L'Electronic Frontier Foundation demande à la Cour suprême américaine d'annuler une décision de cour d'appel, fondée sur des emails récupérés par la NSA. Pour la fondation, la collecte d'emails d'un Américain, sans mandat, viole le Quatrième Amendement de la Constitution.
Nouveau front contre la surveillance outre-Atlantique. Le 10 août, l'Electronic Frontier Foundation, le Center for Democracy & Technology et le New America's Open Technology Institute ont annoncé la saisine de la Cour suprême. Les organisations demandent à la plus haute juridiction du pays d'invalider une décision d'une cour d'appel, datée de décembre 2016, basée sur des communications obtenues via le programme PRISM de la NSA.
La Cour d'appel des États-Unis pour le neuvième circuit, dans le procès de Mohamed Osman Mohamud, qui a tenté de commettre un attentat à Portland en 2010, a estimé que les emails utilisés dans son procès ont été récupérés conformément à la Constitution. Une vision que contredisent directement les nouveaux plaignants.
Constitution et interprétation
Les informations menant à son arrestation ont été obtenues via PRISM, outil de la NSA qui doit sa notoriété aux révélations d'Edward Snowden en 2013. Les données sont récupérées via les services en ligne, en premier lieu ceux de Facebook, Google, Microsoft et Yahoo. Ce dernier a été accusé de participer activement à ces collectes de renseignements, admettant sa collaboration avec le FBI, non les autres agences.
En appel, la récupération de ces messages était déjà contestée, en vain. « Le jury note que tout ce qu'inclut ce procès est le fruit du ciblage d'un citoyen étranger, via la Section 702 [du Foreign Intelligence Surveillance Act], par lequel les communications par emails de Mohamud ont été collectées » écrit la cour. Il n'y a donc pas de problème à ce que la NSA collecte, stocke et analyse les messages d'Américains quand ils communiquent avec des étrangers surveillés, même sans mandat.
« La décision du Neuvième Circuit dans cette affaire néglige des défauts constitutionnels importants », en ne protégeant pas les internautes américains, peu importe le destinataire, comme le demanderait le Quatrième Amendement (qui interdit toute perquisition sans mandat). Quand la justice estime qu'à partir du moment où un non-Américain est impliqué, la communication peut être suivie, la fondation rétorque que c'est la présence d'un citoyen américain qui doit primer.
Une surveillance à l'ampleur « réduite »
En mai, la NSA annonçait réduire l'ampleur de sa surveillance, en ne surveillant plus par défaut les communications des Américains à destination d'étrangers. Autrement dit, l'agence ne pratiquerait plus la surveillance (presque) sans distinction que la loi l'autorise toujours à mener sans mandat. Le changement est intervenu lors du renouvellement des autorisations par la FISC (Foreign Intelligence Surveillance Court), la cour secrète délivrant ces autorisations de collecte.
La révision concrète de la Section 702 menait aussi, selon l'agence, à la suppression d'une grande partie des données récupérées via le programme Upstream, qui permet de récupérer les informations directement via les infrastructures réseau, lui-même censé s'arrêter. Il ne reste plus qu'à invalider le principe devant la Cour suprême.
En parallèle, les géants du Net s'affichent en grands défenseurs des communications des internautes, après avoir été accusés de collaborer avec les services de renseignement. Ils combattent la récupération sous mandat de données hébergées à l'étranger, Microsoft avec succès, Google beaucoup moins. Ils publient aussi les demandes d'informations qu'ils peuvent fournir, pour montrer leur bonne foi. Les mêmes marchent sur une corde raide, en premier lieu sur le terrorisme, utilisé par des États (dont la France) comme moyen de reprendre en main le tri des informations en ligne.