La reconnaissance du burn-out en maladie professionnelle bientôt en débat à l’Assemblée

Burn to be alive
Droit 4 min
La reconnaissance du burn-out en maladie professionnelle bientôt en débat à l’Assemblée
Crédits : PeopleImages/iStock

La commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale examinera le 24 janvier prochain une proposition de loi défendue par le groupe La France Insoumise afin de « reconnaître comme maladies professionnelles les pathologies psychiques résultant de l’épuisement professionnel ». Un sujet récurrent depuis quelques années.

Smartphones, emails, messages sur les réseaux sociaux... L’hyper-connexion est plus que jamais dans les esprits lorsqu’on évoque les problèmes de burn-out, tant les nouveaux moyens de communication peuvent s’immiscer facilement dans la vie privée du salarié (sur le trajet, dès le matin ou tard le soir, les week-ends, etc.).

Au-delà de l'aspect purement médical de ce qu’on appelle aussi le syndrome d’épuisement professionnel, certains responsables politiques s’élèvent depuis quelques années contre les modalités de prise en charge des burn-out par l’Assurance maladie. « Est-il normal que les Assedic, ou la sécurité sociale, supportent le coût des défaillances managériales ? » s’interrogent faussement les députés La France Insoumise (LFI) au travers d’une proposition de loi déposée fin décembre devant l’Assemblée nationale.

Pour une prise en charge via les cotisations patronales

« Cela fait des décennies que ce syndrome est identifié », clament les parlementaires menés par Jean-Luc Mélenchon. « Les maladies que produit cet épuisement professionnel sont connues de tous les médecins (...), elles sont nommées, classées : la dépression, le trouble anxieux généralisé et le stress post-traumatique. »

Si les burn-out peuvent théoriquement être reconnus comme maladie professionnelle, « seuls 200 à 300 épuisements » seraient déclarés comme tels chaque année. En Belgique, poursuivent les députés LFI, 83 155 cas auraient pourtant été reconnus en 2014.

L’explication, selon eux ? « Aujourd’hui, cette reconnaissance n’est possible que « hors tableau », via les « comités régionaux de reconnaissance », en déployant force preuves », déplorent les parlementaires. Pour qu’un dossier soit recevable, il faut que le salarié malade commence par présenter un taux d’incapacité permanente partielle de 25 % minimum. « Alors que la victime est bien souvent en lambeaux, fragile mentalement, ce parcours du combattant est plus que dissuasif » estime le groupe des « insoumis ».

Leur proposition de loi prévoit ainsi qu’un « tableau spécial » soit mis en place par l’exécutif à partir du 1er janvier 2019, afin d’énumérer d’une part « les pathologies psychiques relevant de l’épuisement professionnel », et d’autre part les conditions dans lesquelles celles-ci « sont présumées avoir une origine professionnelle lorsque les victimes ont été exposées d’une façon habituelle à des facteurs limitativement énumérés par ce tableau ».

Les élus n’hésitent d’ailleurs pas à suggérer un tableau, à partir d’un rapport remis en 2011 au ministre du Travail.

 burn out tableau

Ces éléments permettraient selon les auteurs du texte d’instaurer « une « présomption d’imputabilité » de ces pathologies à une organisation du travail, avec instruction par la caisse d’assurance-maladie ».

Principe de « pollueur-payeur »

Jean-Luc Mélenchon et ses collègues souhaitent surtout qu’avec cette reconnaissance, les burn-out soient plus systématiquement pris en charge par la branche « Accident du Travail - Maladie Professionnelle », « financée à 97 % par les cotisations des employeurs » : « Les entreprises aux pratiques néfastes se verront pénalisées, leurs taux de cotisations AT/MP augmentant. Sera ainsi appliqué le principe, de bon sens, du « pollueur-payeur ». »

Les députés LFI considèrent que « frappées aux portefeuilles, les entreprises seront très concrètement incitées à améliorer leur management, leurs conditions de travail, à protéger la santé de leurs salariés ». Alors que le gouvernement s’apprête à abaisser la vitesse sur certaines nationales, ils poursuivent : « Sur la route, radars et amendes n’ont-ils pas fait leurs preuves face aux chauffards ? »

La prise en charge du salarié devrait par ailleurs être distincte, sans parler des effets psychologiques d’une telle reconnaissance :

« Le salarié épuisé, déclaré « inapte », ne bénéficie, aujourd’hui, que d’un simple chômage. Comme « maladie professionnelle », les indemnités journalières seront prises en charge à 90 % pendant un mois, puis à 80 % ensuite, tous les soins seront couverts, une rente sera versée, proportionnelle au dommage causé. Le travailleur sera protégé contre le licenciement, et en cas de licenciement pour inaptitude, son indemnité sera doublée. À l’égal, simplement, d’un salarié subissant un accident du travail. »

L’origine « professionnelle » du burn-out difficile à établir

La nouvelle majorité ne devrait cependant pas se montrer très « réceptive » face à ce texte très marqué à gauche. En 2015, le législateur s’était résolu à lâcher un peu de lest en acceptant que les « pathologies psychiques » puissent être expressément reconnues comme des maladies d'origine professionnelle (mais sans toucher au seuil de 25 % d’incapacité permanente partielle).

« Le concept de burn-out renvoie à une pathologie psychique qui semble assez difficile à cerner et à mesurer précisément. Les causes en sont souvent multiples : professionnelles, certes, mais aussi personnelles, familiales, sentimentales ou liées à une fragilité de la personnalité. Or je ne vois pas comment les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles, même avec l’expertise de psychologues ou de psychiatres, arriveront à déterminer si la cause essentielle de la maladie est d’origine professionnelle » avait notamment objecté le centriste Jean-Marc Gabouty, (devenu par la suite rapporteur du projet de loi El Khomri pour le Sénat).

Alors que la pression des membres de l’aile gauche du PS montait à quelques encablures de la course à la présidentielle, notamment sous la pression de Benoît Hamon, la ministre de la Santé avait annoncé en février 2016 qu’un groupe de travail composé de médecins, experts et chercheurs serait installé « pour définir ce qu’est médicalement le burn-out, la manière de le traiter » (alors que les travaux ne manquent pourtant pas sur ce dossier). Une initiative dont on attend encore des nouvelles...

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