Le projet de loi contre le terrorisme ouvre une fenêtre aux nouvelles poussées sécuritaires parfois les plus farfelues. Éric Ciotti et Guillaume Larrivé, notamment, profitent de l’occasion pour réchauffer leur vieille idée : coupler les caméras de surveillance et reconnaissance faciale.
Plusieurs députés LR ont déposé des amendements pour utiliser les caméras installées dans les rues pour lutter contre le terrorisme.
Dans l’amendement 191, ils proposent d’autoriser « le recueil en temps réel de l’image d’une personne par le moyen de la vidéoprotection » ce, « à des fins d’exploitations biométriques et de reconnaissance automatique des visages ».
Dans l’amendement 184, même idée : « Les images issues des systèmes de vidéoprotection sont traitées au moyen d’un dispositif de reconnaissance automatique des visages », sachant que ces photos peuvent ensuite être comparées avec celles stockées dans le fichier automatisé des empreintes digitales et celui des personnes recherchées.
Un « réel intérêt opérationnel » selon le rapporteur
Enfin, avec l’amendement 229, les députés Ciotti et Larrivé proposent le même dispositif dans une perspective de « prévention du terrorisme ».
Dans leur exposé des motifs, ils expliquent que « compte tenu des récents progrès dans le domaine des algorithmes de reconnaissance faciale et d’analyse vidéo en temps réel, comme un temps différé, la vidéoprotection couplée à une technologie de reconnaissance faciale est de nature à offrir des gains significatifs en matière d’identification criminelle ou terroriste et d’analyse du renseignement ».
Le 13 septembre, durant les débats en Commission des lois, un tel mécanisme avait été rejeté, mais le rapporteur avait laissé une petite porte ouverte : « Cette question revêt un réel intérêt opérationnel, mais elle mérite d’être étudiée plus attentivement, car les procédures doivent être encadrées de manière beaucoup plus stricte ». Les députés auteurs de ces patchs remettent sur la table cette idée, en espérant son adoption.
Les craintes de la CNIL
Ce n’est pas la première fois que ces parlementaires plaident pour un tel couplage. Ils avaient déjà déposé des amendements identiques lors d’une proposition de loi en mars 2017, ou en mai 2016 à l’Assemblée nationale autour du projet de loi sur la justice du 21e siècle. Même mouvement au Sénat en juillet 2016.
L’an passé, devant les députés, l’ancien ministre de la Justice avait craint cependant un « cavalier législatif », quant au rapporteur d’alors, il avait dénoncé un « risque d’atteinte aux libertés publiques ».
De longue date, la CNIL appelle à la prudence : « Si cette technologie n’en est qu’à ses balbutiements, il importe de comprendre que son caractère intrusif est croissant puisque la liberté d’aller et venir anonymement pourrait être remise en cause ».