Altice a présenté ses résultats financiers pour le troisième trimestre 2017. La maison mère de SFR se porte bien dans son ensemble, notamment grâce à ses bons résultats aux États-Unis. En France, le groupe ne parvient toujours pas à redresser la barre, malgré ses efforts sur le fixe et le mobile.
L'exercice de la présentation des résultats fut compliqué pour Altice. D'un côté, le groupe affiche des performances intéressantes dans son ensemble avec un EBITDA qui continue de progresser, grâce aux différentes synergies mises en place au sein du groupe. De l'autre, Altice souffre encore sur certains territoires, dont la France et le Portugal.
Moins de revenus, mais davantage de bénéfices
Le chiffre d'affaires d'Altice au troisième trimestre s'élève ainsi à 5,755 milliards d'euros, soit un recul de 1,8 % par rapport aux données annoncées il y a un an, mais une relative stabilité (+0,3 %) à taux de change constants.
Pendant ce temps, l'EBITDA progresse de 4,2 % sur un an à taux de change constants, ou de 1,8 % sans cet artifice, pour atteindre 2,358 milliards d'euros. Par conséquent, la marge d'EBITDA d'Altice a bondi de 1,5 point en l'espace d'un an, et atteint désormais 41 %. Un score plus qu'honorable.
Dans la même lignée, le flux de trésorerie de l'entreprise évolue lui aussi favorablement. À 1,411 milliard d'euros, il a progressé de 6,2 % à taux de change constant ou de 2,9 % sans tenir compte de cet élément.
L'érosion continue en France
Dans l'Hexagone, Altice est toujours dans le dur. Le chiffre d'affaires de SFR a encore fondu de 1,3 % sur un an et s'établit à 2,757 milliards d'euros au troisième trimestre.
L'EBITDA de l'opérateur au carré rouge est lui aussi sur la mauvaise pente, puisqu'il recule de 3,2 % sur un an, à 1,009 milliard d'euros. La marge a quant à elle reculé de 0,7 point sur un an et atteint maintenant 36,6 %, contre 37,3 % l'an dernier.
Pour justifier ce recul, Altice invoque le coût de ses dernières acquisitions de contenus, notamment sur le plan des droits sportifs, qui pour le moment ont a priori du mal à attirer de nouveaux clients. Cette inflation de coûts est toutefois en partie compensée par les économies réalisées avec les différents plans de départs volontaires mis en place par l'opérateur.
À noter également : l'arrivée prochaine d'Altice Caribbean au sein du silo SFR. Le groupe a en effet trouvé un accord avec SFR pour qu'il gère ses activités d'outre-mer. La transaction doit être finalisée au premier trimestre 2018 et son montant n'a pas été dévoilé. Il aurait pourtant été intéressant de voir si elle n'était pas tout simplement une manœuvre pour faire remonter du cash de la filiale française vers sa maison mère.
Dernier point intéressant, cette fois hors télécoms, Altice annonce que ses revenus « autres », c'est à dire principalement ceux liés à ses médias sont en nette progression : +20,4 % sur un an. Une hausse principalement due aux performances de NextRadioTV, mais atténuée par le recul des ventes de journaux et magazines par Altice Media Group France.
Il est à noter que depuis ce trimestre et sa sortie de bourse, SFR ne diffuse plus certains chiffres qui étaient jusqu'ici mis à disposition sur son site institutionnel. Manquent ainsi à l'appel l'ARPU des offres prépayées, le nombre total de clients mobiles B2B ainsi que le nombre de lignes M2M ouvertes. Côté fixe, l'ARPU des offres xDSL a également disparu de la documentation. Seul l'ARPU global et celui des offres FTTx est répertorié.
Sur le mobile, SFR surnage
Côté mobile, l'ambiance n'est pas vraiment à la fête. Certes, pour le quatrième trimestre consécutif SFR est parvenu à recruter de nouveaux clients sur ses forfaits, mais la moisson est très mince puisqu'ils ne sont que 16 000 de plus qu'il y a trois mois, portant le total à 12,455 millions. Le reste des chiffres clés vous est résumé ici :
- Nombre de clients mobile grand public (B2C) : 14,564 millions (+13 000 sur trois mois, + 75 000 sur un an)
- Dont abonnés : 12,455 millions (+16 000 sur trois mois, +151 000 sur un an)
- Dont prépayés : 2,109 millions (-3 000 sur trois mois, -76 000 sur un an)
- ARPU Mobile grand public : 23 euros (+0,5 euro sur trois mois, -0,4 euro sur un an)
- Dont ARPU Forfait : 25,8 euros (+0,6 euro sur trois mois, -0,3 euro sur un an)
- Couverture 4G : 93 % de la population (+2 points sur trois mois)
Concernant les offres B2B, on apprendra seulement que le parc est resté relativement stable, avec 6 000 clients (hors M2M) perdus en trois mois contre 21 000 lors du troisième trimestre 2016. Aucune information n'est donnée concernant le parc M2M.
Altice justifie ce score par le succès de ses offres convergentes SFR Family, ainsi que ses efforts en matière d'investissements dans son réseau mobile. L'opérateur couvre désormais 93 % du territoire en 4G avec un total de plus de 25 000 antennes, et a donc rempli son objectif de 90 % de couverture d'ici fin 2017 avec un peu plus de six mois d'avance.
Brasse coulée sur le fixe
En ce qui concerne le marché fixe, la tendance reste la même que lors des trimestres précédents. SFR continue de perdre beaucoup de clients sur ses offres ADSL, or les recrutements sur son réseau FTTx ne permettent pas de combler les départs. Voici les quelques chiffres importants à retenir :
- Nombre de clients fixe grand public : 5,988 millions (-75 000 sur trois mois, -186 000 sur un an)
- Dont xDSL : 3,826 millions (-119 000 sur trois mois, -364 000 sur un an)
- Dont « Fibre » : 2,162 millions (+44 000 sur trois mois, +178 000 sur un an)
- ARPU Fixe : 35,9 euros (+0,8 euro sur trois mois, -1,4 euro sur un an)
- Dont « Fibre » : 38,6 euros (+0,6 euro sur trois mois, -2,6 euros sur un an)
- Prises « Fibre » commercialisables : 10,396 millions (+433 000 sur trois mois, +1,46 million sur un an)
Pour la première fois depuis son rachat par Altice et l'intégration des clients de Numericable dans son parc, SFR passe sous la barre des 6 millions d'abonnés. Autrement dit, en trois ans, SFR a perdu près de 10 % de ses abonnés sur son réseau fixe. Ceci alors que l'ensemble de ses concurrents continuent de gagner du terrain, trimestre après trimestre. Ce n'est donc pas aujourd'hui que l'opérateur perdra son surnom de « O négatif », certains de ses concurrents qualifiant la marque au carré rouge de donneur universel d'abonnés.
Malgré un léger rebond sur les trois derniers mois, l'ARPU de SFR a nettement plongé sur un an, principalement sur les offres « Fibre ». Altice évoque un fort impact « des promotions très agressives chez la concurrence ». Un comble pour une entreprise qui vend en permanence des forfaits FTTx à 20 euros par mois « à vie » via RED, et descend régulièrement à 10 euros pour contrer les ventes privées et autres promotions de la concurrence.
Néanmoins, Altice espère pouvoir renverser la vapeur dans les mois à venir en accélérant le déploiement de son réseau FTTx, notamment dans les zones rurales où amener la fibre coûte plus cher, mais où la concurrence est bien moins rude aujourd'hui.
Carton plein aux États-Unis
Pendant ce temps, la stratégie d'Altice aux États-Unis marche à plein régime. Les revenus de l'opérateur chez l'Oncle Sam ont grimpé de 3,2 % à taux de change constants à 2,327 milliards de dollars, et un EBITDA en très nette progression : +18,9 % à taux de change constant, à 1,042 milliard de dollars.
Si l'EBITDA monte aussi rapidement, c'est parce que la marge en fait de même. À 44,9 %, elle a bondi de 6,1 points en l'espace d'un an. On note tout de même d'importantes disparités entre Suddenlink (+1,4 point sur un an à 47,8 %) et Optimum (+7,9 point sur un an, à 43,7 %). Dans le détail, Altice USA perd encore des clients dans la TV payante (33 000 départs sur trois mois), mais continue de recruter sur celui de l'accès Internet à très haut débit (16 000 nouveaux clients en trois mois).
Les revenus progressent principalement grâce à l'ARPU qui augmente en même temps que les débits proposés aux clients. Chez Optimum, il est passé de 152,6 à 156,9 dollars en un an, et de 108,2 à 110,6 dollars chez Suddenlink. Pendant ce temps, les débits moyens grimpent en flèche, et sont passés de 56 Mb/s il y a un an, à 106 Mb/s aujourd'hui. 88 % des nouveaux clients d'Altice USA souscrivent à des offres à plus de 100 Mb/s, contre 48 % l'an dernier et 9 % il y a deux ans. Une progression permise par la modernisation du réseau.
Le point dette
Dernier poste majeur chez Altice : la gestion de la dette. Le 9 octobre dernier, l'entreprise a annoncé le refinancement d'une portion de la dette de SFR et d'Altice International. Les deux entités ont pu lever 4,675 milliards d'euros, à un taux de 4,75 %, le plus faible sur l'ensemble des silos de dette du groupe, qui empruntait jusqu'ici à des taux parfois nettement plus élevés.
Au total, la dette brute d'Altice, toutes filiales confondues atteint 51,245 milliards d'euros, soit 5,5x son EBITDA annuel, un taux qui va en diminuant. Du côté de SFR, la dette s'élève à 15,850 milliards d'euros, ou 4,2x l'EBITDA, avec cette fois-ci un levier qui s'amplifie du fait de la baisse des bénéfices.
Côté américain, la réduction du poids de la dette se poursuit, puisque Suddenlink a fait passer son ratio d'endettement de 6,5x à 5,0x en l'espace de deux ans, tandis qu'Optimum est parvenu à atteindre 5,1x contre 6,7x un an plus tôt. Des signes encourageants qui ne sont certainement pas étrangers aux conditions favorables qu'Altice a pu obtenir pour le refinancement de sa branche européenne.
En bourse, ces chiffres n'ont pas vraiment ravi les marchés, en témoigne la chute de 27 % du cours d'Altice NV sur les deux dernières séances. Les analystes ont sanctionné les annonces du groupe autour de la croissance de son flux de trésorerie, qui se situera finalement dans le bas de la fourchette initialement prévue sur l'ensemble de 2017. Altice USA de son côté a connu une chute de 8 % lors de la séance de vendredi, mais rebondit de 4,6 % au moment où nous rédigeons cette actualité.
Altice NV est désormais valorisée à 19 milliards d'euros (-37 % depuis le 1er janvier, -23 % sur un an), contre 17,5 milliards de dollars pour Altice USA (-28 % depuis son introduction en bourse le 23 juin dernier).