Les futures règles applicables au recommandé électronique se dévoilent

Lettre et le néant
Droit 4 min
Les futures règles applicables au recommandé électronique se dévoilent
Crédits : Gajus/iStock/ThinkStock

Encore peu répandus, les recommandés électroniques pourraient se multiplier à l’avenir, le gouvernement s’apprêtant à prendre un décret destiné à sécuriser davantage ces envois dématérialisés. Cette réforme issue de la loi Numérique de 2016 ne devrait toutefois entrer en vigueur qu’en juillet 2018.

La machine gouvernementale a-t-elle attendu la rentrée pour se mettre en marche ? Alors que nous relevions en début de semaine que le nouvel exécutif n’avait encore transmis aucun projet de décret d’application de la loi Numérique à la Commission européenne, Paris a notifié hier à Bruxelles un texte destiné à préciser les modalités de mise en œuvre de la réforme du recommandé électronique.

Le législateur avait en effet choisi de rouvrir ce dossier au travers de la loi Lemaire, en raison notamment d’un cadre juridique « lacunaire et peu harmonisé » selon le rapporteur Luc Belot, mais aussi pour se mettre en conformité avec la réglementation européenne.

L'accord préalable des particuliers sera obligatoire

« L'envoi recommandé électronique est équivalent à l'envoi par lettre recommandée », dispose l'article 93 de la loi pour une République numérique. Pour cela, il faut toutefois que ce pli dématérialisé respecte une batterie d’obligations.

L’envoi devra tout d’abord être assuré par un « prestataire de services d’envoi recommandé électronique qualifié » au sens de l'article 44 du règlement européen sur l'identification électronique (910/2014).

Hormis pour les professionnels, il faudra que le destinataire (particulier, association, administration...) d’un recommandé électronique ait donné son accord exprès pour l’utilisation d’un tel procédé. Faute de quoi l’envoi en question ne pourra produire aucun des « effets juridiques attachés à une lettre recommandée », insiste le projet de décret notifié hier à Bruxelles.

Mais comment ce consentement se matérialisera-t-il ? De diverses manières, en théorie : par écrit ou par voie dématérialisée. L’expéditeur pourra même mandater le prestataire qu’il aura choisi afin qu’il recueille cet accord en son nom.

Il sera par ailleurs possible de demander un accord pour un ensemble de courriers (provenant d’un même expéditeur), visiblement pour éviter d’avoir à répéter la procédure pour chaque lettre. On peut ainsi imaginer que des entreprises prévoient dans leurs conditions générales que le client accepte de recevoir des recommandés par voie électronique.

Quinze jours pour « récupérer » son recommandé électronique

D’un point de vue plus pratique, le prestataire commencera par vérifier l’identité de l’expéditeur (que ce soit en sa présence ou à distance, au moyen d’un certificat de signature électronique...). Le prestataire devra ensuite fournir à son client « une preuve du dépôt électronique de l’envoi », ainsi que différentes informations afférentes : numéro d'identification unique de l'envoi, date et l'heure du dépôt électronique du pli « telles qu’indiquées par un horodatage électronique qualifié », « signature électronique avancée ou le cachet électronique avancé utilisé par le prestataire de services qualifié lors de l’envoi », etc.

Une fois l’envoi effectué, l’entreprise chargée du pli devra informer le destinataire, par voie électronique, « qu’une lettre recommandée électronique lui est destinée et qu'il a la possibilité, pendant un délai de quinze jours à compter du lendemain de l'envoi de cette information, d’accepter ou non sa réception ». Le destinataire ne sera toutefois pas en mesure de savoir à ce moment-là qui en est l’expéditeur.

En cas de refus ou de non réclamation, le prestataire sera tenu d’en adresser une preuve à l'expéditeur (avec horodatage en ce qui concerne la première hypothèse). Et ce « au plus tard le lendemain de l'expiration du délai » de quinze jours laissé au destinataire. Cette preuve produira « les mêmes effets juridiques que ceux attachés à la preuve d’un refus ou d’une non réclamation d’une lettre recommandée », prévoit le projet de décret.

En cas de réception, différents éléments seront recueillis par le prestataire chargé du recommandé : nom et prénom du destinataire ou de son mandataire ayant accepté l’envoi, date et heure de réception du courrier, référence à l’identification préalable du destinataire, etc.

Les professionnels du recommandé électronique devront dans tous les cas conserver les données relatives à chaque envoi pendant au moins douze mois, l’expéditeur étant censé pouvoir y accéder durant un an.

Les recommandés « hybrides » resteront possibles

Dernier point évoqué par le projet de décret : les recommandés dits « hybrides », dans la mesure où le prestataire se charge d’imprimer le contenu de l’envoi, de le mettre sous enveloppe et de l’acheminer jusqu’au destinataire.

Ceux-ci resteront bien entendu possibles. L’entreprise à laquelle aura recours l’expéditeur devra simplement se tourner vers « un prestataire de services postaux » pour la partie concernant la distribution physique.

Dernière chose : la loi Numérique punit d'une amende de 50 000 euros « le fait de proposer ou de fournir un service ne remplissant pas [toutes ces obligations] dans des conditions de nature à induire en erreur l'expéditeur ou le destinataire sur les effets juridiques de l'envoi ».

Entrée en vigueur prévue pour la mi-2018

Le projet de décret notifié hier à la Commission européenne, et dont la publication était initialement envisagée en mars 2017, ne paraîtra pas avant la fin de l’année. Une période dite de « statu quo » de trois mois empêche en effet le gouvernement de le publier (l’objectif étant de laisser à la Commission européenne et aux autres États membres le temps d’émettre des observations sur ce texte).

Il est de toute manière prévu que ses dispositions n’entrent en vigueur qu’au 1er juillet 2018. Elles signeront à ce moment-là la disparition du décret du 2 février 2011 relatif à l’envoi de recommandés électroniques « pour la conclusion ou l’exécution d’un contrat » (voir à ce sujet l’analyse de la réforme à venir par Maître Caprioli dans L’Usine Digitale).

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