Déployer la fibre, c'est bien. Prévenir les habitants, c'est mieux. L'Arcep propose au gouvernement les modalités pour désigner une commune comme « fibrée », avec des obligations de complétude pour les opérateurs. Si la publicité reste le principal intérêt, il doit aussi permettre d'éteindre plus vite le vénérable réseau cuivre.
Les « zones fibrées » entrent dans leur phase finale. Le Journal officiel a publié une décision de l'autorité des télécoms, l'Arcep, proposant les détails concrets du statut au ministre chargé des communications électroniques. Après une consultation publique en avril (dont il reprend les grandes lignes), ce texte a de bonnes chances d'être validé en l'état.
Pour mémoire, les « zones fibrées » doivent signaler aux opérateurs, élus et habitants qu'une commune dispose partout de la fibre, pour amener tout ce petit monde à quitter les autres réseaux. La genèse du projet a été longue, le statut étant d'abord évoqué dans le rapport Champsaur début 2015, avant d'être entériné par la loi Macron d'août de la même année.
Début 2016, les industriels des réseaux publics lançaient des projets pilotes pour aider l'Etat à définir les détails du statut, qui doit montrer aux habitants que le très haut débit avance. Ces zones fibrées ont d'ailleurs bien évolué depuis 2015.
En avril, le régulateur a par exemple écarté l'idée d'une modulation des tarifs du cuivre (ADSL et VDSL). L'idée de départ était de faire grimper le coût des connexions haut débit sur ces zones, pour inciter opérateurs et clients à migrer vers la fibre. En avril, l'Arcep estimait une telle mesure inutile, compte tenu du rythme de remplissage du nouveau réseau. Dans sa décision, l'autorité affirme se laisser la possibilité, à l'avenir, d'appliquer une telle modulation si besoin.
Un statut délivré par l'Arcep, en deux vagues annuelles
Depuis un décret d'août 2016, les bâtiments neufs situés dans une « zone fibrée » n'ont plus besoin de disposer de réseau cuivre, pour l'ADSL ou le VDSL. Encore faut-il que ce statut puisse être attribué. Dans sa proposition au ministre, l'Arcep établit qu'il les délivre, sur demande de l'opérateur chargé du réseau ou de la collectivité (avec l'opérateur exploitant), dans le cas d'un réseau d'initiative publique (RIP).
Un dossier complet est à envoyer par lettre ou extranet à l'Arcep, avec l'ensemble des informations disponibles sur le réseau dans la zone, y compris une visualisation géographique. Des compléments pourront tout de même être demandés sous 30 jours. Le dossier pourra être rejeté si une procédure de sanction (L. 36-11 du Code des communications électroniques et des postes) est en cours contre l'opérateur demandeur.
L'autorité jaugeant la maturité d'une zone donnée, par exemple via le nombre d'opérateurs tiers desservant la zone visée. En zones très denses, où Orange, Free et SFR déploient leurs réseaux en parallèle, chacun pourra effectuer la demande individuellement. Pour les dossiers avant le 30 juin d'une année, la réponse de l'autorité doit être rendue en septembre. Ceux fournis avant le 31 décembre seront officiellement jaugés en mars. Dans les deux cas, la décision sera publiée par l'Arcep.
« L'attribution du statut doit correspondre à la disponibilité effective de services de communications électroniques basés sur un réseau très haut débit en fibre optique jusqu'à l'abonné pour l'ensemble des logements et des locaux professionnels d'une zone donnée » affirme l'autorité dans sa décision.
Raccorder tous les locaux, avec quelques exceptions
Chaque logement derrière les points de mutualisation concernés doit être raccordable. Dans le cas d'un immeuble, la fibre doit être déployée verticalement. S'ils ne le sont pas, ils sont censés être dans les six mois après une demande d'un opérateur concurrent, d'un promoteur ou d'un concurrent. Pour en juger, les logements devront être au moins marqués comme raccordables dans les fichiers IPE (informations préalables enrichies) des opérateurs, qui font foi.
Une exception existe en cas de « blocage avéré » sur certaines lignes, qui empêche le raccordement rapide. En zones très denses, tous les points de mutualisation concernés doivent être reliés au réseau de l'opérateur demandant le statut.
L'opérateur obtenant le statut doit maintenir une offre commerciale FTTH, proposer une offre avec qualité de service renforcée sur le marché de gros (pour les entreprises), avec une garantie de temps de rétablissement d'au plus 10 heures. Le FTTH reste le Graal de l'Arcep pour la concurrence sur la fibre pour entreprises, un marché encore dominée par Orange, malgré les derniers mouvements de SFR.
Le maillon « pertinent » est la commune, ou l'arrondissement dans les cas de de Lyon, Marseille ou Paris. Concernant les nouvelles communes étendues, le périmètre d'une ancienne commune ou un lot peut être désigné comme fibré. La mesure doit aider les zones rurales, où les nouveaux ensembles peuvent être très étendus.
Le tampon fibre apposé, l'opérateur devra fournir des indicateurs trimestriels de la qualité de service du réseau, notamment sur l'avancée du raccordement des locaux. Il devra aussi informer l'Arcep du transfert du statut à un autre opérateur.
« zonefibree.fr », extinction accélérée du cuivre et publicité
Dans sa décision, le régulateur mentionne un site zonefibree.fr, qui renvoie aujourd'hui vers une page de son site. Il doit au moins contenir les modalités d'attribution du statut, sans précision sur d'autres données.
Concernant l'extinction du réseau cuivre, qui reste le cœur vibrant du statut, elle pourra être accélérée une fois une commune ou un arrondissement couvert. Sans statut, Orange pourra lancer un compte à rebours de cinq ans pour couper un nœud de raccordement cuivre si l'ensemble des lignes desservies disposent de la fibre.
Dans une « zone fibrée », l'échéance pourra être avancée, si une offre de qualité de service renforcée existe bien. Le délai pourra être modulé selon le nombre d'opérateurs sur la majorité des lignes fibre et le taux de pénétration du nouveau réseau.
Enfin, comme expliqué en avril, le statut doit surtout permettre aux pouvoirs publics locaux, aux promoteurs et aux opérateurs de faire la publicité du très haut débit. L'État a déposé la marque « zone fibrée »à l'INPI début avril. C'est le principal avantage pour tout le monde, en l'absence d'incitations plus fortes, comme une coordination plus forte de la migration des clients.