Le gouvernement va créer un « Code du travail numérique »

Le gouvernement va créer un « Code du travail numérique »

Le Da Pénicaud Code

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Xavier Berne

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Droit

28/08/2017 5 minutes
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Le gouvernement va créer un « Code du travail numérique »

Alors que la rentrée s’annonce tendue pour le gouvernement, qui présentera cette semaine ses ordonnances relatives à la réforme du droit du travail, l’exécutif est revenu ces derniers jours sur l’une des mesures à venir (et passée quasiment inaperçue jusqu'ici) : la création d'un « Code du travail numérique ».

« Aujourd'hui, quand vous prenez le Code du travail dans les versions imprimées, quand vous allez sur Légifrance, vous ne pouvez pas naviguer » a fait valoir Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État au Numérique, ce matin sur l’antenne de France Inter. Les critiques sont en effet loin d’être nouvelles : non seulement le droit du travail est très dense, mais en plus il se révèle souvent bien peu « lisible » pour tout un chacun...

Pour faciliter la compréhension du droit du travail par le plus grand nombre, la ministre du Travail l’a souligné ce week-end dans une interview au Monde : le gouvernement va « créer un Code du travail numérique ».

Il ne s’agit toutefois ni de proposer une version PDF du Code du travail, ni de mettre à part les règles qui s’appliqueraient spécifiquement aux acteurs « numériques » (Uber, Deliveroo, etc.). « Mettre le Code du travail de façon numérique, c'est le faire pour que des gens comme vous et comme moi puissions le comprendre autant que tous les salariés et que tous les chefs d'entreprises » a expliqué Mounir Mahjoubi. En pratique, le dispositif imaginé par l’exécutif devrait même aller plus loin qu’une simple explicitation du droit existant.

Possibilité de se prévaloir des informations fournies par ce nouvel outil

 

Ce projet de « Code du travail numérique » figure depuis plusieurs mois à l’article 3 du projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances diverses mesures « pour le renforcement du dialogue social ». Suite à la saisine du Conseil constitutionnel, qui rendra son avis la semaine prochaine, le texte n’a pas encore été promulgué par Emmanuel Macron.

Sauf censure des « Sages », l’exécutif devrait néanmoins pouvoir prendre sous six mois toutes les dispositions législatives qu’il souhaite pour « faciliter l’accès par voie numérique de toute personne, y compris en situation de handicap, au droit du travail et aux dispositions légales et conventionnelles qui lui sont applicables ». D’autre part, le gouvernement sera amené à définir dans le même temps « les conditions dans lesquelles les personnes peuvent se prévaloir des informations obtenues » au travers de ce « Code du travail numérique ».

Autrement dit, il semble que l’utilisateur aura non seulement une information personnalisée, mais en plus, cette information pourra être considérée comme « fiable » – et devenir dès lors opposable à l’administration.

Laurent Pietraszewski, le député rapporteur du projet de loi de réforme du Code du travail, expliquait ainsi début juillet qu’une réflexion était en cours « pour déterminer dans quelle mesure les normes et informations ainsi regroupées pourraient servir de socle aux salariés comme aux employeurs dans le cadre de leurs démarches, sous la forme d’un quasi rescrit, qu’elles pourraient ainsi invoquer et dont elles pourraient se prévaloir, que ce soit auprès dans le cadre des relations individuelles ou collectives du travail, vis-à-vis de l’administration, ou encore dans le cadre d’une démarche contentieuse ».

Des propos qui cadrent avec ceux tenus en commission des affaires sociales par Muriel Pénicaud, la ministre du Travail :

« Il s’agit de compléter l’existant, et non de le remplacer, par un accès par voie numérique, pour tous ceux qui le souhaitent (...) au droit du travail, pas simplement le droit du travail en bloc dans un « grand PDF Dalloz » mais sur des questions précises. Une vision interactive permettrait un a priori sécurisant pour l’entreprise. (...) Lorsqu’elles seront face à l’administration, les petites entreprises bénéficieront d’une sorte de certification de bonne foi. L’administration fera preuve de bienveillance à leur égard. Bien sûr, cela ne vaut pas interprétation du droit mais cela fait partie du « droit à l’erreur », c’est-à-dire de cette démarche de présomption de bonne foi, surtout s’il y a une information de l’administration. »

L’étude d’impact annexée au projet de loi porté par Muriel Pénicaud reste toutefois bien discrète quant aux contours exact du futur dispositif (site Internet et/ou application mobile, date de mise en service, etc.), ainsi que sur son coût... Peut-être le gouvernement donnera-t-il plus de précisions sur cette réforme lors de la conférence de presse qu'il organise, jeudi 31 août, à 15h à Matignon, pour présenter ses ordonnances.

Bientôt une base Open Data des accords de branche, de groupe...

En attendant d’en savoir plus, rappelons que la loi El Khomri tentait déjà d’améliorer l’accès au droit du travail : son article 16 prévoit que sauf accord contraire des parties, « les conventions et accords de branche, de groupe, interentreprises, d'entreprise et d'établissement » doivent être « rendus publics et versés dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable » – conformément aux principes de l’Open Data. Un décret publié en mai dernier fixe d'ailleurs l’entrée en vigueur de ces dispositions au 1er septembre prochain.

D’autres ordonnances en lien avec le numérique

Les ordonnances qui seront présentées en fin de semaine par Muriel Pénicaud sont enfin censées s’intéresser à d’autres sujets habituellement traités dans nos colonnes, comme le télétravail et « le droit d’expression des salariés, notamment par le développement du recours aux outils numériques ». Nous aurons l’occasion d’y revenir.

Écrit par Xavier Berne

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Possibilité de se prévaloir des informations fournies par ce nouvel outil

Bientôt une base Open Data des accords de branche, de groupe...

D’autres ordonnances en lien avec le numérique

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Commentaires (38)


Réunion de crise chez Dalloz et JuriTravail.com <img data-src=" />


Ce sous-titre !! <img data-src=" /> <img data-src=" />


Histoire de renflouer Atos/Capgemini/Autre. Miam.


” Mettre le Code du travail de façon numérique, c’est le faire pour

que des gens comme vous et comme moi puissions le comprendre autant que

tous les salariés et que tous les chefs d’entreprise “



Ca ne va pas être de la tarte, indépendamment de l’organisation du dît code en sa version papier qui ne facilite déjà pas sa consultation, la matière est ardue et technique. De mon temps on y touchait pas avant la licence histoire de pouvoir s’en dépetrer.



&nbsp;


Haha, à voir comment le nouveau gouv. se comporte, mais effectivement ça sent bon le produit immonde et hors de prix, spécialitée de nos SSII Françaises.


Ca serait sympas que ce soit sur GIT aussi !

Pas tant pour les recherches que pour garder l’historique des changements <img data-src=" />

D’ailleurs, quelqu’un l’a fait pour le code civilhttps://github.com/steeve/france.code-civil , mais plus mis a jour il me semble :(


Le projet est intéressant, mais tout dépendra de la manière dont il sera réalisé, ça promet.&nbsp;:oui2:








127.0.0.1 a écrit :



Réunion de crise chez Dalloz et JuriTravail.com <img data-src=" />





Haha peut-être, mais pas sûr que ça soit en concurrence avec leur travail, qui s’adresse directement aux juristes, avocats et magistrats, alors qu’ici ça ressemble à une vulgarisation.







gragra a écrit :



“ Mettre le Code du travail de façon numérique, c’est le faire pour que des gens comme vous et comme moi puissions le comprendre autant que tous les salariés et que tous les chefs d’entreprise ”



Ca ne va pas être de la tarte, indépendamment de l’organisation du dît code en sa version papier qui ne facilite déjà pas sa consultation, la matière est ardue et technique. De mon temps on y touchait pas avant la licence histoire de pouvoir s’en dépetrer.





Je me suis fait la même remarque, et en pensant aussi à cet intéressant billet d’Eolas :

http://www.maitre-eolas.fr/post/2006/11/28/475-pourquoi-parlons-nous-chinois





«&nbsp;Aujourd’hui, quand vous prenez le Code du travail dans les

versions imprimées, quand vous allez sur Légifrance, vous ne pouvez pas

naviguer »





Il utilise Links comme navigateur, le ministre ?



Je veux bien qu’on ait du mal à s’y retrouver sur Légifrance, c’est très dense. Mais de là à dire qu’on ne peut naviguer… On choisit son Code, on recherche un mot-clé, bref si on s’en donne un peu les moyens on trouve ce qu’on veut. Et il y a plein d’articles et de blogs qui font des liens directs vers les articles concernés (au pire on tape le numéro de l’article sur un moteur de recherche).








OlivierJ a écrit :



Je me suis fait la même remarque, et en pensant aussi à cet intéressant billet d’Eolas :

http://www.maitre-eolas.fr/post/2006/11/28/475-pourquoi-parlons-nous-chinois







Intéressant. <img data-src=" />



Une petite voix me dit que, dans un avenir proche, ce sont les AI qui auront la charge de comprendre les textes de loi… et que, par conséquent, il y aura sans doute l’émergence d’une version beaucoup plus orientée “logique formelle” de tous ces textes.



L’exemple cité par eolas dans son blog peut facilement être transformé en règle/algo.



(amusant de constater que le terme “code” s’emploie aussi bien pour le droit que pour l’informatique)



peut être qu’une façon de le rendre plus compréhensible et lisible par tous:c’est de le supprimer carrément. c’est ce qui va arriver d’ailleurs..








127.0.0.1 a écrit :



Intéressant.&nbsp;<img data-src=" />&nbsp;



Une petite voix me dit que, dans un avenir proche, ce sont les AI qui auront la charge de comprendre les textes de loi… et que, par conséquent, il y aura sans doute l’émergence d’une version beaucoup plus orientée “logique formelle” de tous ces textes.&nbsp;



L’exemple cité par eolas dans son blog peut facilement être transformé en règle/algo.&nbsp;



(amusant de constater que le terme “code” s’emploie aussi bien pour le droit que pour l’informatique)





Ça me fait penser à ces articles qui datent maintenant d’un petit moment mais qui collent à tes propos :



http://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/05/27/une-intelligence-artificielle-fa… et&nbsphttp://www.huffingtonpost.fr/2016/05/13/premier-robot-avocat-embauche_n_9954520…. (j’espère que j’ai le droit de poster ces liens ?)



&nbsp;





ledon94 a écrit :



peut être qu’une façon de le rendre plus compréhensible et lisible par tous:c’est de le supprimer carrément. c’est ce qui va arriver d’ailleurs..





Pourrais-tu développer ?



On peut se demander, pourquoi le droit du travail ?



Pourquoi pas le code civil pour commencer ? Autant faire un truc qui s’applique à tout le monde, et pas juste aux rares pistonnés qui ont du travail








Jarodd a écrit :



Il utilise Links comme navigateur, le ministre ?



Je veux bien qu’on ait du mal à s’y retrouver sur Légifrance, c’est très dense. Mais de là à dire qu’on ne peut naviguer… On choisit son Code, on recherche un mot-clé, bref si on s’en donne un peu les moyens on trouve ce qu’on veut. Et il y a plein d’articles et de blogs qui font des liens directs vers les articles concernés (au pire on tape le numéro de l’article sur un moteur de recherche).





C’est juste qu’il comprend rien aux textes de lois, il voudrait une version pour les nuls pour qu’il puisse bosser un peu lui aussi









uzak a écrit :



On peut se demander, pourquoi le droit du travail ?



Pourquoi pas le code civil pour commencer ? Autant faire un truc qui s’applique à tout le monde, et pas juste aux rares pistonnés qui ont du travail





bah justement : tu commences sur un échantillon plus petit pour voir comment ça passe (si tu constates une hausse des ventes de fourches et de torches, c’est bon pour le commerce mais tu as foiré ton coup) <img data-src=" />



(oui, je feed)









OlivierJ a écrit :



Haha peut-être, mais pas sûr que ça soit en concurrence avec leur travail, qui s’adresse directement aux juristes, avocats et magistrats, alors qu’ici ça ressemble à une vulgarisation.







Je pense pas qu’une vulgarisation soit compatible avec ça :





Autrement dit, il semble que l’utilisateur aura non seulement une information personnalisée, mais en plus, cette information pourra être considérée comme « fiable » – et devenir dès lors opposable à l’administration.





Ou alors les juristes nous enfument depuis des années à faire des trucs compliqués sans vraie raison derrière..

Ce dont je doute









WereWindle a écrit :



bah justement : tu commences sur un échantillon plus petit pour voir comment ça passe (si tu constates une hausse des ventes de fourches et de torches, c’est bon pour le commerce mais tu as foiré ton coup) <img data-src=" />



(oui, je feed)





Le code du commerce alors, il est cool lui aussi.



des fourches <img data-src=" /> Faut se mettre à jour, on a des moissonneuses batteuses maintenant <img data-src=" />









127.0.0.1 a écrit :



(amusant de constater que le terme “code” s’emploie aussi bien pour le droit que pour l’informatique)





“Le droit est une science de qualification&nbsp;: on donne à une situation de fait ou une manifestation de volonté une qualification juridique, puis on applique à cette situation les conséquences que le droit lui attache.”



Ce passage de maitre Eolas résume a lui seul&nbsp; ce parallèle code informatique/droit <img data-src=" />



&nbsp;A partir du moment où l’on peut exprimer le droit comme une matrice d’état en entré (les faits) avec le droit applicable en face, le droit sera bien plus compréhensible par un robot qu’un humain.









uzak a écrit :



Le code du commerce alors, il est cool lui aussi.



Déjà adapté depuis longtemps, ca s’appelle la vente à distance.









uzak a écrit :



des fourches <img data-src=" /> Faut se mettre à jour, on a des moissonneuses batteuses maintenant <img data-src=" />





mouais… autant une tête sur une fourche ça envoie un message, autant la même tête passée dans une moissonneuse, ça file juste du taff en plus à la femme de ménage <img data-src=" />



Le Code du travail c’est un peu comme les &nbsp;dépendances de package&nbsp;&nbsp;<img data-src=" />








tifounon a écrit :



Le Code du travail c’est un peu comme les &nbsp;dépendances de package&nbsp;&nbsp;<img data-src=" />





<img data-src=" />



C’est du Java ça !


J’ai l’impression que pas mal de monde se méprend sur l’intention derrière ce “code numérique” qui semble juste avoir pour objectif de sécuriser les entreprises vis-à-vis de l’administration lorsqu’il y a un point de droit obscur et qu’elles font la démarche de s’informer (cf. la comparaison avec le rescrit).



Pour la vulgarisation de qualité, il reste ça.



Sinon les IA en cabinet d’avocat, c’est pas encore la panacée d’après ce qu’on en dit en formation.

Ça te dit quel juge est plus lent/rapide, accorde une grosse prestation compensatoire, … bref,rien de bien transcendant.&nbsp;


Quand les accords de branche professionnelle n’auront plus la primauté sur les accords d’entreprise, on va enlever le peu de pouvoir détenu par les confédérations syndicales (les renforcer aurait un peu plus de sens ne serait-ce que pour augmenter leur légimité) et il ne restera plus que la législation du travail (le pouvoir de l’État) pour protéger le salarié dans son entreprise, ça va effectivement devenir plus simple à comprendre.








blob741 a écrit :



Pour la vulgarisation de qualité, il reste ça.







C’est ce que je me suis dit en lisant l’article. On dirait qu’ils veulent refaire service-puclic.fr.



Sur la partie Particulier &gt; Travail, il y a déjà énormément d’infos et c’est très bien rédigé. Avec des questions/réponses pour les cas les plus courants.

https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/N19806



La précédente majorité avait fait une annonce similaire il y a quelques mois (à la louche un an).



L’idée est louable mais comporte deux limites qui à mon sens compromettent totalement l’aventure :




  • d’une part la matière première, à savoir le Code, est disponible pour tous aujourd’hui. Et même mieux agencé/présenté, un profane ne comprendra pas. Par exemple, le Code général des impôts est super bien présenté en ligne avec même des précisions etc… (rien avoir avec les autres Codes en ligne) pourtant il reste bien hermétique. En outre, le Code du travail (comme tous les Codes) ne peut que rarement être lu seul mais se complète régulièrement par d’autres Codes, Lois ou règlements (classiquement droit de l’environnement, Code pénal, convention collective etc…). Tout regrouper est une gageure qui me semble insurmontable, déjà qu’ils sont incapables de voter une Loi compréhensible en elle-même sans 200 renvois à d’autres textes, alors un Code…

    &nbsp;

  • d’autre part, modifier le texte du Code pour le rendre compréhensible sans effort pour tous, implique nécessairement un appauvrissement du droit. A titre d’exemple, lorsque le Code aborde la capacité juridique pour signer un contrat de travail, il fait appel à une notion juridique bien définie qui représente des tartines de Jurisprudences et de fascicules pour en maîtriser le sens qui d’ailleurs ne sont pas liés au Droit du travail. Paradoxalement, en tentant d’en simplifier le sens pour le rendre immédiatement compréhensible au profane, on ouvrira la porte à l’interprétation jurisprudentielle qui devra tenter de trancher des situations pas (ou mal) envisagées par une formulation trop simpliste du Code du travail.








blob741 a écrit :



Sinon les IA en cabinet d’avocat, c’est pas encore la panacée d’après ce qu’on en dit en formation.

Ça te dit quel juge est plus lent/rapide, accorde une grosse prestation compensatoire, … bref,rien de bien transcendant.&nbsp;



C’est pas mal pour le contentieux de masse pour automatiser certaines taches (calcul de la prestation compensatoire, application des barèmes d’indemnisation des préjudices corpos etc…).



Pour le reste, si c’est abordé comme une aide à la rédaction d’actes c’est pas mal (lecture auto de l’assignation ou conclusions et affichage en parallèle des fascicules et jurisprudences en lien avec les notions juridiques détectées).



Si c’est abordé comme une pré-rédaction d’actes/décisions, ben c’est nul. D’une part car les articulations juridiques sont encore bien trop subtiles pour que les algos arrivent à faire les bons arbitrages (certains pensent qu’à force d’ingurgiter les décisions pour avoir tous les cas, ca marchera un jour…). D’autre part parce que dans des conclusions ou des assignations tu peux développer des arguments volontairement faux et donc embarquer l’algo sur de fausses problématiques (mais qu’il voudra trancher comme un benêt).



On commence à préparer notre solution de “justice prédictive” dans mon Barreau, mais avec comme idée d’être une nouvelle génération d’aide à la rédaction et certainement pas de remplacer les hommes qui participent et rendent la Justice.



D’ailleurs et si par malheur un jour la justice prédictive telle que vue par certains devait exister, il faut avoir conscience du fait que jamais certaines notions clefs de notre droit n’aurait pu apparaitre avec un tel système. Jamais on aurait eu un droit protecteur en matière de crédit à la consommation, jamais on aurait pu développer les problématiques de discriminations (testing CV anonymes) etc…



Sans compter que je doute fortement que quiconque accepte une décision rendue de façon automatisée, d’une part car un algo n’est jamais neutre. D’autre part car aucun humain normalement constitué ne peut accepter de mettre sa liberté entre les mains d’une machine, et la Justice c’est d’abord ça.









crocodudule a écrit :





Sans compter que je doute fortement que quiconque accepte une décision rendue de façon automatisée, d’une part car un algo n’est jamais neutre. D’autre part car aucun humain normalement constitué ne peut accepter de mettre sa liberté entre les mains d’une machine, et la Justice c’est d’abord ça.





Je crois le contraire, la preuve est la justice administrative. Qui conteste encore un PV de radar automatique ?

Si le logiciel de “justice” est bien fait, mais surtout clair, il n’y a pas matière à contestation. Mieux, tout à chacun est libre de faire des simulations de risque avant de passer à l’acte.

Mais ce n’est pas demain la veille qu’on aura la réponse aux 3 questions suivantes :

1/qu’est ce que je risque si je vole une mobylette sans violence

2/idem si je matraque le propriétaire et qu’il perd un oeil

3/idem à 1/ mais je perd le contrôle de la mobylette et provoque un accident qui envoie un bus de tourisme de japonais au fond de la Seine (80 morts, 20 blessés)

Un système de justice bien fait devrait donner la même sentence dans n’importe quel tribunal. On se doute bien que ce n’est pas le cas, donc la Justice avec son bandeau et sa balance déséquilibrée, bof.

Avant d’informatiser un système, il faut qu’il soit prédictif. Rendre la justice actuellement est imprévisible, donc n’est pas informatisable.



Je suis d’un petit barreau (Caen - 400 avocats), donc il n’est pas question de développer quoi que ce soit (on en est plus à résilier Lexis Nexis pour prendre Lexbase …).



J’ai fait une formation avec Wickers qui parlait des IA et ça donnait pas envie.



Après, je peux aider à coder l’algorythme pour certaines juridictions/types de contentieux.



Recours TA sur les conditions de détention : le détenu a toujours eu plus de 3m² pour lui tout seul, rejet, sinon, indemnisation merdique.

Comparution immédiate (en fonction du juge) : papiers, si non, mandat de dépôt (si oui, vraisemblablement aussi tu me diras).


En matière de logique pure, c’est un non-sens complet que de donner la primauté des accords d’entreprise sur les accords de branches. Ce sont des garde-fous au même titre que le Code du Travail, une hiérarchie des normes des plus naturelles.



Si une entreprise n’est pas contente d’un accord de branche, qu’elle en sorte, mais si elle l’a adopté, elle s’y conforme et elle la ferme. Sauf erreur, même en Allemagne, maintes fois citée plus ou moins à tort par nos chers élus, les conventions collectives ont force de loi.


Pourquoi simplifier le code du travail, quand vous pouvez presenter la meme usine a gaz en version numerique ? lol…



On entend deja les PMEs se rejouir de cette nouvelle qui va radicalement changer leur vie <img data-src=" />



Plus de perte de temps et plus de precieuses ressources financiaires en

frais juridiques &Co pour essayer de se mettre en conformite.





Et surtout, elles ne seront plus terrorisees a l’idee de pouvoir se

faire comdamner a tout moment par les prud’hommes; la version

non-numerique etant si compliquee que tout respecter a la lettre est

impossible.


Dans ton commentaire, il y a quelque chose d’étrange : par principe la justice est personnalisée, or tu as l’air de considérer que la sanction du PV devrait être la même pour tous (forfaitaire) et que la justice humaine est moins efficace qu’un algorithme. Même si la justice humaine est imparfaite et le sera toujours, aucune décision mécanique (venant d’une machine, d’un algorithme) ne pourra prendre la place à la décision d’un humain (sauf peut-être le jour où la machine aura une conscience). Même si 2 tribunaux différents ne rendraient pas la même sanction à une infraction déterminée dans une situation déterminée avec les mêmes protagonistes mis en cause, la Justice (avec un grand V) est surtout garantie par une procédure judiciaire (des prérogatives, des recours, des délais, etc).




  &nbsp;Pour rappel, l'amende forfaitaire est une   simplification administrative pour fluidifier et accélérer la peine         

d'amende, mais ce n'est pas ce qu'on appelle une justice impartiale (aveugle) et équitable (qui pèse les arguments des justiciables) et répressive (qui tranche) -- représentée par le personnage féminin avec la balance d'un côté, le glaive de l'autre et le bandeau sur les yeux.

* la Justice (avec un grand J)&nbsp; <img data-src=" />








crocodudule a écrit :



L’idée est louable mais comporte deux limites qui à mon sens compromettent totalement l’aventure :




  • d’une part la matière première, à savoir le Code, est disponible pour tous aujourd’hui. Et même mieux agencé/présenté, un profane ne comprendra pas. Par exemple, le Code général des impôts est super bien présenté en ligne avec même des précisions etc… (rien avoir avec les autres Codes en ligne) pourtant il reste bien hermétique. En outre, le Code du travail (comme tous les Codes) ne peut que rarement être lu seul mais se complète régulièrement par d’autres Codes, Lois ou règlements (classiquement droit de l’environnement, Code pénal, convention collective etc…). Tout regrouper est une gageure qui me semble insurmontable, déjà qu’ils sont incapables de voter une Loi compréhensible en elle-même sans 200 renvois à d’autres textes, alors un Code…





    On ne peut pas imaginer un système qui “compilerait” le texte final (i.e intègrerait les renvois et modifications + éventuellement décrets d’application) ?

    Sinon, oui, la version actuelle est souvent compliquée.







    crocodudule a écrit :



  • d’autre part, modifier le texte du Code pour le rendre compréhensible sans effort pour tous, implique nécessairement un appauvrissement du droit. A titre d’exemple, lorsque le Code aborde la capacité juridique pour signer un contrat de travail, il fait appel à une notion juridique bien définie qui représente des tartines de Jurisprudences et de fascicules pour en maîtriser le sens qui d’ailleurs ne sont pas liés au Droit du travail. Paradoxalement, en tentant d’en simplifier le sens pour le rendre immédiatement compréhensible au profane, on ouvrira la porte à l’interprétation jurisprudentielle qui devra tenter de trancher des situations pas (ou mal) envisagées par une formulation trop simpliste du Code du travail.





    [/quote]

    Sur ce point là, à mon sens, ça n’est pas un vrai problème (dit autrement ça dépend du but du système).

    Si l’objectif est que tout un chacun puisse se faire une idée d’ensemble d’un point de droit, quitte à le creuser plus sérieusement avec un juriste ou un avocat, ça limitera déjà l’impression de ne même pas savoir par quel bout le prendre (quelle question poser audit juriste/avocat) et en soi c’est déjà pas mal.



    Si le but est d’être une version vulgarisée mais totalement interchangeable avec les textes existant, là oui, il y aura vite des problèmes.







    joma74fr a écrit :



    * la Justice (avec un grand J)  <img data-src=" />





    j’ai bien buggé 1mn à me demander ce qu’était ce V <img data-src=" />









blob741 a écrit :



Je suis d’un petit barreau (Caen - 400 avocats), donc il n’est pas question de développer quoi que ce soit (on en est plus à résilier Lexis Nexis pour prendre Lexbase …).




 J'ai fait une formation avec Wickers qui parlait des IA et ça donnait pas envie.      






Après, je peux aider à coder l'algorythme pour certaines juridictions/types de contentieux.      






Recours TA sur les conditions de détention : le détenu a toujours eu plus de 3m² pour lui tout seul, rejet, sinon, indemnisation merdique.      

Comparution immédiate (en fonction du juge) : papiers, si non, mandat de dépôt (si oui, vraisemblablement aussi tu me diras).







En réalité, c’est moins cher qu’on l’imagine et surtout c’est notre intérêt que plusieurs solutions existent pour que cela soit accessible à l’ensemble de la profession mais aussi des Juridictions (avec qui on travaille sur la question).

&nbsp;

(Très bon barreau Caen, on a historiquement de bons liens avec vous ici, notamment après guerre et la création de l’association locale d’un syndicat bien connu dans la profession, si tu as des contacts n’hésitent pas à solliciter mon Barreau sur la question de la justice prédictive, avis qu’on doit pouvoir travailler en bonne intelligence…) &nbsp;









WereWindle a écrit :



On ne peut pas imaginer un système qui “compilerait” le texte final (i.e intègrerait les renvois et modifications + éventuellement décrets d’application) ?

Sinon, oui, la version actuelle est souvent compliquée.





Faire de la vulgarisation c’est une excellente chose (et on le fait régulièrement à destination des pros).



En revanche, nourrir l’espoir de rentre tout accessible/intelligible me semble une chimère.



Perso j’ai 11 ans d’études derrière moi, sincèrement je ne vois pas comment rendre “ingurgitable” tout cela (et j’en apprends encore tous les jours) en quelques heures de lecture sur le net, même avec la meilleur volonté du monde.









Aloyse57 a écrit :



1°/ Je crois le contraire, la preuve est la justice administrative. Qui conteste encore un PV de radar automatique ?

2°/ Si le logiciel de “justice” est bien fait, mais surtout clair, il n’y a pas matière à contestation. Mieux, tout à chacun est libre de faire des simulations de risque avant de passer à l’acte.

Mais ce n’est pas demain la veille qu’on aura la réponse aux 3 questions suivantes : […]

3°/ Un système de justice bien fait devrait donner la même sentence dans n’importe quel tribunal. On se doute bien que ce n’est pas le cas, donc la Justice avec son bandeau et sa balance déséquilibrée, bof.

Avant d’informatiser un système, il faut qu’il soit prédictif. Rendre la justice actuellement est imprévisible, donc n’est pas informatisable.





&nbsp;1- Pas mal de monde conteste les prunes automatiques. Tu as d’ailleurs actuellement une irrégularité “probable” d’une contravention consistant pour une “personne morale” a ne pas dénoncer le conducteur(salarié) responsable d’une infraction. Certains commissariats/gendarmes font pas dans le détail, et transforment cette obligation initialement prévue à destination des flottes de bagnoles dans les Sociétés, à tous les professionnels (dont ceux qui ne sont pas nécessairement une personne morale; artisan exerçant à titre personnel, profession libérale etc…).



&nbsp;2- A mon sens dans la notion de logiciel “bien fait”, il y a une erreur fondamentale. Qu’il soit bien codé et fonctionnel est une chose. Mais un algorithme, surtout dans le domaine du prédictif, doit nécessairement arbitrer entre plusieurs informations pour déterminer un résultat. Celui qui le code va pondérer ou surexprimer tels ou tels facteurs. De façon paradoxale mais néanmoins bien réelle, un algorithme prédictif est structurellement partial. Tu as une affaire très récente en ce domaine aux USA, où une partie a demandé la production en justice du code source de l’algo pour démontrer cela (la boite refusant dans un premier temps avant d’y être contrainte). Plus proche de nous tu as le code source d’APB qui a été très critiqué pour sa distinction candidats français de l’étranger/ français sur le territoire ou quelque chose de cet ordre.



3-Si certains écarts de décisions entre différentes Juridictions sont parfois difficilement compréhensibles (je sais bien que notre Justice n’est pas parfaite…), néanmoins, il n’est pas souhaitable d’avoir strictement le même montant d’indemnité ou de sanction partout sur le territoire. Le niveau de vie à Paris n’est pas celui à Montpellier par exemple, des barèmes communs au niveau de la Cour d’appel sont plus logiques comme en matière de prestation compensatoire ou de dommages corporels.

Enfin et surtout, mis à part les écarts entre Juridictions, il faut aussi admettre, qu’au sein d’une même Juridiction, qu’une indemnisation (comme le préjudice moral par exemple) ou une peine doit être adaptée à la personnalité de la victime/auteur. On ne peut donc pas calquer strictement une décision rendue sur les mêmes faits pour une personne, à une autre qui n’a pas le même parcours ou la même personnalité.



Donc si j’accueille avec plaisir la “justice prédictive” (mal nommée) dans mon travail quotidien, en revanche, je m’opposerai farouchement à ce que l’ordi tranche en lieu et place de l’humain.