le football est de plus en plus impacté par le piratage (de 10 % à 20 % des audiences TV selon les contenus) », relève à cet égard l’étude Médiamétrie.