Il y a 50 ans, la seconde passait officiellement de l'échelle astronomique à l'échelle atomique

C'était une révolution
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Il y a 50 ans, la seconde passait officiellement de l'échelle astronomique à l'échelle atomique
Crédits : jasastyle/iStock

Le temps, une notion simple et pourtant si complexe. Comment a-t-on défini la durée exacte d'une seconde, et en quoi est-ce important ? Cela fait 50 ans aujourd'hui que le Bureau international des poids et mesures lui a donné sa troisième et dernière définition en date. Retour sur cette quête de la précision.

Le 13 octobre 1967, une petite révolution s'est déroulée pendant la treizième conférence générale des poids et mesures : la définition de la seconde a été remplacée. Elle est depuis restée et c'est la suivante : « La seconde est la durée de 9 192 631 770 périodes de la radiation correspondant à la transition entre les deux niveaux hyperfins de l'état fondamental de l'atome de césium 133 ».

La raison de ce changement était simple à l'époque : la précédente définition ne proposait pas une précision suffisante par rapport « aux besoins actuels de la métrologie ».

La seconde est l'une des sept unités du Système International

Commençons par enfoncer une porte ouverte : cette unité permet de mesurer une durée. Le temps est défini en seconde et c'est d'ailleurs l'une des sept unités de base du Système international avec le mètre, le kilogramme, l'ampère, le kelvin, la mole et la candela. Il existe évidemment des multiples de la seconde. D'un côté la milliseconde, microseconde, nanoseconde qui sont respectivement 1 000, 1 000 000 et 1 000 000 000 fois plus petites. De l'autre, les unités couramment utilisées sont la minute, l'heure et le jour.

La seconde est donc au cœur de notre vie. Elle régit par exemple nos emplois du temps, mais cela va bien plus loin encore. La notion de temps est par exemple primordiale pour les systèmes de géolocalisation (GPS, Galileo, etc.) qui ont besoin d'une synchronisation d'une très grande précision afin de mener à bien leur mission.

D'abord fraction d'un jour solaire, puis d'une année...

À l'origine, la seconde était définie comme étant 1 / 86 400e du jour solaire moyen. D'ailleurs, un calcul simple permet de comprendre de quoi il en retourne. Dans une journée il y a 24 heures, 60 minutes par heure et 60 secondes par minute : 60 * 60 * 24 = 86 400, ce n'est évidemment pas un hasard.

Problème, la notion de jour solaire moyen n'est pas très précise, d'autant que la rotation de la Terre est irrégulière. La mesure du jour solaire moyen était alors laissée à l'appréciation des astronomes.

En 1960, lors de la 11e conférence générale des poids et mesures, une deuxième définition lui a été donnée : « La seconde est la fraction 1/31 556 925,9747 de l'année tropique pour 1900 janvier 0 à 12 heures de temps des éphémérides ». Au lieu d'un jour solaire moyen, l'idée était de prendre l'ensemble d'une année pour définir une seconde. 

Si l'on suppose qu'une année fait environ 365,25 jours (le quart restant correspond aux années bissextiles revenant tous les quatre ans), on retombe là encore sur nos pattes (ou presque, à cause des approximations et des irrégularités justement) : 365,25 * 86 400 = 31 557 600, un nombre relativement proche du quotient de la fraction de la deuxième définition de la seconde.

La précision était certes meilleure, mais là encore on utilisait toujours les astres (et leurs irrégularités) pour définir la notion du temps. 

... elle est désormais le multiple des vibrations d'un atome de césium

En 1964, un changement radical s'opère afin d'améliorer la précision de la seconde. Le Comité international des poids et mesures « a désigné pour répondre à ces besoins un étalon atomique de fréquence à césium ». En 1967, il a été décidé qu'il était « suffisamment éprouvé et suffisamment précis pour servir à une définition de la seconde répondant aux besoins actuels », une nouvelle définition de la seconde était adoptée.

Comme nous l'avons expliqué, il s'agit désormais de la durée de 9 192 631 770 vibrations d'un atome de césium (à 0 K depuis 1997). La seconde est ainsi passée « officiellement de l'échelle astronomique à l'échelle quantique » explique le CNRS.

Aujourd'hui, il existe plusieurs centaines d'horloges atomiques dans le monde. L'ensemble des mesures est centralisé et synchronisé au bureau international des poids et mesures en banlieue parisienne. Il se charge de distribuer le temps universel coordonné (UTC).

D'autres horloges encore plus précises sont en préparation

Si les meilleures montres à quartz ont une précision d'une seconde sur une période de 100 ans environ, Il faut une centaine de millions d'années avec les horloges atomiques au césium pour atteindre un tel décalage. Mais d'autres, encore plus précises, sont déjà en préparation, à base d'autres éléments chimiques comme l'ytterbium et le strontium. Les vibrations sont des milliers de fois plus rapides qu'avec le césium, permettant en théorie d'améliorer la précision.

Jérôme Lodewyck, chercheur à l'observatoire de Paris qui travaille sur une horloge atomique à base de strontium, explique que sa machine est « plus précise, mais aussi plus jeune ; il faut qu'elle gagne en maturité ». On change encore d'échelle puisque son horloge serait capable de garder une précision de l'ordre de la seconde pendant 10 milliards d'années. 

Mais quel intérêt d'avoir des horloges toujours plus précises ? Le chercheur donne une piste : « grâce à des horloges qui mesurent des échelles de temps très très précises, on peut observer de tous petits défauts dans la physique actuelle et valider des théories ».

Mi-2018 (et après plusieurs années de retard), l'ESA a prévu d'envoyer sur la Station Spatiale Internationale son instrument Pharao. Il s'agit d'une horloge atomique avec une précision accrue (une seconde de déviation tous les 300 millions d'années environ). Cela permettra de vérifier les effets prédits par la théorie de la relativité générale.

Terminons enfin par une réflexion plus philosophique que physique de l'astrophysicien Marc Lachièze-Rey (enseignant à l'École Centrale Paris, théoricien en cosmologie au CNRS) : « le temps n'existe pas, mais évidemment si on veut dire que le temps n'existe pas, il faut plus ou moins savoir ce qu'on appelle le temps. L'idée que je défends c'est que le temps ce n'est pas du tout une notion simple, ce n'est pas du tout une notion première, mais c'est une notion composite ». Même son de cloche pour Étienne Klein, physicien et spécialiste du temps au CEA : il s'agirait d'une « chose introuvable dont tout le monde parle, mais que personne n’a jamais vue ».

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