Au MWC 2018, Wiko exposait ses smartphones View 2 à 200/300 euros et ajoutait à sa gamme « Y » trois mobiles à moins de 100 euros sous Android Go. La société vise désormais l'international, se définit comme une « marque globale » et nous détaille les grandes lignes de son orientation pour son avenir, qui passe par la montée en gamme.
Deux semaines avant l'ouverture du MWC de Barcelone, Wiko annonçait son passage à 100 % sous le pavillon du chinois Tinno. Ce changement n'était pas une révolution puisque ce dernier détenait déjà 95 % des parts du « Français ».
Dans la pratique, James Lin (président de Tinno) prend la tête du comité exécutif de Wiko. De son côté, Laurent Dahan, ancien président de Wiko, devient vice-président senior. Ainsi, « il n'y a plus qu'un seul pilote à bord » nous explique un représentant de l'entreprise.
À Barcelone, il était évidemment question des conséquences de cette annonce (nous y reviendrons) mais également de nouveaux smartphones allant de 80 à 300 euros : une gamme View 2 avec « notch », une encoche sur l'écran au niveau de la caméra, ainsi que des terminaux d'entrée de gamme sous Android Go.
Sur place, nous avons rencontré Hervé Vaillant, responsable des relations publiques de Wiko, afin d'évoquer la stratégie de la société, son positionnement en tant que marque « française » et ses perspectives d'évolutions pour l'avenir.
Notre dossier les sociétés « françaises » au MWC 2018 de Barcelone :
- Archos, Echo, Wiko : les fabricants « français » de smartphones marquent leurs différences
- Wiko nous détaille sa stratégie : marque globale et montée en gamme progressive
- Les ambitions d'Echo, jeune créateur français de smartphones à moins de 200 euros
- Diversification chez Archos : trottinettes, crypto-monnaie et IoT, en plus des smartphones
Entre « erreur stratégique » et « marque subie » par ses utilisateurs
Avec les View 2 et 2 Pro de 6" (écran au format 19:9), Wiko propose des smartphones avec des caractéristiques intéressantes (au moins sur le papier) pour cette gamme de prix : 199,99 euros avec un Snapdragon 435, 3 Go de mémoire et 32 Go de stockage, contre 299,99 euros avec respectivement Snapdragon 450, 4 Go et 64 Go.
L’encoche est gérée par Android avec une barre défilante, mais pas encore les applications. Le travail reste à faire par Google et les développeurs #Wiko pic.twitter.com/wfWWVWoQ5s
— Next INpact L@bs (@Next_Labs) 26 février 2018
Tous les deux embarquent un lecteur d'empreintes digitales, de la reconnaissance faciale, VoLTE, VoWiFi, de la 4G jusqu'à 300 Mb/s, etc. Il s'agit donc de modèles haut de gamme pour la marque, réalisant actuellement son plus gros des ventes avec des produits à moins de 150 euros.
Le prix moyen de vente des smartphones Wiko est en effet aux alentours des 100 euros, nous précise Hervé Vaillant. Le constructeur revendique d'ailleurs 50 % de parts de marché en France sur ce segment, contre 30 % sur les mobiles entre 100 et 150 euros. « Au-delà de 150 euros, nos parts de marché s'effondrent un peu et au-dessus de 200/300/400 euros on nous attend pas du tout » ajoute-t-il.
Les Wiko sont bien souvent les premiers téléphones achetés par les parents pour leurs enfants, reconnait le responsable. Wiko est « une marque qui est plus subie que désirée » lâche-t-il, un paradigme qu'il souhaite changer avec une montée en gamme... exactement comme l'année dernière avec le WIM.
Pour autant, au niveau du prix, les View 2 et 2 Pro (dès 200 euros) se placent à bonne distance du WIM. Ce dernier avait pour rappel été annoncé à près de 400 euros. Ce smartphone n'a visiblement pas rencontré le succès espéré, d'autant que la marque (et surtout son image) n'était pas attendue sur cette tranche de prix élevée, nous indique Hervé Vaillant.
Wiko grimpe doucement : 299 euros au MWC, 350 euros à l'IFA en septembre
« On a cru qu'on pourrait le faire », mais c'était « une erreur stratégique » reconnait-il. Le fabricant « revient à ses fondamentaux » et descend donc d'un cran. Il espère ainsi trouver un public pour ces produits et élargir sa cible. Réponse à partir du mois d'avril lors de la mise sur le marché.
Dans tous les cas, la volonté affichée est clairement de continuer à monter en gamme. À l'IFA de Berlin en septembre prochain, l'entreprise devrait ainsi présenter une nouvelle série de smartphones atteignant les 350 euros, mais sur laquelle nous n'avons pas plus de détails pour le moment.
Le principe devrait être le même que pour les View 2 (Pro) : deux déclinaisons – notamment au niveau du SoC, de la mémoire vive et du stockage – sur un même châssis. La plus accessible devrait être pour sa part sous les 300 euros (probablement à mi-chemin entre les View 2 et 2 Pro). À plus long terme, Wiko compte bien revenir avec des smartphones à 400 euros et plus.
Les marchés de 200 euros et moins en baisse, il faut s'adapter
Cette montée en gamme n'est pas une lubie, mais une nécessité pour l'avenir de la société. L'année dernière, les segments de marchés des smartphones à moins de 200 euros ont tous baissé en France nous affirme Hervé Vaillant, contrairement à ceux à partir de 200 euros.
Or, l'entreprise réalise le gros de ses ventes « principalement sur des produits entrée de gamme » à moins de 200 euros ; Wiko doit donc s'adapter. 2018 est synonyme de nouvelle tentative, mais avec une approche différente et surtout une augmentation des tarifs plus mesurée.
Hervé Vaillant ajoute que le chinois Tinno a également dans sa besace la marque Sugar, « bien installée » en Asie et misant sur le côté bling-bling. Elle commercialise des smartphones haut de gamme à plus de 600 euros avec un certain succès si l'on croit le responsable des relations publiques de Wiko.
Preuve pour ce dernier que Tinno saurait réaliser des produits dans cette gamme de prix. Reste que les marchés sont bien différents, comme les produits et les attentes des clients ; pas sûr qu'une transposition du modèle Sugar en Europe soit une solution gagnante.
Android Go, One et les partenariats
Comme d'autres fabricants, Wiko répond présent à l'appel de Google et annonce trois smartphones sous Android Go au MWC 2018 : les Jerry 3, Tommy 3 et Lenny 5 (de 5,45" à 5,7"). Il ne s'agit que d'un premier lot, d'autres terminaux Android Go suivront nous affirme Hervé Vaillant.
Annoncés à moins de 100 euros, il s'agit de modèles d'entrée de gamme avec 1 Go de mémoire vive et pouvant donc profiter des applications « Go » de Google. Pour rappel, ces dernières sont spécialement pensées pour réduire leur consommation data ainsi que l'espace occupé sur le mobile.
Sur la question des mises à jour du système d'exploitation, le fabricant – comme ses concurrents – affiche son intention de les déployer rapidement... bien qu'on l'imagine difficilement affirmer le contraire. On attendra de vérifier sur le terrain. Dans tous les cas, la politique Wiko sur le sujet reste la même : les smartphones les plus vendus et les plus haut de gamme seront les premiers à disposer des mises à jour.
De leur côté, les View 2 (Pro) seront livrés avec un Android sans surcouche, pour « une expérience pure ». Il n'est pour autant pas question du programme Android One de Google. Wiko nous affirme néanmoins travailler en étroite collaboration avec le géant du Net sur ses différents projets en cours, sans plus de précisions pour le moment.
Les partenariats avec DxO PhotoLab et Vidhance annoncés l'année dernière avec le WIM sont renouvelés avec les View 2 (Pro), même s'ils n'étaient pas spécialement mis en avant sur le stand du fabricant (il y avait tout de même une démonstration de la stabilisation vidéo logicielle de Vidhance). Par contre, aucune nouvelle concernant le partenariat avec le youtubeur PV Nova du côté de la communication.
Une société française, mais une marque globale
Nous sommes également revenus sur le côté « cocorico » de Wiko. Malgré son passage à 100 % sous la houlette de Tinno, la société se définit toujours comme française : « notre ADN est français [...] le design de nos produits est fait à Marseille ». De plus, elle est toujours immatriculée en France et y paye ses impôts, avec son siège dans la cité phocéenne.
Néanmoins, Wiko ne communiquera plus sur son côté français à l'avenir, mais sur sa dimension européenne et mondiale, son nouveau terrain de jeu. Tinno a en effet la volonté de transformer Wiko en une « marque globale », présente partout dans le monde, sauf en Asie où Sugar restera, avec un déploiement progressif bien évidemment. C'est une demande forte de James Lin (président de Tinno et Wiko) nous précise Hervé Vaillant.
Le rapprochement entre Tinno et Wiko permet au second de disposer d'une puissance financière bien plus importante pour mener à bien sa mission d'internationalisation. Pour le reste, pas de changement : les équipes collaboraient déjà ensemble depuis longtemps, et il n'y aura pas de suppression de postes affirme la société. Au dernier décompte, Wiko revendiquait 500 employés (dont 200 à Marseille), exactement comme en 2017 et 2016.
Dans tous les cas, Wiko reste également attachée à la French Tech : « On est un acteur clé de la French Tech Aix-Marseille » nous affirme Hervé Vaillant. Il ajoute que le rachat par Tinno ne change rien sur ce point.
Wiko revendique la deuxième place en France depuis mi-2013
Nous avons enfin évoqué la position de Wiko sur le marché français où, cette année encore, il revendique la deuxième place. Hervé Vaillant nous indique qu'il s'agit du volume des ventes hors opérateur, avec une part de marché de 17 % selon une étude GFK, la première place revenant sans surprise à Samsung.
Sur l'ensemble du marché, la société passe en troisième position avec 10 % de part de marché, se faisant doubler par Apple. Mais l'avenir risque de se compliquer avec l'arrivée probable de Xiaomi en France (lire notre analyse) – dont le stand était d'ailleurs juste à côté de celui de Wiko – mais aussi d'Oppo, nous précise le constructeur.
Il semble conscient des risques liés et surveille de près ses concurrents, mais reste tout de même confiant dans l'avenir, notamment grâce à son implantation chez les opérateurs et les revendeurs... Mais il n'est pas le seul sur ce segment, un concurrent prend de l'importance au fil des mois sur le marché des smartphones à moins de 200 euros : Echo (nous aurons l'occasion d'y revenir).