Données de connexion : censure du droit de communication de la HATVP

Données de connexion : censure du droit de communication de la HATVP

Capito ?

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Marc Rees

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Droit

08/09/2017 4 minutes
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Données de connexion : censure du droit de communication de la HATVP

Le Conseil constitutionnel a censuré plusieurs dispositions issues des lois pour la Confiance dans la vie politique. On remarquera en particulier celles visant le droit de communication de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Plus qu'un symbole, un message fort : il s'est saisi d'office sur cet article. 

Dans sa décision rendue ce jour, le Conseil constitutionnel a examiné plusieurs dispositions de ces deux lois à la demande de soixante députés. Dans leur saisine, plusieurs reproches ont été exprimés. Si le juge en a suivi certains, il a surtout dégommé dans son coin, une défaillance trouvée à l’article 9.

Pour comprendre, il faut revenir à l’article 6 de la loi de 2013 sur la transparence. Il prévoit que « la Haute Autorité peut demander à l'administration fiscale d'exercer le droit de communication (…) en vue de recueillir toutes informations utiles à l'accomplissement de sa mission de contrôle », en particulier la prévention des conflits d'intérêts dans les emplois publics.

L’article 9 de la loi sur la Confiance voulait armer la HATVP du pouvoir d’exercer à l’avenir elle-même ce droit. Et donc directement auprès des opérateurs de communications électroniques, des FAI et des hébergeurs.

Seulement, dans son empressement, le législateur a omis de prévoir qu’un tel accès devait nécessairement être encadré (délai, recours, durée de conservation, etc.). Une contrainte pourtant dite et répétée par la Cour de justice de l’Union européenne, mais également par le Conseil constitutionnel.

Saisine d'office et censure 

Celui-ci a donc relevé d’office, c’est-à-dire sans que la défaillance ne lui soit signalée par les auteurs de la saisine, un motif de censure. Une première en la matière, selon l’avocat Alexandre Archambault.

L’explication est donnée au paragraphe 83 de la décision : « La communication des données de connexion est de nature à porter atteinte au droit au respect de la vie privée des personnes faisant l'objet du contrôle, exposent les « Sages ». Faute d'avoir assorti la procédure prévue par les dispositions en cause de garanties suffisantes, le législateur a porté une atteinte disproportionnée à ce droit ». 

Bref, c’est un signe d’impatience forte et une remise en cause directe adressée au législateur.

Déjà plusieurs rappels à l'ordre 

Il faut dire qu’en la matière, la documentation commence à être tout de même épaisse. Le 8 avril 2014, la Cour de justice de l’Union européenne avait invalidé la directive sur la conservation des données de connexion, faute pour elle d’avoir prévu les garanties nécessaires pour la sauvegarde de la vie privée.

En effet, les juges rappelaient que les données de connexion, « prises dans leur ensemble, sont susceptibles de permettre de tirer des conclusions très précises concernant la vie privée des personnes (…) telles que les habitudes de la vie quotidienne, les lieux de séjour permanents ou temporaires, les déplacements journaliers ou autres, les activités exercées, les relations sociales de ces personnes et les milieux sociaux fréquentés par celles-ci ». 

En septembre 2014, la section des études du Conseil d’État insistait dans son rapport sur les libertés numériques à ce que la France tire les conséquences de cet arrêt dit « Digital Rights Ireland », en particulier concernant  « l’accès aux données de connexion collectées au titre de l’obligation de conservation systématique prévue par notre législation ». Des remarques partagées par le député Lionel Tardy, qui a démultiplié les questions parlementaires sur le sujet lors de la précédente législature.

L'AMF, l'Autorité de la concurrence, la HATVP...

Mais ces vœux ont été pieux. Un an plus tard, le Conseil constitutionnel a censuré un article de la loi Macron qui offrait un accès aux métadonnées aux agents de l’Autorité de la concurrence sans encadrement sérieux. Le 21 juillet dernier, rebelote, il a sanctionné un pouvoir identique reconnu aux agents de l’Autorité des marchés financiers. Le Conseil a là encore reproché au législateur de n’avoir « assorti la procédure prévue par les dispositions en cause d'aucune autre garantie ». 

Autant dire que l’exécutif et le législateur seraient désormais bien inspirés de relire l’arrêt initial de la CJUE, sa réplique de 2016 et cette jurisprudence constitutionnelle aujourd’hui limpides. Sur ces sujets, cependant, les résistances sont fortes. En témoigne cet état des lieux dressé par Privacy International relatif à la conservation des données, où la France se distingue par son immobilisme.

Écrit par Marc Rees

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Introduction

Saisine d'office et censure 

Déjà plusieurs rappels à l'ordre 

L'AMF, l'Autorité de la concurrence, la HATVP...

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Commentaires (11)


Comme quoi, il ne suffit pas de s’autoproclamer “expert issu de la société civile qui fait de la nouvelle politique vite et efficace pas comme la vieille garde qui fait de la vieille politique” pour éviter de confondre vitesse et précipitation <img data-src=" />


nan mais en fait, c’est pas leur faute : l’AN est construite sur sur un vieux cimetière indien. <img data-src=" />








WereWindle a écrit :



nan mais en fait, c’est pas leur faute : l’AN est construite sur sur un vieux cimetière indien. <img data-src=" />





C’est pas une excuse. Les coups de casques, ça marche sur tous les types de fantômes, pas uniquement ceux du PS <img data-src=" />



Pour coller à la géographie, cimetière Gaulois serait mieux.<img data-src=" />


Je n’ai pas compris le but de l’article qui vient d’être censurés par le conseil constitutionnel c’était de se voir communiquer toutes les informations possibles sur un élus ??




Autant dire que l’exécutif et le législateur seraient désormais bien inspirés de relire l’arrêt initial de la CJUE, sa réplique de 2016 et cette jurisprudence constitutionnelle aujourd’hui limpides.



C’est quoi déjà la définition de la folie ? <img data-src=" />




Seulement, dans son empressement, le législateur a omis de prévoir qu’un

tel accès devait nécessairement être encadré (délai, recours, durée de

conservation, etc.).





Same player shoot again…



Amateurs un jour, amateurs toujours !








Ricard a écrit :



C’est quoi déjà la définition de la folie ? <img data-src=" />







Et de l’hypocrisie? Ils défendent l’Europe corps et âme… et la renient quant ses décisions de justice leur rappelle qu’ils violent les Droits de l’Homme <img data-src=" />









Soriatane a écrit :



Je n’ai pas compris le but de l’article qui vient d’être censurés par le conseil constitutionnel c’était de se voir communiquer toutes les informations possibles sur un élus ??





Le fisc pouvait demande des infos de connexion (art 6), pourquoi pas.&nbsp;



Sauf qu’ils ont rajouté aussi la HATVP dans les personnes pouvant demander des infos de connexion.&nbsp; Alors que le taf de la HATVP c’est juste contrôler le patrimoine et les conflits d’intérêt.



C’est donc un peu disproportionné…&nbsp;



tiens marrant cette saisine d’office.

Lorsqu’il s’agit de perquisition administrative et de lettre de cachet (pardon, d’assignation à résidence adminitrative) et autre “surveillance de masse” pour le vulgum peum, il n’y a eu aucune saisine d’office sur les articles, et surtout on ne se presse pas sur les réponses lorsqu’on a les qpc et on gratte pas plus loin.



Par contre dès qu’il y a un truc (même si je suis d’accord sur le pourquoi) qui concerne les élus (ie les copains), le CC décide que visiblement il y a urgence à agir.


Le pire étant que ce n’est peut être pas la raison.



Il suffit de lire la biographie de Jean-Louis Nadal (président de la HAPTV) pour comprendre que ce type de collège est choisi par le pouvoir, et en l’occurrence le précédent.

&nbsp;

Je crains qu’il s’agisse d’avantage d’une petite “vengeance” socialiste que d’une réelle volonté de s’opposer au texte…