Vers une sixième prorogation de l'état d'urgence et un nouveau texte sécuritaire

Bernard Macron
Droit 4 min
Vers une sixième prorogation de l'état d'urgence et un nouveau texte sécuritaire
Crédits : iStock

À peine installé au Palais de l’Élysée, le nouveau président de la République a annoncé qu’il allait faire déposer un projet de loi pour proroger l’état d’urgence jusqu’au 1er novembre. Mieux, un énième texte sécuritaire est annoncé pour renforcer encore les moyens des services.

À l’issue d’un Conseil de défense et de sécurité nationale organisé ce matin, Emmanuel Macron a annoncé sur le site de l’Élysée qu’un lot de mesures allait être prises, et ce quelques dizaines d’heures après l’attentat de Manchester.

Premier sujet mis sur le tapis : l’état d’urgence. Cette situation exceptionnelle permet aux autorités administratives d’ordonner des assignations à résidence ou des perquisitions et saisies notamment informatiques en dehors du droit commun des procédures judiciaires. Cet état avait déjà été prolongé jusqu’au 15 juillet pour couvrir l’élection présidentielle puis celle des députés. Macron, qui était resté jusqu’alors plutôt flou, a décidé finalement que le Parlement serait saisi d’une prolongation jusqu’au 1er novembre.

Six prorogations, deux années d'état d'urgence

Par cette décision préparant une sixième prorogation, l’exécutif refuse de prendre le moindre risque, celui d’un retour à une situation normale qui serait suivie d’une attaque terroriste. Un scénario qui serait catastrophique, pas seulement dans le contexte des législatives.

En attendant, ce risque existera toujours. Pire, on voit mal quels seraient les signes qui permettraient de garantir une sacro-sainte sécurité absolue qui n’existe pas. D’ailleurs, en novembre, nous ne serons qu’à deux mois des fêtes de fin d’année, synonymes de rassemblements populaires et il se trouvera toujours un conseiller gouvernemental ou des parlementaires pour réclamer une énième prorogation. 

  • 13 novembre 2015 : Attentats du Bataclan et à Saint-Denis
  • 14 novembre 2015 : Décret déclarant l’état d’urgence pour 15 jours (avec perquisitions informatiques) 
  • 26 novembre 2015 : Loi prorogeant l’état d’urgence pour 3 mois (avec perquisitions)
  • 19 février 2016 : Décision du Conseil constitutionnel censurant les saisies informatiques de données
  • 26 février 2016 : Loi prorogeant l’état d’urgence pour 3 mois (avec perquisitions)
  • 22 mars 2016 : attentat à Bruxelles
  • 26 mai 2016 : Loi prorogeant l’état l’urgence pour 2 mois (sans perquisitions)
  • 14 juillet 2016 : Le président promet de mettre un terme à l’état d’urgence dont la fin est prévue le 26 juillet 2016
  • 14 juillet 2016 : Attentat de Nice
  • 15 juillet : Le président propose de proroger l’état d’urgence de trois mois. Un projet de loi est discuté la semaine suivante.
  • 21 juillet : L’état d’urgence est finalement prorogé de 6 mois (avec perquisitions, saisies informatiques et dispositions sur le renseignement valables même en période normale).
  • 10 décembre : le gouvernement dépose un projet de loi pour étendre l'état d'urgence jusqu'au 15 juillet 2017 afin de couvrir les élections 
  • 19 décembre : cinquième prorogation de l'état d'urgence publiée au Journal officiel
  • 24 mai 2017 : Emmanuel Macron annonce une sixième prorogation jusqu'au 1er novembre

Un nouveau projet de loi sécuritaire

L’épisode va se doubler d’un autre projet de loi. Selon le communiqué officiel,  « le Président de la République a demandé au Gouvernement de proposer des mesures de renforcement de la sécurité face à la menace terroriste hors d’état d’urgence afin qu’un texte législatif soit préparé dans les prochaines semaines ».

La justification, des tours de vis sécuritaires pour atténuer les différences entre droit commun et état d’urgence, avait été déjà avancée par plusieurs députés LR.

Éric Ciotti, Guillaume Larrivé ou Nicolas Dhuicq et bien d’autres avaient proposé à l’Assemblée nationale d’intégrer hors état d’urgence des mesures puisées dans la loi de 1955. Emmanuel Macron n’aura donc qu’à puiser dans ce vivier ou laisser ces députés revenir à la charge. Dans tous les cas, il pourra s'appuyer sur ce patch pour tenter de sortir tête haute de l'état d'urgence. 

Une fenêtre de tir précieuse, mais risquée

Si besoin est, cette fenêtre de tir permettra à Macron de revenir sur le sujet du chiffrement après une tentative désastreuse durant sa campagne.  Surtout ce futur texte offrira la possibilité à l’exécutif de réagir à la censure possible d’une extension des pouvoirs de surveillance par le Conseil constitutionnel.  

Depuis une loi votée l’an passé, après l’attentat de Nice, les services de renseignement peuvent aspirer en temps réel les données des personnes simplement susceptibles d’être en lien avec une menace terroriste, voire leur entourage s’il est lui-même susceptible de détenir une seule information.

Seulement, la Quadrature du Net, FDN et FFDN ont attaqué cette disposition du Code de la sécurité intérieure devant le juge constitutionnel. La réponse à cette question prioritaire est attendue d’ici le mois d’août 2017. En cas de censure, le gouvernement pourra donc exploiter les possibles ouvertures trouvées dans la décision des Sages de la rue de Montpensier.

En attendant, l'exécutif va multiplier les prises de risque alors qu'une procédure visant la France et l'actuelle loi renseignement est en cours d'examen devant la Cour européenne des droits de l'Homme.

Vous n'avez pas encore de notification

Page d'accueil
Options d'affichage
Abonné
Actualités
Abonné
Des thèmes sont disponibles :
Thème de baseThème de baseThème sombreThème sombreThème yinyang clairThème yinyang clairThème yinyang sombreThème yinyang sombreThème orange mécanique clairThème orange mécanique clairThème orange mécanique sombreThème orange mécanique sombreThème rose clairThème rose clairThème rose sombreThème rose sombre

Vous n'êtes pas encore INpactien ?

Inscrivez-vous !