À peine élu, Emmanuel Macron a décidé demander au Parlement une nouvelle prorogation de l’état d’urgence jusqu’au 1er novembre 2017. Cette sixième extension est dénoncée par différentes organisations, auteur d’une lettre adressée au nouveau président.
« Nous regrettons que le Président de la République et son gouvernement aient annoncé, aussi rapidement et sans concertation avec les acteurs de la société civile qui travaillent sur le sujet, leur volonté de renouvellement de l'état d'urgence ». Voilà le cœur de ce courrier adressé par Amnesty International France, Human Rights Watch, la Quadrature du Net, la Ligue des Droits de l'Homme, l’Observatoire International des Prisons ou encore le Syndicat de la Magistrature et le Syndicat des Avocats de France.
Plutôt qu’une nouvelle course sécuritaire, les signataires s’interrogent sur l’évaluation des différents textes adoptés lors du précédent quinquennat. Sur l'efficacité supposée de l’état d’urgence, ils ont en mémoire les « bilans dressés par la commission des lois de l’Assemblée nationale chargée du contrôle parlementaire de l’état d’urgence et par des autorités indépendantes, comme le Défenseur des droits, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme ou encore le Commissaire européen des droits de l’Homme ».
Un coût social, politique et institutionnel très élevé selon les signataires
Le 5 juillet 2016, le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur les moyens mis en œuvre dans la lutte contre le terrorisme avait certes reconnu un « effet déstabilisateur », s’agissant des premières perquisitions administratives, mais cet effet « semble s’être rapidement amenuisé, comme l’ont noté les directeurs départementaux de la sécurité publique (DDSP) également entendus par la commission des Lois le 11 janvier dernier ».
Dénonçant « le coût, social, politique et institutionnel très élevé de l'état d'urgence qui autorise des mesures impliquant des atteintes graves aux libertés individuelles », le courrier adressé à l’exécutif considère qu’ « un régime d'exception ne saurait durer si longtemps impunément pour la République et ses citoyens. Il tend à fragiliser la séparation et l’indépendance des pouvoirs, en particulier au prix d’une dé-judiciarisation s’installant durablement dans notre paysage juridique ».
Une mesure d'affichage, pour Sébastien Pietrasanta
Plutôt qu’opter pour la prorogation, ils réclament une marque de courage de la part d’Emmanuel Macron, à savoir le non-renouvellement de cet état d’exception. « Ni l'Allemagne ni la Belgique, également touchés par des attentats, n'ont eu recours à un régime juridique d'exception tel que l’état d’urgence. En revanche, la France s’illustre négativement, en étant l’un des seuls pays du Conseil de l’Europe qui dérogent, avec l’Ukraine et la Turquie, à l’application de la Convention européenne des droits de l’Homme ».
Sur Twitter, Sébastien Pietrasanta, l'auteur du rapport relatif aux moyens mis en œuvre par l’État pour lutter contre le terrorisme a justement considéré hier que « l’état d’urgence permanent n’est pas efficace dans la lutte contre le terrorisme. On le galvaude. C’est une mesure d’affichage ».