Dans un marché qui cherche des concurrents à Orange, Kosc vient de signer avec l'opérateur historique pour fournir des offres concurrentes sur son réseau. Une avancée pour un marché en manque cruel de diversité, qui ne satisfait pourtant pas tout le secteur.
L'union est officialisée. Le consortium Kosc a signé un accord d'investissement avec Orange (PDF), pour accéder au réseau fibre de l'opérateur historique sur l'ensemble du territoire. C'est la conclusion de plusieurs mois de travail souterrain, un an et demi après la formation du consortium composé d'OVH et de trois holdings, qui se destine à démocratiser la fibre pour entreprises.
Kosc promet de premières offres fibre au 1er septembre, pour des livraisons débutant en janvier 2018. La société propose déjà des liens backbone (cœur de réseau d'opérateur) depuis septembre 2016. En accédant au réseau fibre d'Orange, le plus large en métropole, il complète celui qu'il détient, à savoir un assemblage de celui d'OVH et du réseau DSL de Completel, ex-filiale de Numericable, récupéré en mars 2016. En propre, Kosc dit déjà couvrir 180 agglomérations.
La nouvelle est donc importante pour Kosc, mais doit aussi être pour le marché des télécoms pour entreprises, où la domination d'Orange ne fait aucun doute. L'accord doit maintenir éloignée une régulation trop forte par l'Arcep, alors que de petits opérateurs réclament toujours des offres clés-en-main directement sur son infrastructure.
Une preuve de bonne foi pour Orange
Depuis janvier, Orange brandit cet accord face à l'Arcep, qui préparait un large arsenal pour rééquilibrer le marché de la fibre. De quoi fortement agacer l'entreprise à l'époque, le régulateur des télécoms voulant lui imposer une plus grande ouverture de son réseau aux concurrents.
Le problème est profond : fin 2015, le groupe avait été condamné à 350 millions d'euros d'amende par l'Autorité de la concurrence pour des pratiques anticoncurrentielles sur le marché entreprises. Il est depuis régulièrement accusé de reformer un monopole sur la fibre. Face à cela, l'Arcep a décidé d'avoir la main légère sur les prochaines années.
Dans le cadre de son analyse de marché, l'autorité voit finalement deux pistes pour les opérateurs qui voudraient s'appuyer sur le réseau d'Orange. D'un côté, elle opte pour des offres de gros passives « activées » par des opérateurs comme Kosc, qui revendront ensuite le service clés-en-main à des détaillants. De l'autre, elle propose aux petits opérateurs de revendre directement les offres d'Orange.
La solution que réclame une partie de ces petits opérateurs, via l'Association des opérateurs télécoms alternatifs (AOTA) n'est pas retenue. Il n'est pas question de permettre à des tiers de construire leurs offres à partir d'une fibre activée par Orange (autrement dit, où il fournirait la fibre et le signal pour le compte d'un autre opérateur). L'Arcep affirme même qu'elle n'a jamais été envisagée, malgré le soutien de l'Autorité de la concurrence pour cette option... Lui préférant une chaine à trois maillons (Orange fournissant le réseau, Kosc l'activant, puis un opérateur de détail la commercialisant aux entreprises clientes).
Un marché qui évolue
Pour certains de ces petits acteurs, le choix du régulateur pose un problème concret : si des offres activées d'Orange sont scrutées de près par l'Arcep, ce ne sera pas le cas d'offres équivalentes par des tiers, sur le même réseau. Or, pour le moment, Kosc est le seul opérateur ayant officiellement signé sur l'activation de la fibre pour entreprises d'Orange.
Pour l'autorité des télécoms, l'objectif est bien d'ouvrir le marché de la fibre pour entreprises à d'autres acteurs qu'Orange et SFR. Kosc est une aubaine, avec l'ambition de devenir numéro trois de ce segment, pour atteindre 100 millions d'euros de chiffre d'affaires en cinq ans. Le régulateur espère tout de même en voir émerger d'autres, à la faveur de la mutualisation des réseaux fibre (grand public et entreprises), qui doit diviser de plusieurs fois les coûts de connexion.
Selon l'autorité, l'an dernier, seules 7 % des entreprises disposaient de la fibre, considérée comme un produit de luxe par le régulateur. Avec des coûts mensuels montant aisément au-dessus du millier d'euros pour des garanties de service importantes et des lignes dédiées, il est difficile pour les TPE et PME d'opter pour cette technologie.
Notons, enfin, que la surprise pourrait ne pas venir seulement que de nouveaux acteurs. SFR, le numéro deux actuel du marché entreprises, a récemment affiché sa volonté de « fibrer » le pays, quitte à faire concurrence aux réseaux publics montés par des collectivités. Le groupe a récemment revu ses offres fibre pour professionnels, en cassant ses propres prix. De quoi potentiellement chambouler le paysage, sans attendre les offres fondées sur le réseau d'Orange.