Amazon a présenté cette nuit ses résultats du troisième trimestre 2017 devant un parterre d'analystes et d'investisseurs. Pour la première fois, le bilan de Whole Foods est intégré à celui du géant du commerce en ligne, mais cela ne suffit pas à battre tous les précédents records de l'entreprise pour autant.
Pour sa présentation des résultats du troisième trimestre, Amazon n'avait pas de temps à perdre. En témoigne la conclusion de Brian T.Olsavsky, le directeur financier du groupe, après 25 minutes d'échanges avec les analystes de Wall Street : « je dois vous rappeler que le match de football du jeudi soir commence dans 2h20, du coup... ». Étant donné qu'il nous reste plus de huit heures avant le PSG-Nice de ce soir (qu'on ne regardera probablement pas), nous avons donc tout le temps nécessaire pour jeter un œil aiguisé aux chiffres présentés par le géant du commerce en ligne.
Un troisième trimestre très dynamique
Sur le troisième trimestre, le chiffre d'affaires d'Amazon atteint 43,7 milliards de dollars, soit 34 % de mieux que l'an passé. Cette hausse n'est que marginalement due à l'intégration de Whole Foods dans les comptes de l'entreprise depuis le 28 août dernier. Les effets concrets de ce rachat à 13,6 milliards de dollars devraient toutefois être nettement plus visibles lors du quatrième trimestre.
Le bénéfice opérationnel s'est quant à lui effondré, passant de 575 millions de dollars l'an dernier à 347 millions sur les trois derniers mois, soit une chute de 40 % sur un an. Amazon tente de minimiser ce recul brutal en expliquant qu'il n'est que de 33 % une fois l'effet des fluctuations monétaires retiré de l'équation. Une maigre consolation.
Le bénéfice net atteint quant à lui 256 millions de dollars et apparaît quasi stable par rapport aux 252 millions de dollars enregistrés lors du troisième trimestre 2016.
L'effet Whole Foods se fait attendre
Entre le 28 août et le 30 septembre, l'impact de Whole Foods sur les résultats d'Amazon est resté minime. Les 465 magasins de l'enseigne ont enregistré un chiffre d'affaires de 1,3 milliard de dollars, pour un maigre bénéfice opérationnel de 21 millions de dollars. On se consolera en voyant qu'ils sont malgré tout nettement plus rentables que le reste des activités d'Amazon hors des États-Unis.
Qu'importe, Amazon entend ouvrir de nouveaux magasins prochainement, en se concentrant dans un premier temps sur le maillage des États-Unis, avec des projets en Californie, à Washington DC ou Austin. Pour la suite, les prévisions sont encore floues.
En attendant, l'objectif d'Amazon est de marquer sa présence dans les boutiques existantes, avec l'installation d'armoires de livraison (Amazon Lockers) permettant de récupérer en magasin les produits commandés en ligne. Autre sujet chaud : la fusion entre le programme de fidélité Whole Foods avec Prime.
AWS reste la cash-machine d'Amazon
Amazon Wallet Web Services poursuit également sa croissance folle, avec un chiffre d'affaires atteignant 4,6 milliards de dollars au dernier trimestre, contre 3,2 milliards un an plus tôt, soit une progression de 42 % sur un an. Les bénéfices opérationnels sont plus que largement au rendez-vous, puisqu'ils ont dépassé la barre du milliard de dollars, à 1,17 milliard exactement (+36 % sur un an).
Comme d'habitude donc, Amazon tire la majeure partie de ses bénéfices de sa branche spécialisée dans le cloud, lui permettant ainsi de compenser les lourdes pertes régulièrement enregistrées par son activité de commerce en ligne, notamment en dehors des États-Unis.
Trou d'air sur l'e-commerce
En Amérique du Nord, Amazon a connu une progression de 35 % de son chiffre d'affaires e-commerce sur un an. Il s'établit désormais à 25,4 milliards de dollars. Sur la même période, le bénéfice opérationnel a quant à lui fondu comme neige au soleil, passant de 255 millions de dollars, à seulement 112 millions. Amazon n'a fourni aucun détail permettant de comprendre ce net recul, d'autant plus que Whole Foods a eu un impact positif sur cette ligne comptable.
Dans le reste du monde, les recettes culminent à 13,7 milliards de dollars au troisième trimestre, soit 29 % de mieux que l'an passé. En revanche, les pertes opérationnelles ont explosé, passant de 541 millions de dollars à 936 millions, et la tendance des derniers trimestres montre que la situation ne va pas en s'améliorant.
Pourtant Amazon voit ces chiffres comme très positifs. La nette augmentation des revenus à l'étranger serait notamment due au Prime Day, organisé les 10 et 11 juillet derniers. Ces promotions réservées aux abonnés Prime auraient fait bondir le nombre de clients à l'offre. Les recettes tirées des offres d'abonnement (Prime inclus) ont progressé de 59 % sur un an, à 2,44 milliards de dollars, et de 13 % sur trois mois.
Prime, l'arme fatale
Ce sursaut d'inscription au programme Prime est une aubaine pour Amazon, dont la stratégie repose fortement dessus. Si le géant du e-commerce investit dans les contenus audiovisuels avec Prime Video, c'est pour attirer de nouveaux clients en leur promettant des contenus inédits. Une fois alléché par les séries ou films du géant américain, le client sera certainement tenté de profiter de la livraison gratuite en commandant quelques bricoles sur la partie e-commerce.
« Je veux être clair. Nous allons continuer d'investir dans la vidéo, et même y accroître nos investissements en 2018 », clame le directeur financier d'Amazon. « Et pourquoi nous allons faire ça ? Parce que la vidéo obtient de très bons résultats avec notre base de clients la plus précieuse, les abonnés Prime. La vidéo entraîne une meilleure conversion des offres d'essai gratuites, de meilleurs taux de réabonnement et globalement un engagement plus fort ».
D'autres modèles économiques commencent également à faire leurs preuves chez Amazon. Les revenus « divers » du groupe ont bondi de 19 % au dernier trimestre et de 58 % sur un an, à 1,12 milliard de dollars. Ces recettes cumulent celles issues de la vente de publicité, et provenant d'accords signés avec diverses banques pour qu'elles proposent des cartes de paiement offrant des avantages chez Amazon. Si aucun commentaire n'a été fait sur ces dernières, la direction du géant américain se dit « ravie » de la bonne santé de ses affaires dans la publicité.
La carte du transport
Autre question soulevée par un analyste, celle des importants investissements consentis par Amazon dans le domaine du transport. Le géant américain loue une flotte de 40 Boeing 767, dispose d'une licence de fret maritime entre la Chine et les États-Unis et veut globalement prendre en charge la livraison de plus en plus de colis. Mais ces lourdes dépenses ont-elles un réel intérêt pour le vendeur ?
« Notre philosophie ici, c'est que nous voulons prendre soin de nos clients, nous voulons être en capacité de leur rendre service 12 mois par an, mais particulièrement pendant les fêtes de fin d'année. En investissant dans ces modes de transport, nous y parvenons au bas mot, à coût égal », précise ainsi le directeur financier d'Amazon.
L'entreprise espère aussi améliorer la qualité de ses services en prenant en charge la livraison elle-même. « C'est ainsi que l'on peut livrer le dimanche et mieux servir les clients le week-end. Ça nous a également permis de repousser l'heure limite pour la livraison le lendemain de 15h à minuit. » Conséquence pour Amazon, ces avantages génèrent des ventes supplémentaires et « participent à établir une confiance avec le client, qui se dira que s'il a besoin de quelque chose, Amazon sera là pour lui ».
Pas de pause dans les embauches
Avec l'absorption de Whole Foods, mais également de Souq lors de ce trimestre, les effectifs du géant américain ont explosé, passant de 306 800 personnes il y a un an, à 541 900 aujourd'hui, soit un bond de 77 %. Hors acquisitions, la progression n'aurait été « que » de 47 %.
Hors de question pour autant pour Amazon de lever le pied sur les embauches. Historiquement, le quatrième trimestre est synonyme de recrutements importants : avec les fêtes de fin d'année, l'entreprise aura besoin de renforts pour s'occuper des commandes qui afflueront dans ses entrepôts, toujours plus nombreux. Amazon compte également renforcer ses équipes de développement logiciels, pour s'occuper d'Amazon Web Services, Prime Video et de ses divers terminaux.