L’Assemblée nationale a adopté en commission, mardi 16 janvier, un amendement destiné à faciliter le déploiement du programme « Dites-le-nous une fois ». Mois après mois, le gouvernement se montre néanmoins toujours incapable de définir la liste des pièces que les particuliers ne devraient théoriquement plus avoir à fournir aux administrations.
« Dites le nous une fois, et une fois pour toutes » clamait le ministre de l’Action et des comptes publics, Gérald Darmanin, lors de la présentation de son projet de loi « pour un État au service d’une société de confiance ».
Le fameux texte, examiné depuis le début de la semaine en commission spéciale, institue ainsi un « droit pour toute personne de ne pas être tenue de produire à l’administration une information déjà détenue ou susceptible d’être obtenue automatiquement auprès d’une autre administration ».
RIB, justificatif de domicile, revenus... Cela fait pourtant près de quatre ans que l’on nous laisse déjà entrevoir un meilleur échange de données entre acteurs publics (Allocations familiales, impôts, mairies, etc.). Sauf que le déploiement de « Dites-le-nous une fois », bien que déjà possible sur le plan juridique, reste à ce jour enlisé au stade des expérimentations (voir notre article).
Levée d’obstacles juridiques
Et pour cause, l’échange d’informations entre administrations demeure extrêmement délicat : « fonctionnement en silos, fragmentation des administrations, coûts d’implémentation et d’évolutions des systèmes d’information existants, accompagnement au changement (processus, pratiques et cultures)... » énumérait ainsi le gouvernement dans son étude d’impact.
À cela s’ajoutent différents obstacles juridiques, qu’a justement voulu faire tomber la députée Laure de La Raudière. Au travers d’un amendement, l’élue (Agir) a demandé à faire disparaître de l’article L113-12 du Code des relations entre le public et l’administration les dispositions qui imposent à l’usager d’informer « par tout moyen l'administration du lieu et de la période de la première production du document » qu’il ne souhaite pas fournir une nouvelle fois...
Le rapporteur, Stanislas Guérini, a émis un avis « très favorable » sur cet amendement, estimant que la disparition de cette démarche supplémentaire allait « dans le bon sens ». « Chacun a vécu le caractère « déceptif » des exceptions de Dites-le-nous une fois », a-t-il ajouté. L’amendement de Laure de La Raudière a ainsi été adopté, après que Gérald Darmanin a lui aussi apporté son soutien à cette évolution législative.
Le décret prévu par la loi Numérique pourrait être pris dans les prochains mois
Toujours afin de pousser au déploiement de « Dites-le nous une fois », la députée proposait d’autre part que le gouvernement fixe, au travers d’un des décrets d’application de la future loi sur le droit à l’erreur, la liste des pièces que les particuliers ne devraient plus avoir à transmettre une seconde fois aux administrations.
Et pour cause : cette liste devait être fixée par un des décrets d’application de la loi Numérique de 2016, lequel n’a toujours pas été publié par le gouvernement... « Il n’est pas acceptable que [ce texte] n’ait pas été pris à ce jour alors que l’échéancier Légifrance évoquait la date de janvier 2017 », a déploré l’élue.
Cependant, la parlementaire a cette fois-ci essuyé un avis défavorable du rapporteur et du gouvernement. Gérald Darmanin a expliqué qu’au regard d’une réunion interministérielle en date du 19 décembre dernier, il était « tout à fait vraisemblable qu'avant l'adoption définitive du projet de loi, ce décret soit enfin pris ». « C'est la faute de l'exécutif de ne pas l'avoir pris » a-t-il a passage reconnu.
Laure de La Raudière a accepté de retirer son amendement, mais devrait le redéposer en vue des débats dans l’hémicycle afin d’avoir une réponse plus « ferme » de la part de l’exécutif.
Vers une refonte complète des règles relatives à « Dites-le-nous une fois » ?
L’adoption du premier amendement de Laure de La Raudière pourrait toutefois ne pas suffire, si l’on en croit l’étude d’impact du gouvernement :
L’exécutif espère néanmoins relancer « Dites-le-nous une fois » via deux initiatives inscrites dans le projet de loi Darmanin, et qui ont vocation à « fournir un démonstrateur de la pertinence de la mesure générale » :
- Une expérimentation qui permettra aux citoyens résidant dans les départements de l’Aube, du Nord, des Yvelines et du Val-d’Oise de ne plus fournir de justificatif de domicile dans le cadre d’une demande de carte d’identité, de permis de conduire, de carte grise ou de passeport. Il suffira de déclarer son adresse et de communiquer à l’administration « une information permettant son identification auprès d’un fournisseur d’un bien ou d’un service attaché à son domicile ». L’intermédiaire, de type fournisseur d’accès à Internet ou de téléphonie, serait alors tenu de vérifier la concordance.
- Une expérimentation qui devrait permettre aux entreprises de réaliser différentes démarches à partir de leur seul numéro de SIRENE, dans le prolongement de ce qui existe déjà grâce à l’API Entreprises (utilisée notamment pour « Marchés publics simplifiés »).
Ces deux expérimentations ont été validées en commission sans modification substantielle.