Terrorisme : dernière ligne droite pour le projet de loi post-état d'urgence

Le jour d'après
Droit 5 min
Terrorisme : dernière ligne droite pour le projet de loi post-état d'urgence
Crédits : Marc Rees (CC-BY-SA 3.0)

Les parlementaires se réuniront aujourd’hui à 16 heures pour arbitrer la version finale du projet de loi sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme. Plusieurs points d’arbitrage touchent au droit des nouvelles technologies.

Après les sénateurs, les députés ont adopté à leur tour le projet de loi anti-terroriste déposé par le gouvernement, pour y apporter plusieurs modifications. Cet après-midi, la commission mixte paritaire se réunira en CMP pour départager les différences entre les deux versions.

Le temps presse puisque ce texte est destiné à prendre la suite de l’état d’urgence qui s’achèvera au 1er novembre prochain. On retrouve d’ailleurs dans ses lignes, plusieurs dispositions inspirées de cet état exceptionnel. Si l’analyse est contestée par l’exécutif, c’est en tout cas celle faite par Bernard Cazeneuve lors d’une conférence « Nuit du Droit », organisée la semaine dernière au Conseil constitutionnel.

Zone de protection, fermeture des lieux de culte

Ainsi, le Préfet pourra décider de mettre en place des périmètres de protection dont l’accès sera contrôlé dès lors qu’un lieu ou un évènement sera exposé à un risque terroriste à raison de sa nature et de l’ampleur de sa fréquentation.

Le même pourra décider la fermeture des lieux de culte « dans lesquels les propos qui sont tenus, les écrits, idées ou théories qui sont diffusés ou les activités qui se déroulent provoquent à la violence, à la haine et à la discrimination et provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes ». Le texte déborde ainsi de la seule lutte contre le terrorisme.

En outre, suite à un vote des députés, des propos diffusés sur Internet pourront à eux seuls justifier cette décision de fermeture.

Les mesures individuelles de surveillance

Des mesures individuelles sont prévues par le même texte à l’encontre de certaines personnes. Il s’agit de celles à l’égard desquelles il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement « constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics » et qui, soit sont en contact avec des groupes terroristes, soit soutiennent, diffusent ou adhèrent à la commission d’actes de terrorisme ou en font l’apologie.

Elles pourront se voir astreintes à rester dans un périmètre de la taille de la commune, pointer au moins une fois par jour à la police, et déclarer leur changement de lieu d’habitation. À titre alternatif, au lieu du pointage, la personne soupçonnée pourra porter un bracelet électronique.

L’obligation de déclarer ses identifiants

En lieu et place de ces mesures, les députés ont réintroduit une obligation initiale qui avait sauté au Sénat. Elle vise notamment à obliger les suspects à déclarer durant 6 mois, l’ensemble de leurs identifiants électroniques, sachant que si cette mesure ne concerne pas les mots de passe, son spectre d’application est très vaste pour ne pas dire indéfini. Soit un joli terreau pour une possible censure constitutionnelle

Députés comme sénateurs ont validé le principe des visites et saisies notamment informatique, deux miroirs des perquisitions chères à l’état d’urgence.  Avec une nuance : il faut cette fois l’autorisation initiale du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, saisi par le préfet.

Nouveauté à l’Assemblée nationale : le ministère de l’Intérieur devra informer « sans délai » les deux chambres des mesures de surveillance, des visites et des saisies mises en œuvre sous le règne de la nouvelle loi jusqu’au 31 décembre 2020.

À cette fin, les autorités administratives, essentiellement les préfets, devront « leur transmettre sans délai copie de tous les actes qu’elles prennent en application de ces dispositions. L’Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l’évaluation de ces mesures. »

Géolocalisation en temps réel, enquêtes administratives

Toujours chez les députés, a été ajoutée la possibilité, pour les investigations relatives aux infractions de terrorisme, de procéder à la géolocalisation en temps réel d’une personne ou d’un véhicule, sans le consentement de son propriétaire.  

Même sens pour la réalisation d’enquêtes relatives aux emplois publics relevant en particulier des missions de souveraineté de l’État ou du domaine de la sécurité ou de la défense. Désormais, afin de déceler des incompatibilités avec l’exercice des fonctions ou des missions envisagées, ces enquêtes pourront être menées en vue de s’assurer que le comportement des personnes n’est pas devenu, avec le temps, incompatible avec leur poste.

Remarquons au passage que ces enquêtes pourront être nourries par la consultation de l’ensemble des fichiers relevant de la sécurité de l’État.

Des boites noires étendues jusqu’en 2020

D’autres traitements automatisés sont programmés par les parlementaires dans le cadre du passager name record (ou PNR).  Comme l’a signalé la CNIL, « le traitement mis en œuvre au niveau national est en outre plus étendu que ce que prévoit la directive [PNR], dans la mesure où il peut être utilisé, par les services de renseignement, à des fins de prévention des atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation ». 

Outre la mise à niveau du code de la sécurité intérieure relative à la surveillance hertzienne, censurée dans sa première version parle Code de la propriété intellectuelle, le projet de loi étend désormais l’expérimentation des boites noires jusqu’en 2020. Le rapport d’étape parlementaire, lui aussi programmé par la loi renseignement, a été repoussé tout autant de deux années par les députés.

Selon le gouvernement, à l’origine de l’amendement modifiant ce terme, « la date de 2018 retenue par le législateur au moment de l’examen du projet de loi relatif au renseignement semble cependant prématurée et il apparaît que le bilan qui pourrait être tiré de la mise en œuvre de cette technique de recueil de renseignements au 30 juin 2018 ne permettra pas au Parlement de se prononcer de manière satisfaisante sur l’opportunité de pérenniser cette technique ou d’y mettre fin ».

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