Le Conseil national du numérique a adressé un courrier à Matthias Fekl, ministre de l'Intérieur, pour l’alerter des « conséquences graves et non anticipées d’une limitation du chiffrement ». Next Inpact diffuse le document. En clair.
Si le signal d’alarme est tiré si bruyamment par les trois vice-présidents du Conseil, c’est non seulement en raison des discussions entre le ministre et son homologue allemand, Tomas de Maizière, qu'au regard des récents propos d’Emmanuel Macron avant sa marche arrière. Un climat qui est tout sauf serein.
Le courrier revient d’ailleurs sur quelques fondamentaux, soulignant l’importance du secret, crucial aussi bien pour les citoyens et les entreprises que pour l’État, puisque le chiffrement « participe à la préservation de notre souveraineté ».
Limiter le chiffrement, une mesure inutile
Au contraire, une limitation, notamment par la mise en place de « backdoor », « aboutirait à un affaiblissement dommageable de la sécurité sur l’ensemble des réseaux » estime le Conseil. Pire : « de telles mesures auraient une efficacité toute relative sur l’infime minorité d’utilisateurs ciblés ». Et pour cause, à ses yeux, « limiter le chiffrement pour le grand public reviendrait alors à en accorder le monopole aux organisations qui sauront en abuser ». Un vrai ratage de cible.
À ceux qui s’estiment désarmés, le courrier au ministre de l’Intérieur soutient que le chiffrement n’est pas toujours cette « barrière infranchissable » trop souvent dénoncée dans les roues des enquêtes : d’une part, « il est souvent possible de le contourner, même s’il est très robuste, en exploitant des failles techniques ou en s’introduisant directement dans l’équipement de la personne ciblée ». D’autre part, les métadonnées peuvent aussi être exploitées.
Bref, plutôt qu’un empilement hasardeux de mesures parfois prises dans l’urgence, le CNNum plaide au contraire pour « une réflexion globale et collective » sur ces questions. Il profite d’ailleurs de l'instant pour revenir un instant sur le fichier des Titres électroniques sécurisés (ou « TES »). Il regrette encore et toujours le choix gouvernemental de n’avoir retenu que des conclusions tronquées de l’audit lancé par l’ANSSI et la DINSIC. À toutes fins utiles, le courrier est donc accompagné de l’avis du CNNum et de son rapport annuel.