Mastodon : mais en fait, comment ça marche ?

L'âme d'un pouet
Mastodon : mais en fait, comment ça marche ?

Après avoir expliqué les fondations et la philosophie de Mastodon, nous plongeons cette fois dans ses aspects pratiques. Création de compte, publication de contenu, interactions, limites et autres sont au programme.

Mastodon prend la forme d'un nouveau réseau social décentralisé dont le vrai coup d’envoi a été donné le week-end dernier. Depuis, de nombreuses instances se sont créées un peu partout.

À l’heure actuelle, Mastodon.social, créée par le développeur principal de Mastodon, Eugen Rochko, est reliée à plus de 600 autres. Dans le lot, des noms connus apparaissent déjà, comme la Quadrature du Net, ou encore Framasoft avec ses CHATONS. Après avoir expliqué son fonctionnement global, nous allons nous attaquer à son usage réel.

Comme nous allons vite nous en rendre compte, les liens avec Twitter sont très forts, mais en plus d’une philosophie très différente, il existe des écarts entre les deux qui peuvent faire toute la différence. 

Notre dossier sur Mastodon :

Le choix d'une instance n'est pas si anodin

Pour créer un compte, il faut commencer par trouver une instance. Idéalement, on en cherchera une qui nous convient ou, par défaut, une plus généraliste comme celle d'Eugen Rochko. Malheureusement, cette dernière est actuellement « pleine », l’infrastructure mise en place ayant ses limites.

On retrouve d’ailleurs ici un point essentiel de Mastodon : chaque administrateur crée une instance en fonction de son cadre propre, les moyens techniques en faisant partie. Attention donc à bien sélectionner celle qui vous convient et à ne pas aller trop vite en besogne. Si jamais elle venait à ne plus être maintenue d'ici quelques jours ou semaines, il ne vous sera pas (en l'état actuel des choses) possible de migrer votre compte vers une autre.

Ce problème se pose d'ailleurs pour ceux qui peuvent être incités d'utiliser l'instance de leur employeur ou de leur site. En cas de changement d'URL ou de société, que faudra-t-il faire ? Pour le moment, cette question n'a pas vraiment de réponse et la communauté devra sans doute trouver une solution.

Une création de compte très rapide

Une fois que vous avez choisi votre instance, la création du compte est rapide : une adresse email, un pseudonyme, un mot de passe. On reçoit un mail de confirmation muni d’un lien à usage unique qu'il vous suffira de cliquer.

Rappelons ici un principe important : le pseudonyme détermine ce que les autres verront, à la manière de Twitter. Cependant, la séquence complète sera toujours du type « pseudo@domaine », exactement à la manière des emails. Ainsi, il peut y avoir nombre de domaines différents, mais puisque le système est fédéré, ils communiquent tous entre eux, sauf indication contraire de l’administrateur.

Une fois que le compte est validé, on peut commencer à utiliser Mastodon. Pour ajouter des amis depuis Twitter, vous pouvez utiliser ce service en ligne.

Diable, ça ressemble sacrément à Tweetdeck

Arrivé sur l’interface principale, beaucoup se feront la réflexion : l’interface est très similaire à Tweetdeck. Et en effet, on retrouve une vue en plusieurs colonnes dont le fonctionnement semble se calquer sur le service, qui appartient pour rappel par Twitter depuis quelques années maintenant.

mastodon

La première colonne sert ainsi à la rédaction des messages, à la recherche ainsi qu'à différents outils. À la différence de Tweetdeck cependant, cette colonne n’est pas rétractable. La deuxième est le flux principal (nous y reviendrons plus tard). La troisième est dévolue aux notifications. Quant à la dernière, elle pourra afficher soit tous les « pouets » (messages) de l’instance sur laquelle on se trouve, soit tous ceux des instances fédérées. Dans ce dernier cas, la liste peut évidemment changer très rapidement.

On remarquera qu’il n’existe pas de colonne spécifique pour les messages directs. C’est normal : elle n’existe pas. Pour l’instant, même si les « DM » sont possibles, ils sont affichés au sein du flux principal, donc dans la deuxième colonne. Ce qui demandera bien sûr un petit temps d'adaptation pour les habitués de Twitter. On ne peut pas non plus ajouter de nouvelles colonnes pour l'instant. Gageons que cela changera rapidement.

Mastodon : bases et éléments de langage

Pour vous familiariser avec Mastodon, il faut savoir que l’on retrouve en gros les mêmes concepts élémentaires que sur Twitter, mais ils ne portent pas les mêmes noms et apportent de subtiles différences.

Les messages s’appellent donc des « pouets » en français, ou des « toots » en anglais. L’aspect amusant de l’appellation française plaide visiblement en sa faveur, beaucoup ayant déjà pris le pli. Les retweets, ou RT, se nomment sur Mastodon les « boosts », dans l’idée qu'il s'agit de pousser le message vers une plus grande visibilité. Par contre, les mentions restent des mentions, et les messages directs des messages directs.

Comme indiqué dans notre précédent article, l’autre grande différence est la limite de longueur des messages : 500 caractères, contre les 140 sur Twitter. Une largesse qui permet de détailler beaucoup plus efficacement sa pensée et doit permettre, selon Eugen Richko, d’éviter au moins en partie le phénomène de « tempête », quand les participants d’une discussion enchainent les tweets très rapidement.

Précisons cependant un point important sur cette limite : les caractères des mentions sont décomptés du total. Un aspect à prendre en compte quand une conversation intègre un nombre croissant de participants, surtout quand ils sont situés sur d’autres instances. Car la seule mention @pseudo ne suffit plus : il faudra les interpeler via @pseudo@instance, ce qui risque de consommer rapidement la place disponible dans certains cas. 

Notez que le compte peut être défini comme privé, d'une manière similaire à Twitter. Le principe est le même : l'utilisateur valide toutes les demandes d'abonnements. Cependant, même ainsi, il pourra quand même publier des messages sur le fil public, s'il le décide. Une granularité qu'on retrouve dans le choix du filtre.

Les filtres de contenus définissent la visibilité

En fonction des cas, l’utilisateur aura également peut-être besoin d’apposer un « content warning » sur son message pour avertir qu’il contient un contenu sensible. On peut l’activer (bouton CW) pour plusieurs cas comme un spoiler sur un film ou une série. On définit alors une partie visible et une autre masquée.

Quand il est vu par d’autres, cette dernière nécessite alors un clic supplémentaire pour être déverrouillée. Par ailleurs, dès qu'un contenu multimédia est détecté, Mastodon propose un nouveau bouton : NSFW. L'expression est connue sur la toile : signifiant « not safe for work », elle signale surtout un contenu de type pornographique ou violente par exemple. 

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Cette fois encore, il s'agit d'une question de granularité. Les abonnés seront reconnaissants de ce type de précision, qui pourra éviter quelques désagréments. 

On retrouve ce mécanisme sur Twitter, à ceci près que ce sont les algorithmes de l’entreprise qui tentent d’effectuer automatiquement cette opération. Même chose chez Instagram, qui a récemment décidé d'imposer un flou sur les photos et vidéos considérées comme sensibles.

Autre élément à prendre en compte : le périmètre de visibilité de son message. On y accède par la petite icône en forme de planète. Le message est par défaut public, c'est-à-dire à destination du fil public et donc visible par tous. Dans le menu, on peut cependant restreindre le champ : non-listé pour qu'il n'apparaisse pas dans le fil public, privé pour qu'il soit limité aux seuls abonnés et direct, pour un seul abonné. Attention donc à ne pas confondre les réglages privé et direct, une distinction qui n'existe pas sous Twitter.

Elle est d'autant plus importante que la préparation du message se fait de la même manière : on mentionne des comptes puis on écrit son texte. Mais dans le premier cas, le message sera visible par tous les abonnés, alors que dans le second, seules les personnes interpelées pourront le lire.

Signalons au passage que les messages directs prennent bien en compte les mentions multiples et qu'on peut donc créer des « DM à plusieurs », une fonctionnalité arrivée assez tard sur Twitter. D'autant que, là aussi, on peut joindre un GIF, une photo, une vidéo ou des emojis.

Des conséquences pour la visibilité des comptes

À la lecture de ces différences avec Twitter, certains se seront immédiatement fait la réflexion : sans algorithme et avec un fil public, la visibilité d’un compte sera forcément très différente.

Mastodon renvoie effectivement davantage sur une idée de méritocratie. Aucun programme de traitement, aucun service ni aucun « curateur » n’est là pour définir ce qui « marche ». En d’autres termes, le nombre d’abonnés, la certification d’un profil et ce genre de paramètre n’entrent pas en ligne de compte pour augmenter la visibilité. Personne ne sera là pour décider qu’un compte en particulier doit être vu de tous.

Pour les utilisateurs de Mastodon, la conséquence est très nette : la liste des messages qu’ils verront sera toujours chronologique. C’est l’une des plus grosses différences avec Twitter, qui cherche à montrer en premier les tweets censés être les plus intéressants, ce qu’on aurait pu rater, etc. Une intention peut-être « louable », mais qui casse largement le sentiment de maîtrise que l’on a de l’outil, à moins de passer par une autre application.

On trouve déjà des applications mobiles

L'utilisation de Mastodon ne se résume à son application web. Projet libre et open source oblige, proposant une API REST il peut être facilement exploité pour la création d'applications compatibles.

Comme on peut le voir sur le dépôt GitHub du projet, plusieurs sont en cours de développement, mais seules certaines sont disponibles, bien que pas forcément depuis les boutiques respectives d’Apple et Google :

Android :

iOS :

Le fonctionnement reprend à chaque fois le tronc commun des fonctionnalités décrites dans cet article. Il s’agit cependant d’applications jeunes et qui évoluent rapidement. Les versions sont donc pour l’instant régulières et les bugs corrigés rapidement.

Quel avenir pour Mastodon ?

On se pose inévitablement la question. Il s’agit d’un projet jeune qui, en dépit d’un fort engouement actuellement, pourrait tout aussi bien se casser la figure dans quelques semaines, comme tant d’autres phénomènes avant lui.

Tout cela va dépendre en fait de plusieurs facteurs : un mélange de réactions des utilisateurs, d’initiatives du côté des administrateurs et bien entendu des développeurs. Un mix finalement de forces et de faiblesses qui pourrait trouver un véritable équilibre, car il ne faut pas oublier ici que Mastodon est avant toute autre chose un projet libre et open source.

Cela signifie que son socle fonctionnel va probablement beaucoup évoluer au cours des prochains mois, les développeurs pouvant reprendre le projet, créer des variations, participer évidemment au dépôt GitHub principal en proposant des améliorations et ainsi de suite. Des éléments simples comme une éventuelle gestion spécifique des messages directs pourrait donc arriver rapidement, si certains éprouvent le besoin de s’y pencher.

Il va dans tous les cas y avoir une période de forte effervescence durant laquelle les utilisateurs vont chercher leurs marques, les administrateurs vont se faire la main et les développeurs vont s’intéresser au projet. Il sera important pour ces derniers d'assurer un suivi important concernant les mises à jour et la sécurité des instances, afin d'éviter un drame en cascade qui pourrait mettre un coup d'arrêt à l'ensemble. Une phase où les idées risquent de fuser en tous sens, mais un point reste certain : les perspectives d’améliorations sont nombreuses.

Beaucoup sont d’ordre pratique et pourraient, comme signalé précédemment dans l’article, permettre d’assurer plus rapidement le succès global de Mastodon. Par exemple, des outils simples et pratiques pour transférer son compte d’une instance à une autre, transiter de Twitter vers Mastodon (certains apparaissent mais ont encore du mal à fonctionner correctement), etc. Pour d’autres, pas besoin d’attendre, le plaisir de « l’esprit pionnier » étant irremplaçable.

Dans tous les cas, Mastodon n’en est qu’à ses débuts et a tout le temps de s’améliorer. Sa souplesse devrait lui assurer un bon potentiel, mais l’essai reste à transformer. Nous suivrions bien entendu son évolution avec attention.

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